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 [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]

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Andrea Vitaly

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[Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] Vide
MessageSujet: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeMar 21 Sep - 16:49

A never ending dream I dream of you
I believe I received the sign of you
Tonight I wanna hide my feelings too
As you do when i wanna be with you


Il était une fois un imbécile. Un mec qui croyait tout savoir, qui ne craignait pas grand-chose, même quand la situation devenait critique, qui fourrait son nez partout, qui était méprisant et pété de thune. Et il était heureux comme ça. Pas besoin de quelqu’un, les gens ça encombrait, ça prenait la tête, c’était chiant. Et puis il y a eu une défaillance, une baisse de vigilance, un trop plein d’alcool. Une rencontre. Anodine. Peut être pas en fait, un rêve plus vrai que nature. Alors il fallait bien chercher à comprendre, à essayer de savoir le pourquoi du comment. Il fallait revenir chercher cette veste, beau motif pour retourner à ce bar, pour retourner voir cet homme. Pour essayer encore et toujours de le sonder, de le comprendre. Pour essayer de s’en approcher, pour finalement s’en éloigner à cause d’une irrépressible angoisse. Essayer de parler, d’agir. Ne paraitre que stupide. Et cet imbécile, hélas, c’était moi. Et si j’en suis resté là, c’était évidemment parce que ma résolution de ne pas retourner dans ce bar avait fondue comme neige au soleil dès le lendemain. J’avais mal dormi. J’avais tourné tourné et encore tourné dans mon lit sans trouver le sommeil. Je n’avais pas envie d’aller sur mon ordinateur. Pourtant cracker des mots de passe nécessitait un minimum de concentration ainsi j’aurais pu penser à autre chose. Mais je ne me sentais même pas capable de faire ça. Il était hors de question de lire ou même de regarder un téléfilm. Non j’étais allongé à regarder mon plafond, la faible lueur des lampadaires passant à travers les rideaux. Je me sentais étrange. Pas très bien, comme oppressé. Et la cause était évidente. Elio me hantait. Quoi que je fasse je pensais à lui. Je pensais à son visage, son dos, son sourire, ses verres… Ses derniers mots, son indifférence, ses moqueries muettes. Une claque. Claque dans ma suffisance, claque dans mon mépris. Et je savais que si je n’arrêtais pas de penser à lui, ce n’était pas pour le maudire, ce n’était pas par simple curiosité comme ça pouvait m’arriver pour d’autres personnes. Je pensais à lui parce que c’était indéniable qu’il produisait quelque chose pour moi.

Et ça me rendait dingue. De ne plus être maître de mes émotions, de mes pensées. Je me faisais des films, j’imaginais des trucs sans queue ni tête, des dialogues improbables, des actions sans raisonnement. Alimenté par les images toujours plus lancinantes de ce rêve. Etait-ce la réalité ? Est-ce que j’étais réveillé ? Etait-il mon cauchemar ou étais-je le sien ? Alors je me redressais, je me prenais la tête dans le visage. Jamais, jamais je n’avais à ce point réfléchi, pensé à quelqu’un. Jamais je n’avais ressenti autant d’émotion, jamais je ne m’étais autant pris la tête sur une relation. Normal, quand on n’en avait pas. Enfin si, j’en avais quelque unes, mais aucune n’était comparable à Elio. Elio qui semblait me rappeler à chaque minute où je n’étais pas là bas. Du moins c’est ce que j’aurais voulu. Malgré tout mon mépris, j’étais perdu. Totalement perdu, je n’avais jamais été aussi vulnérable. Mon rejet des autres avait été altéré par lui. Lui qui se fichait de moi. Je n’étais qu’un client comme les autres, rien de plus. Et je n’avais pas imaginé à quel point la non réciprocité d’émotion pouvait être aussi douloureux.

Alors j’y étais retourné. Une envie. Il fallait. Je n’avais rien à perdre. Et ça me dévorait tellement le ventre qu’il fallait que j’essaie, que je vois ce que ça pouvait donner. J’y étais retourné. Dans ce bar. Le Love’s Out, avec un nom qui en premier lieu sans signification particulière, se révélait finalement plus pertinent que l’on aurait pu le croire. Que moi j’aurais pu le croire, étant donné qu’il était le premier bar où j’avais mis les pieds. Ce bar où je n’étais ni plus ni moins que moi-même. Lui qui me parlait comme à n’importe qui, moi qui avait cessé de me cacher pour le regarder. De toute façon il devait bien avoir compris. D’ailleurs il avait sûrement compris bien avant moi. Mais pour me protéger, je ne pouvais m’empêcher de parler, d’agir avec dédain, comme j’avais l’habitude.

Un combat. Contre moi-même. Que pouvais-je lui montrer d’autre ? Que j’agissais comme ça ou non ça ne changerait rien pour lui. Et pourtant chaque fois qu’il me tournait le dos, chaque fois qu’il était assis à côté de quelqu’un d’autre, je sentais mon cœur se serrer, je me noyais dans ces cocktails que je consommais à outrance, n’en demandant pas plus d’un alcoolisé par soir. Deux fois, puis trois fois. Je revenais presque tous les deux jours. Comme si j’en avais terriblement besoin, comme si mes journées étaient trop vides si je ne sortais pas le soir. Si je ne pouvais pas le voir. Je savais que c’était à la limite du malsain. Parce que je n’avais jamais été accro à quelqu’un à ce point. Un truc qui me faisait sortir de chez moi. Surtout quand on n’avait rien en retour. J’avais très vite assimilé que chaque soir ou presque Elio finissait dans son lit avec quelqu’un. Et chaque fois je restais un peu plus tard, mais évitait de faire la fermeture, c’était au dessus de mes forces. Je ne pouvais pas me retrouver en tête à tête avec lui, même pour lui dire bonsoir. Je n’enviais pas les gens avec qui il couchait. Ce n’était pas pour moi. Surtout vu mes réactions, même que je contrôlais dès qu’il s’avançait trop. Pourtant je savais que si j’en avais émis le souhait, j’aurais pu en être. Comme tous les autres, sans distinction. Et je ne voulais pas. Pas être un trophée qu’il aurait pu accrocher à son tableau de chasse invisible. Après ça aurait été encore pire. Il résonnait plutôt comme quelque chose d’impossible à atteindre. Elio le barman. Le brun avec son sourire d’ange ses doigts de fée et son corps de dieu. Evidemment qu’il était trop loin pour moi, moi le spécialiste des relations humaines. Je ne cherchais pas quelque chose de charnel avec lui. J’aurais juste voulu qu’on soit plus proche. Pouvoir discuter ensemble alors que je pourrais le regarder franchement, sans crainte. Aha. De nouveau j’agissais comme la fille amoureuse de base, c’était pitoyable. « Pourtant tu ne serais pas… » Non je ne l’étais pas, ce n’était pas ça. C’était l’attrait de la nouveauté, l’impression d’avoir quelque chose en soit qui nous poussait à aller vers l’autre. Une curiosité teintée d’envie d’aller plus proche. C’était nouveau, c’était normal.

Pourtant. une vague. Dans les entrailles, qui remuaient étrangement. Qui poussait à aller de plus en plus dans ce bar. Mais j’avais pris une décision. Parce que moi-même je n’en pouvais plus. Ca faisait deux semaines. On dirait pas comme ça, mais deux semaines, c’est long, surtout quand on ressent autant de chose, surtout quand il n’y avait pas de retour. Ou que les rares essais, je les rabrouais aussi sec. Un jeu du chat et la souris nouvelle génération. Je n’avais pas pour habitude d’attendre. Jamais. Et là c’était bien assez. Je sentais que cette situation me minait. Je sentais que je n’étais plus pareil. Mais lui se fichait bien de ce que ça pouvait me faire, lui était totalement à l’ouest. Lui était normal. Il ne se doutait pas de la tempête qui faisait rage sous mon crâne. Et ça m’énervait. Je me répétais mais c’était insupportable. Il fallait que ça cesse. Je devais passer à autre chose, revenir à ma vie d’avant, je mourrais d’envie de me disputer avec quelqu’un, de faire quelque chose de foireux, de démolir un truc de l’oublier. D’oublier ce vide, cette envie de le voir, de le regarder, les films imaginaires. Il me pourrissait la vie. Je ne viendrais plus. Je visiterais un autre bar, je ferais d’autres rencontres, le monde de la nuit deviendra mien. Et je reviendrais peut être plus tard, quand j’aurais pris en assurance, quand j’arrêterais de reculer quand il avancerait.

Pousser la porte avec une inspiration. S’installer dans ce canapé devenu fétiche. Attendre son verre, parfois échanger quelque mot de politesse, la routine. Routine sévère et cruelle.
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Aurelio Pastore

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[Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] Vide
MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeJeu 23 Sep - 13:14

I'll tell you from the start
He's gonna break your heart
You can't stop the Lover Boy

He's gonna tell you lies
But you won't realize
Because you can't stop the Lover Boy

He's got to have a good time in the city
He's got to have a good time every night
He's gonna love 'em and leave 'em, cheat and decieve 'em
He's gonna show 'em who's wrong and who's right


Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants. C’est un peu ce qui vint à l’esprit d’Elio quand il vit repartir un de ses meilleurs clients avec quelqu’un d’autre, la soirée à peine commencée. Pourtant, il était objectivement laid. C’est d’ailleurs pour ça qu’il était un bon client. Entre ça et les emmerdeurs, c’était le genre de mecs qui pouvaient facilement passer toute la soirée à commander boisson sur boisson, se rendant encore plus pitoyable que leur pauvre petite existence le laissait paraitre. Si Elio s’entourait souvent de charmants jeunes gens dans ses escapades nocturnes, il préférait de loin recevoir dans son établissement ce genre de balourd comme Ernezo, qui tenait bien l’alcool, ne plaisait ni aux femmes ni à ses messieurs, et ne voulait pas se rabaisser à se taper le barman … Tranquillité et argent, voilà deux mots qui sonnaient particulièrement bien aux oreilles du jeune homme, comme une promesse de bien commencer la soirée. Alors quoi, si même Ernezo se trouvait quelqu’un, le monde ne tournait plus rond … Ceci-dit, c’est par quelques expériences dans le genre qu’Elio apprenait toujours plus de choses sur les vices humains. Car la jeune donzelle pendue au bras du ventripotent quinquagénaire n’en avait sûrement pas après son cœur, mais bien après son argent. Elio, un instant, eu pitié de ce bon vieil habitué qui se faisait mener par le bout du nez. Où plutôt, dans le cas présent, par le bout d’autre chose … Mais peu importait, après tout. Il était grand, et s’il avait pour projet de dilapider toute sa modeste fortune pour les yeux d’une jolie gazelle avant de passer l’arme à gauche d’un infarctus bien mérité, libre à lui. Elio n’était pas garde-chiourmes, encore moins quand ils avaient presque le triple de son âge …

En parlant de gosses … Ce qui l’énervait le plus, c’était encore de n’avoir rien fait depuis plusieurs soirs, pas de voir Ernezo partir s’amuser comme il se doit. Enfin, si. Mais pas comme d’habitude. Voilà maintenant deux semaines, à vue de nez, qu’Andrea avait mis les pieds ici, deux semaines. C’est très long, deux semaines. Surtout pour un barman qui ne voit pas le temps passer, mais qui sent les heures s’affaler sur son dos comme autant de rappels à l’ordre. Lui qui, toute la semaine, servait tout ce qu’il avait à ses clients. Dans chaque verre, il jouait sa réputation, dans chaque sourire il jouait une fréquentation. Le dimanche, et en journée, il pouvait se reposer. Dormir, l’esprit libre. Après s’être défoulé en compagnie d’une ravissante créature, cela semblait évident … Pourtant depuis quelques jours, Elio ne faisait plus grand chose de ce côté-là. Peut être que trois petits soirs, ça ne pèse pas bien lourd dans la balance. Mais pour Elio qui était habitué à vivre un petit moment d’après bar presque tous les soirs, ce n’était pas évident. Pour être exact, il avait donné de sa personne. Seulement, sans explication rationnelle, cela ne fonctionnait plus comme avant. Sans aller jusqu’à l’impuissance, le jeune charmeur de ces dames et autres messieurs ne ressentait plus ces vagues de plaisir qu’il prônait dans son travail et dans la vie. La passion immédiate, le soulagement d’une étreinte, la force d’un soir sans lendemain … Plus rien n’était pareil. C’était vide, sans entrain, sans couleurs. Comme si ses cocktails devenaient brusquement fades de goût et de teinte. Comme si son monde s’écroulait à ses pieds, ne laissant que de la poussière sur son passage. Cela le contrariait fortement, vous l’imaginez … Surtout que, s’il n’en connaissait pas véritablement la raison, il savait qu’un certain jeune homme aux cheveux blonds n’était pas totalement étranger à tout cela. Même absent, il lui pourrissait la vie …

Il voyait ce visage, se souvenant de leur première rencontre dans ce bar, se remémorant tout ce qu’il avait apprécié dans ce visage d’ange au regard acéré mais totalement perdu. Cette innocence touchante, qui se révélait maintenant bien plus agaçante qu’autre chose. C’était sa faute. La faute de sa présence, de sa simple existence. Depuis deux semaines, Elio avait le déplaisir de voir débarquer son gamin préféré tous les deux jours ou presque, faisant de lui un habitué, qui se bornait à ne prendre pratiquement que des boissons non alcoolisées … Comme un enfant qui découvre un monde extraordinaire et qui ne voudrait pas y plonger d’un coup, mais commencer par y tremper l’orteil. Comme un adolescent qu’il était encore presque, comme un mioche totalement ignorant et désagréable. Des habitudes qu’il avait prises, Elio n’en retenait qu’une : celle de ne pas réitérer son erreur de la première fois. Il restait là, sobre, maître de ses gestes et de ses pensées, refoulant les pulsions qu’il devait avoir, comme tous les humains. Après tout, pourquoi venait-il ici si ce n’était pas pour ses beaux yeux ? Et Elio, en tout simplet pragmatique qu’il est, ne comprenait pas pourquoi, avec cette constatation évidente, le jeune homme ne se laissait pas faire … Il avait pourtant à plusieurs reprises tenté une approche discrète. Peut être trop, même s’il doutait qu’Andrea soit assez bête pour passer à côté. Alors il l’ignorait sciemment, tout en rongeant son frein, étant donné qu’il entretenait à n’en pas douter.

Du coup, depuis cette résistance, depuis cette frustration, depuis cette petite défaite, Elio en bavait. Il imaginait toujours un autre visage, depuis quelques jours, et une douce colère mêlée d’envie l’empêchait d’apprécier le moment qu’il passait … Et le mettait ce soir dans de bien étranges dispositions. Dès qu’il se baissait derrière le comptoir pour attraper un verre, dès qu’il s’éclipsait dans l’arrière boutique, son visage se figeait et un rictus agacé naissait sur son visage. A ce rythme, il n’allait plus faire correctement son boulot. Tout ça à cause d’un gamin ridicule qui se refusait à lui. Et dans un trop plein d’ego, le barman refusait de le vexer une bonne fois pour toutes et de le faire déguerpir. Il voulait chasser sa frustration, son impatience. Piétiner ce malaise qui lui rongeait le cœur. Une seule solution : parvenir à ses fins. Et, alors qu’il écartait d’une main le rideau qui le séparait de la salle, une bouteille de vin blanc à la main, Elio reprit son sourire, quelque peu entaché en voyant la place désormais familière vide. Lui qui prenait de si bonnes dispositions, voilà qu’il n’était pas là ! Andrea manquait à l’appel, et depuis quelques jours un bar sans lui manquait d’un soupçon d’acidité, d’une touche de mystère. Il lui manquait son défi quotidien, sa source d’imagination et sa frustration habituelle. Ce soir, ça se passerait bien. Le Love’s out n’était pas trop rempli, il avait du temps devant lui et surtout une grande motivation qui le poussait à obtenir ce qu’il attendait depuis deux semaines déjà. Ce visage tordu de plaisir, ce corps cambré sous le sien. Des mèches collées sur son front par la sueur, des veines tendues sous la peau … Si Elio n’avait pas été habitué rapidement à de telles visions, il en aurait pu rougir. Mais si c’était la première fois qu’on lui résistait si longtemps, ce n’était pas une découverte en matière de patience et de séduction insistée. Ce soir, il serait sympathique et accueillant. Rassurant, mais entreprenant. Du moins si Andrea daignait apparaitre … Cela faisait exceptionnellement deux jours aujourd’hui qu’il n’était pas venu, alors que d’ordinaire sa présence se faisait impérieuse légèrement plus souvent. D’où la légère frustration, surprenante mais compréhensible quand la cible de son défi ne donne pas lieu de son existence entre ces murs …

Ah ah. Victoire. Enfin, bien maigre pour le moment. Mais comme Andrea pouvait se lasser chaque soir, même s’il semblait apprécier cet endroit, chacune de ses visites était une petite victoire en soi. Il ne l’avait pas vu rentrer, mais automatiquement son regard s’était posé sur sa place. Et, comme par magie, le visage qui hantait ses nuits était apparu. Ce même visage qu’il désirait trop pour penser à quelqu’un d’autre de manière entière et sincère, même s’il ne l’était jamais vraiment … Elio s’empressa de se pencher en avant, attrapant un verre dans un mouvement un peu trop enjoué à son goût. Ce soir, qu’est ce qu’il allait lui servir ce soir … Un cocktail à étages ! Il ne lui avait encore jamais offert le privilège de voir les couleurs se séparer après les avoir mélangées, et revenir toujours à leur état d’origine. Un délice pour les yeux, autant que pour les palais. Surprendre. Tel était son maître mot. Il exécuta donc rapidement sa petite danse habituelle, et se délecta à l’avance du plaisir que son client si capricieux allait prendre en buvant ça. Et comme à l’ordinaire, il serait très léger sur l’alcool, et seulement en début de soirée. Il avait compris les codes muets d’Andrea, et pour l’instant il n’avait guère d’autre choix que de s’y plier … Première couche, un fond de martini coloré avec un coulis de cassis. Puis une dose sympathique de curaçao marine, distillé pour enlever un peu sa teneur en alcool. Venait ensuite une généreuse quantité de jus d’ananas, et un filet somme toute assez épais de lait de coco pour parfaire le tout. Elio porta son index droit à ses lèvres, puis s’en servit pour humidifier les rebords du verre. Il faisait toujours comme cela, résultat garanti plus efficace que de l’eau ! Il colla donc sur le pourtour des éclats de noix de coco, pour la décoration. Sobre à l’extérieur, mais finalement très haut en couleurs. Le nom ? Sweet dreams. Et ce cocktail respectait la créativité d’Elio, son amour pour l’alcool, et les réticences d’Andrea.

Il se dirigeait d’ailleurs déjà vers lui, d’un pas peut être un peu plus rapide que nécessaire. Puis, décidant qu’à soirée exceptionnelle il pouvait bien se le permettre, le barman s’assit sur la banquette d’Andrea, conservant une distance tout à fait respectable. Il voyait ainsi la salle, ce qui n’aurait pas été le cas en occupant la chaise en face d’Andrea. Et puis il pouvait se le permettre, la salle n’était pas très remplie, et il avait subitement envie de faire une pause. En poussant son verre vers Andrea, le jeune homme brun le regarda avec plaisir, pour entamer une discussion remplie de banalité.

- Cela faisait longtemps … Premier verre de la soirée, j’ai été prudent sur la quantité d’alcool. J’espère qu’il vous plaira …

Ce n’était qu’affaire de politesse. Tout ce qui comptait, c’est qu’Elio pouvait admirer ces traits qu’il voyait bien trop souvent le soir, ces derniers temps. Peut être que la seule solution pour le faire sortir de sa tête était de l’entraîner avec lui …
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Andrea Vitaly

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[Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] Vide
MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeMar 12 Oct - 17:25

And I wait....without you
With or without you
With or without you
I can't live

J’avais commencé à prendre un peu mes aises. J’étais un peu plus habitué à l’ambiance, à l’endroit, aux gens. Et vice versa. Depuis ce soir où j’avais envoyé balader Camélia, on ne venait plus vraiment me voir. C’était déjà arrivé, et je n’avais pas fait dans la dentelle. Les regards qu’on jetait sur moi était curieux, interrogateurs, mais je n’en croisais que rarement qui voulaient tenter quelque chose. Ce n’était pas la peine, je n’étais pas là pour ça. Et je suppose que ça pouvait déranger. Après tout, j’avais bien compris que ce bar était fait pour ça. Des rencontres, des coups d’un soir, de plusieurs soirs. De la détente, de l’oubli. Pour l’oubli ça c’était bon. J’avais oublié mes problèmes actuels, j’étais bien trop axé sur Elio pour penser à autre chose. Et j’aurais tellement voulu en parler avec quelqu’un. Quelqu’un qui pouvait avoir de l’expérience dans le domaine. Mais aha. Marrant. Je ne connaissais personne. Et je n’aurais sûrement pas eu le courage de parler de ça. De ça. De ce que je pouvais bien ressentir envers cet homme. Moi qui ne voulais me persuader que ce n’était que de la curiosité, qu’une envie de faire connaissance avec le monde de la nuit. Elio était quelqu’un que j’aurais voulu considérer comme un ami. Ou plus. Je ne savais plus. Elio c’était un monde à part. J’aurais voulu être capable de tout comprendre, que tout se dénoue d’un coup dans ma tête. J’aurais voulu y voir plus clair. Alors que je faisais tout pour me cacher tout ce que je pouvais ressentir dès que ça devenait trop violent. Qui aurait pu accepter aussi facilement avoir des sentiments quelconques pour quelqu’un du même sexe. Un barman qui couchait avec n’importe qui, qui ne vous voyait que comme un client comme les autres. Moi en tout cas je ne pouvais pas. Et c’était dur.

Bien sûr, de son côté, j’avais remarqué qu’il avait fait des tentatives d’approche. Je n’étais pas assez débile pour ne pas m’en rendre compte. C’était subtil, dans les règles de l’art. Elio qui s’approche, qui parle un peu, qui s’approche de plus belle. Moi qui répond, plus sèchement, le cœur battant à tout rompre, moi qui recule un peu, moi qui prétexte avoir quelque chose d’urgent à faire. Je ne pouvais pas le laisser faire c’était au dessus de mes forces. Finalement, c’était la première fois que je me sentais mis en échec à ce point. C’était la première fois que je ne savais pas quoi faire vis-à-vis de quelqu’un. Je n’osais pas le remettre à sa place violemment, parce que je voulais qu’il continue à venir vers moi, inlassablement, comme un besoin impératif de respirer. J’avais besoin de sentir que j’étais quelqu’un à ses yeux, même si c’était juste l’envie charnelle qui le motivait. Moi il venait me voir au moins, ce n’était pas le cas de tout le monde dans le bar. Il venait me voir. Et même si c’était certainement son égo qui le titillait parce que je me refusais à lui, je préférais ce manège à celui d’être catalogué comme un autre avec qui il avait couché. Je n’étais pas que ça. Je ne serais jamais que ça. D’ailleurs si pour lui c’était de la plus grande facilité, il devait bien se douter que ça ne pouvait pas être mon cas et que je m’en contentais fort bien ainsi. Je n’avais pas plus envie que ça d’essayer, pas envie qu’il cesse dans ce cas de s’intéresser à moi. J’avais un tel besoin de reconnaissance venant de lui que s’en étant effrayant.

Mes manières maladroites ne devaient pas lui échapper c’était sûr. Même si j’apprenais à contrôler la rougeur de mes joues, les tremblements de mes mains, ma façon de tenir mon verre de façon plus compulsive, de boire à outrance, je ne calmais pas les manifestations physiques qui se produisaient dès qu’il restait près de moi. Mon cœur qui s’emballe, le sang qui pulse, l’esprit qui ne peut s’empêcher de divaguer en sa direction. Elio poison, il fallait que j’en finisse moi-même pour ne pas qu’il gagne à la longue. Mais une fois de plus, ça me paraissait si dur. Cette détermination que je pouvais avoir chez moi, sur le chemin. Celle qui disait que c’était la dernière fois, qu’il fallait mettre un terme à tout ça s’effritait dès que je croisais son regard. Si seulement j’avais pu avoir plus de volonté. Mais c’était peine perdue. Il me rognait jusqu’à l’os, sans me permettre une issue de secours. Ce sourire qui hantait mes nuits. Mes jours. Bordel, j’avais tellement mieux à faire que de rester là-dessus pourtant.
J’avais du travail, j’avais des réponses à trouver, j’avais des connaissances que je devais retrouver, j’avais un oncle à emmerder, j’avais un connard à éviter. Je pouvais aisément trouver quelque chose à faire de ma vie. Mais pourtant les soirées où je n’étais pas là me semblaient terriblement fades et insipides et je ne trouvais rien de mieux à faire que de me faire cuire des pâtes et de trainer devant un film que je ne regardais même pas. Aucun acteur ne pouvait arriver à sa cheville. Si seulement. Si seulement je n’avais pas choisis d’entrer ici. Si seulement je n’avais pas bu à outrance, si seulement il n’avait pas été barman ici. J’aurais gardé mon libre arbitre, j’aurais été capable d’agir en toute rationalité, mais il avait ce pouvoir de détourner le choix logique des acteurs. Il agissait sur mon environnement de façon inconsciente mais pourtant belle et bien présente.

Et le voila qui arrivait vers moi, un verre à la main. Je me calmais d’avance, me forçant à respirer. Il ne le remarquerait sûrement pas, mais j’avais fait encore plus d’effort pour paraitre bien ce soir. J’avais mis une de mes plus belles chemises, un peu de mon eau de parfum, j’avais fait attention à l’allure de mes cheveux. Et c’était pitoyable. J’aurais dû arriver débraillé au possible et cheveux emmêlés, de toute façon l’un ou l’autre, je ne pouvais pas être à l’aise devant lui. Jamais.
Je me forçais à ne pas me déplacer alors qu’il s’installait à côté de moi, à une distance qui prouvait son respect de ma timidité. Et je l’en remerciais silencieusement. Une fois de plus, de ne pas essayer avec plus de ferveur. Parce que ça aurait pu être dramatique. Pour moi.

J’étais silencieusement heureux qu’il vienne s’installer. Il ne le faisait pas tous les soirs. En même temps, les jeudis soir, il y avait rarement beaucoup de gens, du coup, il pouvait en profiter pour s’attarder. Et il m’avait choisi. J’étais flatté, mais il ne fallait pas que je me donne trop d’importance, surtout avec lui, c’était peine perdue. Je le regardais du coin de l’œil alors qu’il posait un verre coloré et très appétissant sur la table. Une pensée fugace me traversa l’esprit. Et si maintenant là tout de suite je lui attrapais le col de sa putain de chemise qui n’était jamais fermée et que je l’embrassais ? Juste pour voir. Voir ce que ça me faisait, ça lui faisait, voir si je pouvais m’en libérer. Mais non. C’était impossible. Jamais je n’aurais pu oser quelque chose de pareil. Et c’était surtout parce que j’avais peur de ce que ça pourrait enclencher en moi. J’étais déjà suffisamment accro pour ne pas l’être encore plus et tomber dans le schéma où il pourrait en profiter. Jamais. Il fallait à tout prix que je reste détaché de ce qui pouvait se passer entre nous.
Rien ne se passait jamais d’ailleurs. La main qui glisse, les jambes qui s’effleurent, ça ne compte pas. Le fait que j’ai envie de me rapprocher ne comptait pas non plus. Malgré toutes mes pensées qui reniaient en bloc ce que je pouvais ressentir, je ne pouvais m’empêcher de me demander si pour être libéré de son emprise, il suffisait juste d’y succomber. Mais cette pensée me donnait presque à chaque fois des sueurs froides alors j’évitais de l’imaginer.

- Cela faisait longtemps … Premier verre de la soirée, j’ai été prudent sur la quantité d’alcool. J’espère qu’il vous plaira …

J’avalais péniblement ma salive. Je n’aimais pas ma façon de trouver des sous entendus arrangeants dans chacune de ses phrases. Ca faisait longtemps. Trois soirs quoi. Ce qui au final n’était pas vraiment ce qu’on pouvait appeler longtemps. Enfin, de mon côté, ça l’avait été, j’avais juste craqué misérablement, ne cherchant qu’à revoir son visage. Peut être que de son côté, il avait aussi trouvé le temps long. Peut être que je lui avais manqué. Ou peut être qu’il disait ça aussi à tous ses clients. Et j’avais beau dire, c’était l’hypothèse la plus convaincante. J’avais envie d’être cinglant, hautain, méprisant. Mais je n’y arrivais que de façon piètre avec lui, la volonté de l’envoyer balader était radicalement différente des autres. N’importe qui d’autre, je pouvais le rabaisser plus bas que terre sans que ça me pose un quelconque problème éthique. Mais pas lui, lui je ne voulais pas qu’il me déteste, qu’il assimile le fait que je n’étais qu’un sale gosse orgueilleux. Je ne pouvais pas cacher ma nature, mais disant qu’il s’adoucissait légèrement par rapport à ce qu’elle pouvait être avec quelqu’un d’autre que lui.
Je le remerciais pour son verre sans trop d’alcool. Peut être que j’en prendrais un deuxième ce soir. Voir ce que ça pouvait faire en étant un peu plus dans le brouillard. Peut être que j’arrêterais de me poser moi-même des barrières. Ca serait lui donner satisfaction. Et après ça serait moi qui m’en voudrais à m’en sentir malade. N’y avait-il pas une autre solution ?
Je me saisis du verre pour y tremper les lèvres et lui répondis avec le sourie habituel. Un sourire qui n’en n’était pas vraiment un. Un sourire de forme, poli, qui cachait multitudes d’autres sentiments.

- Merci beaucoup. Il ne peut que me plaire vu qu’il est toujours préparé par le même soin par la même personne.

Et voila que de mon côté je me mettais à faire des sous entendus foireux. Inconsciemment, j’avais envie de le rapprocher de moi, de la seule façon dont j’étais capable. Je reposais le verre de façon un peu brusque, celui-ci vacilla, ma main se tendit vers lui pour ne pas qu’il tombe, sans penser qu’Elio ferait de même. Quelques gouttes sur la table, des mains qui se touchent encore. Je m’empressais de retirer la mienne l’air de rien. Il fallait toujours que ça se passe comme ça de toute façon. Quelque chose qui ferait que je ne pourrais pas rester neutre vis-à-vis de lui. Jamais ça ne marchait comme ça. Dis Elio, qu’est-ce que tu penses de moi ?
Je m’excusais pour la table, pour le verre, pour la main. Je me serais excusé de tout si ça avait été possible. Il n’y avait que devant lui que je m’excusais. Les autres pouvaient bien aller se faire voir tant qu’il me pardonnait. « Pourquoi tu ne te laisserais pas faire, tu n’attends que ça »Et je ne trouvais rien à répliquer. C’était juste au dessus de mes forces. Si c’était pour paniquer et avoir l’air ridicule, je passais mon tour merci bien.

- Je… La nuit est fraiche ce soir et… Et c’est ridicule de parler de la météo, à se demander pourquoi c’est toujours le premier sujet de conversation qui vient. Vous allez bien ?

Je me sentais un peu plus à l’aise, tant qu’on pouvait parler de choses quelconques, je pourrais avoir de la répartie, de la discussion. Oui Elio, dis moi comment tu vas, parle moi de toi, j’aimerais tout savoir. Parler avec toi tout mon saoul dans ce bar jusqu’à pas d’heure. J’aimerais qu’on refasse le monde, qu’on rie, que tu m’embrasses.

J’étais siphonné, complètement siphonné.
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[Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] Vide
MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeJeu 14 Oct - 16:05

Cela aurait pu être très drôle de confronter directement les émotions de chacun des deux hommes assis sur cette banquette. Car l’un comme l’autre, sans le savoir, avaient exactement le même sentiment planté au fond du cœur. Cette impression de ne plus savoir, de ne plus être sûr. Cette certitude d’avoir un peu changé entre temps, ce poids qui pulse dans la poitrine comme un second organe vital. De la même façon, la connaissance étrange du caractère essentiel de cette émotion. Comme si, en l’enlevant, bien des dégâts pouvaient survenir. C’était pour eux deux la première fois qu’ils se sentaient aussi démunis face à une situation qui devrait être familière sans l’être. C’est vrai, après tout de nombreuses fois Elio s’était retrouvé face à un jeune homme un peu timide. Mais aucun n’avait cette maladresse camouflée, cette retenue palpable, ce désir refourgué dans un coin de leurs corps. En jouant cartes sur table, donc, Elio et Andy se seraient aperçus que la phrase qui résumait le mieux leurs échanges était celle d’une première expérience de ne pas savoir faire en face de quelqu’un. Un même raisonnement, pour des résultats au final pas si différents que cela. Certes, les deux jeunes gens n’avaient rien à voir l’un avec l’autre. Et pourtant, quelque chose les réunissait dans leur progression, tous deux aspiraient à effacer cette distance, à briser ces silences et à réunir enfin ce qui l’avait déjà été avec tant de naturel. Apprendre l’un de l’autre pour habituer leurs corps, Elio en rêvait. Il voulait par-dessus tout faire céder cette fine frontière de chair, pénétrer le premier dans le sanctuaire du corps d’Andrea, l’étreindre comme jamais il ne le serait et lui faire comprendre le plaisir de la vie et le sens d’un quotidien terne, qui n’existe que pour magnifier les beautés de la nuit. Être le premier, souiller son âme de véritables pensées, le laisser tremblant de désir et de froid, user ses muscles et sa chair jusqu’à ce qu’il crie pitié. Le détruire pour le faire renaître.

Pour prendre la défense d’Elio face au petit Andy tout innocent, il suffit de changer légèrement de point de vue quant à la situation présente : le barman se tenait à côté d’un jeune homme qui, depuis deux semaines, venait régulièrement dans un bar dont le principe est d’oublier les soucis et déceptions extérieures. Donc de s’amuser un soir ou deux de temps à autre. Sauf que ce jeune homme, suffisamment aisé pour se permettre de payer régulièrement les services alcoolisés du Love’s out, refusait le principe même de l’établissement. Qui plus est, un jeune homme particulièrement séduisant sans le savoir. Un petit air de retenue, une gêne habilement effacée au fil des soirs, un corps attirant … Mais Elio dérapait. Ceci dit, il était obligé de s’imaginer tout ce qu’il aurait préféré vivre pour ne pas céder totalement à la frustration et se jeter sur Andy comme un loup affamé. Étonnamment, ça le calmait, de fantasmer ainsi sur un inaccessible. Deviner la chaleur de cette joue contre sa paume, la rugosité d’une bouche sur ses lèvres l’empêchait de passer à l’acte et d’attirer subitement Andy à lui pour lui arracher un baiser et ainsi tout briser. C’était incroyable. Lui, qui préférait prendre peu que rien du tout s’accrochait encore à l’espoir ridicule de posséder ce visage, ce regard, ce corps. De le sentir se cambrer sous ses caresses, de rougir avec lui de la même flamme passionnée que deux êtres savent si bien échanger. Pour lui, il se serait fait attentionné. Pour lui, il se serait fait à la fois doux et brutal, tendre et strict. Elio l’aurait laissé partir dans ses bras pour mieux le retenir à la dernière seconde. Il se serait fait délicat ou dominateur, il aurait accepté d’attendre si seulement, si seulement il avait accès à cette partie là de lui.

Attendre, attendre. Il ne pouvait faire que cela. Car Elio sentait bien que tout n’était pas complètement perdu, puisque Andy revenait encore et toujours. Puisqu’il savait qu’il ne lui était pas indifférent. Il lui restait au moins ça, à Elio. Cet espoir stupide, ce détail complètement fou. Il pouvait se fier à cette impression, mais son espoir ne reposait que là-dessus. Aucune certitude dans le comportement futur de son petit mioche blond, aucune promesse sur une quelconque force -ou faiblesse- qu’il aurait, et qui permettrait au barman de franchir ses barrières protectrices. Alors voilà à quoi il était réduit, l’espoir ? Un sentiment stupide de jeune fille qui soupirerait en attendant un signe, une ouverture. Hors de question. Cela le mettait hors de lui, et en même temps l’assommait d’un coup. Elio, lui, se trouvait toujours dans une attitude un peu ambigüe, un peu étrange en la compagnie d’Andrea. Et cela distillait au fur et à mesure une piqure dans le cœur, une douce décharge qui l’agaçait, le rendait docile et patient tout en contenant la colère qu’il éprouvait alors contre lui-même. Saleté de résistance, Andrea pourquoi n’abandonne tu pas ? Abandonner, lâcher prise. Piétiner ses ridicules peurs, oublier ses appréhensions. Si seulement Elio arrivait à lui montrer que le plaisir vaut largement l’angoisse et l’hésitation. S’il arrivait à lui faire ressentir de nouveau la vague incroyable que pouvait procurer un simple baiser.

Mais ce n’était peut être pas une bonne idée. Pas ici, pas maintenant. Sans se douter qu’Andrea en viendrait pourtant à hésiter à le faire de lui-même, sous le coup de son délicieux caractère paradoxal, Elio se retint de dévorer ces lèvres autrement qu’avec les yeux. Il y avait trop de monde et pas assez d’alcool pour mettre en confiance, trop de bruit et pas assez de promesses. Mais ce soir, Andy ne pourrait pas repartir sans payer au moins un peu de sa personne. Quitte à prendre le risque de ne plus le revoir pendant de longues soirées, voire tout court. Quitte à passer outre ce à quoi il avait pensé auparavant, à rayer ses bonnes résolutions. Il ne tiendrait pas indéfiniment aussi loin de lui, aussi respectueux de ses peurs et de ses désirs nuancés. Toutefois le considérait-il encore assez pour ne pas lui imposer le regard envieux des autres dans la salle. Du moins plus qu’ils ne l’étaient déjà. Car il était rare qu’Elio le pressé, Elio le volage, Elio le mirage qui avait disparu avant même que l’on ne l’aperçoive, demeure auprès de quelqu’un de cette manière. S’asseoir, partager, ce n’était pas dans ses habitudes. Aussi les jaloux étaient déjà bien insistants, quoiqu’encore assez discrets pour quelqu’un qui ne les connaissait pas. Regards interrogateurs pour la plupart, qui ne comprenaient pas. Qui pouvait comprendre ? Elio s’acharnait sur un rêve, sur un désir inassouvi et faisait fi du reste. Lui qui, sur un claquement de doigt, pouvait mettre chaque membre de la salle dans son lit si ce n’était tous à la fois. Lui qui, finalement, vivait dans l’opulence puisque rien ne lui coutait plus cher que ses cigarettes. De l’argent, et des filles gratuites. En tous les cas, il était presque intolérable à Elio d’imaginer tous ces yeux dévisageant Andrea pour chercher, pour comprendre. Ce qu’il avait plus qu’eux ? Elio aurait simplement répondu qu’il ne lui avait pas encore cédé, et que cela l’intriguait autant que ça l’obsédait. D’autres diraient sans doute un discours bien différent, mais ce serait mal connaitre le jeune barman.

Ce qu’il avait de plus, c’était aussi ce côté un peu préparé pour venir ici. Pas préparé dans le but de faire ressortir ses charmes de séducteur, plutôt dans le rehaussement d’un naturel faussement élégant, dans ce décor particulier. Elio laissait son regard errer sur une chemise à laquelle il aurait bien aimé faire subir le même sort que la première, un soir il y avait de cela quinze jours. Andrea était séduisant à sa façon, bien loin du charme d’Elio mais tout aussi plaisant à regarder, aussi son compagnon ne se gênait-il pas pour le faire. Encore, et encore. Observer le moindre de ses mouvements, le mettre mal à l’aise sans en avoir l’air, le fixer aussi profondément que possible et y mettre toutes les promesses qu’il véhiculait à travers son attitude. Si seulement ! Si seulement Elio avait pu discerner l’hésitation d’Andy quant au baiser qu’il avait subitement eu envie de lui donner … Bien sûr, il lui en aurait offert l’occasion, l’invitant à se perdre de lui-même dans l’univers d’Elio, dans l’univers de la nuit. Mais il n’en fut rien, et cet instant pourtant si crucial pour Andrea passa comme un autre aux yeux de son serveur. Ce fut alors une bien maigre consolation qui suivit, avec un sourire diablement faux de son client, qu’Elio accepta toutefois avec politesse. Cet étirement de lèvres, il ne l’aimait pas. Il ne le déchiffrait pas, ne le comprenait pas. Le détestait. Andrea n’avait pas le droit d’être à la fois gentil et froid, à la fois proche et horriblement éloigné. Heureusement, les remerciements du jeune homme le calmèrent un moment, surtout au vu de l’importance qu’il mettait à préciser que sa personne avait de l’importance dans le plaisir qu’il prenait à boire sa boisson. Du tac au tac, il répondit sur un ton enjoué :

- Je vous en prie. J’en ai encore beaucoup en réserve … Alcoolisés ou non.

Voilà qui, pour une fois, voulait tout dire. C’était simplement une remarque de barman à un client, une proposition en attendant ses goûts à venir en matière de cocktails. Rien de plus. Rien. Du moins en apparence. Elio n’y avait pas mis particulièrement de signification cachée, puisque son travail comptait également, au-delà de la simple coucherie. Mais Andy pouvait bien l’interpréter à sa guise, après tout. Et peut être l’avait-il fait, puisqu’une maladresse suivit bien rapidement de sa part. Le verre rencontra la table avec peut être un peu trop de véhémence, et celle-ci s’opposa vivement à ce contact trop brutal. Aussi le haut pied vacilla sur le bois poli, et deux mains se tendirent simultanément vers la future catastrophe. Rencontre. Le verre aurait pu exploser qu’Elio s’en serait totalement moqué au moment où il entra en contact avec Andrea. Cela faisait si longtemps qu’il ne l’avait pas touché -trois jours, rappelons le-, que cela suffit pour faire naitre un sourire discret sur le visage du jeune homme. Elio ne remarqua pas le léger débordement, ne faisant qu’attention aux quelques secondes auxquelles il avait droit avant que … Voilà. Qu’Andrea ne fuie, encore. Comme il savait si bien le faire, avec un air contrit et des paroles non moins désolées. Et désolantes. Cela donnait à Elio l’envie de lui coller une gifle avant de le prendre dans ses bras. Il était ridicule, énervant et touchant à la fois. Cocktail raté qui plaisait particulièrement à un professionnel pourtant sévère en matière de goût et de mélanges …

- Je… La nuit est fraiche ce soir et… Et c’est ridicule de parler de la météo, à se demander pourquoi c’est toujours le premier sujet de conversation qui vient. Vous allez bien ?

Et il continuait à dire des conneries, et il en sortait à la seconde des si énormes que même l’interlocuteur le plus alcoolisé qui soit aurait remarqué le ridicule de son discours. Mais Elio n’arrivait pas à lui en vouloir, surtout quand il se mélangeait les pinceaux et se retrouvait à parler de la météo après lui avoir touché la main. De quoi parlerait-il si Elio parvenait à aller plus loin ce soir, là est toute la question … Ceci dit, il fallait bien jouer la carte de la politesse et répondre à Andrea dans la mesure de ses attentes, à ce sujet aussi inintéressant que possible.

- Il suffit d’avoir une bonne veste pour affronter le temps … Pause. Alors, quelle réaction sur cette veste qui suggérait plus de chose qu’une simple protection contre le vent ? Et puis il faut bien commencer par quelque chose, lorsque l’on veut établir un dialogue.

Et toi, Andy, tu veux établir un dialogue ? Dis, tu veux me connaitre ? Me sentir, me savoir, me posséder ? Jouer avec le feu, s’approprier quelqu’un dont on ne connait rien. Pourquoi pas, après tout. Mais il était temps de répondre vraiment à sa question. Puisqu’il voulait savoir comment il allait … D’ailleurs, comment allait-il, notre barman préféré ? Pas si bien que ça, en dehors du boulot. La dernière visite de sa cousine Luisa lui pesait à vrai dire encore sur l’estomac, et il avait du mal à accepter que cette idiote ait pu le dénicher ici. Après tout le mal qu’il s’était donné pour se faire oublier … Luisa, délicate mixture tueuse, mystérieux venin dont l’antidote était si simple et si compliqué à la fois. S’en séparer. Mais sangsue, elle revenait, se collait, s’accrochait avec l’énergie du désespoir. Comment il allait ? Pas si bien que ça. Prenant un air étonné, peu feint devant cette question habituelle mais pas dans une telle bouche, Elio répondit :

- Fraichement, et puis ce soir il n’y a pas grand monde, je risque de m’ennuyer jusqu’à la fermeture … Sauf si tu restes. Ceci-dit, pour l’instant je suis bien accompagné. Mieux que je ne l’aie été ces derniers jours, en tout cas.

Décidément, Elio était bien loquace ce soir, et disait une vérité toute prête dans ses paroles. Sans tourner autour du pot, en préservant la timidité d’Andrea. En douceur, mais tout en réalité. Le jeune homme ponctua ses paroles d’un regard appuyé et d’un simulacre un peu particulier mais totalement spontané. Lui prenant une main qu’Andrea n’eut pas le temps d’enlever, Elio la leva à la verticale et tourna la paume de la main du jeune homme vers lui, pour venir rencontrer la peau fine du poignet de ses lèvres. Il y posa un baiser très rapide mais suffisamment appuyé pour le satisfaire et calmer pour un moment au moins ses ardeurs. Puis, de peur d’effrayer Andy sur une impulsion aussi soudaine qu’étrange, le barman s’échappa bien vite et entreprit un petit rire moqueur envers lui-même, histoire de grossir le trait et de préserver Andrea. Alors qu'il n'avait pas envie de se moquer de lui, mais au contraire de recommencer. Caresser cet aperçu qui lui filait déjà entre les doigts, parcourir de sa langue la peau parfumée, inhaler les vapeurs innocentes d'Andrea ...

- Désolé, ce doit être une goutte qui serait tombé sur votre main, l’alcool a tendance à m’attirer rapidement à sa source …

N’importe quoi. Surtout que la source la plus agréable aurait été la bouche de son compagnon. Mais au moins permettait-il à Andy de croire une excuse bidon et de ne pas s’en faire, ni de relever. Une fuite, une porte de sortie. Une échappatoire. Bref, on aura compris l’idée : une chute qui donnait le choix à un gamin de faire comme si de rien n’était.

Ou pas.
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Andrea Vitaly

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[Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] Vide
MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeDim 17 Oct - 14:45

I wish you were here tonight with me to see the northern lights.
I wish you were here tonight with me.
I wish I could have you by my side tonight when the sky is burning.
I wish I could have you by my side.
Au fond de moi, je savais sûrement que cette soirée ne pourrait pas être comme les autres. Il était impossible qu’il ne se passe rien. Et si cela devait arriver, c’était la fin de tout. La fin de mes venues, la fin de mes soirées, la fin d’Elio et moi, de moi et Elio. De ce lien qui n’était pas tissé, de ce lien qui n’existait même pas. Si ce soir était un soir comme les autres. Si ce soir était comme les autres… Je ne voulais pas y penser. Je ne voulais pas penser à ce que ça allait pouvoir me faire ressentir. Quitte à ce que je le déclenche, quitte à ce que je m’enterre, quitte à mourir de ridicule. Voir. Vérifier. Essayer. Et constater. Ce qui arriverait ou non. Et si quelque chose arrivait, qu’est-ce que ça changerait ? Pour moi, pour lui ?
Des questions et encore des questions. Il n’y avait que ça qui comptait quand je pensais à lui. Rien n’était sûr, rien n’était écrit, posé, immuable. Elio était le vent, insaisissable. Qu’aurait-il fait avec quelqu’un comme moi ? Non, mais quoi que j’en pense, j’en revenais toujours au même point, à la même interrogation. Quelle possibilité pouvait-il bien y avoir entre nous ? Pourquoi alors que j’étais tenté de hurler au monde entier un « rien » catégorique je n’y parvenais pas ? Parce que je ne voulais pas ? Parce qu’il y avait effectivement quelque chose de possible ? Mais quelque chose ça pouvait être n’importe quoi. Oh oui, tellement n’importe quoi à tel point que je n’avais pas arrêté d’y penser ces derniers jours. L’envie d’essayer côtoyait sans cesse celle de fuir et j’étais coincé dans un absurde paradoxe faisant que je n’arrivais tout simplement pas à me décider. Et il devait en avoir assez. Sûrement assez. Il n’y avait plus eu de sous entendus sur ma première soirée ici et je n’en savais toujours rien. Et je n’allais pas lui demander la vérité. Pas maintenant, je n’étais pas prêt.

Ou alors je me persuadais que je n’étais pas prêt. Je n’aurais pas été capable à l’heure actuelle de reprendre ma vie d’avant qui m’allait jusque là fort bien. L’oublier était impossible et pourtant j’allais devoir me forcer. Tout ça à cause de mon caractère et du fait que depuis le temps à agir ainsi, je ne pouvais pas changer du jour au lendemain. Si on ajoute à ça mon inexpérience de tout ce qui touche aux relations humaines, j’étais mal barré. Tout ce que je savais, c’était que la situation ne pouvait plus durer ainsi. J’étais constamment sous pression à me faire des films, à imaginer le pire comme le meilleur, à m’embourber dans des choses irréelles. Ce n’était plus tenable. Il fallait que j’y mette un terme et il n’y avait pas dix solutions différentes. Combien de fois ces deux dernières semaines est-ce que j’avais failli craquer ? Combien de fois l’envie pure avait failli écraser la retenue et la peur ? Ca se passait en un éclair. Je le regardais et une seule idée me venait, m’avancer et l’embrasser, lui attraper la main, lui toucher la peau, les cheveux, les lèvres. Ouvrir son insolente chemise, qu’il fasse de même. Des pensées plus rapides que la lumière. Avant qu’elles ne se retirent, me laissant un goût amer d’inachevé. Jamais il ne me serait possible de faire ça. Ce n’était pas moi. Et je ne supportais pas de perdre ainsi le contrôle. C’était de sa faute, il m’obsédait tellement, il s’était tellement insinué en moi sans que je ne demande rien qu’il m’était impossible de m’en défaire. Et je refusais de succomber. Question de fierté, d’honneur… De peur. Pourtant c’était certainement le chemin le plus simple à employer. Mais celui qui était également le plus incertain. Parce que le résultat ne pouvait pas se prévoir. Loin, bien loin de là.

Pourtant j’étais attentif aux signes. Peut être un peu trop. Ces signes qui pourraient m’encourager silencieusement à me lancer. Ces signes qui pouvaient aussi bien me paniquer que me rassurer. A commencer par son regard. Incisif. Un regard auquel on ne pouvait se soustraire. Lui qui me mettait à nu, qui me brûlait à chaque instant. Comme s’il pouvait tout voir de moi. Et celui là, j’étais presque certain de ne pas l’imaginer. Parce que je l’observais moi aussi, dès que je pouvais. Et ce regard, il ne le posait pas sur les autres, ce n’était pas le même. Il n’avait pas le même but, la même profondeur, la même portée. Peut être qu’au final je l’intéresse un peu, sinon il n’essaierait pas autant de fois. Oui mais pourquoi ? Pour avoir le privilège de se vanter d’avoir défloré Andrea Vitaly ? Non merci. Rien qu’à cette pensée je faillis en rougir de honte. Et pourtant, ce n’était pas la première fois qu’une telle image me venait. Elio pensait-il uniquement à cela ? Avec un tel regard aussi chargé ? Des yeux que j’évitais quand ils agissaient ainsi. Qui pourrait apprécier de se faire mettre à nu de la sorte par un inconnu ? Un presque inconnu ? Elio-au-nom-inconnu. Je n’étais même pas sûr qu’il s’appelle véritablement ainsi. Je ne savais rien de lui, il ne savait pas grand-chose de moi. Le schéma idéal pour quelque chose sans lendemain. « Quelque chose ». Des mots auxquels je ne voulais pas penser, auxquels je refusais de mettre des images. Ahaha. Elio et ses regards, et ses mots, Elio et ses gestes et ses tentatives. Elio. Je crois que j’aimerais te céder. Pour voir, pour essayer. Action. Réaction. Qui pouvait dire à quel point c’était aussi difficile ?

« Tu dois lui paraître bien étrange à avancer pour mieux reculer. » Comme si c’était aussi facile. Mais même armé des meilleures intentions du monde, il balayait ma volonté par sa simple présence. Des mots qui me semblaient si bénins chez moi me semblaient des plus insurmontables à prononcer une fois en face de lui. Elio paralytique. J’avais ce don de chercher des sous entendus dans chacune de ses paroles. Et ça fonctionnait.
Mon cœur battait fort. Plus fort qu’il ne l’aurait dû pour un simple contact d’une main à l’autre. Si seulement je pouvais avoir l’air plus décontracté que mon interlocuteur. J’avais beau y arriver de mieux en mieux, j’étais loin de savoir camoufler véritablement ce que je pensais. Comment l’aurais-je pu ? Pourtant au fond de moi, je sentais que ma main était un peu plus chaude qu’avant. Comme à chaque fois qu’il me touchait, même de façon très rapide, imperceptible. C’était pire qu’un jeu du chat et la souris. Et lui aussi devait se douter que ça ne pouvait plus durer ainsi, qu’il fallait faire quelque chose pour cesser de tourner en rond. Même si j’étais le seul coupable, le seul fautif.
Il ne me restait plus qu’une fois de plus à assumer mes dires. Mes conneries de dires. Mais bon. Je préférais parler pour dire de la merde que de rester silencieux à me sentir vraiment mal. Tant qu’on parlait, j’arrivais à me contrôler. Malgré mes interprétations de ses paroles, j’essayais de rester en terrain connu, sur des choses sur lesquelles je pouvais parler, sans me perdre dans mes pensées. Mais irrémédiablement, ça glissait toujours sur des terrains plus dangereux et sur lesquels je n’avais pas de prises.

- Il suffit d’avoir une bonne veste pour affronter le temps … Et puis il faut bien commencer par quelque chose, lorsque l’on veut établir un dialogue.

Et voila. Le voila le sous entendu que j’attendais. Peut être même qu’il n’y en avait pas, je ne savais plus. Mais une veste ne pouvait pas être anodine, au vu de notre deuxième rencontre. Cette veste qui ne sentait pas ma lessive. Cette veste qui était, pour une obscure raison, restée au Love’s Out le premier soir. Cette veste que j’avais une certaine appréhension à remettre. Mais je divaguais. Déjà qu’il faisait l’effort de répondre à mes sujets totalement bateau et loin d’une discussion que l’on pouvait avoir généralement dans un bar de ce genre. Mais il n’y avait pas de moquerie. Juste de la patience. Jamais il ne brusquait. Jamais il n’allait trop loin. Etait-il prêt à aller aussi loin pour pouvoir me posséder ? Etait-ce juste un caprice d’enfant qu’il cherchait à assouvir ? Je ne me voyais cependant pas lui poser la question. C’était bien trop dur. Trop personnel. Trop gênant.
Essayer de paraître à l’aise, se calmer. Il n’y avait pas de raison de se sentir oppressé de la sorte. Il ne se passait rien là. Juste une discussion lambda. Aussi vite que d’habitude, je bu mon verre, en laissant un fond que j’allais savourer pleinement en bouche. C’était original, ces étages. Agréable.

- Fraichement, et puis ce soir il n’y a pas grand monde, je risque de m’ennuyer jusqu’à la fermeture … Ceci-dit, pour l’instant je suis bien accompagné. Mieux que je ne l’aie été ces derniers jours, en tout cas.

La ritournelle habituelle tourna dans ma tête encore et encore jusqu’à ce que je trouve un semblant de souffle pour répondre quelque chose de correct « Ne rougis pas, ne rougis pas, ne rougis pas ».

- Dans ce cas, je pourrais faire la fermeture, je n’ai pas grand-chose à faire demain, et ça ne sera sûrement pas très tard au vu du monde.

Et voila. Je l’avais dis. Ce n’était même pas caché. C’était assumé. D’une voix toute à fait correcte. Et pourtant, ça m’avait demandé plus d’effort que de courir le marathon. Rien n’était caché dans sa phrase non plus. Il assumait. Pourquoi ne l’aurais-je pas fait à mon tour ? Il était temps de se prendre en main. De dire ce qu’on pensait. Et même si la perspective de me retrouver seul avec lui en fin de soirée était des plus angoissantes, elle pouvait aussi se révéler intéressante. Ce qui allait se passer changerait certainement beaucoup de choses. Car un non lieu n’était pas envisageable. C’était bien ce qui devait se passer un jour. Un face à face. Et même si je ne me sentais absolument pas prêt pour le faire, je n’avais pas le choix. Les dés étaient jetés. En plus, c’était de sa faute. C’était bien la première fois qu’on me touchait de la sorte rien qu’avec des mots. Les mots généralement, c’était moi qui les maniais, et je me fichais bien de ceux qu’on pouvait me retourner. Les mots je m’y connaissais. Pas forcément pour dire des mots doux, mais au moins je savais les utiliser d’une façon large. Et ce n’était pas prévu qu’il arrive à me déstabiliser avec ses mots à lui. Ce n’était pas prévu que je me sente heureux, que je retienne un sourire parce qu’il disait qu’il était bien avec moi. Je ne me sentais pas capable de lui dire la même chose. Mais il fallait croire que l’intention y était, émettant le souhait de rester à ses côtés jusqu’au bout. Depuis quand étais-je sensible aux flatteries ? Il y avait de quoi se poser montagne de question.

Mais il gâcha tout. Alors que je m’efforçais de me rapprocher de lui, du moins juste en parlant, il sauta le pas. Normal pour lui. Il avait sûrement l’habitude que tout lui tombe tout cuit dans les bras et n’étais pas habitué à une telle résistance. Ce qu’au final j’appréciais d’être. Une résistance à son habitude. Mais je ne pensais pas que sa limite serait si vite atteinte. Et moi je n’étais pas encore serein, pas encore prêt à accepter ce qu’il me proposait dès maintenant. Une partie de moi disait stop, l’autre disait plus. Et une fois de plus, je me sentais horriblement tiraillé. Il n’avait fallu que d’un geste. Sa main qui attrape mon poignet. Que j’essaie instinctivement de retirer sans que cela fonctionne outre mesure. Ses lèvres qui s’approchent, mon pouls qui s’emballent sous ma peau. Un simple baiser sur mon poignet à peine dénudé de ma chemise. Poignet qui brutalement se dégage pour revenir à sa place initiale. Automatisme. Ne me touche pas. Un regard noir l’espace d’un instant que je m’efforce d’adoucir par la suite. Ne rie pas. Ce n’est pas drôle. Tu ne pouvais pas encore attendre ? Comme si j’avais besoin de ça.
Il fallait cependant que je me calme. Ce n’était pas grave, ce n’était rien. Vraiment rien. Je prenais trop à cœur cette histoire. Mais réagir autrement serait lui céder, ce que je ne pouvais pas faire. Et mes automatismes avaient la vie dure. Je n’avais pas été loin de lui en coller une sur ma lancée. Mais non. Il ne fallait pas, j’aurais tout gâché à faire ça. Mais ainsi se posait le problème. Si je n’étais pas capable d’accepter ça. Comment pourrais-je envisager qu’il aille plus loin ? Je n’avais pas l’habitude de prendre sur moi et ça risquait de se révéler plus compliqué que prévu.

J’étais vexé par son attitude. Excuse-toi tant que tu veux. Ce n’est que du vent je le sais bien. Je sais bien ce que tu veux. Je sais ce que tu ressens. Je sais ce que je ressens. Je sais que mon pouls ne se calme pas, que mon poignet est chaud. Je sais que j’ai envie de porter ce même poignet à mes lèvres pour avoir l’impression de sentir les tiennes. Je sais que je divague. Je sais que je suis débile. Mais je suis perdu. Comment arriver à penser quelque chose de correct vis-à-vis de cela ? Tu as envie ? Moi aussi. Sauf que moi, je ne suis pas comme toi. Du coup, ça ne pourra jamais être simple. Et je n’ai pas envie d’être tellement déprimé par ce qui pourrait se passer ensuite que je pourrais en venir à te mettre au chômage par simple vengeance. Et puis d’abord, ça ne se fait pas. Bien joué Andrea, il agit exactement comme toi. Et tu le condamnes. Sauf que moi ce n’est pas pareil ! Ca aurait pu être lui, ça aurait pu être quelqu’un d’autre. De toute façon, c’est la soif de curiosité qui me pousse toujours plus loin. Une fois que je saurais, je n’aurais plus besoin de me poser tant de question. Je ne vois pas ce que ça pourrait être d’autres.

Je poussais mon verre dans sa direction.

- J’aimerais bien en avoir un du même genre.


J’hésitais. Pouvais-je passer à côté de son acte qui l’espace d’un instant m’avait fait perdre mes moyens, m’avait donné envie d’être en colère et heureux, de lui donner une claque et de lui rendre ce baiser ? Non je ne pouvais pas, mais je ne voulais pas qu’il aille voir ailleurs. Parce que cette soirée c’était la nôtre et peu importait le nombre de maladresse, il allait bien falloir qu’elle arrive à son terme. Et maintenant, je ne pouvais rentrer chez moi sans rien et décidant de disparaitre de la vie de ce bar. Pas maintenant.
Et puis, un autre verre avec de l’alcool pourrait peut être me donner le courage dont je manquais. Juste un autre, histoire de brouiller légèrement plus mes pensées. Juste un peu. Comme l’autre fois. L’autre fois avec les innombrables verres, la chaleur, le tournis, les sourires. Et le reste. Et j’aurais même peut être un autre rêve. « Réveille toi Andrea ce n’est qu’un rêve, une chimère ! »

- Je vous offre un de vos cocktails, que je puisse en gouter un autre.


Pour que tu restes avec moi. Reviens avec mon verre, laisse moi respirer, laisse moi reprendre ma raison, pour mieux m’empoisonner, m’emprisonner. Ne me mens pas, ne te moque pas. Et reviens.
Si l’alcool t’attire autant, je m’en parfumerais, pour que tu restes. Pour que cette nuit j’ai l’impression d’être le seul.
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Aurelio Pastore

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[Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] Vide
MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeMer 20 Oct - 16:24

Elio ne comprenait pas. Une chose. Ou tout, au choix. Comment Andrea pouvait-il à ce point lutter contre lui-même et l’envie qui devait lui mordre la chair jusqu’à l’os ? Comment pouvait-il fuir une vérité indubitable et évidente, une simple constatation à laquelle il faudrait se plier dans le respect de la logique des choses. Parce que franchement, Elio sortait le grand jeu avec lui. Gentil, patient, souriant et séducteur, il déballait tout son talent pour un simple gosse un peu curieux sans que celui ne parvienne à extraire le balai plongé entre ses jambes qui l’empêchait d’exécuter tout mouvement. Aucun écho, aucune invitation à part son mutisme souvent bien bavard mais qui ne suffisait pas à l’entrainer dans les bras du barman. A sa place, il n’aurait pas hésité. A sa place, son ego aurait très certainement pris les choses en main pour le pousser dans les draps d’un serveur charmant et prévenant. A sa place, il s’en serait passé des choses … D’un point de vue extérieur, il était d’ailleurs difficile de comprendre et de soutenir Andrea dans son refus stupide. Après tout, Elio n’était pas désagréable à regarder. Tout en lui respirait la vie, la joie instantanée, le bonheur fugace mais perpétuellement renouvelé. Même sa peau pâle d’albâtre appelait les baisers, démonstrations aussi superficielles que réelles d’une affection particulière le temps de quelques heures. Pas véritablement narcissique, Elio ne pouvait cependant pas nier l’attirance, le besoin qu’il dégageait à chaque instant. Rien à voir avec un adolescent grassouillet, boutonneux aux cheveux fades et à la larme facile. Rien à voir avec ces ridicules petits adultes qui se croient dans la réalité, rien à voir avec un passé trop brutalement oublié. Rien à voir non plus avec ces semblants d’hommes épanouis et dont la réussite sociale n’était plus à prouver, malgré leur présence entre ces murs, désespérés par l’amour et blasés par la complexité des relations.

Entre deux âges, Elio voguait loin des stéréotypes quel qu’ils soient. Différent de ces gens banals, il l’était tout autant de ces beaux gosses vides et plats que l’on voit souvent au détour d’un carrefour milanais. Eux qui exhibent sans vergogne leurs atours, bronzage compris même en plein hiver. Loin de la mode, des tendances, des habitudes et de ce qui plait, Elio se différenciait en étant à cheval entre deux mondes. Empruntant au quotidien ennuyeux et redondant de tous ces gens une apparence simple et un mode de fonctionnement au moins aussi modeste dans ses dépenses, il volait à l’univers de paillettes son charisme et son rythme de vie en total décalage avec les bienpensantes règles journalières et bien trop morales pour lui. Se délestant des inconvénients, il ne prenait que le meilleur cru de chaque récolte et se moquait de la nécessité d’appartenir à quelque chose, de rentrer dans un moule, dans un idéal. Comme une infime particule en suspension, il se laissait voguer au gré du bon vouloir de la vie et de ses expériences. Qui lui disait qu’Andy finirait dans son lit ? Personne. Nulle certitude, nulle promesse. Et pourtant il perdait du temps ici, ce soir. Pour s’amuser, pour défier la trop simple règle du destin, pour jouer avec ses limites, qui sait. Lui n’était pas comme eux. Elio ne se posait pas de questions, ne réfléchissait pas pendant des heures sur un détail comme Andrea passait son temps à le faire. S’il pensait à lui c’était dans le simple but de le posséder. Si le jeune homme occupait les pensées de ce serveur pourtant peu en manque, c’était parce qu’il avait décidé de jouer sérieusement l’innocence de ce gosse. Comme une vierge que l’on voudrait sentir étreinte pour la première fois, comme la surface d’une mare que l’on brise en y sautant à pieds joints. Avec délicatesse et force, détermination et prudence.

Seule peur, échouer. Et en même temps, tellement dérisoire. Elio ne perdrait rien, si ce n’est un peu de temps, chose qu’il avait à revendre tant il ne se projetait jamais au lendemain. Le jeu en valait sans doute la chandelle, du moins l’espérait-il. Même si dans l’histoire il aurait toujours appris quelque chose en cas d’échec, c’était une idée qui ne parvenait pas à s’implanter réellement dans son crâne, délaissant tout fonctionnement de pensée pour se loger dans un espace clos dont il n’avait que faire. Andrea serait à lui, de quelque manière que ce soit. D’autant plus qu’il l’était déjà un peu, avec sa mauvaise habitude de venir encore et encore lui rendre visite. Etait-ce son visage, son charisme, sa gentillesse feinte ou bien encore autre chose qui avait amené le jeune homme à rester au Love’s out ? La curiosité, très certainement. Mais de quoi ? De savoir jusqu’où il pouvait aller, de mesurer son charme, de connaitre ses limites ? Après tout, le raisonnement de ce genre de personne était totalement obscur à Elio. Lui n’aurait pas réfléchi. En se voyant, il aurait certainement profité de l’occasion. Des boucles brunes qui venaient se perdre sur une joue blême, des yeux aussi insipides que captivants, un corps attirant … Le barman ne se cachait pas la vérité de sa beauté, aussi en revenait-il toujours au même point : il ne comprenait pas. Ce qui n’était pas dans ses habitudes, étant donné le peu de choses que le jeune homme avait à comprendre au quotidien. Lui aurait tout simplement profité d’un corps offert en jouant la séduction, en se tarissant en des baisers langoureux et provocateurs. Des caresses mutines, des insistances marquées, et une nuit de plus au paradis.

Il y avait des moments où il fallait mourir pour se sentir vivre.

Mourir c'est renoncer. Changer quelque chose, même un détail. Eh bien Andy, saisis ta chance. Ça n’arrivera pas tous les jours de te faire proposer l’expérience par un mec à peu près réglo. Elio n’abandonne pas, Elio garde ses clients. Elio sait être doux lorsqu’il le faut, Elio est prêt à t’apprendre. Quand un homme aime une femme, c’est beaucoup moins amusant. Tu as vraiment envie de ça, Andy ? De ne rien savoir, de ne rien comprendre pour te planter magistralement le jour où il faudra bien faire quelque chose ? Tu seras seul alors, tu seras seul. Seul comme un homme qui doit prendre ses responsabilités, seul comme un homme qui doit donner du plaisir avant d’en prendre. Avec Elio, pas de ça. Il prenait du plaisir à en donner, il ne faisait pas que tirer un coup dans une chambre glacée. Elio éduquait, protégeait, accompagnait. Tu as besoin de ça, Andy. Besoin de savoir avant de devoir faire, besoin que quelqu’un te montre comment emmener loin d’un simple baiser. Que quelqu’un te fasses ressentir ce qu’un jour tu devras reproduire. Prends ça comme un bon moment à passer. Et pas comme un mauvais. Se libérer, s’ouvrir à l’autre n’était pas chose facile lorsque les sentiments étaient en jeu. Alors que d’un simple accord tacite, on peut ouvrir une porte sur un univers étrange et fugace, tant et si bien que plus rien ne compte si ce n’est le retrouver. Mais pour ça, il faut accepter de trébucher une fois. Se perdre dans des bras inconnus, tomber dans un lit qui n’est pas le sien, et découvrir. Puis oublier, peu importe. Au moins, rien ne sera plus comme avant.

Elio pensait à tout cela vaguement, tout en regardant sa si jolie préparation se vider, tomber peu à peu, couler dans la gorge d’Andrea, se réchauffer dans sa bouche, toucher ses lèvres. Véritable spectacle dévastateur, qui rendait le barman un peu plus déterminé que précédemment. Coule, coule. Que l’alcool coule à flots. Et si ça dois te tuer, tant pis. Il y a toujours un moment pour mourir, d’autant plus que les anges n’aiment pas devenir vieux. Mais ce n’est pas tant cette fausse assurance qui surprit Elio, mais plutôt la franchise des dires de son compagnon du soir. Il était là, tentant d’être calme, voulant un ton sans hésitations, sans honte. Il lui annonçait délibérément que rester n’était pas un problème pour lui. Un instant, Elio hésita entre deux hypothèses. Soit Andy était un crétin fini -peu pertinent, surtout pour l’être encore plus que lui-, soit il … rentrait dans son jeu. Et il avait raison. Retenant un sourire, le barman jeta un coup d’œil rapide à la salle déjà bien tranquille en cette fin de soirée, début de nuit. Il ne priait à présent plus que pour leur départ à tous, le moment béni où Elio et Andrea se retrouveraient seuls un court instant avant que celui-ci ne fuie. Il fallait maintenant tenir jusque là. Et manifestement, le baiser offert en promesse n’avait pas été une bonne idée. Quoique … Elio s’attendait à recevoir une gifle et un air outré, il ne rencontra que recul et colère. Heureusement, il avait profité un court instant du contact, et en subissait à présent les conséquences. Regard noir, regard de cendres. Comme quelque chose de définitivement calciné avant même d’avoir vu le jour. Elio ne broncha pas. Il l’avait sans doute mérité, Andy n’était pas encore prêt, apparemment.

Mais quand ? Quand pourrait-il enfin profiter de cette peau, de cette chair, de cette odeur qui excitait déjà ses sens ? Se calmer, il fallait se calmer. Attendre, malgré la difficulté assez insoutenable que cela induisait. Mais fort heureusement pour Elio, Andrea eut la bonne idée de réclamer un autre verre et d’ajouter, en poussant le cadavre de sa précédente création dans sa direction :

- Je vous offre un de vos cocktails, que je puisse en gouter un autre.

Comme un automatisme, sans un mot, Elio se dégagea, récupéra le verre vide et fila en direction du bar dans un sourire d’obéissance. S’éloigner, un moment. Reprendre son calme, reprendre son souffle. Se retenir de ne pas tout gâcher en une seule seconde de satisfaction. Sans vraiment regarder ce qu’il faisait, il se saisit d’un verre coupe pour lui et d’un plus classique pour Andrea. Il savait, sentait ce qu’il allait faire. Dans le premier, il alla vers ses préférences : un fond de liqueur de banane pour garder ça sur le palais une fois le verre terminé. Arroser généreusement d’un mélange de jus d’ananas et de vodka, goût exotique que le jeune homme appréciait tout particulièrement. Et le must, le plaisir du début, le moment où tout commence … Une crème de cassis largement relevée de gin pour le haut du verre. Un vrai délice qui portait mal son nom de Building malgré les jolies couleurs structurées qu’il proposait de par sa composition. Pour Andrea, maintenant. Il avait envie d’une private joke, d’un petit clin d’œil fait à lui-même. La boisson, appelée Cendrillon, correspondait plutôt bien à la situation qu’il voulait recréer, sans la fuite et la chaussure -ou veste- oubliée. Beaucoup d’agrumes, en tout cas, avec du jus d’orange, des citron pressés et de la mandarine fruitée. Et pour en parfaire le goût mais surtout l’effet, Elio y versa une grande rasade de gin, le pêché mignon qui avait commencé à perdre Andy voilà deux semaines. Parfait.

En revenant, Elio posa les verres devant leurs propriétaires et repris sa place, éloigné mais pas suffisamment pour être étrangers l’un à l’autre. Par politesse, il attendait que son client commence à boire avant lui. D’ailleurs, il y avait un détail à régler …

- Je suppose que je dois vous remercier pour le verre …

Grand sourire. Pourboire. Ce n’était rien, ça faisait plaisir à tout le monde et le sourire d’Elio était bien plus intéressant que beaucoup d’autres moyens de payement. Il offrit à Andrea un de ses plus réussis, avec beaucoup de sincérité feinte, imperceptible jeu auquel il se livrait. Puis, le jeune homme enchaina rapidement vers une toute autre voie de réflexion :

- Sans paraitre indiscret. Que venez-vous faire ici, au juste ? Vous n'avez pas l'air de rechercher la même chose que mes autres clients ...

Question peut être un peu brute de décoffrage, pourtant il tenait à la poser. C’est vrai, lui qui n’aimait pas se questionner pour rien n’avait toujours pas compris. Alors Andrea ne le lui en dirait certainement pas la raison sans mentir ou omettre une partie de la réalité, mais ses possibles réactions ou silences en disaient également beaucoup. Et puis, quand on ne savait pas on demandait. C’est exactement ce qu’Elio faisait, alors qu’il croisait les jambes et porta la main à son verre en tentant de ne pas fixer trop intensément Andy du regard. Alors, qu’est ce qu’on répond à ça Andy ? Tu vas me livrer une partie de toi ou te fermer complètement ?

Pile ? Ou face.
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Andrea Vitaly

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MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeMar 1 Fév - 14:54

« Parfois à trop vouloir, trop vouloir se la jouer
On ne s'y reconnait même plus
Mais Andy il est trop tard, n'aie donc pas de regrets,
On aura fait ce qu'on a pu. »

Je ne me rappelais pas m’être déjà fait draguer durant mon adolescence. Ou alors ce n’était pas vraiment subtil. C’était la plupart du temps des filles qui ne cherchaient qu’un prétexte pour m’approcher pour mon nom et la fortune de mes parents. Et ça m’allait très bien. Je pouvais les envoyer balader sans que cela ne me gêne outre mesure. Je n’avais pas la moindre envie d’avoir une petite amie ou n’importe qui se rapprochant outre mesure de moi. Faire confiance, ça finissait toujours mal. Je savais très bien que dès qu’on me situait et reconnaissait comme l’enfant des Vitaly, la plupart des personnes agissent en conséquence. Et je n’avais pas besoin de ça. Moi et moi-même. Rien besoin d’autre. D’ailleurs je repoussais systématiquement ceux qui essayaient de rentrer dans mon quotidien bien peinard. Hélas, cela m’avait apporté aussi quelques ennuis. Des connaissances foireuses que je ne citerais pas. Et puis d’autres connaissances. Et puis lui. Et là j’avais appris le véritable sens de la drague. Entre sourire, présence, flatteries, sous entendus et distance, un savant cocktail de comportement qu’il instillait pour me perdre. Et ça marchait hélas diablement bien. Cette proximité, cette façon de me pousser dans mes retranchements, puis le vide et l’ignorance. Comme si rien ne se passait. Comme si agir comme ça était normal et donc comme s’il n’avait rien à se reprocher. Et cette saloperie de manège fonctionnait à merveille. Il fallait bien l’admettre qu’à cause de ça je pensais constamment à lui. Surtout qu’il n’avait pas l’air de savoir vraiment qui je pouvais être. Il semblait plus j’m’en foutiste qu’autre chose. Il attire quelqu’un dans ses filets, fait ce qu’il a à faire, et s’en va, laissant sa victime. Qui en redemande. Mais avant que je m’en rende compte, il était bien trop tard et j’étais moi-même devenu une de ses victimes. Personne ne semblait avoir d’emprise sur lui, il vivait au gré de ses envies sans se soucier du reste. Et je croyais être fait du même bois. Ce qui était faux. Car personne ne m’avait autant ébranlé que lui. Il fallait me faire une raison, je ne pouvais pas le fuir et l’oublier. La seule façon c’était la confrontation. Et c’était pour ce soir. Et peu importait mon stress, mon envie de fuir, ma peur irrépressible alors que je pensais aux divers scénarios qui pouvaient arriver. J’avais fait mon choix, et je savais bien qu’il l’avait remarqué.

Il fallait juste que je tente de rester calme jusqu’au bout. Même de façon factice. Il lisait en moi. Il savait très bien si je bluffais ou pas. Je n’avais pas son expérience, et ça avait beau me rendre fou je ne pouvais rien y faire. Si je sentais que ça dérapais trop ou que ça allait trop loin, je pouvais toujours tout stopper et partir. Partir partir et me faire une raison. Oui voila, il suffisait de faire ça. Je ne savais pas ce qui pouvait arriver alors qu’il n’y aurait que lui et moi ici. A quel point ce que j’imaginais allait se révéler juste. Mais après tout, ce qui se passe en soirée reste en soirée. Il ne parlerait pas. Ou alors ça serait la dernière chose qu’il dirait. Il me verrait uniquement comme un autre. Du coup je ne craignais rien… Ou presque. A l’instant critique, je ne sais pas si je serais capable de me contrôler. Je pourrais très bien entrer dans une rage folle pour cacher le malaise qui était devenu insoutenable. Mais à imaginer n’importe quoi, on n’avance pas, on reste campé dans son imaginaire et ce n’était pas la meilleure des choses. Vraiment pas. C’était à moi de lui montrer de quoi j’étais capable. T’es bien gentil Elio, mais je reste quand même maitre de ma vie. Oui non peut être ? Si seulement ça pouvait être aussi simple que ça. Sauf que je savais bien de quoi il retournait. Je savais bien de quoi j’avais envie. Je ne voulais pas le dire, ni même y penser. Inavouable. Hey Elio revient.

Baisse de pression dès qu’il s’éloigne, j’ai quand même l’impression que mon poumons fonctionnent mieux. Je remets une mèche de cheveux derrière mon oreille, je fais tourner mon verre vide, je jette des regards anxieux sur les quelques personnes présentes dans la salle. Je fixe la porte de sortie. Je croise mes jambes, les décroise, fait pareil avec les bras. Et j’inspire et expire à fond. Non ça n’allait pas. Ca n’allait pas ça n’allait pas. Il fallait que quelque chose se passe vite où ça allait être l’apoplexie. Plus ça trainait en longueur plus c’était insupportable. Mais c’était pourtant moi qui faisais ça. C’était moi qui l’empêchais d’approcher alors qu’il ne tenait qu’à moi de pencher mon visage vers le sien. Je ne pouvais m’en prendre qu’à moi-même si j’étais tendu à ce point. Je forçais mon regard à tourner dans tous les sens sauf dans le sien, mais c’était peine perdue. « Il est déjà trop tard » J’abandonnais et le regardais préparer de nouveaux cocktails. De loin, être hypnotisé par cette dextérité. Je l’étais totalement. Qui aurait pu croire qu’une personne puisse me hanter à ce point ? Il avait réussi ce tour de force de la façon la plus naturelle qui soit. Un physique avenant, un charisme écrasant. Jamais je n’aurais pu croire être sensible à cela. Jusqu’à lui. Au diable le reste ?

Elio reprit enfin sa place l’air de rien. Me laissant toute latitude d’agir ou non. Calmer les battements de mon cœur. Rien ne se passerait tant que le bar ne serait pas totalement désert alors en attendant, tu n’as plus qu’à te calmer. Tu n’as rien à craindre, il ne fera rien, il sait que tu le refuseras. Tremper les lèvres dans mon cocktail. J’étais sûr que mes yeux se sont mis à briller l’espace d’un instant. Car le mélange des agrumes était largement bien dosé et l’arrière goût amer de l’alcool n’était pas trop prenant. Autant dire qu’il savait réellement y faire pour que ses breuvages fonctionnent.

- Je suppose que je dois vous remercier pour le verre …

Et je faillis à mon grand désarroi m’étouffer à la vue de son sourire. Déglutir difficilement et lui rendre un sourire poli. Bon sang mais ce n’était pas permit des sourires pareils ! Sérieusement pas étonnant que n’importe qui lui tombe dans les bras avec une telle capacité à faire tourner les têtes juste avec un haussement de commissures. Paye ton remerciement en fait. Un simple merci aurait suffit, ce n’était pas la peine de faire jouer de la sorte ta capacité à séduire. J’imaginais sans mal une horde de fan enragé poussant des cris hystériques à la vue de ce sourire. Chose qui m’aurait fait ricaner, ou tout simplement blasé si j’en avais eu vent. Sauf que face à la chose, on ne se dit pas tout à fait la même chose. Et je détournais les yeux l’air de rien, plongeant mes lèvres de nouveau dans mon verre.

- Ce n’était pas réellement la peine.

- Sans paraitre indiscret. Que venez-vous faire ici, au juste ? Vous n'avez pas l'air de rechercher la même chose que mes autres clients ...

Indiscret tu parles. Je voyais bien qu’il cherchait juste à me déstabiliser avec ce type de question, mais je refusais de me laisser aller à ce jeu. Il m’avait déjà poussé dans mes retranchements, je n’allais pas le laisser continuer. J’étais constamment sur la défensive, oui, et c’était lui qui menait le jeu. Et je commençais à en avoir assez de ce jeu du chat et de la souris. Je n’aimais pas être pris en porte à faux. Merde quoi, même si je n’étais pas à l’aise, je pouvais bien le laisser paraitre. L’heure n’étais plus à l’innocence et au « Ils recherchent quoi ? ». Non je savais très bien de quoi il voulait parler. Moi-même je pouvais me poser la question de qu’est-ce que je pouvais bien foutre là. Tout ça parce que tu m’avais abordé dans la rue comme n’importe quel inconnu ? Parce que la première nuit que j’avais passé là se situait entre le rêve et la réalité ? Parce que si tu n’étais pas là, je n’aurais jamais mit les pieds ici ? Je ne pouvais guère lui annoncer ça, cela allait de soi. Tout comme le fait qu’en effet, je ne cherchais pas un pauvre coup d’un soir ici.

- C’est vrai que je ne viens pas ici pour chercher et trouver l’âme sœur d’un soir ici. D’ailleurs je n’en vois guère l’intérêt. Provocation. Serait-il indispensable de venir dans ce bar dans ce but ? Faire des rencontres ne m’intéresse pas vraiment. Tout comme boire de l’alcool à outrance. C’est vraiment à se demander pourquoi je continue à venir ici.

Je pose mes bases, j’enchaine. Un état d’adrénaline commence à courir en moi. Je me sens plus rassuré par le fait de parler, de prendre les choses en main. Je prends de l’assurance. Assez de cette sensation de se faire acculé. Prend garde Elio, si je ne te laisse pas m’approcher, moi je vais peut être le faire. Ainsi, alors qu’il prenait son verre, je lui attrapais la main pour porter sa coupe à mes lèvres, et goutter ce qu’il avait bien pu se préparer. C’était totalement différent du mieux. La sensation en bouche était plus crémeuse, plus profonde, moins frivole que le mien. Bien plus Elio, ça se sentait.
Est-ce que j’en faisais trop ? A trop jouer avec le feu, on finissait par se brûler. Je me laissais emporter par mes pulsions, mes envies d’en finir avec l’image trop sage que j’entretenais. Sauf que je ne savais pas l’effet que ça pouvait avoir sur Elio. Ce n’était qu’une attitude égoïste, mais en prenait bien plus en assurance quand on arrêtait de toujours reculer. Sauf que je faisais ça pour me sentir mieux, pas forcément pour lui. Et c’était ça qui posait problème. Ba de toute façon ça vaudra bien pour toutes les fois où il avait put se moquer rien qu’avec un regard. Si tu veux jouer à ça on va le faire. Me comporter de cette façon était la seule manière que j’avais pu trouver de faire taire momentanément mes angoisses vis-à-vis de lui. A moins que l’alcool que je buvais de plus en plus m’y aidait plus ou moins. J’étais encore maitre de mes actions et paroles, mais peut être aussi que ne n’assimilait pas de manière réelle les risques que mon changement d’attitude pouvait engendrer. Je m’adossais au canapé de façon un peu plus décontractée. Il y avait encore quelques personnes, quelques couples. Je ne risquais rien. Alors je pouvais bien légèrement continuer sur cette lancée.

- Je ne suis pas encore un habitué du monde de la nuit. Mais j’apprends. Et vous, pourquoi avoir choisi ce métier ? Et pourquoi un bar avec un tel nom, un tel thème ?

Si tu veux en savoir plus sur moi, j’aimerais bien en savoir plus sur toi. J’aimerais bien en apprendre, te connaitre, savoir le pourquoi, le comment. J’aimerais me rendre compte que ton charisme n’est que façade et que je me suis laissé embobiner. J’aimerais voir que tu es en fait un humain comme les autres. Mais j’aimerais que tu me montres plus, que tu te dévoiles plus. Il paraitrait que tu as des choses à m’apporter. Et si je les refuse ? Est-ce que moi je pourrais t’en apporter ? Elio mystérieux Elio, que caches-tu derrière ce sourire et cette frivolité ? J’ai mes secrets comme tu as les tiens. Mais si tu veux un quelconque rapprochement, ça sera donnant donnant.
De longues gorgées. En sachant très bien l’effet que ça allait me faire. Le dernier verre. Celui-ci était le dernier. Il n’aurait déjà même pas du arriver sur la table. Je me décalais un peu vers lui, pour mieux entendre sa réponse. Du moins, c’était la raison officielle. Je pense, Elio, que l’on n’a pas finit de s’étonner mutuellement.
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Aurelio Pastore

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MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeMer 2 Fév - 8:38

C’était presque jouissif de se savoir empli d’un tel retentissement sur le pauvre Andy, un peu innocent de la force que quelques gestes peuvent avoir sur un inconscient. Mais aussi presque trop facile de se jouer de lui, de le voir mal encaisser le charme qu’il lui offrait de temps à autre à dose maximale, presque trop simple de l’amener dans des réactions évidentes et simples à imaginer. Elio voulait de l’imprévu, de la surprise, quelque chose qui le détourne du schéma qu’il n’avait même pas à réajuster, juste en prenant en compte la résistance dont cet adolescent faisait preuve, et ce à son grand regret. De la rébellion, de la violence peut-être. Car si l’envie de posséder ce gamin le rongeait de l’intérieur, le besoin de lui faire comprendre pourquoi il était là primait sur toute chose. Andrea devait toucher du doigt, appréhender et comprendre le pourquoi du comment son cul était posé sur la banquette aux couleurs vives. C’était pour se défendre contre ses préjugés, c’était pour les combattre seul de toutes ses forces, comprendre leur caractère ridicule et les abandonner finalement, sur le bord du chemin de sa vie. C’était saisir le pitoyable que la lutte incarnait, l’inefficacité de toute tentative de s’appuyer sur ses règles, sur ses habitudes. Parce que dans ses propos filtraient sans nul doute ces mêmes idées toutes faites, témoignant de son refus partiel de la situation. Elio eut un sourire très légèrement condescendant, devant tant de naïveté. Si tous les clients qu’il recevait chaque soir ne manquaient pas de bêtise et de défaut, ils avaient pourtant au moins compris l’essence de la spontanéité et l’intérêt de la vie, qui n’étaient aucunement résumés à la passivité et à l’oubli. D’autant plus qu’admettre de lui-même qu’il n’avait rien à faire ici était passablement stupide, mais Elio avait l’habitude. Le rejet, le déni, l’attirance refoulée et l’envie inassouvie et inavouable. Un grand classique, qu’il fallait accompagner en douceur, ce qu’il entreprit de faire dans une simple réponse.

- Ce n’est pas tant la rencontre qui importe que le résultat de ce qu’elle vous apporte. Le plaisir d’avoir pu dire ou faire ce que vous voulez, sans aucune limite morale ou restriction sociétale. C’est d’avoir un endroit défini où l’on peut être qui l’on veut, soi-même ou quelqu’un d’autre. Sans avoir à se plier à autre chose qu’à ses propres envies.

Il ne comprendrait peut-être pas, mais Elio s’en fichait. Ce n’était pas par de jolies phrases qu’il comptait amener Andrea à comprendre. Déjà, il s’imaginait bien essayer de lui faire assimiler. Sans les mots qui ressurgissaient de vieilles habitudes de premier de la classe, sans tournures vides qui ne touchaient que moins bien les cœurs qu’une démonstration irréfutable et logique, soutenue par l’approbation d’un corps qui ne peut se soustraire à ses propres envies, aux limites inhérentes à sa condition.

Trop plongé dans ses propres ressentis, il était bien plus important de saisir cette douce chaleur qui se répandait dans toute sa poitrine pour irradier jusque chaque muscle de son visage. Tenter de garder près de soi l’enivrante mais éphémère sensation de satisfaction. Pour un détail peut-être, mais qui avait le mérite d’exister. Et c’est bien dommage qu’en cet instant, Andy ne se montre pas d’avantage tourné vers son délicieux barman, pourtant tout disposé à recevoir chaque invitation, chaque démonstration d’une timidité qu’il combattrait avec plaisir et empressement. Parce que le plaisir d’un hôte encore difficile à cerner aurait pu fortement contribuer à sa satisfaction personnelle, d’autant plus qu’Elio s’était juré de faire d’Andrea un autre homme, qu’il pourrait caresser de ses mains pressantes. Après tout, le jeune homme avait pour credo de se nourrir de l’apparent plaisir de ceux qui l’entouraient, parfois, pour un soir, afin de le ressentir à son tour. Rien n’était plus délicieux que de voir quelqu’un s’abandonner à vous et de le sentir partir avec élan et abandon sous la simple impulsion de votre corps. Et maintenant qu’il s’était mis cette idée en tête, Elio ne parvenait plus à se concentrer sur autre chose. Cette simple effervescence, cette tension dans le cœur au moment de pousser un peu plus loin le pari, ce banal jeu de séduction réveillait petit à petit de vieux défis, de vieilles résistances qu’il ne pouvait accepter. L’époque où ce pouvoir, cette puissance de frappe lui avait été refusée. Le passé dans lequel il n’était rien de plus qu’un perdant, bien incapable de dominer qui que ce fut sur un simple coup de tête. Le temps qui berçait ses sourires innocents.

Celui-ci l’était évidemment beaucoup moins. A la fois débarrassé de toute dimension profonde et habité par bien plus que la découverte, un geste ordinaire peut se charger de sens. Parce qu’il était évident qu’Andrea n’avait aucune notion de ce qu’il faisait. Parce qu’en sentant sa main capturée par des doigts à la fois hésitants et assurés, Elio faillit hausser les sourcils sous le coup de la surprise. Ne s’y attendant pas le moins du monde, il se laissa pourtant faire avec impatience, comme pour encourager le jeune homme en face de lui à laisser libre cours à ses impulsions et à ses prises de risque. Parce qu’un tel acte était souvent de son fait à lui et rarement engagé par un client un peu troublé, et qu’Elio découvrait l’égoïsme de se laisser, un instant seulement, guidé vers une promesse au goût sublimé en bouche. Imaginez qu’on vous fasse toujours vous sentir au service du bien être des gens, plié à leurs humeurs changeantes et spectateur de leur destinée. Même si c’était voulu, Elio était ainsi un messager du plaisir et le divulguait avant tout autour de lui. Triste échéance, dans laquelle il devait lui aussi trouver satisfaction pour ne pas s’abandonner. Puis tout d’un coup, quelqu’un vous prend par la main et vous jette au milieu d’eux. Au même rang, à la même place. Dans un univers où le cœur s’emballe, où les yeux scintillent, où les mots prennent du sens et font écho à quelque chose en vous. Quelque chose de profondément enfoui, d’oublié. Et bien en toute fatalité, il ne reste qu’une alternative : en avoir plus, toujours plus. Andrea avait choisi, par cette simple formalité, d’entraîner Elio là où il n’avait pas l’habitude d’aller, dans la provocation, le jeu et la contre-attaque avec quelqu'un de totalement étranger à son monde. Parfait, Andy, viens à moi. Et le pire, c’est que cela allait marcher. Du moins, si le barman ne craquait pas avant. Car cette lueur de défi à peine masquée dans les yeux de son client, ajoutée au geste plein d’audace de sa part le rendaient presque fou d’impatience. Le jeune homme dut même se mordre l’intérieur de la joue pour ne pas sauter immédiatement sur les lèvres qui le narguaient. Un peu rapide pour ce qui relève du tabou, de l’intime et de la morale.

Mais la morale n’était qu’une institution, et là-dessus Elio unirait très certainement beaucoup de monde dans la salle. Il était facile de porter un jugement de valeur, de condamner l’autre sans même se questionner soi-même. Il n’y a jamais de tout noir ou de tout blanc, alors la morale ne pouvait être qu’un lointain concept vers lequel tendre quand on a tout à perdre et qu’on a besoin à en crever d’un idéal. La morale, c’est surtout une grande mascarade où seuls les imbéciles trempent pour justifier leur ennui, leur peur de l’inconnu et du lâcher prise. La morale, c’est refuser de voir à quel point deux hommes se tournaient autour, l’un ayant cruellement envie de l’autre, ce dernier tentant de repousser les barrières que sa raison et son esprit lui mettaient en travers de la route. Et il était en train de gagner.

Andrea jouait. Il se glissait dans la peau de celui qui, rassuré de la présence humaine encore inhérente à l’établissement, se permet de faire trainer les choses en longueur. Mais il n’allait pas pouvoir se complaire bien longtemps dans ce rôle, puisqu’une fois qu’Elio l’aurait décidé, il pouvait, d’un signe de tête, faire partir les derniers consommateurs. Ils avaient l’habitude, d’autant que la plupart avait un jour où l’autre expérimenté la position d’Andy. Et ce dernier, se croyant à l’abri de toute attaque trop directe, se défendait et esquivait l’insistance d’Elio. Soit. Celui-ci se taisait alors, se contentant d’admirer le fruit de son travail disparaitre en quelques instants. Encore, encore il était avalé sans autre forme de procès et rien que cette vision, répétitive et immortelle, éveillait les sens du jeune homme. C’était injuste de paraitre à la fois si innocent et si dépravé, d’autant que l’imagination faisait beaucoup dans cette situation pourtant presque banale, si l’on avait été dans un autre bar que le Love’s out.

- Je ne suis pas encore un habitué du monde de la nuit. Mais j’apprends. Et vous, pourquoi avoir choisi ce métier ? Et pourquoi un bar avec un tel nom, un tel thème ?

Ah, il attaquait. Un coup d’estoc qu’Elio laissa passer un instant, peu sûr de pouvoir retenir ses mots sur un sujet qu’il connaissait aussi bien. Il voulait savoir, creuser la surface et explorer le fond des choses ? Soit, Elio lui en donnerait assez pour satisfaire sa curiosité et son besoin d’être rassasié, d’être sans doute pris pour quelqu’un de différent dans la mesure où il arracherait des informations sur un barman mystérieux qui préférait le sourire muet aux longs discours sur sa personne.

- Je me ferai un plaisir de vous y guider, si vous acceptez, bien entendu.

D’autant diront que l’éducation, ça se prend au berceau. Si l’on veut façonner la personnalité, l’avenir et même le destin de quelqu’un il faut s’y prendre très tôt. D’ores et déjà, les premiers mots appris refléteront un peu l’évolution que ce bambin criard et rougeaud aura. Si c’est « papa » ou « maman », bam, un complexe d’Œdipe sur le coin de la figure. Si c’est « manger », je vous laisse imaginer la priorité dans la vie. Les études, même si vous ne vous en doutiez pas. Parce que la bouffe, c’est la compensation du travail et le moteur de la réflexion. Si c’est « jouer », il faudra parier sur un homme restant très infantile, avec toujours cette idée de se gausser des autres tout en se pliant devant ses supérieures. Quelqu’un qui rentre dans le moule, quelqu’un qui se conforme à la hiérarchie et aux règles durement apprises dans son enfance. Et si c’est « tété », là encore je vous laisserai imaginer ... sans pièges. Y’a-t-il un moyen d’influencer ce premier son, de le maitriser pour en faire le premier d’une longue suite de réussites ou de déception ? Sans doute. Par la frustration, par l’envie et le désir d’une chose. Ce qui sort de la bouche d’un enfant est souvent l’expression la plus brute, la plus simple d’un besoin inconditionnel. Alors la meilleure façon de le lui faire dire, c’est de l’en priver avec délice et, disons-le, une certaine dose de perversion. Mais n’est-ce déjà pas au départ un comportement déviant que de vouloir manipuler un poupon du premier âge et en faire avec plaisir ce que l’on n’a pas réussi à être ?

Plus grand, c’est déjà plus facile. Parce que les enfants boivent les paroles des adultes savants, il n’y a qu’à voir comment certains arrivent à leur faire faire ce qu’ils veulent. Nombres de drames naissent de là, de l’envie de s’approprier l’enfant au lieu de le laisser partir. L’orienter à sa manière, parfois l’obliger à certains actes qu’un innocent ne devrait même pas connaitre. Le détruire, peu à peu, prendre possession de son âme et de sa pureté d’enfant. Le souiller. C’est parfois avec les meilleurs intentions du monde que l’on influence un esprit en incapacité de réfléchir, de s’ouvrir suffisamment sur le monde pour découvrir, émettre un avis propre, faire murir une idée. Parce que ces gosses s’amusent de peu et changent tout le temps de centre d’intérêt, parce qu’un gamin est fait pour l’instabilité, le risque, l’apprentissage par l’expérience et l’inconstance. Personne n’a le droit ni -normalement- le pouvoir humain de leur voler tout cela en les construisant dans un but égoïste. Comme ces mères qui enfantent pour combler un trou dans leur existence et pas seulement pour créer la vie, simplement, et accepter qu’elle se développe différemment de ce que l’on prévoit. Seule l’amoralité peut conduire à une telle déviance de l’enfance. Seule la haine de ce qui est différent peut amener au désir de contrôle d’une autre vie que la sienne. Seul le complexe d’infériorité profond peut aboutir à la volonté de faire sien, l’autre. En mieux.

Mais pour forger quelqu’un, il y a pléthores de facteurs extérieurs que l’on ne peut contrôler. L’influence des autres, de l’éducation extérieure. Les amis, les ennemis, les amours. Les sentiments de l’enfant le construisent bien plus que les idées qu’on peut lui mettre dans la tête, et seule l’interaction entre lui et l’extérieur pourra servir de base à ce qu’il va devenir et rester. Parce que les règles de la petite enfance, l’admiration d’un jeune âge, tout cela s’oublie et s’efface avec le temps pour ne plus rester que vagues souvenirs remplis de nostalgie. Ce qui laisse vraiment son empreinte, c’est soi-même. Les expériences que l’on fait, la force que l’on se découvre pour résister aux épreuves et aux déceptions. Celles-ci, tout comme les trahisons que nous réserve la vie, sont autant de conditions pour apprendre et évoluer. Il n’y a sans doute rien de mieux que les larmes douloureuses et le cœur serré pour barricader ses faiblesses et en faire des forces. Les déceptions rendent les bonnes surprises encore plus belles, les pleurs font d’un sourire ce qu’il y a de plus agréable à ressentir. Alors qu’un esprit heureux et comblé s’effondrera à la première difficulté une fois venu le terrible âge adulte, qui ne fait plus aucun cadeau sous prétexte de l’âge ou de la pitié que l’on accorde volontiers aux jeunes un peu capricieux. Bienvenue dans le monde réel, en somme. Celui qui révèle beaucoup de choses, celui qui en détruit d’autres. C’était dans ce monde-là qu’Aurelio avait perdu cette dénomination angélique, c’était dans cet univers peuplé de chimères, d’espoirs et de désillusions qu’il avait appris à hurler sa peine, puis à la faire taire à jamais. Et personne n’avait accès à cette partie secrète de son être, le traumatisme que tout le monde aura pu connaître, un grain de sable banal dans une existence qui explique alors beaucoup de choses.

Des choses qu’Elio refusait d’exprimer ainsi, puisque justifier son bonheur par la fuite et par l’ignorance revenait à accepter qu’il n’avait jamais eu accès à la plénitude qu’il croyait envahir son être à chaque respiration. Parce qu’expliquer son bonheur par l’envie de se détourner d’autre chose rabaissait tout ce qu’il était, tout ce qu’il avait fait pour devenir ainsi. L’obtention d’un tel degré de distance et de protection morale s’était faite à la sueur de son front, et personne n’avait le droit, en quelques mots, de briser cette vérité qu’Elio considérait à présent comme immuable. Comme parfois la tempête souffle tout sur son passage, la vérité n’était pas toujours bonne à prendre et il y avait des moments où seule l’action honteuse de fermer les paupières rapporte véritablement quelque chose.

- Parce que c’est un métier de liberté. Au Love’s out, les clients sont libérés de la plus grande attache de leur vie qu’est l’amour. C’est un peu comme si on leur collait brutalement deux paires d’ailes dans les omoplates avant de les pousser du haut d’une falaise pour leur apprendre à voler. Ils se démènent tant bien que mal, pataugeant souvent dans l’incompréhension, puis apprennent que seule la chute libre assumée permet d’enfin pouvoir voler.

Bordel, il avait presque l’air intelligent comme ça. Effrayant, un Elio qui paraissait dire autre chose que ce qu’il maitrisait. Mais à bien y réfléchir, son bar, il le maitrisait de fond en comble. Il en comprenait l’essence, la logique, les raisons de son existence et la beauté qu’il apportait au monde. En gros, c’était pour les gens qui trouvaient difficile de remonter la pente quand ils venaient d’eux même de se jeter à bas de la montagne, dans un délibéré espoir de se faire piétiner puis oublier. Tout ça parce qu’ils avaient changé d’avis quant à la morne existence de leur quotidien, et qu’en trouvant que le regard de l’autre ne compte finalement plus autant qu’ils ne l’avaient cru, certains comprennent que d’avoir sacrifié leur bien-être et leur spontanéité au nom du culte de l’apparence et des convenances était stupide. Mais c’était ça, se voiler la face. C’était ça, sa nouvelle religion et ce en quoi il croyait dur comme fer. L’éducation qu’il avait reçue n’était plus rien à ses yeux, seuls comptaient les quelques mois passés ici, près de Delia, couvé des meilleurs instincts d’apprentissage, des meilleures promesses de réussite. C’était ça, la vérité, et le premier mot prononcé par Elio à sa renaissance dans le monde de la nuit avait sans doute été « échappatoire ».

Puis, las de devoir ouvrir quelque peu la porte qui menait à la compréhension de sa personne, Elio eut un imperceptible hochement de tête en direction du comptoir. Invisible sauf pour ceux qui gardaient attention au manège du feu follet qui contrôlait ce bar et sa fermeture. Il était temps. Au revoir tout le monde, le théâtre descend ses rideaux, il est temps de vous en aller loin et de fermer précautionneusement derrière vous. Durant quelques minutes qui lui parurent interminables, Elio entendit les chaises racler le sol, et les deux couples qui demeuraient encore là malgré l’heure tardive se dirigèrent vers la sortie. Sortirent. Laissant deux hommes totalement seuls. Et si Elio faillit précipiter ce qui le brûlait de faire, il laissa le temps au temps et se contenta de se rapprocher également, tournant légèrement le visage afin de fixer ses grands yeux faussement interrogateurs dans ceux du jeune homme en face de lui. Leurs visages étaient proches, et pourtant si loin. Puis, tendant son bras Elio vint appuyer sa main contre le mur posté derrière Andrea, laissant ainsi sa peau à une infime distance de la joue du jeune homme. Ce n’était pas l’envie qui lui manquait de créer un effet miroir avec son deuxième membre, mais il ne souhaitait pas laisser l’impression qu’une cage de chair l’enserrait. Il restait une porte de sortie. Allait-il la prendre ? Sans doute pas. D’autant qu’Elio ne lui laisserait pas la franchir, étant parfaitement conscient de ce qu’il allait entreprendre dans quelques instants. Bientôt. Bientôt Andrea serait à lui, de quelque façon que ce soit. Il n’y avait pas d’autre issue possible, c’était illusoire de penser le contraire. A la fois libre et prisonnier de ses envies, Andrea appréhendait le concept du bar mieux que quiconque.


[Le prochain post, j'attaque :D Là j'ai pas voulu briser les dialogues donc je te laisse encore une réponse avant de croquer mon ptit Andy <3]
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Andrea Vitaly

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[Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] Vide
MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeSam 5 Fév - 17:39

Yeah maybe I fought.
One thought I was saved.
But all I wanna do is get off,
And feel it for a minute like the real thing baby, I guess.
I already forgot, what I thought I would say.
But all I wanna do is get off. I feel it, I feel it, I feel it babe.


Si je disais que tu ne m’impressionnais plus, ça serait totalement faux. Je voulais me persuader en voyant mon verre presque vide que l’alcool y était pour quelque chose. Moi-même j’avais peut être envie de t’impressionner. Tout cela n’était que de la pure provocation. Après tout, il ne s’était pas gêné lui, pour le faire depuis quelques semaines. Et j’avais enduré sans broncher, trop paralysé pour trouver une quelconque issue à ses attitudes démoniaques envers moi. Tout était trop bien dosé, ou presque, pour que je trouve réellement quelque chose à lui reprocher. Car tout ce qui se passait n’était quasiment qu’une affaire de ressenti et de non dits. Elio en mettait bien plus dans un regard, un cocktail, un sourire, un haussement d’épaule que dans des longs et lourds dialogues. Et dur était de constater que je n’étais pas à la hauteur. Pas avec lui. Mais le temps avait passé et tout était devenu un peu plus familier. Je ne pouvais pas dire qu’il était prévisible, mais j’anticipais mieux ses réactions. Je devinais mieux ce qu’il cherchait à faire qu’avant. Le problème demeurant que je ne savais toujours pas quoi faire pour y répondre. Je continuais coute que coute à venir en essayant de ne pas penser à la raison. Pourquoi aurait-il fallu une raison pour que je daigne aller dans un bar de ce genre ? De toute façon dès que l’on touchait ce sujet, j’étais devenu un expert de l’esquive. Sauf que ça ne marchait qu’à moitié avec Elio qui faisait mine de ne pas chercher le clash et le tête à tête. Mais tout dans ses mouvements montrait le contraire. C’était moi, sans que je le sache vraiment, qui décidais si oui ou non il pouvait aller plus loin.

Et puis quoi ? Trois semaines, un mois ? Ce n’était rien à l’échelle d’une vie. Mais c’était suffisant pour faire la connaissance de quelqu’un, pour essayer de le percer à jour, pour essayer de le comprendre, pour essayer de se comprendre. Comprendre pourquoi lui et lui seul avait réussi à modifier notre manière de faire et de parler. Pourquoi face à lui l’arrogance n’était plus de mise. Pourquoi lui et pas quelqu’un d’autre ? En trois semaines, en de plus en plus de discussions, en de multiples sous entendus baignés des meilleurs verres. Une atmosphère s’était créée. Et si je tempérais trop au départ, car je n’étais qu’un de ses clients, je sentais la méfiance s’endormir au fur et à mesure de mes visites, de mes discussions. Mon instinct qui savait toujours plus ou moins comment je pouvais m’en sortir le mieux s’était endormi, me laissant me débrouiller avec mon interlocuteur. Je ne rêvais pas, je n’inventais pas le fait qu’il était presque systématiquement avec moi chaque fois que je venais, je ne fabulais pas les attentions qui s’enchainaient. Ce n’était certainement pas ce que je voulais voir. C’était réel. Oui évidemment, c’était une technique de drague comme une autre. Mais merde, je n’avais pas encore envie de penser à ça. Après tout lui il ne se gênait pas pour ne pas y penser. C’était à se demander s’il pensait autrement que pour avoir quelqu’un dans son lit.
Enfin, il ne fallait pas se leurrer, c’était toujours agréable d’être le centre d’attention, même si c’était dans un seul but. Mais je prenais doucement conscience que mon inébranlable refus de le laisser s’approcher se fissurait de jours en jours. Que mon envie de m’accrocher à lui, de sentir ses bras autour de ma taille se réveillait, quitte à me rendre malade de penser une telle chose. Ouais un mec ouais. Et alors, en vivant avec Egeado, ce n’était même pas étonnant qu’il déteigne sur moi cet abruti. Cela dit je me prenais déjà suffisamment la tête avec tous mes autres problèmes, alors je n’allais pas en plus en rajouter avec ces problèmes de genre, j’avais mieux à gérer.

Mais après tant d’hésitation et d’innocence, un nouveau jeu venait de s’enclencher. Et j’étais électrisé par son enjeu. Sûrement qu’il n’était pas le même pour les deux partis. Mais peu importais. Parce que je m’étais réveillé. A force de cogiter et d’imaginer, de le voir partout, de croire reconnaitre une nuque et des cheveux bruns de dos dans la rue, à force de ne même pas réussir à en dormir correctement, à force de tourner et retourner chacune des soirées, chacun des mots qu’il avait pu m’adresser, je n’étais plus aussi démuni qu’au départ. Enfin j’avais assez de matière pour lui tenir tête. Il n’était plus le bel inconnu, et même si je ne pouvais me targuer de le connaitre, je le cernais suffisamment pour me permettre d’en arriver là. Oui au final, tout n’était pas rassurant, au final j’étais assez nu et dépourvu d’arme, mais tel que je me montrais à lui, ça se voyait moins. Et à montrer que je gagnais de l’assurance, j’en venais à en obtenir réellement. Le bout de mes doigts n’était plus gelé, mon cœur ne battait plus aussi fort, mon ventre se serrait moins. Même mon regard sur lui avait changé. Ce n’était plus de l’effroi mêlé de tellement d’autres sentiments, non, et il l’avait bien vu. C’était du défi et de la provocation. Je jouais délibérément avec le feu et avec lui. La question était de savoir si oui ou non j’arriverais à aller jusqu’au bout de mon jeu ou si j’allais me retirer avant la fin. Faire tapis ou se coucher ? Jusqu’où est-ce que je serais prêt à miser ? Car les enjeux de cette partie étaient loin d’être monétaire. Et je n’en étais que trop conscient. Et je le cherchais. Intentionnellement. Mais entre l’imaginaire et la réalité, à quel point la différence allait être flagrante ? Entre ce que je me croyais capable de faire ce que j’étais réellement, le gouffre était-il infranchissable ? Les désirs d’Elio resteraient-ils désirs ou allaient-ils être assouvis ? Comme des désirs personnels profondément cachés, qu’il avait réussi par un tour de passe passe à faire apparaitre ?

Mon verre était vide. Zut. Elio finissait sa phrase, vibrante d’arguments pour défendre sa position. J’esquissais un sourire un coin. Pour lui sûrement que ça marchait comme ça. Mais quand on venait d’une famille comme la mienne, on ne pouvait guère se permettre de faire quoi que ce soit qui jetterait un discrédit sur celle-ci. Alors je t’en donnerais moi, des conventions sociales. Qui ne me disait pas que dans ce bar quelqu’un savait qui j’étais ? Ce n’était pas de la paranoïa. C’était plausible vu que le Love’s Out n’était pas un bar de quartier miteux. Et tout le monde s’y croisait. Cela dit il y avait bien longtemps que je me fichais totalement de ce que pouvait penser le monde bourgeois de Milan à propos des Vitaly… Du moins jusqu’à une certaine mesure. Qu’on salisse le nom d’Egeado m’était indifférent, me mettait même en joie. Le nom de mes parents, ce n’était quand même pas du même acabit. Enfin, tout ça pour dire qu’il n’y en avait en effet qu’avec peu de personne que je pouvais m’affranchir de ces codes qui même si je les avais rejeté durant toute mon adolescence, étaient bien plus profondément ancrés en moi que je ne le croyais.
C’était un beau discours qu’il me fournissait là. Mais pas suffisant pour me convaincre. Pour lui c’était sûrement facile, pour moi, ça l’était beaucoup moins. Surtout que la plupart de mes rencontres se terminaient toujours plus ou moins mal. Si les gens ne pouvaient pas me sentir, je leur rendais bien la pareille.

Verre toujours vide. Re zut. C’était toujours pareil avec ces verres. Trop vite consommés, laissant l’alcool faire son office dans les veines de chacun. L’espace d’un instant je me pris à imaginer Elio éméché. Juste légèrement rouge, se tenant fermement à son bar, un air de défi interdisant quiconque de lui faire une remarque. Un air déterminé et pourtant toujours aussi séducteur… Je chassais bien vite cette pensée de mon cerveau, il divaguait bien trop en ce moment. L’avantage de ne pas avoir un verre, c’est que je n’eus pas à manquer une gorgée aux mots d’Elio.

- Je me ferai un plaisir de vous y guider, si vous acceptez, bien entendu.

J’avais beau avoir plus ou moins l’habitude, la façon si cash qu’il avait de dire des choses les plus anodines avec de tels sous entendus me laissait encore coi. Mais restes-y dans ta galère ! Je veux pas le savoir moi ! Menteuuuur. Andrea menteur. Oui bon, c’était relatif tout ça. Je n’avais pas envie de baisser ma garde et de le suivre dans cet antre de débauche qu’il se plaisait à imposer à tout l’établissement. Je n’avais pas envie et pourtant la curiosité me bouffait. Qu’est-ce que tu cachais derrière toi, derrière tes semblants, derrière cet escalier qui monte à l’étage, derrière de bar. Une fois la porte du Love’s Out poussé on était déjà totalement perdu et soumis à son influence. Comme un univers parallèle qui n’aurait de cesse de nous pousser dans nos derniers retranchements, qui voudrait nous mettre à nous, nous saigner puis nous laisser pantois, avec l’impression d’avoir fait quelque chose de mal, quelque chose d’irrémédiablement inscrit dans notre chaire, et l’envie dévorante d’y retourner pour goûter encore à cette sensation maudite.
Mais tout cela n’était que superstition et imaginaire. Je ne pouvais pas ressentir ça. Le Love’s Out m’avait peut être happé mais je pouvais sans mal m’en délivrer. Je ne lui avais rien donné. Ni au bar, ni a son barman. Je n’étais en rien attaché à cet univers et il ne suffisait que d’un semblant de volonté pour oublier tout ce qui avait pu s’y passer. A savoir pas grand-chose en fait. Tu ne m’auras pas Elio, je ne glisserais pas dans ton antre de la sorte, sans opposer de résistance, et si tu y croyais, tu te mettais le doigt dans l’œil. Il ne fallait pas confondre envie désir curiosité et provocation. Mais le fait de déjà se poser la question me prouvait que j’étais sur la mauvaise pente. Je savais que ce qui allait suivre était inéluctable et je ne faisais rien pour y échapper « La causalité »

- Je ne doute pas que vous y soyez… Comme un poisson dans l’eau.

Tu éludes la question Andrea. Probablement. Mais rien ne lui avait dit que ça serait facile. Mais s’il y a une nouvelle chose à laquelle je ne m’attendais pas, c’est bien la tirade avec laquelle il me répondit.
L’amour, une attache ? Probablement. Du moins pour ceux qui savaient ce que c’était. Malgré leurs chassés croisés, je savais que mes parents s’aimaient. Est-ce ça qui les avait perdu ? Je ne le savais pas encore, et je ne voulais pas y repenser pour le moment. Pas ce soir. Parce qu’ils étaient la seule vision de l’amour que je pouvais avoir. Et toi Elio, quelle vision de l’amour pourrais-tu bien avoir ? Pour avoir autant envie que ça que tout le monde soit dans tout cas et s’affranchisse ainsi de ce que peut être l’amour. Pourquoi veux-tu à tout prit toi-même fuir ce sentiment qu’est l’amour ? Qui toi t’as poussé de cette falaise ? Depuis es-tu en chute libre ? Tu es sûrement un Dieu dans ce bar, dans ce monde de la nuit. Mais le reste de temps, qui est-tu ? Et que caches-tu derrière tes grandes déclarations, tes preuves de flegme sur la vie ? Tu as sûrement deviné milles et une choses sur moi. Mais je m’approche lentement à mon tour de ton essence, et je meurs d’envie de savoir, meurs d’envie de deviner, de découvrir. Te fermeras-tu si je m’approche trop ? Comme je suis moi aussi tout à fait capable de le faire ? Elio secret, Elio discret. Elio figurant qui se figure qu’on ne voit pas quelle autre figuration il joue. Et c’est ça que tu veux me faire apprendre ? Et toi, en as-tu souffert ? Jusqu’à quel point pour vouloir faire connaitre la même chose à tes clients ? En n’ayant pas la même volonté qu’eux en poussant ce bar, serais-je plus apte à te comprendre ? Pour une fois que j’avais réellement envie d’en découvrir plus sur quelqu’un. Que je voulais passer outre le, les premiers jugements sur une personne. Mais après tout, cela me semblait des plus logiques de le voir ainsi. Elio, un simple désabusé de l’amour. Un gros chagrin d’amour qui a mené à une coquille pour rejeter toute forme sentimentaliste envers les autres. Est-ce aussi simple que ça de te découvrir ? Si c’est vrai, finalement, tu n’en valais pas vraiment la peine. Mais j’ai également le sentiment qu’il ne peut pas y avoir que ça. Elio le mystérieux ne saurait être réduit à une simple peine de cœur. Et j’étais prêt à parier qu’il y avait autre chose. Autre chose qui était bien plus délicat à découvrir. Mais c’était aussi mon cas. Ma réalité n’était pas celle qu’il percevait depuis le début, malgré ce que je pouvais lui en montrer. Le mystère n’était plus entier. Mais n’était-il au contraire pas en train de s’épaissir ?

- Et vous ? Depuis combien de temps êtes-vous en chute libre ?

Pas sûr qu’il me réponde d’ailleurs. Mais en tout cas, j’avais réussi à renverser la donne, à poser les questions au lieu de les accuser. Mais il se passa quelque chose que je n’avais guère prévu. Voir avec un certain effroi les dernières personnes quitter les lieux les uns après les autres, comme une mécanique bien huilée, comme après un signal. Un d’Elio ? Voulait-il couper court à la discussion ou pensait-il que le moment du tête à tête était arrivé ? Un vent d’angoisse souffla en moi. Mon visage affirmait la même assurance mais c’était tout mon être qui était ébranlé. Je ne m’attendais pas à ce que ça arrive si tôt, si soudainement. A vrai dire, j’aurais préféré continuer notre discussion, essayer de le cerner un peu plus. Mais tout se passait comme si il se sentait acculé et en danger. Et en se débarrassant des derniers gêneurs, alors que je lui avais dit que je ferais la fermeture, j’étais à présent à sa merci. Enfin devait-il se dire. Mon cœur cognait douloureusement dans ma poitrine. Ainsi, il me faisait bien plus peur qu’un certains Vargas dégainant son épée. Il ne fallut pas longtemps à Elio pour briser la distance conventionnel entre nous deux. Et son regard se fit bien plus profond que je n’étais capable de le supporter. Mon assurance s’effondra, mes yeux se firent fuyants mais je ne faiblis pas. Je ne reculais pas devant lui et le laissais venir. Rien. Pour l’instant il n’y avait encore rien, rien à craindre n’est-ce pas ? Sauf que je n’étais pas du tout sur de ce que j’avançais à cet instant. Car bientôt ce fut la main d’Elio qui se trouva proche de moi, contre le mur. Nouvelle envolée des battements de mon cœur, mais mon regard se fit de nouveau plus déterminé et je pus à nouveau le regarder dans les yeux. Je ne fuirais pas. Après tout, j’étais bien là pour ça non ? Pourquoi Andrea ?

Oui pourquoi ?

Ainsi ma tête se pencha légèrement, effleura les doigts d’Elio, revint en place. Ce n’était plus avec le feu que je jouais, c’était avec le diable. Je retins un sourire qui pourrait m’être préjudiciable. Je savais que lui n’allais pas se gêner. Le but, c’était de ne pas lui céder plus que je n’en avais l’intention.
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MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeDim 6 Fév - 12:05

Bien que cela ne se remarque absolument pas au premier coup d’œil, Elio était en plein combat. Acharné. Si, de l’extérieur, tout semblait aller parfaitement bien pour le barman, son esprit était en plein affrontement avec ses envies. On aurait presque pu imaginer son front humidifié par l’effort qu’il devait constamment entretenir, ses muscles tendus sous le coup de la pression écrasante qu’il s’infligeait en cet instant, et ses lèvres tordues en un rictus malmené par le désir de résister. Résister à la situation, au contexte, à ses habitudes. En temps normal, la soirée aurait été expédiée bien plus rapidement. A cette heure-ci, il serait peut-être même déjà en train de s’endormir, satisfait de son œuvre. Pas qu’Elio soit fatigué, non. Mais après ce qu’il avait souvent l’intention de faire après son service, on a souvent envie de dormir. Longtemps. Évidemment, à cet instant le jeune homme pensait à toute chose, n’importe quoi, excepté dormir. En réalité, il était à deux doigts de se réciter les déclinaisons de l’adjectif « patient », patiens en latin. Celui qui supporte, qui est endurant. Ah oui ça pour supporter, il supportait le Elio ! Il réprimait tout comportement qui aurait pu effaroucher le petit faon devant lui, se retenait de le saisir par les hanches pour le positionner contre lui. Enserrer sa taille d’un bras pressé, chercher aveuglément ses lèvres, partir à la conquête d’un corps qu’il n’avait que trop brièvement exploré le premier soir. Sentir une peau se réchauffer contre la sienne, faire virevolter des vêtements qui le privaient d’un spectacle sans nul doute délicieux. Mais il y avait mieux que ce corps qu’il imaginait d’ores et déjà tendu à l’extrême sous le sien, oui. La rougeur sur les joues d’Andrea, la gêne dans son regard, les gémissements qu’il avait pu lui offrir une fois et qu’Elio mourrait d’envie d’entendre à nouveau. La retenue, le désir, l’envie de s’exprimer et la peur de le faire. La chaleur, le souffle court, la gorge qui se tord, les paupières qui se ferment. Rien qu’à cette image, Elio dut raffermir sur son corps une discipline qu’il ne supportait que difficilement. En empêchant la moindre parcelle de son être de se rapprocher encore de cet adolescent qui jouait avec ce qui le dépassait, le jeune homme reniait en partie tout ce qui le définissait. Jamais encore il n’avait dû prendre autant de précautions, jamais il ne s’était senti aussi proche de la réussite, et en même temps de l’échec critique. Jamais il n’avait trouvé autant d’importance dans un comportement qu’il devait rendre adapté, qu’il devait contenir. Jamais.

D’où l’expérience du combat acharné contre lui-même, contre ses envies. D’où sa raison qui n’avait jamais été aussi présente, lui intimant le calme, lui intimant le respect et l’attente. Trois mots qu’il ne comprenait pourtant pas, trois mots qu’il se refusait à admettre comme acquis. C’était tellement stupide, dénué de sens. Pour le jeune homme, rester là à perdre son temps avait un caractère inutile flagrant. A la limite de l’idiotie, il forgeait des espoirs sur la seule inexpérience d’un gamin qu’il pensait pouvoir attirer à lui. C’était presque comme s’il s’était jeté à lui-même un défi d’une imbécilité rare, gagnant toutes ses précédentes tentatives. Oui, c’était ridicule que de même penser essayer. Et pourtant, depuis quelques semaines, Elio faisait passer ce même gosse avant les autres. Il préférait s’asseoir près de lui et jouer au gentil barman presque inoffensif plutôt que de se jeter avec impatience sur la première délicieuse créature qui passait par là. Plusieurs de ses clients lui avaient d’ailleurs fait la réflexion, Delia l’avait mis en garde. Mais en garde contre quoi ? Elle avait parlé d’amour. Ridicule, encore plus que son propre acharnement à s’approprier Andrea. Elle avait utilisé ce mot vide de tout sens en sa présence alors qu’elle savait tout de lui. Pour la première fois depuis longtemps, Elio avait sans doute ressenti de la déception. Et, s’il avait omis de l’identifier ainsi, c’était évident que quelque chose en lui s’était senti trahi par cette affirmation qui ne souffrait apparemment d’aucune réplique. Il n’avait d’ailleurs rien trouvé de mieux à répondre qu’en lui éclatant d’un rire gras au visage. Persuadé que c’était par l’impossibilité de la chose qu’il était demeuré muet, Elio ne pouvait même pas envisager ce mot, avec tout ce qu’il représentait. Les mots d’amour, les déclarations, les prises de tête, la jalousie, l’envie et la routine, c’était tout ce qu’il avait banni en rentrant ici. Tout ce à quoi sa vie actuelle s’opposait, tout ce qu’il avait abandonné sur le bord de la route, dans l’accident qui avait changé sa vie.

Alors pourquoi, pourquoi prenait-il autant de temps et de précautions pour Andrea plutôt que de le jeter dehors comme un malpropre, dans la mesure où il n’adhérait à rien de ce qui se trouvait ici ? Dans un premier temps, la réponse « par défi » avait longuement habité son esprit. Sauf que ... sauf que. On ne va pas jusqu’à étouffer ses envies, son désir brûlant et insatiable par défi. Du moins, pas Elio. Il n’était pas de ceux qui persévèrent juste pour avoir raison, qui font tout leur possible pour se prouver quelque chose qu’il n’était pas. Tenir tête à quelqu’un pour le principe, non merci. S’excuser, reconnaitre ses torts ne le dérangeait pas lorsqu’il était dans le faux et que c’était l’issue la plus évidente. Détourner le regard et mentir, jusqu’à tenter de renier tout ce qui le définissait, certainement pas. Ce n’était d’ailleurs pas pour lui qu’il utilisait le seul mensonge qu’il pratiquait. Celui qui enrobe, qui rassure, qui rend le monde meilleur plutôt que de l’assaillir un peu plus de mauvaises intentions.

Mentir, c’est tout de même avoir l’intention de tromper. Que ce soit pour le bien de l’autre, pour sa propre satisfaction, pour faire de la peine ou pour éviter d’en faire. Il faut être prêt à l’accepter. On peut être habité des meilleures intentions lorsque les mots surgissent, faux, déformant une vérité qui est pourtant toujours bonne à dire. Toujours ? L’humanité a besoin de vérité, mais elle a plus grand besoin encore du mensonge qui la flatte, la console, lui donne des espérances infinies. Sans le mensonge, elle périrait de désespoir et d’ennui. L’être humain est-il sensiblement pareil à la société qui le porte ? L’omission ou la claire intention de tromper sont-elles des choses aussi primaires et importantes qu’on peut le croire ? Chacun vit baigné de mensonges, tout le monde y puise une source de réconfort, de plaisir, une certaine forme de jouissance, même. Car la flatterie et le ton mielleux qui vous couvre des meilleurs compliments vont toujours de pairs, et s’installent avec une facilité déconcertante dans les habitudes d’un homme. Dans les habitudes d’Elio. Mais, dans tous les cas, pour la cible comme pour l’instigateur, cela devient un prérequis à toute relation, à tout contact. On ne peut plus imaginer la rencontre sans enjoliver un peu son image, sans en rajouter sur ses qualités tout en évitant de parler de ce qui pourrait décevoir l’autre. Et même chez Andrea, et même chez son barman. Parce qu’il y a un moment où l’on évite la question, où on la retourne. La socialisation n’est qu’un grand échiquier géant où chaque pièce doit se déplacer dans la direction qui l’arrange le plus, sans que ses adversaires en soient conscients. Avoir un coup d’avance, devancer les réactions de l’autre, contrer ses projets, deviner le bluff. La vie, c’est comme un grand jeu de stratégie. A qui mentir, quoi dire, comment bien se faire voir, tenter de percer la carapace de l’autre et apercevoir les faiblesses qu’il cache par trop de fioritures. Mentir, oui. Mais sans trop en faire.

La seule règle du mensonge est de le tenir jusqu’au bout, de ne jamais céder sous la pitié ou les remords, ne jamais regarder en arrière et y préférer une vérité qui fera d’autant plus mal qu’elle a été cachée. Souvent, c’est une couverture. Pour soi ou pour l’autre, peu importe tant que cela protège, enrobe, soulage. Le mensonge est une arme délicate qu’il faut apprendre à manier avec subtilité. A tout moment, elle peut être réduite en poussière par un seul mot de l’adversaire alors que le reste du temps, elle est inaltérable par l’habileté du bretteur. Se révéler trop, ne pas en dire assez. Les deux extrêmes conduisent au même cuisant échec, qui vous met hors-jeu et vous retire votre droit de participer. Identifié, les autres savent. Ils savent ce que vous vouliez cacher, et que vous avez tenté de le faire. Se remettre dans la course ne sert plus à rien, une fois éventée, la stratégie ne peut se redresser et laisse pantois et démuni un général abandonné de ses troupes. Mais l’illusion peut tenir. Elle peut avoir été élaborée avec tant de soin que rien ne peut la fendiller, ni même l’approcher. C’est le cas de ces mensonges que, finalement, personne ne veut élucider. Ceux qui arrangent tout le monde, qui permettent de ne pas réfléchir, de ne pas se poser de question. Qu’il soit de grande ampleur ou concernant une unique personne, ce type de mensonge facilite la vie des gens qui l’entourent, arrange le cadre dans lequel ils vivent. Comme par exemple les mensonges d’Elio. Celui de promettre d’aimer tout le monde. Il suffisait de de pas préciser que ce n’était que pour une nuit ou deux. Tout le monde le savait, personne n’en parlait, et malgré cet état de fait c’était un mensonge par omission. Mais on s’en fiche. Parce qu’il arrange, parce qu’il plait. Le voir se mentir à lui-même avait tant d’efficacité que cela pouvait convaincre tout le monde. Surtout que personne ne s’intéressait de savoir si son attitude était réelle, tant qu’elle le paraissait avec une superbe ressemblance. Les gens se fichent de savoir la vérité, ils lui préfèrent ce qui panse leurs blessures.

- Et vous ? Depuis combien de temps êtes-vous en chute libre ?

Ah, ça c’était une bonne question. Il était évident que le petit être en face de lui prenait de l’assurance, en répondant avec fermeté à ses affirmations, en ne le laissant pas un seul instant le questionner. Mais à vrai dire, le jeune homme se fichait de qui posait les questions, dans son bar. Il avait l’habitude de le faire pour démontrer à ses clients qu’il s’intéressait à eux. Et puis, souvent, on n’ose pas embêter le barman et quand enfin on l’ose, c’est que l’alcool a bien aidé. En effet, il était rare qu’Elio se voie interrogé de la sorte, mais s’il ne disait rien sur lui en temps normal c’est bien parce que personne ne demandait. C’est plus flatteur de s’intéresser aux consommateurs que de parler de soi en continu, d’autant que nombreux étaient ceux à venir ici car quelque chose les rendaient apte à s’enfoncer dans les tréfonds de l’amour immédiat. Une tristesse, souvent. Qu’ils étaient prêts à livrer au premier sourire rassurant et attentif qui passait prendre des nouvelles. Elio, encore Elio, toujours Elio. Qui savait tout de la vie de la plupart de ses réguliers, qui devait constamment retenir les prénoms des épouses, des maris, des enfants, pour demander des nouvelles lorsque la situation s’y prêtait. Mais également leurs préférences en alcool, en compagnons d’un soir que, souvent, le jeune homme devait solliciter et encourager. Bref, son esprit était rempli des informations personnelles des autres sans que grand monde ne cherche à se remplir la tête avec sa vie à lui. Qui n’avait rien d’intéressant, qui n’avait rien d’extraordinaire. On attendait de lui qu’il écoute, qu’il soit bon dans son métier et au lit. Pas qu’il se lamente sur sa condition ou son passé. Alors oui, c’était chose peu commune. Mais Elio n’avait rien à cacher depuis qu’il avait tourné la page. S’il répondit un peu à côté, ce n’était que pour renvoyer la balle à Andrea. Uniquement pour cela. Ceci-dit, il se permit un éclat de rire avant de livrer sa réponse. Un rire clair qui sonna un instant dans la pièce, amusé qu’il était par la pertinence pourtant aveugle de ce gamin qui devait très certainement utiliser sa tête à outrance.

- Je ne l’aurai jamais été assez tôt. Cette sensation de liberté totale, s’abandonner à ce que souhaite le plus l’homme ... N’est-ce pas aussi pour ça que vous êtes ici ?

Jeu, set et match pour Elio. Parce qu’il ne lui laissa pas le temps de répondre. Parce que ce fut à cet instant qu’il se rapprocha et qu’il ne laissa à Andrea que la possibilité de réfléchir. Ou pas, à ce qu’il se passait. La proximité de leurs corps, la distance infime qui séparait leurs visages, son bras frôlant son cou, la tension qu’il avait accumulée se faisant sentir dans un regard on ne peut plus sérieux. Fini de rire. C’était maintenant l’instant décisif, là où toute cette mascarade les avait menés depuis le premier jour, depuis le premier verre, depuis le premier regard échangé. Le barman sentait l’angoisse de son compagnon, buvant presque la peur qui étreignait son être mêlée, très certainement, à une impatience très mal assurée. Cet instant, avant que tout bascule, dura de longues minutes. Temps pendant lequel Elio eut tout loisir de laisser ses yeux courir sans aucune retenue sur les courbes du visage et du cou d’Andrea. Il ne cédait pas. Il n’était pas parti en courant, il était encore là. Comme une souris face à un gros chat, mais courageusement prêt à accepter les conséquences de ses actes incertains. Un instant, pourtant, Elio crut que le jeune garçon n’allait pouvoir tenir la tension qu’il était obligé de lui faire sentir pour ne pas lui mentir plus que de raison, plus que de nécessaire. Son regard peinait à assumer la situation, et l’on sentait son envie d’abandonner, de baisser les bras. Mais, et heureusement pour Elio, le jeune homme abordé dans la rue avait sa part de fierté, sa part de défi, de caractère que lui n’avait pas. S’il s’échappa une infime seconde à la question muette d’Elio, il finit par y répondre en venant planter deux yeux presque assurés dans le regard ravi du barman. Et là ...

Bordel. Comment ce gamin pouvait encore vouloir hésiter après cela ? Comment Elio était supposé résister à ça ? Ce ça, qui avait poussé Andrea à pencher son cou pour poser un très léger contact de sa bouche sur les doigts qui se trouvaient si près de son visage. A cet instant précis, Elio crut qu’il allait exploser. Trop de retenue, trop de tension inhabituelle, trop de raisonnement pour qu’il puisse tout à coup les laisser s’échapper sous ce seul impact. Il fallait absolument qu’il les laisse filer doucement, sans précipitation. Et pourtant, Dieu qu’il mourrait d’envie de saisir sa gorge pour déposer violemment ses lèvres contre les siennes. Il crevait d’envie de glisser sa main sous sa chemise, tandis qu’il dévorerait son cou et obligerait son corps à venir à lui. Pourtant, il ne fit rien de tout cela. Il inspira profondément, offrant une naissance de sourire seulement à son interlocuteur. Un très léger aperçu, qui pourtant avait bien plus d’impact et de signification que le large étirement de lèvres offert un peu plus tôt. Il y avait là-dedans tout le désir qu’il avait pour lui, toute l’envie qu’il contenait par souci de ne pas le voir partir à toutes jambes, tout le soulagement de se voir ouvrir une brèche, une seule. Celle-là lui suffirait, il n’irait pas chercher plus loin. Les doigts encore brûlant du chaste baiser déposé à leur surface, Elio posa sa deuxième main de l’autre côté du visage d’Andrea, le fixa un instant puis baissa le regard vers la bouche du tout jeune homme. Doucement, il l’observa puis s’en rapprocha, étreignant délicatement la lèvre inférieure d’Andrea, quelques mèches de sa chevelure sombre venant caresser le front de son dernier client. Le contact fut bref, le message fut pourtant clair. Plein d’autant de sensualité et d’invitation qu’il l’était de brièveté et de chasteté, Elio s’écarta bien vite et lança un regard de défi à son compagnon.

De ceux qui vous obligent à réagir, de ceux qui vous percent de fond en comble sans aucune hésitation, de ceux qui vous quémandent une spontanéité imminente. Puis, avant de se faire repousser, Elio décida de prendre les devants en se basant sur la fierté de ce jeune homme dont il cernait à peu près les principaux traits de caractère. Ainsi, il se lève, se retourne et se dirige d’un pas léger vers les escaliers. Crois, Andrea. Crois que cela ne voulait rien dire. Attaque, jette-toi sur moi et viens chercher toi-même ce que je veux. Il n’avait pas le choix, il allait venir. L’ironie était là toute entière : c’était par Andrea qu’allait venir tout ce qui se passerait par la suite. Elio n’avait fait que suivre une courte impulsion, et en n’ayant rien ajouté après ce baiser, en ayant fait le premier le mouvement de recul, il était certain que le jeune homme ne partirait pas sans rien faire. Et, tandis qu’il s’éloignait doucement de la banquette sur laquelle il avait laissé Andrea, un sourire ne put s’empêcher de naitre sur ses lèvres. Tout restait encore à faire, mais le plus dur était passé. Le plus dur était d’avoir pu recueillir le premier pas, le premier geste. Celui qui avait tout engagé. Celui d’Andrea.
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Andrea Vitaly

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MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeMar 22 Mar - 19:41

The future's in the air
I can feel it everywhere
Blowing with the wind of change


Il n’était plus temps de partir. Il n’était plus temps de fuir. J’avais eu mille et une occasions de le faire et je les avais toutes laissé passer les unes après les autres. Me disant en mon for intérieur « La prochaine fois » Oui à la prochaine occasion je partirais. Et le temps passait encore, le piège se refermait de plus en plus et intentionnellement je le laissais faire. La sortie n’était physiquement qu’à quelques mètres mais pourtant elle me semblait inatteignable à présent. Il était hors de question que je parte, mon orgueil me l’aurait refusé. Mille fois refusé. Qui est-ce que j’étais pour arriver au point critique et partir ? Personne. Alors il n’était pas envisageable de me lever comme si de rien n’était, de dire bonsoir et de partir en refermant la porte derrière moi. Rien que de l’imaginer j’étais à deux doigts d’exploser de rire. Moi, lâche ? Mais il ne manquait plus que ça. C’était certain qu’il avait remarqué ça et Elio en usait de façon à ce que je ne puisse pas lui échapper. A cet instant, même si j’avais décidé de partir sans demander mon reste, il ne l’aurait jamais permis. Il ne m’aurait jamais laissé faire.

Et il me le prouva assez rapidement. A peine j’eus baissé ma tête vers lui que sa deuxième main se plaça de l’autre côté. Ses lèvres s’approchèrent des miennes et j’eus le plus grand mal à me retenir une fois de plus de lui saisir son col de chemise pour qu’il vienne plus rapidement à moi. Mais il n’allait pas me faire ce plaisir. Pas maintenant, lui aussi pouvait se montrer extrêmement horripilant. Ses lèvres de posèrent sur ma lèvres inférieure, appuyant légèrement pour laisser une trace que je pouvais ressentir. Mais il se recula bien vite, laissant ce goût d’inachevé lancinant.

Gouffre entre ce que je me forçais à faire et ce que je pouvais accepter. Et ce fut bien malgré moi que je m’obligeais à voir rouge pour éviter de ressentir cette espèce d’envie de recommencer, cette frustration intense alors que j’avais accepté pour la première fois sans reculer ce baiser. Non je ne lui ferais pas ce plaisir ni cet honneur. Compte là-dessus et bois de l’eau Elio. Si tu crois avoir enfin gagné tu te trompes lourdement car jusqu’au bout je te donnerais du fil à retordre, je te montrerais que tu ne peux pas te jouer de moi comme des autres. Je te montrerais que je suis différent. Etait-ce vraiment de l’orgueil que de penser ça ? N’était-ce pas plutôt l’angoisse qu’une fois avoir craqué, je retournerais à l’anonymat le plus complet ? Elio ne se contenterait plus que de me servir des verres sans un regard, occupé à aller voir quelqu’un d’autre ? Pourquoi j’aurais peur de ça après tout ? On ne se devait rien lui et moi. Cependant il fallait bien avouer que ça pouvait avoir un côté frustrant d’avoir attendu toutes ces semaines, de s’être autant prit la tête pour au final ne se comporter que comme des inconnus. De toute façon rien n’était fait n’est-ce pas ?

Non. C’était faux, et je le savais. Je savais que c’était trop tard et que je ne faisais que retarder l’échéance, je savais aussi que c’était moi qui avais donné implicitement le feu vert avec le mouvement de tête que j’avais fait en direction de sa main. Il avait suivi sans vraiment suivre. Enfin c’était plutôt lui qui avait d’abord mit sa main près de moi. Mais je n’avais aucune obligation de rentrer dans son jeu… En fait le jeu était déjà enclenché depuis que j’avais poussé la porte du bar, donc on ne pouvait pas vraiment dire ça. Les choix que j’avais fait les uns après les autres m’avaient mené inextricablement à ce moment. Pouvais-je le considérer comme ma perte ? Non car si ça avait été le cas, je n’aurais pas tout fait pour y arriver. Je ne cherchais pas à me perdre, juste à assouvir une curiosité débordante, juste à être un peu plus proche de lui l’espace d’un instant. Je cherchais à retrouver cette sensation à mon réveil de cette première fois. Cette sensation de chaleur, d’étreinte, cette sensation différente de toutes les autres. Au final, il y avait plein de raisons, certaines plus avouables que d’autres qui me poussaient à aller toujours dans ce sens, dans son sens. Car malgré les multiples détours que j’avais fais, on en arrivait quand même au point qu’Elio avait voulu depuis le début. Mais les détours ne sont pas inutiles. Ils m’ont appris quantités de choses sur lui, sur moi, j’avais changé et c’était changé que j’allais affronter ce qui m’attendais. Le seul hic, c’était que je ne savais pas ce que c’était.

Enfin… Ce n’était que des réflexions dignes d’un gamin. Je n’étais pas si ignorant de la vie que ça. Mais je m’y connaissais plus en fille garçon qu’en garçon garçon et puis je n’arrivais pas à aller plus loin dans l’imaginaire que ce qu’on avait déjà fait. A savoir pas grand-chose à part ces multiples sous entendus et tout ce qui avait été effleuré. Bref autant dire que je pouvais m’attendre à tout. Et à réfléchir à ça, monter là haut sonnait un peu comme un glas funeste. Dans quoi j’allais m’engager ? Mais comme je l’avais déjà dit, il était à présent trop tard et seul me restait ma certitude bancale de si ça allait trop loin, je pouvais toujours partir et ne plus jamais revenir, au diable ce que je pensais. Quel doux espoir je caressais encore là. Infantile. Et je ne voulais plus que ça me colle à la peau. Le problème c’était que je ne choisissais guère.

D’ailleurs il n’avait pas l’intention de me laisser m’en tirer à si bon compte. Alors que j’étais resté assis sans bouger sur le canapé, le cœur palpitant, ce qui devait arriver arriva. Au moment où je croisais son regard, juste après avoir osé après ce rapprochement, je n’y lu qu’une immense lueur de défi qui m’électrisa. Je serrais les poings. Ah oui il la jouait vraiment comme ça ? Comme si de rien n’était mais avec cet air supérieur de « t’es pas cap de venir me rejoindre ». Ce n’était que de la pure provocation, je le savais pertinemment. Mais j’avais signé et Elio s’assurait que je n’allais pas revenir sur mes pas. Pas maintenant. Le jeu n’était pas terminé mais on s’approchait néanmoins doucement du dénouement. Mon sang ne fit qu’un tour alors que je me levais assez brusquement pour avancer d’un pas décidé à la suite d’Elio sans plus prendre le temps de cogiter. Tu me cherches, tu vas me trouver. De quel droit après tout tu fais ça puis tu te casses ? Comme si tu pouvais me laisser sur le carreau ! Oui être en colère était le bon moyen de cacher ma confusion vis-à-vis de ce qu’il venait de faire. D’accord il savait me manipuler. Mais ce n’était plus totalement de la manipulation quand on le savait. Elio tu me paieras tout ce que tu fais ! Quitte à embrasser, fait le vraiment et pas de façon aussi légère et frivole ! Si tu veux que je vienne, ne t’attend pas à ce que ça soit de bonne grâce et avec facilité. Jusqu’au bout je n’en verrais voir de toutes les couleurs. Pour que tu te souviennes que ça ne fut jamais facile. Heureusement que je n’avais pas bu un verre de plus, ça aurait été assez tragique je suppose dans mon comportement qui déjà dépassait ce que j’avais l’habitude de faire.

Je lui attrapais l’épaule, le stoppant dans son élan pour le retourner face à moi, les sourcils froncés.

- Tu fais quoi là ?

Toute mon attitude n’était que mensonge et je ne trompais personne, surtout pas Elio. Je n’étais pas en colère, pas contre lui. J’étais juste en colère de sa manie de s’amuser comme ça. La même que j’avais. Je savais que ça pouvait frustrer ce que je faisais. Je savais, nous savions tous les deux maintenant. Mais il était hors de question que je l’en laisse s’en tirer à si bon compte. Ce n’était pas le regard noir et offusqué que j’avais pu avoir tellement de fois auparavant. C’était d’une tout autre nature. Celui qui veut dire « Arrête de te foutre de ma gueule ». Il fallait que je me calme, il fallait absolument que je me calme car je perdais une fois de plus le contrôle, peut être que finalement, j’ai déjà trop bu. Ca me faisait une belle jambe de tout mettre sur le dos de l’alcool mais ça me permettait de me dédouaner de ce qui était en train de se passer. Même si j’essayais de temporiser, Elio était en train de gagner haut la main. Car d’un point de vu extérieur, c’était moi qui m’étais levé, qui l’avait suivi. Ce n’était pas l’inverse. Il avait réussi quelque chose qui me semblait véritablement impossible il y avait encore une semaine de cela. Au lieu de me courir après, il avait semé ses graines et récoltait son travail. Après avoir joué sur mon caractère, mon orgueil, mes sentiments, il avait réussi à me faire le suivre. Et je m’en voulais, je m’en voulais tellement que j’aurais été presque à deux doigts de lui en coller une. C’était à pleurer de se faire manipuler de la sorte de A à Z. Je pensais presque avoir réussi à mener l’espace d’un instant la danse. Mais il s’était mit en retrait pour mieux réussir plus tard. Et il n’était plus temps de regretter car je ne pouvais plus me soustraire de l’embarras dans lequel je m’étais moi-même mit. Avant sûrement, mais pas là alors que j’avais fait le premier pas. Ce pas qu’Elio attendait tant.

Il y avait des raisons de s’en vouloir oui. J’étais fautif mais la blessure dans mon mépris me semblait à l’instant bien secondaire. Parce qu’autre chose s’éveillait en moi alors que je tenais toujours son épaule, le foudroyant du regard. Bordel. Au lieu de penser des choses méchantes que j’aurais pu lui envoyer en pleine tête, je pensais à ses mains, à ses lèvres, à ses yeux, à son torse. Putain il fallait bien avouer qu’il avait réussi dans les grandes largeurs. J’osais juste espérer qu’il ne se rende pas compte à quel point tout avait fonctionné comme il le voulait. La seule zone d’ombre, c’était pourquoi il avait prit autant son temps. Lui qui pouvait sans problème mettre n’importe qui dans son lit, quand il voulait, voila qu’il s’en était prit à moi qui lui refusait tout bonnement juste de s’approcher. Enfin, il fallait croire que c’était l’attrait du défi, de la nouveauté, de la résistance. Ce n’était que ça qui avait fait qu’il ne m’avait pas laissé tomber quand il avait vu que je ne marchais pas. Il avait voulu me faire craquer. Et ça avait marché. Moi qui ne pouvais pas y croire. Enfin il ne me restait plus qu’à essayer de lui faire comprendre que ce n’était pas que ça. Que je ne voulais pas être réduit à ça. On n’avait pas finit de discuter. Je voulais en savoir plus sur lui alors il était hors de question qu’une fois ce petit jeu terminé il ne reste plus rien des dernière semaines.
J’étais sûrement en train de faire une grosse bêtise mais qui ça pouvait bien déranger ? Hormis moi, le principal intéressé. Personne ne savait que j’étais là. Je n’avais de compte à rendre à personne. Je n’avais pas d’amis qui pouvaient s’inquiéter de l’endroit dans lequel j’étais tombé. Je n’avais pas d’autorité pour me dire de rentrer à telle heure et de me coucher. Non je faisais ce que je voulais, quand je voulais. Et personne ne saurait jamais à quel point je m’étais fait mener par le bout du nez par ce barman aux yeux perçants, au sourire enjôleur et aux cocktails divins.
Mais ni l’un ni l’autre n’avait encore dit son dernier mot.
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Aurelio Pastore

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[Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] Vide
MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeJeu 24 Mar - 9:24

On imagine assez mal comment cela fait quand on se retrouve derrière les barreaux. L’oppression de l’autorité, la promiscuité des autres, les règles très strictes qui vous bardent d’injonctions et de limites. Aucune échappatoire, l’obligation de vivre collé à des étrangers sans pouvoir s’en détacher. Comme si on vous plongeait dans une fosse glaciale où il faudrait vous frayer un passage vers les meilleures places, celles où suffisamment de chaleur humaine irradie pour vous protéger, laissant les autres crever. Sauf que là-bas, ce n’est pas forcément l’humanité que l’on cherche. C’est le pouvoir, celui de corrompre, celui de plaire, celui de menacer. Pour tirer son épingle du jeu et avoir ne serait-ce que l’illusion de dominer un monde en modèle réduit, on ferait parfois n’importe quoi. Et puis il y a ceux qui subissent sans rien dire les assauts de leurs congénères, ceux qui se font arnaquer sans pitié, ceux qui sont incapable de dire non ou de chercher à prendre, à leur tour, une parcelle de pouvoir. Ce lieu est un endroit dans lequel il faut abandonner encore plus d’humanité que lorsqu’on y est entré. Car ce n’est que chose pour faire plaisir aux gardiens, inutile pour s’imposer ou se préserver. Mettre sa vie entre parenthèse, oublier quelques mois ou années qui l’on est et peut-être passer de brebis malchanceuse au loup le plus féroce. Ou passer de la brute sanguinaire à l’impitoyable terreur de ce huis-clos dévastateur. C’était le cheminement d’Elio, qui trop longtemps avait été prisonnier de ses cauchemars et vieux démons revenus le hanter sur son terrain de survie. De la soumission il était passé au rang de Dieu dans cet établissement où les règles humaines n’ont plus leur place. Où la chaleur humaine est la première raison d’être. Elio avait acquis ici la force de corrompre d’un regard, de guider d’un sourire et de soumettre d’un baiser. Un rituel bien huilé qui ne souffrait d’aucune résistance, d’aucune entorse.

Sauf pour Andrea, qui sortait de sa ligne habituelle de conquêtes, qui refusait de se plier à la supériorité manifeste du barman sur sa triste petite existence qui avait besoin d’être bousculée, remaniée. Le piment de la vie ne tenait parfois qu’à une rencontre totalement hasardeuse dans la rue, et peu à peu Elio avait compris comment agir avec lui, comment l’approcher pour qu’il en soit à deux doigts de fuir sans pour autant le faire. Le laisser sur le fil, perché sur une corde raide et au final, l’obliger à tomber d’un côté ou de l’autre. Pile, tu repars tranquillement au chaud dans ton appart confortable ou ta villa de snobinard. Face, tu montes ces escaliers et tu t’offres enfin à tes désirs évidents. Car si Elio s’était beaucoup attardé sur sa frustration, sa retenue et sa capacité à ne pas céder aux avances muettes de son jeune compagnon, il avait senti à demi-mot ce qu’il se passait sous le crâne de ce petit monsieur bien propre sur lui. La peur, la fierté, la colère. Sans doute les trois mots qui définissaient le mieux l’acharnement d’Andy, et également le temps presque record qu’il prenait avant de céder. Néanmoins, malgré cette vague idée de la puissance de l’ego d’Andrea et de ce qu’il devait se prouver à lui-même, Elio restait quelque peu surpris : qu’est-ce qui, véritablement, avait permis cette situation ? Car au début, le challenge était loin d’être gagné et, pire, le barman avait eu pour la première fois l’impression de foncer dans le mur. Parfois déjà il avait eu à faire à des réfractaires, plus timides que véritablement opposants. Et son calme ainsi que la confiance qu’il instaurait aux gens de façon immédiate avaient joués en sa faveur. Rapidement, tous et toutes tombaient les uns après les autres, sans jamais tenter de le repousser ou de lui dire non.

Andrea lui avait dit non. De nombreuses fois, quand il venait le soir dans le bar sans montrer la moindre ouverture réellement exploitable, sans montrer cette aura d’acceptation qui soudainement se dégageait de ses clients habituels. Et pourtant, Elio s’était comporté comme à l’ordinaire, avec simplement un peu plus de patience. Alors quoi, est-ce que le petit jeune avait besoin de se prouver quelque chose ? C’est souvent Elio que l’on soupçonnait de se servir des clients pour passer un bon moment, mais au final n’était-ce pas totalement l’inverse ? Le jeune homme pouvait très bien aller chercher quelqu’un ailleurs, pouvait faire tomber la plus prude jeune fille de bonne famille dans ses filets de séducteur. Et pourtant, il se cantonnait à n’offrir ses charmes qu’aux consommateurs du Love’s out. C’était lui aussi une marchandise, lui aussi un service compris dans les prix de la carte des cocktails. Ses sourires étaient vendus plutôt qu’offerts, son intérêt feint délicatement glissé pour accroitre les commandes. Alors Andrea était-il lui aussi comme tous les autres ? A vouloir s’approprier le beau serveur mais, au final, seulement pour se prouver quelque chose et dépasser certaines limites qui l’entravait dans son morne quotidien ? Sans doute. N’était pas dominateur celui qu’on croit, et Elio était persuadé que la seule motivation qui avait poussé Andy en avant était ce désir de posséder un temps celui que tout le monde s’arrachait ici, comme une fierté d’y être parvenu. Quoi d’autre, après tout ? On ne va pas se jeter dans l’inconnu, on ne recule pas perpétuellement devant le précipice pour ensuite y sauter si ce n’est pour se féliciter de l’avoir fait. Ce genre de gestes stupides qui n’ont de valeur qu’à la hauteur du courage qu’ils ont demandé.

Alors qui était le plus prisonnier de l’autre, en cet instant où la soirée basculait dans la nuit ? Le manipulateur qui ne le faisait que pour accompagner sa victime là où elle-même voulait aller, ou bien cette même victime qui se servait de sa faiblesse et de son déni pour obliger son compagnon à l’entrainer à sa suite ? Bien sûr, Elio avait des envies, et depuis quelques jours déjà il soupirait souvent à l’égard de son imagination qui lui laissait apercevoir ce qu’Andy pouvait lui offrir, mais au final sa frustration aurait pu être apaisée, contrôlée par un ou une autre. Limitée à sa plus simple expression en attendant, peut-être un jour, la libération. Il aurait pu alors passer son chemin, et l’aurait sans doute fait si Andrea n’avait pas été un de ses clients. Elio avait su deviner que l’aboutissement que son esprit lui suggérait était une envie partagée, et donc il mettait tout en œuvre jusqu’à sa patience pour exaucer le désir de son maintenant habitué. Quelle dévotion ! Et rigole qui voudra, il n’empêche que cette logique est véritable, qu’Elio ne donne que ce qu’il sait que l’autre souhaite, force uniquement pour réveiller l’envie profonde et ne transgresse jamais les défenses adverses. Il est tel le gardien de prison qui viendrait ouvrir la cage après avoir cherché si l’aliéné souhaite bel et bien cette libération qui implique tant de choses. Les cages.

On y trouve de tout, et pourtant tous ceux qui s’y trouvent ont un point commun qu’ils ne s’avouent pas et dont il n’est pas possible de parler sans en subir les représailles violentes des autres pauvres hères. On ne parle pas de liberté. On ne la pense pas, on ne met aucun mot dessus. Parce que c’est leur seul point faible, de savoir que leur monde dominé -certes par eux- n’est que factice. Que cette société où ils ont de la force et de l’autorité est soumise à toutes les autres, qu’elle est en marge de tout. Plus bas que terre, ils sont ramenés à l’état de rumeurs de décadence ou d’adultère, de compromission ou de luxure. Dehors, ils n’ont plus rien. Alors il faut jouir de cette impression de vivre, de ce mirage confortable, sans le briser par un simple terme trop douloureux. Ce serait comme leur rappeler les liens imaginaires qui les attachent à ces murs infranchissables, les assommer de l’horrible vérité que tout ce qu’ils construisent tant bien que mal pour ne pas se perdre ne représente rien. Que ceux qu’ils haïssent et descendent constamment sont les seuls êtres humains qui leur parleront. Que leur commerce est plus surveillé et ridicule que celui de leurs enfants, dehors, en cour de récréation. Ils n’ont aucune liberté, et seuls les barreaux à leurs fenêtres le leur rappellent tous les soirs. La liberté est ici, dans cette pièce, et dehors ce n’est qu’un jeu d’échec soumis à des règles despotiques. Triste vérité.

Alors que le bruit de quelqu’un qui se lève se faisait entendre dans son dos, Elio continuait d’avancer sans ralentir ni montrer le moindre signe d’hésitation vers les escaliers. Les premières marches témoignaient déjà du grand nombre de fois que ce bois avait été foulé par le passé. Les bords, érodés et plus clairs que le centre, s’arrondissaient sous l’effet du temps et paraissaient presque plus avenants. La pente était faible, et l’escalier tournait légèrement de façon à ce que personne ne voie, en restant en bas, ce qu’il se passait là-haut, sur le palier des chambres. Mais Elio remarquait un détail qui ne lui était pas inconnu de là où il était. Sur la rampe qui longeait le mur et accompagnait les visiteurs tout au long de leur ascension était accroché un bout d’élastique, qui se fondait dans la couleur du bois poli qui le soutenait. Cela ne signifiait qu’une chose : Delia, ce soir, n’était pas accompagnée. Et cela tombait très bien puisqu’à cet instant il aurait été stupide pour Elio de faire un détour par la porte d’entrée pour la refermer à double tour comme tous les soirs. Avec Andrea, cela casserait sans doute l’ambiance électrique qu’il avait instauré sous le crâne du jeune homme et il était alors hors de question de se détacher du plan qui germait dans son esprit pour l’accompagner à son but, tout en prenant en compte la colère, la frustration et l’état de perdition dans lequel son compagnon de la soirée devait se trouver. Et Elio savait que ce soir il pourrait compter sur sa chère patronne pour fermer le bar. Elle redescendrait en l’entendant monter d’un pas plus lourd qu’à l’ordinaire, car accompagné. Delia savait bien que dans ses moments-là, son serveur n’allait pas ménager sa proie et les bruits l’empêcheraient sans doute de s’endormir immédiatement, elle qui avait l’ouïe si fine à force de tout entendre, de tout savoir.

C’est au moment où notre grand garçon aux cheveux sombres posait son pied sur la première marche qu’il sentit enfin la résistance tant désirée. Une main se posait sur son épaule, et il devinait Andrea en train de lever le bras pour atteindre le sien, placé plus haut du fait de leur différence de taille. Se laissant bien volontiers retourner par une petite boule de nerfs qui affichait alors un air contrarié et colérique, Elio tenta de demeurer impassible devant les sourcils froncés et l’air revêche qui lui faisaient face. Son visage arborait alors un air neutre, très légèrement surpris peut-être d’être si violemment interpellé.

- Tu fais quoi là ?

Elio aurait pu avoir de bien nombreuses réponses à cette question, selon la personne qui la posait. Il aurait pu jouer le séducteur, le gentil, l’étonné, le provocateur ou tout simplement la carte de la franchise déstabilisante. Qu’il avait bien envie d’utiliser, d’ailleurs. Rien que pour voir le visage d’Andy se décomposer s’il lui annonçait qu’il l’avait embrassé avant de le laisser venir recommencer de lui-même, simplement dans le but de le faire jouir un certain nombre de fois toute la nuit durant entre ses draps. Mais, et bien malheureusement pour lui, ce n’était sans doute pas le meilleur moyen d’arriver à ses fins, loin de là. Alors il se contenta de quelque chose de plus abordable, un peu mystérieux et très frustrant. Histoire de le renvoyer à quelque chose qui allait peut-être tout faire basculer, d’un côté ou de l’autre. Son dernier atout verbal avant de passer aux choses sérieuses, sa dernière pirouette faite de mots qui pourrait sceller cette soirée d’une heureuse manière.

- Tu ne disais pas ça, il y a deux semaines, quand tu as commencé ce petit jeu ...

A peine eut-il le temps de prononcer sa réplique qu’Elio sentit le coup venir. Il savait que le résultat serait à peu près de cet acabit, pourtant il ne pensait pas Andrea capable de réagir de la sorte, avec autant de fougue. Plus la vérité faisait mal, plus la réaction était à hauteur ? Intéressant. Le barman se serait bien amusé alors à lui détailler tout ce qu’ils avaient fait il y avait de cela deux semaines, tout ce qu’il avait apparemment oublié. Mais un simple sous-entendu avait sans doute eu plus d’impact, puisque le regard en face de lui se durcit encore et que la main d’Andrea décolla, pour venir filer en direction de la joue de son interlocuteur quelques secondes après qu’Elio l’ait remarquée. Dans un réflexe qui montrait bien que ce genre de sévices lui avait souvent été offert par une femme jalouse ou un mari en colère, le jeune homme intercepta la gifle qui lui était destinée. Se saisissant du poignet d’Andy, il le stoppa à quelques centimètres seulement de son visage et le regarda d’un air presque désolé. Avant de resserrer doucement sa prise tout en caressant très légèrement et d’un signe presque provocant la peau du dessus de sa main, laissant son pouce effleurer le revers de la paume qui voulait auparavant le frapper.

- Alors, on n’assume pas ?

Si la suite promettait d’être tout aussi colérique que cette tentative de l’emmener plus loin, Elio savait bien que c’était une étape nécessaire à l’ego, à la fierté et aux valeurs d’Andy pour baisser les armes et accepter de se rendre. Il devait lui laisser le temps de l’énervement avant qu’il n’accepte vraiment de se jeter à corps perdu dans quelque chose qu’il avait si longtemps évité, se rattrapant à la gentillesse peu pressante de son compagnon. Mais l’attente était terminée, Elio en avait assez et il se délectait de voir cette rage se transformer en envie. Ce moment où la lueur dans les deux prunelles qui lui faisaient face allait basculer, se transformer en quelque chose de moins agressif et de plus évident. Les yeux d’Elio, eux, ne posaient qu’une question en cet instant. Une seule et ultime question, qui semblait à la fois facile à comprendre et extrêmement complexe. Une interrogation qui n’attendait pas un seul mot, juste un geste prouvant l’accord du gosse pétrifié qui faisait à présent face aux escaliers, Elio leur tournant le dos. Une unique question :
« Voulez-vous coucher avec moi ce soir ? »
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Andrea Vitaly

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MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeJeu 24 Mar - 13:43

As you know there's always good and evil
Make your choice don't be blind
Open up your mind and don't be trivial
There's a whole new world to find

Make it real not fantasy


Ma question n’était que rhétorique. Sérieusement, qu’aurait-il pu répondre à ça ? La vérité ? Qu’aurais-je voulu qu’il réponde à ça ? Un mensonge ? Je me doutais plutôt de ce qu’il avait fait. Mais c’était sorti tout seul à vrai dire je n’avais pas mesuré mes paroles. J’étais en colère et c’était une raison suffisante. C’est vrai ça, j’avais bien envie de lui lancer à la tête tout ce que je pensais de lui et de son petit manège. Mais ça aurait été peine perdu vu que je savais très bien ce qu’il aurait pu me répondre en retour. L’un comme l’autre faisait tourner la roue. Mais ce n’était pas chacun son tour, il n’y avait pas de règle précise et tous les coups étaient permis. Même les plus bas. Mais on ne s’abaissait pas à ça. Evidemment que tout n’était pas calculé comme sur du papier à musique et il y avait eu pas mal de contretemps mais l’issue était la même. J’étais devant lui, en train de lui serrer l’épaule alors qu’il me regardait le plus paisiblement possible, étant quasiment sûr que j’allais le suivre. Bien sûr que je n’allais pas rester sans rien faire, ça aurait été le comble du ridicule. Il n’empêchait que tout allait se jouer là. Jouer étant le mot principal.

Sauf que nous n’avions pas forcément les mêmes notions de jeu. Le caractère était en jeu. Car par définition le jeu était synonyme de divertissement et il était sûr de dire que nous ne nous amusions pas de la même manière. Il devait prendre son pied à faire tomber dans ses filets le premier mignon qui lui passait tout le nez. Enfin, sans me faire de compliment, mais je doutais qu’il se soit intéressé à moi si j’avais été moche comme un pour mais passons. Je l’imaginais très bien se faire des plans, des films dans sa tête. Lui qui aborde un inconnu qui lui plait bien, qui commence à le draguer dans un premier temps, puis à le séduire. Ce qui à mon sens étaient deux choses bien distinctes. Si tout se passe bien, tout est conclu en un soir. Autant dire pas très amusant. Et puis il y avait de ceux qui demandaient plus de temps, plus de réflexion pour les approcher. Mais qui finissaient quand même irrémédiablement par tomber. Il fallait croire que j’en faisais parti. Mais une fois, de plus, il était hors de question qu’il ne me voit que comme ça et j’avais bien l’intention de le marquer suffisamment pour qu’il m’oublie aussi vite. Il y avait encore à faire, encore à dire. Tu as dit que tu me montrerais la nuit. Je te suivrais et je n’avais pas l’intention de le lâcher comme ça. J’étais là pour ça au départ. Pour sortir de ce carcan qui finissait par me rendre dingue. Je n’avais aucune intention de me foutre en l’air, car ce n’était pas ça pour délire dans la vie. Le jeu de se foutre un nombre de substance incalculable dans le bras, dans la bouche, dans le nez. Voila ce qu’étaient des lâches. Mais si ça les amusait. De planer, de rire, de déprimer, d’oublier un peu leur vie de merde. Je ne comptais pas en arriver là. J’étais bien au dessus.

Mais mes divertissements à moi étaient loin d’être candides. Ce que je faisais était illégal. Ca l’avait toujours été. Et je savais qu’il en était de même pour ma famille, pour une grande partie des familles bourgeoises de Milan d’ailleurs. Mais c’était une autre histoire. Moi mon domaine, c’était le cyberespace. Et mon plus grand plaisir était de le décoder, d’en découvrir les mécanismes, les portes dérobées, de les enfoncer et d’y découvrir ce qu’on cherche à tout prix à y cacher derrière. Moi je voulais savoir. Je voulais deviner, apprendre, comprendre. Mais surtout savoir. Les gens ne sont intéressants que parce qu’ils ont quelque chose à cacher. La personne blanche comme neige ne peut être d’un quelconque intérêt. Et moi je m’amusais au plus au point à trouver ce qui n’allait pas. Autant chez les personnes que je connaissais que celles que je ne connaissais pas. Mais aussi sur les lieux, sur les secrets du gouvernement, sur ces choses qu’on fait tout pour ne pas que ça soit rendu public. Ces choses tellement terrifiantes que parfois, il valait mieux les laisser où elles étaient. C’était évidemment le cas de la lune rouge. Mais aussi celui de mon oncle. J’aurais pu vouloir chercher ce qui aurait pu le rabaisser, le remettre à sa place. Mais cela m’était impossible. Egeado était inatteignable car je savais qu’il n’était pas net et je n’avais pas envie de savoir pourquoi. Il en était de même pour ma famille. Comme quoi les rares personnes desquelles j’avais été proche demeuraient des mystères que je ne cherchais à résoudre que de façons détournées, sans jamais essayer réellement. Etait-ce le cas d’Elio ? Non car je voulais savoir toujours plus. Mais il fallait bien avouer que c’était une personne de qui j’étais plus proche de la plupart des connaissances que je m’étais faite ces dernières semaines. Les discussions n’avaient pas été si nombreuses que ça, les mots échangés pas réellement intéressants. Mais le reste des non dits était bien plus importants. Et c’était ça qui faisait que je m’amusais, à essayer de le découvrir. Mais si ça signifiait flirter avec quelque chose de nouveau auquel je ne m’attendais pour ainsi dire absolument pas. Et il fallait bien avouer que ça ne me dérangeais pas vu que je continuais sur ma lancé. J’avais découvert autre chose que je ne pouvais pas contrôler à ma guise comme devant mon ordinateur. Et j’étais lancé, pour le meilleur et pour le pire.

Pour en revenir à cette question quelque peu ouverte, je ne savais moi-même pas ce que je lui reprochais. Pourquoi est-ce que t’as fait ça ? Bien que connaissais plutôt la réponse. Ou pourquoi est-ce que t’arrêtes ? Connaissant aussi la réponse, mais la question était bien plus gênante que la première. C’était certain qu’il ne serait pas le dernier mais je n’étais pas lâche et je comptais bien lui prouver. Cher Elio, ne parait pas si sûr de toi. Je pourrais t’étonner encore. Il fallait bien que je cache mon appréhension sous d’autres sentiments, plus ou moins falsifiés. Mais dans l’ensemble j’étais assez en accord avec moi-même. Du moins dans les deux côtés qui se battaient. Celui qui avait la trouille et l’autre qui écrasait de plus en plus le premier, celui qui voulait prouver, quitte à subir quelques dommages, que je n’étais pas de ceux qui se laissent marcher sur les pieds comme ça. Mais il fallait bien avouer qu’il y avait au moins une réponse à laquelle je n’étais pas préparé (Comme quoi il ne cesserait de me surprendre) et c’était bien celle là.

- Tu ne disais pas ça, il y a deux semaines, quand tu as commencé ce petit jeu ...

Le sang cogna à mes tempes de façon suffisamment rapide pour me convaincre qu’outre l’étonnement que cette phrase avait provoqué, la colère avait largement pris le dessus à cet instant. De quel droit osait-il sous entendre n’importe quoi ? De quel droit me mettait-il tout sur le dos alors que c’était lui le responsable de tout ?! Le jeu c’était toi et toi seul qui l’avais enclenché alors ne me mets pas dans le même panier que toi ! Les images revenaient plus vivaces que jamais. Des gémissements lointains, la colonne vertébrale qui se cambre, les ondes de plaisirs, la chaleur de ses mains. Je sentis mes joues devenir cramoisies de honte alors que ma main s’envola vers sa joue avec la ferme intention de lui faire ravaler ses paroles.
Main qui n’atteignit jamais son objectif. Il fallait croire que je n’avais pas été assez désireux de cacher mes intentions à mon interlocuteur qui n’avait eu aucun mal à décrypter ce que j’allais faire. Frustration supplémentaire et ça allait n’aller qu’en s’empirant. Quel… Mais quel connard ! Ace. Service gagnant sans possibilité de répliquer. Il était hors de question que je me laisse faire. Je voulais enlever mon poignet arrêté par sa main mais ma faible insistance se solda par un nouvel échec. Il avait beau se montrer doux, il ne faisait pas semblant de tenir. Ce qui provoqua une nouvelle montée d’adrénaline mêlée de colère. Alors que je savais pertinemment que dès que je laissais la colère œuvrer je laissais les premiers instincts me guider. Ceux que j’avais contrôlés intentionnellement ces dernières semaines. Mais lui. Lui il s’en foutait de tout ça vu qu’il avait réussi son coup. Oh oui il devait être ravi de me voir dans une telle posture.

Il fallait à tout prix que je me calme et que je cesse de faire l’imbécile. Il fallait que je revienne sur terre, que je lui réplique quelque chose de cinglant mais rien, absolument rien ne me venait en tête. Le dépourvu avait été bien trop violent. Le problème c’est qu’il n’avait aucunement l’intention de lui laisser une quelconque minute de répit et pour remettre ses idées en place. - Alors, on n’assume pas ? Le bout de mes doigts se mit à trembler. Je n’avais pas rêvé la dernière fois. Et ces sous entendus, ce n’était pas uniquement un début de drague. Non il y avait eu bien plus avant et l’alcool ainsi que mon subconscient avaient crus bon de m’occulter cet épisode. Mais c’était de plein fouet que je me retrouvais à présent face à la réalité. Oh oui on avait déjà partagé bien plus que ce que je ne croyais et de ce fait, il s’en rappelait et moi qu’à moitié. Il savait plus de chose. Il avait une longueur d’avance qui me serait compliqué de rattraper rapidement.

Comment voulait-il que j’assume un truc pareil sérieux ? Je n’étais pas comme lui moi ! Je n’en faisais pas mon pain quotidien. Il fallait à tout prix que je pense à autre plutôt que de revoir par flash des images qui ne faisaient qu’augmenter ma honte minutes après minutes. Il n’était plus temps de se calmer, plus temps de chercher des issues. La confrontation était belle et bien là. Il avait mit le feu aux poudres de façon crue et violente et il ne tenait qu’à moi de répliquer. Il fallait agir et des dizaines de scénarios m’arrivaient dessus en trois dixièmes de secondes.

- Tout ce qui s’est passé n’était que la faute de l’alcool.

Croirait-il l’espace d’un instant que ça allait être tout et que j’allais en rester là ? Allait-il croire que je ne niais pas mais que je n’y accordais aussi aucune importance ? Aucune chance vu mes précédentes réactions. Mais je ne cherchais pas non plus à me dédouaner de mes actes.
D’un geste vif je dégageais mon poignet qu’il continuait à caresser de manière bien trop douce pour être correcte et fis enfin ce que j’avais imaginé plusieurs fois. Je lui attrapais enfin son col de chemise à deux mains. Position typique de celui qui va se battre, qui en veut pour son argent et qui va se venger. Mais il n’était pas question de cela à présent.

- Contrairement à ça.


Je l’attirais à moi pour que nos lèvres se touchent enfin pleinement. Pour que je l’embrasse de mon plein gré et en premier. Et il était hors de question de lui montrer un baiser chaste et pur. Non les lèvres s’entrouvrirent et le baiser se fit plus profond. Je me laissais guider par un instinct que je ne me connaissais pas. La honte était loin car à ce moment que j’avais attendu avec une certaine appréhension, je sus que ça n’avait pas été pour rien.
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Aurelio Pastore

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MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeVen 25 Mar - 7:47

Spoiler:

Sing once again with me
Our strange duet
My power over you
Grows stronger yet

Prenons un instant un peu de recul par rapport à la situation, voulez-vous. Improvisons-nous spectateurs plutôt qu’acteurs engagés dans ce qu’il se passe et regardons. Regardons ce ballet presque comique qui se joue sous nos yeux. Un barman sexy dans le rôle du stéréotype charmeur et irrésistible, un gosse de riche timide et colérique pour lui donner la réplique. Le jeu du chat et de la souris, à qui tombera le premier, à qui cédera aux invitations muettes et parfois inconscientes de l’autre. Céder, c’est accepter de perdre mais c’est également le premier pas indispensable vers la victoire. Alors quoi, accepter de s’oublier un instant et laisser son corps parler à la place de cette conscience qui nous entrave chaque jour que Dieu fait, ou résister tant bien que mal à l’envie la plus profonde de l’être humain ? Le lecteur attentif pourra deviner deux êtres en mal l’un de l’autre, mais également un duo bien étrange qui n’aurait au départ rien eu à faire ensemble. Deux énergumènes venant d’univers différents qui pourtant se croisent, s’attirent, se tournent autour. Rien de mieux qu’une provocation plus poussée de la part de l’un d’eux -celui qui perd- pour enclencher le processus diabolique de la déchéance d’un pauvre adolescent à peine devenu homme. Il aura souhaité découvrir un monde où il risque de se brûler les ailes, il aura désiré venir jusque-là pour comprendre la vie qu’il n’a jamais eue. A ses risques et périls, avec l’approbation pourtant vivace de son mentor dans le domaine. Et au final, avec quoi se retrouve-t-on pour amuser la galerie ? Un jeune gosse rougissant, habité par la colère. Un instinct des plus primaires, l’un des sept les plus élémentaires que l’on définit depuis des siècles. Un, qui en amènera un autre. Ce soir, Andrea Vitaly n’allait pas s’arrêter là, c’était devenu hors de question. Il connaitrait, il saurait, il sentirait enfin l’intérêt de tout ceci et la déstabilisante inutilité de toute la mascarade qui tourne autour. Il se rendra compte que le monde de la nuit qu’on montre tant du doigt n’est en fait que jalousé, il le fera car maintenant il n’y a plus possibilité de faire machine arrière.

Sans doute le jeune homme se persuade-t-il du contraire alors qu’il défie encore Elio, alors qu’il le cherche et le provoque de son simple regard tellement noir qu’on n’y lit plus aucune hésitation. Comme si toute situation pouvait être réversible à chaque étape de sa construction. Chimère, pure invention pour calmer l’esprit des hommes qui se croient maîtres de leur avancée sur le long chemin de leur vie. Sauf qu’Andy ne pourrait pas partir maintenant. Il aurait pu le faire avant, bien avant. Ne jamais entrer dans ce bar, ne jamais dépasser sa tolérance en alcool, ne jamais mouiller sa chemise le premier soir, ne jamais revenir pour chercher sa veste, ne jamais chercher à en savoir plus sur son serveur. Mais depuis ce soir, il était définitivement trop tard même s’il est entendu qu’avoir mis un terme à tout cela avant aurait créé regrets, curiosité et frustration. Conclusion, tout était voué à l’échec pour le jeune Vitaly qui ne pouvait maintenant qu’accepter de se laisser guider vers l’inévitable.

Il n’y a pas de hasard, tout est inéluctable.

En soi, pourtant, toute chose parait fruit du hasard, d’un coup de chance ou de malchance, d’un chemin prit les yeux bandés, comme on pourrait en prendre bien d’autre. A la naissance même de l’homme, c’est le hasard qui décide en fonction de quoi le nouveau-né sera celui qu’il est. Pourquoi ces cheveux châtains, pourquoi ces yeux ternes et ces formes un peu trop visibles ? Tout est affaire de génétique, et pourtant nombreux seront ceux à dire qu’un autre moment, qu’un autre lieu peut-être, auraient pu conditionner les choses différemment. Si Elio était là maintenant, ce n’était à priori qu’une succession d’événement dont l’ordre d’enchainement était soumis aux imprévus du destin. Un homme, une femme, un désir qui nait et une volonté d’enfanter, rien de plus. Qui aurait pu savoir que le beau bébé aurait évolué de cette façon, qui pouvait prévoir la suite des événements en ce qui la concernait ? Personne, pas même les Parques qu’on associe pourtant à la destinée humaine sans la moindre hésitation. Une route est déterminée par des choix, puisqu’à chaque décision la personne qui la prend efface en un rien de temps toutes les autres possibilités, faisant mourir dans l’œuf un millier de propositions qui auraient peut-être mieux convenues, peut-être moins. Une simple pensée peut d’ores et déjà être un choix, si on la laisse murir, grandir, si on la laisse nous envelopper tout entier pour décider de la suite de notre cheminement personnel.

Et le plus drôle, c’est de savoir que les choix ne sont pas libres. Qu’ils sont eux aussi prédéfinis en fonction de beaucoup de choses, qu’un individu verra forcément son panel de futurs réduits par sa façon de penser, par son éducation, par l’environnement qui l’a conditionné à penser ainsi, à agir de telle façon. Au final, tout se rapporte à la naissance qui trace déjà un futur évident où la part n’est pas faite au hasard ou aux suppositions bancales. Il serait bien trop incertain de laisser le monde tourner avec des « peut-être » constants, des hésitations et des possibilités infinies à chaque seconde, aussi tout est-il savamment déterminé, mené par les règles de logique et de prédisposition. On ne peut laisser chaque être humain abandonné aux possibilités que son esprit façonnerait à chaque seconde. Le fait est que la liberté de choisir n’est qu’une illusion, et que tout suit un cours logique en fonction des choix orientés de chacun. Et quiconque souhaite vérifier cette affirmation ne le pourra jamais, à moins de montrer que remonter le cours du temps est chose possible et qu’à ce moment-là, il agirait différemment de ce qui était prévu pour lui. Impossible, donc, et c’est là que toute cette théorie prend tout son sens, car elle ne peut être ni affirmée ni infirmée, un peu comme la croyance que l’on aurait en un Dieu, l’existence de vie en dehors de notre galaxie, les vérités indéfectibles dans certaines sciences qui se veulent d’une exactitude fondée sur les suppositions et les hypothèses. On pourra dire ce que l’on veut, le hasard est tout autant un indispensable à notre survie morale et au bon développement de toute personne qui croit en la liberté et en la possibilité d’un autre déroulement qu’il est nuisible à notre bonne compréhension des choses et de la logique de tout ce qui survient autour de nous.

Au final, la notion de hasard est uniquement liée à l’incapacité à appréhender complètement certains phénomènes dans leur complexité naturelle, et donc à les prévoir infailliblement. C’est la réponse apportée lorsque l’on ne saisit pas la logique du monde, lorsque quelqu’un ne sait pas pourquoi telle ou telle chose survient, alors que ce n’est que l’assemblage de deux faits qui se rencontrent dans un même temps et un même espace, formant ce qu’on appelle communément le hasard. Mais ces deux événements se sont retrouvés non par coïncidence mais par nécessité. Il fallait qu’ils se rejoignent pour créer cette conséquence, qui en entrainera une autre, puis une autre, dessinant alors un superbe éventail de causalités qui s’allient pour former un être, et ce qu’il doit être. Le rôle qu’il aura à jouer dans la grande mascarade humaine, ce qui va le déterminer et le définir. Par exemple, si Aurelio a vécu la tristesse qu’il a pu connaitre, avec un profond traumatisme, c’était dans le but de renaitre dans cette ville inconnue et délicieuse, de rencontrer une femme qui lui apprendrait qu’il n’y a pas que la passivité comme aptitude de vie, que l’on peut devenir acteur de son existence en guidant celle des autres. Dans aucun autre contexte le jeune homme n’aurait pu découvrir cette vérité pourtant à présent indispensable et essentielle. C’était ce qui le faisait être lui et l’avait amené à cet état de fait, à cette position de référence en termes de liberté, cet Aurelio revisité en mieux, qui a présent avait abandonné la moitié de son prénom.

Le hasard, ni rien de ce qui vient du hasard ne peut être la cause des choses qui sont nécessairement et toujours, ou des choses qui arrivent dans la plupart des cas. En d’autres mots, le hasard ne peut provenir que du hasard, qui est lui-même une invention humaine pour se rassurer et combler ses inquiétudes, son imagination, ses questions. Réponse miracle, sorte de Joker bien pratique à sortir en toute circonstance, c’est le laissez-passer immédiat que l’on sort pour se diriger vers une pseudo explication tout en s’éloignant de la trop inaccessible vérité. Et en venant ici au moment où il en avait le plus besoin, sous la houlette du hasard qui l’avait amené sans s’en rendre compte à franchir une lourde porte de bar, Andrea comprenait sans doute l’enjeu qu’il y avait derrière tout cela. Il était évident que le jeune homme devait venir au Love’s out, devait rencontrer Elio. Pourquoi ? Nous ne le savons pas encore, du moins ne pouvons-nous que le deviner. Certains avanceront qu’Elio en avait besoin, sinon il aurait fini par se détruire tout seul et sous peu, son corps étant trop fatigué pour soutenir toute la souffrance morale que les souvenirs qu’il refoulait lui causaient tant bien que mal. Trop épuisé pour supporter les mensonges qu’il se faisait à lui-même et la dose de tristesse et de rage qu’il contenait derrière la barrière de son sourire, sans toutefois en avoir réellement conscience. Les souvenirs de l’esprit sont une chose, tout comme leurs ressentis, mais il existe indubitablement une mémoire corporelle, qui encaisse les émotions que l’esprit rejette, puisque rien ne se perd totalement. Et Elio était ... non, avait été proche de la rupture. Mais c’était alors normal qu’elle soit à présent là, en face d’un mioche prêt à en découdre. Il n’y a pas de hasard, tout est inéluctable.

- Tout ce qui s’est passé n’était que la faute de l’alcool. Contrairement à ça.

Elio ne résista pas quand son compagnon récupéra sèchement sa main, et laissa celle-ci partir à regret. Patience, car bientôt ... Ah, plus que bientôt manifestement. Plus vite que prévu, et Elio ne put que retenir un faible sourire de victoire avant qu’Andrea ne passe enfin à l’action. Après une rapide prière de remerciement ironique envers les dieux, le barman se laissa bien volontiers attraper dans les filets du petit jeune qui lui servait de client. Dans un geste très viril mais qui chez lui devenait immédiatement enfantin et rempli d’une volonté de se prouver quelque chose, Andrea saisit le col d’Elio et l’attira à lui. A cet instant, bien loin de se morfondre sur le froissement du tissu de sa toute dernière acquisition, Elio se pencha un peu pour aider la rencontre, et se laissa délicatement glisser dans les intentions de son interlocuteur. Qu’il le frappe ou le rejette, il se laisserait faire. Mais qu’il l’embrasse, et il allait comprendre que ce dernier acte fait en toute connaissance de cause marquerait le début de la fin. Sans fermer les yeux pour admirer encore une fois la teinte carmin des joues de celui qui, par colère et envie, l’embrassait à présent, Elio se fondit dans un baiser qu’il avait longtemps attendu. Dans un premier temps pourtant il se laissa faire, invitant Andrea à découvrir à son rythme les prémices d’un futur très proche. C’est avec une surprise et un plaisir mêlé qu’il sentit le gamin se faire plus pressant, et par réflexe il laissa sa bouche s’entrouvrir pour lui offrir ce qu’il désirait manifestement.

Pas un mot ne s’était échangé depuis la dernière réplique d’Andrea, et pourtant le barman aurait aimé le pousser jusqu’au bout en arrêtant l’étreinte et en lui demandant si c’était ça qu’il appelait un baiser. Mais ce n’était pas chose intelligente à faire, aussi le jeune homme décida-t-il de lui montrer plutôt que de faire de grands discours. Parce qu’à ce geste tant attendu la logique et la retenue d’Elio volèrent en éclats, parce que cette proie avait été difficile à approcher et que la récompense arrivait enfin. Parce qu’il voulait faire découvrir à son partenaire l’ampleur du bon choix qu’il venait de prendre. Le barman, qui n’attendait au final que ça depuis quelques semaines, ne le laissa pas s’en tirer à si bon compte. Il imaginait déjà Andy se retirer et admettre en mentant que cela n’avait aucun sens sans le taux d’alcool qui allait avec. Il ne lui laisserait jamais ce plaisir. Dans un bel ensemble, le corps du jeune homme se mit donc en mouvement. D’une main, il vint vivement lui saisir la mâchoire, comme pour éviter qu’il ne s’échappe, comme pour souder leurs lèvres ensemble. Sa prise se fit, comme un peu plus tôt sur le poignet d’Andy, ferme et ne souffrant d’aucune réplique. Ainsi, il le forçait à ne pas céder un seul instant du terrain dans le baiser qu’ils échangeaient, celui-ci s’intensifiant au fur et à mesure qu’Elio ralentissait le rythme, rendant l’étreinte plus suspendue, plus inacceptable mais aussi bien plus délicieuse. Pour ne pas être en reste, son bassin vint heurter celui d’Andrea, leurs jambes trouvant immédiatement un compromis en se décalant les unes par rapport aux autres afin de laisser le plus de surface possible au contact des deux corps.

Enfin, l’autre de ses mains vint se poser avec détermination au bas du dos d’Andrea, exerçant là aussi une pression pour ainsi rapprocher chacun des corps de façon presque stratégique. Voilà ce qu’était un véritable baiser au goût d’Elio. Ce n’étaient pas seulement leurs lèvres qui échangeaient promesses et visions de paradis, mais chaque point de leur peau, chacun de leur muscle qui entraient en contact à travers leurs habits. Restant ainsi quelques secondes, Elio jugea qu’il était inutile de laisser le temps à l’esprit d’Andrea de se remettre et qu’il valait mieux le bousculer sans précipitation mais sans possibilité de retraite. Alors, tout en essayant tant bien que mal de ne jamais rompre le contact établi par Andy, le jeune homme lui attrapa la manche tout en quittant de sa main son visage à regret, pour le tirer en arrière et commencer à gravir les premières marches de l’escalier, à reculons. Dans ces premiers instants, la main d’Andrea qui se tenait à la rampe glissa contre l’élastique sans qu’il le remarque, et aux alentours de la troisième marche escaladée dans un équilibre précaire, le pied du jeune homme glissa et Elio dut le retenir in extremis, entourant son buste de ses bras et séparant alors leurs lèvres. Lui adressant un sourire réconfortant et prometteur, le serveur soutint à moitié son compagnon tout en le redressant et reparti à l’ascension des marches, qui se fit bien plus rapidement maintenant que leurs yeux pouvaient se concentrer sur autre chose. Le bois qu’il connaissait si bien fut bien vite avalé par leurs pas pressés, et une fois arrivé en haut de l’escalier, Elio se retourna vers Andrea et l’embrassa de plus belle, repartant pour une avancée à reculons. Cherchant à tâtons la poignée de sa chambre, le jeune homme ne lâchait pas Andy et tentait de le rassurer dans la douceur et la prévenance qu’il mettait pour distiller sa passion dévorante.

Une fois la porte enfin ouverte, Elio retourna son compagnon afin de pouvoir avancer cette fois-ci dans le bon sens, obligeant Andrea à se laisser guider. A peine le seuil franchi, ce dernier se retrouva plaqué contre le mur juste à côté de la porte, qu’Elio tenta à plusieurs reprises de fermer d’un mouvement de cheville avant de la claquer rapidement de la main. Ils étaient à présent seuls ici, tranquilles. Et Andrea ne pouvait pas reculer, Elio ne le laisserait pas faire. Se collant contre lui, le jeune homme pressait son futur amant, le soulevant presque contre le mur et l’obligeant alors à se tenir hissé sur les talons pour ne pas perdre pied. Quittant ses lèvres, Elio vint poser les siennes dans le cou d’Andrea, venant couvrir cette peau si peu souillée d’embrassades discrètes ou plus appuyées, se partageant son cou ou sa nuque. Quant à ses mains, l’une vint se placer sous la chemise d’Andy, au niveau du flanc tout en revenant parfois sur le devant de son ventre et ce dans les limites de ce que ses vêtements dévoilaient comme peau. La deuxième de ses paumes glissa sur la cuisse du petit blond, lui faisant ramener sa jambe droite contre la sienne, le genou plié au niveau du bassin d’Elio. Ce dernier pouvait alors à présent glisser ses doigts sous la cuisse relevée d’Andrea, caressant à travers le tissu une partie de son corps qu’il avait hâte de découvrir, insistant sur la naissance de ses fesses ou la partie interne de la cuisse, sans jamais remonter vraiment. Ainsi, Elio laissait son partenaire sentir les moindres mouvements de ses doigts sans jamais les précipiter pour ne pas le faire fuir. Bien qu’à présent, cela aurait été chose bien surprenante. D’autant qu’Andrea n’était pas soûl, et bien conscient de la portée de ses actes ... mais aussi bien plus sensible au contact d’un autre qu’à moitié assommé par l’alcool.
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Andrea Vitaly

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[Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] Vide
MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeSam 26 Mar - 13:13

Je t’appréhende
Je te garde
Je te pose
A mon cou
Issu à ma voix
Inspire moi
Enveloppe-nous
Enlace-moi

Un baiser comme je n’en avais jamais donné. J’en avais déjà donné bien sûr, à plusieurs filles, de différentes façons. Mais jamais comme ça, jamais avec une telle impulsion, une telle force d’envie, une telle auto persuasion. Ce baiser uniquement guidé par une explosion d’envie, de mépris, pour lui prouver qu’il n’avait pas à se foutre de moi, que je n’étais pas comme il l’imaginait, que je n’avais pas besoin d’alcool pour le surprendre, pour lui montrer que moi aussi je savais. Le temps n’était plus aux justifications, j’avais peut être fait ce qu’il attendait de moi mais j’étais sûr qu’il n’avait pas pu tout prévoir dans son équation. Je fermais les yeux. C’était peut être trop dur de voir son regard profond et convaincant sur moi alors que nos lèvres étaient serrées ainsi. Combien de temps durait un baiser ? J’avais pensé que c’était une dizaine de secondes, et encore, quand on en avait envie. Sinon ça prenait une seconde à tout casser. Mais là, même sans compter je savais qu’on avait déjà bien dépassé ce quota. Sauf que je n’étais pas las de ça, je ne trouvais pas ça rébarbatif et redondant. Chaque seconde semblait encore meilleure que la précédente. Parce que ce n’était pas n’importe quel baiser, ce n’était pas n’importe qui, et ce n’était pas pour n’importe quelles raisons.

Est-ce ça que j’attendais de lui ? Quelque chose de différent ? Ou est-ce que je voulais tout simplement retrouver ce que je croyais n’être qu’un rêve ? Je ne pouvais pas attendre qu’il me prodigue n’importe quoi sans rien en retour. Mais il ne semblait vraiment pas courir après l’argent, ce n’était pas ça qui l’intéressait chez moi. Mais alors quoi ? Je n’étais pas vraiment du même acabit de ceux qu’il avait l’habitude de draguer. Peut être que je réfléchissais juste trop. Même dans ce cas là je réfléchissais trop. Je ne perdais rien à essayer de me laisser aller, juste cette fois.

Et Elio avait dû penser la même chose, parce que non loin de se séparer, nos lèvres et nos bouches fusionnèrent encore un peu plus alors que je sentis sa main sur ma mâchoire. Comme par esprit de contradiction, mon corps se tendit vers l’extérieur, comme pour m’extirper de lui mais il était déjà trop tard, il n’avait nullement l’intention de me lâcher. Mon cœur se mit à battre plus vite. Je perdais ma capacité de décision. Il me l’annihilait à mesure que les secondes passaient, à mesure que mon corps se réchauffait. J’étais en terrain inconnu. Je ne connaissais rien des règles en vigueur, rien de ce que j’étais supposé faire ou pas. Je ne savais rien. Et ça me faisait silencieusement rager. Moi qui me pensais un brin intelligent, voila que j’étais face à mon ignorance et ma bêtise. Ici le roi, ce n’était pas moi, c’était lui. C’était lui qui guidait, qui choisissait qui menait la danse. Et pour moi, c’était dur à accepter malgré tout. Je sentis mon souffle s’accélérer, pour trouver un peu plus d’oxygène que ma bouche n’était en mesure de me fournir. Ce n’était plus un baiser à ce niveau là. C’était déjà l’étape au dessus. Et j’étais encore réticent.

Ca devait vibrer en moi car si je le laissais faire bon gré mal gré, de mon côté je ne faisais rien. Répondre à ces lèvres était déjà un effort en soi. Son corps plus proche, encore plus proche du mien. Son bassin, ses jambes, nous étions si proches et je me sentais si lointain et peu à l’aise. Pourtant il était loin d’en faire trop. Ca se sentait également. Des réactions similaires pour des raisons différentes. Lui vibrait de se retenir de ne pas en faire trop. J’avais d’ors et déjà l’impression que c’était beaucoup, mais certainement pas pour lui, il ne voulait sûrement pas que je prenne peur. Moi je vibrais également. Mais je ne savais plus si c’était par envie, par peur, par défi. Tout se mélangeait et si on réduisait au strict minimum la situation actuelle. Je me sentais bien.

Les mouvements de recul que je pouvais avoir, c’était plus de l’appréhension qu’autre chose. Car il savait s’y faire, c’était clair et je sentais les derniers bastions de résistances, les derniers muscles tendus se relâcher secondes après secondes. Oh oui il arrivait à me faire oublier les problèmes, les interrogations existentielles car pour l’instant, je sentais quelque chose qui montait en moi qui semblait totalement incontrôlable et que j’avais besoin de laisser partir. Alors je commençais à répondre de façon plus marquée au baiser alors que mon bassin se plaquait un peu plus au sien, que mes jambes se pressaient contre les siennes. L’impression de vide dans l’esprit. Comme avec trop d’alcool. Sauf que là il n’était pas en cause, c’était même moi qui l’avais précisé. Non j’avais décidé de mon plein gré d’en arriver là. Peut être n’avais-je en cet instant pas toutes les cartes en main pour choisir. Je n’avais agis que sur un coup de tête. Je récoltais ce que je semais. Nouvelle pression sur mon corps. Sa main qui semblait brûlante sur le bas de mon dos. Ma main qui se poste sur sa poitrine, dans l’intention de le repousser, de lui dire stop. Mais à la place un soupir qui s’échappe de mes lèvres alors que ma main agrippe finalement sa chemise.

Je tremblais légèrement, il n’allait pas me lâcher, je n’avais pas d’échappatoire. Mais je m’enfermais moi-même. Si je l’avais voulu, j’aurais pu le pousser réellement, fort malgré sa force. J’aurais pu lui crier dessus mais je n’en faisais rien. J’étais moi-même responsable de cet état. Mes paupières se serrèrent de plus belle pour que j’essaie de mettre en veilleuse le fait que je me sente à la fois si bien et si mal. Mais alors que mon autre main allait lui attraper la hanche, je sentis la pression sur ma mâchoire disparaitre, et ressentis comme un espèce de regret. Je lui lâchais la chemise, pensant que c’était finit, qu’on avait terminé de se prouver quelque chose. Mais je me trompais, et dans les grandes largeurs. Car faisant tout pour garder nos bouches scellées, il m’attrapa la manche pour me tirer le long de ce mystérieux escalier que j’avais tant de fois regardé.

Je rouvris les yeux, croisai son regard, les détournai. Il était loin d’avoir terminé ce qu’il attendait de moi. Quant à savoir ce que c’était, je n’avais qu’à suivre ma curiosité insatiable. Et il fallait bien avouer que je n’avais guère envie de le laisser partir après ça, comme ça. Je n’en aurais été que maladivement frustré. Il ne me restait plus qu’à monter et à décider là haut ce que j’allais faire. Oui je voulais voir, je voulais savoir. Alors maladroitement, nous commençâmes à monter les marches dans le plus grand désordre avec pour seul mot de ne pas rompre le lien. C’était sans compter le fait que je ne voyais rien, que je n’arrivais pas à coordonner suffisamment ce que je faisais. Je trébuchais, ma main glissant le long de la rampe. Presque comme un automatisme, Elio me rattrapa, rompant de ce fait le baiser qui avait été si long. Je pris une grande inspiration en attrapant ses bras, comme pour le sentir plus près de moi, encore plus près, ce contact semblait tellement me manquer. Ma commissure se leva légèrement pour le remercier silencieusement. Comme dans un rêve, le palier arriva et je me rendis compte qu’au final, je n’en avais rien à faire d’à quoi ça pouvait bien ressembler. Le temps que je regarde de nouveau Elio, ses lèvres me parvinrent de nouveau et je lui répondis sans l’ombre d’une hésitation, lui enserrant la taille à mon tour. Je le laissais me guider à tâtons jusqu’à ce qui devait être sa chambre.

Et tout se déroula vite. Peut être trop vite. Je m’étais habitué aux baisers, j’en étais même presque devenu accro, comme si c’était impossible de respirer correctement sans qu’il soit là près de moi. La sensation de son corps sur le mien. Sauf qu’un nouveau sentiment vint tout gâcher. Cette impression d’oppression. Ils n’étaient que tout les deux, enfermés dans cette chambre. Personne ne viendrait et je commençais à ne pas me sentir très bien. Ce n’était peut être finalement pas une bonne idée de faire ça, de continuer sur cette voie, attendre encore un peu me paraissait des plus judicieux à cet instant précis alors que les gestes d’Elio devenait de plus en plus pressants à mon égard. Mon souffle s’accéléra alors que son torse était plaqué contre le mien, mes jambes étaient flageolantes. Non ça allait bien trop vite, je n’arrivais pas à suivre. La peur. La peur allait-elle prendre le dessus sur l’envie ? J’avais beau essayer de m’en débarrasser, elle me prenait au corps, me serrant la poitrine. De quoi avais-je peur ? Il n’allait rien faire si je refusais n’est-ce pas ? N’est-ce pas… ? Il était peut être temps de se rétracter. Ou peut être que c’était vraiment trop tard. Ses lèvres se séparèrent des miennes et j’ouvris la bouche.

- At…

Le mot ne sortit jamais complètement, sentant ses lèvres dans mon cou. Je me mordis la lèvre alors que ma main agrippait ne nouveau sa chemise au niveau de la hanche. Grandes bouffées d’air. Oui il faisait chaud, cette chaleur que j’avais déjà ressentie avant. Sa main qui glisse sous ma chemise, les frissons que ça occasionne alors que j’évite délibérément son regard. Non stop non arrête. Je disais non, le reste disait oui. Des soupirs montaient dans ma gorge que je retenais à tout prix. Non non non. Et pourtant j’avais envie de retrouver ses lèvres, là maintenant. Et malgré moi le désir me prend au cœur, au corps. Son autre main qui remonte ma jambe, qui passe sous ma cuisse, ma nuque qui se tend malgré moi, mon poing qui se resserre sur sa chemise. Ses doigts qui jouent et s’amusent, que je sens monter et redescendre. Non arrête. Boum boum faisait le cœur dans la poitrine. Cœur qui a peur, qui en meurt. Il n’allait pas s’arrêter, j’avais enclenché un mécanisme qui dépassait l’entendement, qui avait surpassé ce que j’avais imaginé. Mes cordes vocales se délièrent enfin.

- Attend…

Le souffle court alors que je posais mon autre main à plat sur son torse, comme pour faire barrage, le repoussant légèrement. Mon regard fuyait toujours, j’étais incapable de le regarder. Stop laisse moi respirer, laisse moi me reprendre, je ne sais pas faire, j’ai peur, et je ne te connais pas. Non attend. Ce n’était pas facile de passer outre, d’oublier sa honte, son inexpérience et surtout cette impression de ne rien contrôler. D’être au cœur d’un ouragan inextricable duquel on ne pouvait sortir. Elio me dominait totalement et ça me rendait mal à l’aise. Enfin non, ce n’était pas si simple, ce n’était pas que ça. C’était le tout qui faisait ça. C’était le fait que j’étais encore totalement perdu entre ce que je voulais, ce que j’ignorais, ce qui allait se passer. J’avais peur. Oui j’avais peur c’était normal non dans ces circonstances ? Devant un inconnu qui semblait insurmontable. C’était dur à avouer mais oui je ressentais du plaisir, je sentais cette chaleur qui me dévorait, je sentais à quel point j’avais envie d’être encore plus proche de lui pour estomper un peu cette impression de manque. Mais pour la première fois depuis la mort de mes parents, j’avais cette sensation de ne plus rien contrôler, de ne plus être maître de mes choix et de ce qui arrivait.

Alors forcément j’étais un peu perdu. Mais Elio aurait pu me rassurer, sûrement qu’il l’aurait fait. Comme si j’allais lui demander, il ne fallait pas rêver non plus. Mais j’avais quand même besoin de quelque chose, d’une certitude, d’une explication, de… D’une minute de répit ! Chose qu’Elio ne voulait même pas me laisser ! Sûrement pour éviter les questions superflues qui le dérangeraient. Mais mon cerveau, qu’il le veuille ou non carburait bien trop. J’aurais pu le laisser faire et regretter ensuite, mais je n’arrivais pas à passer outre cette barrière que je fabriquais moi-même. L’inconnu fait peur. Oh oui qu’il fait peur. Parce qu’on ne savait jamais ce qui se cachait derrière. Les avants goûts étaient loin d’être dérangeant, mais il semblait que la suite pouvait se jouer à pile ou face, quitte ou double.

Mais comment lui expliquer ça sans avoir l’air débile ? Sans avoir l’air de se rétracter, de passer pour un gamin ? Il allait se moquer, je ne l’aurais pas supporté. Quelles issues me restait-il alors ? « Arrête » ou « Laisse moi un peu de temps » ou « Dégage je veux plus » « Je le sens pas bien là » Cette envie qui me dévore ne me laisserait aucun répit si je partais maintenant et je n’oserais plus jamais le regarder en face. Ce qui risquait aussi d’être la même chose si on allait plus loin. Je me cherchais des issues, des choix, mais je n’en avais pas. Au final il fallait accepter que le temps de partir en courant était révolu. Je n’étais pas du genre à fuir. Même dans cette situation, même terrassé par l’anxiété. Il me restait à savoir comment appréhender la suite des évènements, voir si j’avais voix au chapitre. Et j’étais sûr de pouvoir faire quelque chose. Peut être pas grand-chose, mais à mon niveau ça pouvait être significatif.

- Je… Mon regard croisa le sien. Doucement.

Ma voix était un peu plus assurée alors que ma main remontait sur son épaule pour l’attirer de nouveau vers moi. Il fallait à tout prix que je me calme. Il était hors de question de me laisser vaincre par un sentiment tel que la peur. C’était moi qui faisais la loi. Mon autre main se décrispa de sa chemise pour venir doucement se glisser dessous à son tour, faisant comme un mime de ce qu’Elio faisait. A mon grand désarroi il semblait refuser de revenir à mes lèvres pour le moment, malgré ma main insistante sur son épaule pour le faire relever la tête, pour que je puisse me pencher vers lui.
Qui de nous deux.
Inspire l’autre.
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[Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] Vide
MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeSam 26 Mar - 17:26

Confusion in his eyes that says it all.
He's lost control.

Étrange sensation que de se sentir à la fois soi et à la fois autre. C’est ce qui arrivait pourtant toujours à Elio lorsqu’il étreignait quelqu’un dans ses bras assurés. C’était inévitable, cette dualité troublante qui le poussait à douter toujours un instant de ses actes. Une seconde seulement pourtant, puisque le corps est maître sur l’esprit dans la plupart des cas et que le plaisir, l’envie et sa bêtise reprenaient immanquablement le dessus. Il lui suffisait d’une main bien placée pour qu’il oublie subitement le frein qui enserrait avec force son cœur, le laissant pantelant et essoufflé d’un plaisir bien lointain de ses sentiments. Le laissant vide de toute substance, incapable de réfléchir. Ces nuits où il s’endormait seul dans son lit qui dégageait encore les effluves de son partenaire de la soirée, et où en se réveillant seule l’odeur de la cigarette le faisait atterrir dans le monde réel. Car la fragrance du tabac était la seule et l’unique à se mêler avec tant d’évidence à celle du sexe, même refroidi. Cette chaleur qui avec le temps continue à se dégager d’un corps, mais également un ensemble de choses plus discrètes comme un regard pétillant quoique fatigué, un corps plus détendu et habitué à la lascivité d’un échange sensuel, des cheveux graissés par la sueur et un torse parcouru de marques rouges plus ou moins récentes, plus ou moins profondes. Les deux fumets, amis quotidiens d’Elio, le berçaient dans sa petite vie tranquille et lui rappelaient toujours la victoire de son existence actuelle sur toute autre. La puissance de son pouvoir d’oubli, de recommencement. Le contrôle du temps et des cœurs, le contrôle de l’absence de toute émotion entre deux êtres qui s’offrent l’un à l’autre. S’aiment le temps d’une nuit, même si Elio préférait employer un autre terme. Car il n’aimait pas les courbes qui gémissait sous son propre corps, il n’aimait que la sensation de se perde dans quelque chose qui assommait de plaisir, qui laissait tout de nouveau vierge -ironie du sort !- pour un nouveau lendemain.

Bêtise, pourtant et sans doute, de s’oublier soi même dans les bras de dizaines d’inconnu(e)s quand on ne parvient même pas à se souvenir de sa personne. Le jeune homme savait tant de choses sur lui qu’il n’aurait pu en dire aucune de pertinente. Son caractère était tel le voile de soie qui habille une femme, totalement souple et adaptable aux formes et aux exigences de ses clients. Il savait se faire tendre, direct, précautionneux. Et s’il était toujours séducteur, de nature et par nécessité en soirée, la journée le bel éphèbe devenait d’un commun déroutant. Sa peau ne luisait plus de la même force, ses cernes ressortaient à force de si peu dormir, sa démarche chaloupée relevait plus de l’incertitude que de la confiance, et les regards ne lui étaient majoritairement plus destinés. Au final, Elio n’était qu’un artifice créé de toute pièce pour rentrer dans un modèle que Delia avait façonné auparavant. Elle n’avait fait que trouver l’être désespéré et prêt à tout pour oublier dont elle avait besoin, afin de le former à son métier et de le modeler à son image. Le maître et son disciple qui au départ l’avait suivi par défaut d’autre endroit où aller. Sa conviction, aujourd’hui, d’être à sa place ne venait que des commentaires de sa supérieure, son amour pour le vice et le plaisir n’était que le reflet des propres pêchés de Delia. Il n’était que sa marionnette, et ne s’en rendait même pas compte. Derrière le masque qui lui faisait détester l’amour se cachait une simple tristesse, l’empêchant d’aller de l’avant et l’ayant transformé en ce messager de malheur qui annihilait tout espoir dans le cœur de ses consommateurs de trouver un jour ce qu’on nomme l’Amour véritable. Un simple grain de sable distillé dans un sourire charmeur et beaucoup d’alcool, voilà quelle était la recette de Delia pour amener tous ceux qui l’approchaient dans son cercle de désillusion et de nonchalance. Une revanche sur la vie qu’elle faisait partager au plus grand monde en se servant d’un pauvre hère aussi touché qu’elle, sans doute, dans une histoire bien vite refoulée.

Et pourtant, comme il avait appris à les aimer, ses journées se passant en individuel et une par une, sans jamais qu’il n’y ait réellement de suivi entre telle ou telle personne, sans jamais que quiconque n’instaure de lien durable et sûr avec ce barman tantôt intouchable tantôt si près qu’on croirait rêver. Disponible et dans le même temps irréel, Elio se faisait un plaisir de satisfaire tout le monde et personne à la fois, de façon à rendre accro tout ceux qui tenteraient de vouloir tourner les talons à un monde bien trop important. Elio leur ouvrait les portes de la nuit, les portes de la liberté et de l’assurance. Un monde où chaque pied a sa chaussure, où chaque désir peut être assouvi et où tous les fantasmes sont permis. Soit disant, un lieu de vérité où la consécration humaine la plus pure et la plus véridique s’exprimait, soit disant un endroit qui à lui seul regroupait tout ce dont un homme ou une femme a besoin pour survivre. Mais il était une vérité que le jeune homme ne soupçonnait jamais vraiment. Car à chaque fois qu’il possédait quelqu’un, avec violence ou tendresse, un malaise se formait un court instant dans sa poitrine, enlaçant son buste d’une affreuse étreinte séductrice. Un murmure qui le suppliait d’arrêter, de repartir. Une voix qui le poussait à revenir sur ses pas et à retourner ce jour là où dans une ruelle tout avait commencé entre lui et le Love’s out. Oublier son établissement, sa sauveuse, son bien être et retourner à la souffrance pour l’assumer et y faire face. C’était toujours une proposition ridicule mais étrangement séduisante, car Elio avait l’intime sentiment qu’il retrouverait quelque chose enfoui depuis trop longtemps. Mais jamais encore il n’avait eu assez de courage ou d’intelligence pour écouter, jamais il n’avait accepté de se perdre pour éventuellement se raccrocher à un espoir faible de retrouver autre chose. De mieux, de moins bien, qu’en savait-il après tout ?

Pourtant, ce soir, rien ne l’empêchait de se sentir bien. Certes, il croyait à chaque instant mourir de frustration, d’envie refoulée et d’empressement tant bien que mal réfréné. Mais le poids sur le cœur s’était envolé, sans qu’il ait même un jour eut vent de sa présence. Cela ne se manifestait alors que d’une seule façon : le bonheur qu’il avait à se tenir là, si près de celui qu’il avait longtemps attendu, celui autour duquel il lui avait fallu tourner longtemps. Elio savait bien que ce n’était qu’un coup comme les autres, et pourtant il était étrangement satisfait d’avoir attendu et de devoir patienter encore. Prendre du temps et des précautions l’ennuyait à l’ordinaire mais cela semblait ici comme évident, comme indissociable du mot victoire. A bien revivre tout ce qu’il s’était passé depuis le début du baiser qui avait tout scellé, Elio ne se rappelait pas la moindre gêne à aucun moment. Il revoyait encore l’expression d’Andrea, sa main sur lui, son hésitation et sa démarche maladroite mais motivée par la simple impulsion de son envie. Son premier soupir, la vague retenue qui avait failli les séparer un instant, puis la raison qui faiblissait. L’ersatz de sourire qu’il avait eu lorsqu’ils s’étaient retrouvés rapprochés soudainement, par le fruit béni du hasard d’une simple marche qui les jeta l’un contre l’autre. A cet instant, Elio avait enfoui une seconde son visage dans son cou pour sentir son odeur, après l’avoir brutalement remis sur pied et trainé en haut des escaliers. Cet ensemble, ce puzzle qui s’était construit sans mauvaise surprise, sans hésitation ou presque. Elio touchait du doigt ce qu’il avait longuement attendu, mais il se doutait bien que rien ne serait aussi facile.

Et en effet, maintenant ... Maintenant Andrea commençait à avoir peur. En comprenant sans doute que le retour à la normale n’était plus envisageable. Mais aussi, logiquement, en découvrant la puissance que tout cela représentait. Elio était prêt à parier que jamais le jeune homme n’avait pu vivre ça, vraiment. La chaleur, mais en même temps les frissons qui vous parcourent le corps. Le tremblement involontaire des membres qui ne font que trahir l’envie, l’impatience que les sens ressentent et crient de toutes leurs forces alors que l’esprit se questionne, hésite, ne sait que choisir. Andrea se rendait compte, peut-être, que se lancer dans le bain avec un homme n’avait rien de normal dans la société commune. Sauf que ce petit bout d’homme n’avait rien à voir, en dépit de son apparence bourgeoise et hautaine, avec ce monde parfait et réglé à la lettre que l’on connait dehors. Pourtant, il y avait dans son âme un malaise qui ne décolorait pas. Et ce malaise se sentit immédiatement, dans le manque d’assurance qu’Andrea mettait dans son approche, dans les flottements incertains de ses yeux, mais aussi dans sa tentative de protestation qu’il dut réitérer pour réussir. La faute à Elio, sans doute, qui en explorant soudainement la gorge de son compagnon, lui avait envoyé une petite décharge qui le fit se crisper, dans un signe manifeste d’approbation plutôt que de mal-être. Toutefois, la main qui se ferma sur le tissu qui habillait le flanc du barman ne suffit pas à dissiper les doutes et les inquiétudes du jeune homme, qui lui intima d’attendre, tout en le repoussant d’une main avec peu de force mais une fermeté qui suffit à Elio pour reculer son corps de quelques centimètres et rompre le contact avec Andy.

Un instant, le jeune homme crut que tout était terminé et que la chance d’enfin sentir ce gamin s’offrir à lui étaient partie en fumée à l’instant où il avait accepté de le quitter de ses mains. Mais n’étant pas du genre à forcer les choses, Elio se dit que peut-être était-ce mieux ainsi, bien que l’envie de le saisir violemment et de l’embrasser jusqu’à qu’il en perde la raison lui traversa l’esprit une seconde. Ou deux. Puis, quand enfin le regard hésitant d’Andrea se posa au fond du sien, il sut que rien n’était totalement perdu. Il pouvait y lire certes l’appréhension tant devinée mais également la promesse d’un peut-être, une nuance d’espoir qui raviva le sien.

- Je… Doucement.

Elio ne saisit sans doute pas l’ampleur de ces paroles. Parce qu’il n’avait pas l’habitude qu’on l’interrompe, parce que c’était d’avantage l’empressement qu’il connaissait chez ses « victimes », et parce qu’Andrea était le premier à le repousser dans un début si enflammé. Il ne comprit pas sans doute que dans ce simple mot il y avait tellement plus de choses. Elio maîtrisait les mots qui font plaisir, pas les autres. Heureusement pour Andrea, le jeune homme connaissait en revanche parfaitement le langage du corps. Aussi ne se trompa-t-il pas à cette réaction. Quiconque aurait pu comprendre que « doucement » voulais bien dire « doucement », et qu’il pouvait reprendre mais en attendant simplement quelques instants à chaque étape. Le même, mais différemment. Alors que dans la voix qui tremblait de manière imperceptible pour quelqu’un de peu habitué, dans le geste à la fois distant et doux d’Andrea lorsqu’il posa ses doigts sur l’épaule d’Elio, ce dernier saisit ce qui, sans doute, était le seul moyen de faire comprendre à son compagnon que ce soir était nécessaire. Alors, le laissant quelques instants seul maître de la situation pour le rassurer au moins sur son pouvoir engagé, Elio le fixa intensément tandis qu’il partait à la découverte de son ventre, effleurant son nombril et caressant maladroitement ce qui se trouvait sous le tissu sombre qui habillait le serveur. Lui laissant ce temps, indispensable, Elio ne revint pas immédiatement à lui, l’abandonnant un moment à son expérience. Il pouvait ainsi en profiter pour détailler son visage, plein d’émotions contradictoires, s’attarder sur ses yeux, la courbe de son nez, le rebondi d’une fossette naissante même sans sourire, l’arrondi d’un menton et la courbure d’une bouche.

Enfin, il reprit. Enserrant sa mâchoire d’une main, prenant ainsi dans ses doigts jusqu’à la naissance de sa nuque, Elio y appliqua une douce pression, simplement pour marquer sa présence. De la même main, un doigt se détacha pour caresser la joue tandis que son autre paume venait à la rescousse. D’un pouce attentionné et tout ce qu’il y avait de plus calme, Elio passa lentement la pulpe de son doigt sur les lèvres d’Andrea, déjà gonflées par leurs baisers. Doucement, il y effleura la peau si sensible, fit quelques allées et venues sur la lèvre inférieure avant d’appuyer très légèrement sur l’ensemble des deux, comme pour sceller le silence lorsqu’il lui répondit.

- Ça va aller, Andrea. Je ne ferai rien que tu ne veuilles vraiment pas.

Tout était dans le vraiment. C’était son corps qui parlerait, par l’envie dans ses yeux et le désir de ses membres plutôt qu’un sursaut d’hésitation malvenu qui franchirait ses lèvres. Elio se promettait alors de ne tenir compte que des demandes véritables d’Andy, que de ses réelles frayeurs comme celle qu’il essayait à présent de calmer, et pas les fausses angoisses de dernière minute qui détruiraient tout.

- Tu peux te détendre, maintenant. Je vais te montrer, je suis là.

A partir de ce moment-là, tous ses gestes se firent extrêmement lents. Ils ne perdirent pas en passion, mais celle-ci était devenue retenue, contrôlée. Elio savait ce qu’il faisait, et ne cédait plus à l’irrésistible attrait de ce jeune homme qui lui avait un instant fait perdre la tête. Il allait faire attention pour ne pas le faire regretter, il allait lui apprendre le plaisir tout en respectant les peurs qu’il dégageait de manière manifeste.

Doucement, il enleva sa propre chemise et révéla à son partenaire un torse offert, légèrement blanchâtre, un détail qui ne se remarquait guère à la lueur de la lune filtrant par les carreaux de la petite fenêtre de cette chambre. Il prit les mains d’Andrea, et les amena à lui, à ses lèvres. Les embrassant tendrement, Elio couvrait la peau ainsi offerte de délicates offrandes avant de guider les paumes du jeune homme en direction de son torse, le laissant venir doucement à la découverte du corps d’un autre homme. Pendant ce temps, il se rapprocha doucement et, tout en commençant très lentement à défaire les boutons de la chemise d’Andy, il l’embrassa. Pas le baiser rapide qu’il lui avait lancé en guise de défi ni l’échange passionné d’un peu plus tôt. Quelque chose de très doux, qui se voulait rassurant et qui occupait l’esprit du jeune homme autant qu’il lui laissait le temps de réfléchir et de se faire à la situation. Elio vint d’abord à la rencontre des lèvres d’Andrea, y posant les siennes dans un simple contact, avant de glisser vers la partie supérieure de la bouche du jeune homme, afin de la saisir, puis de la relâcher. Enfin, seulement, il revint à la charge tout aussi précautionneusement et laissa sa langue partir à la redécouverte d’un territoire peut-être trop rapidement foulé. Après quelques minutes ainsi, Elio fit enfin glisser le tissu de la chemise de son compagnon, laissant simplement leurs deux bustes faire connaissance. Ainsi, sa peau électrisait celle du blond et ses bras, pour l’instant sages, ne faisaient qu’enserrer le corps fragile contre le sien. Et ils restèrent là, s’embrassant l’un contre l’autre sans réellement faire plus pour la suite des évènements. Elio bouillait intérieurement, et pour calmer son esprit quémandeur il se devait d’imaginer la suite des opérations, et se concentrer presque uniquement sur le grain de la peau d’Andrea qui touchait la sienne.

Cette lenteur calculée n’avait cependant pas pour but de faire redescendre la passion entre les deux hommes, Elio mettant un point d’honneur à toujours rester présent au contact de son jeune partenaire, afin de le garder dans ses bras et imprimer dans sa chair l’envie de lui, le désir de venir à sa rencontre. Il fallait encore qu’Andrea fasse certains pas en sa direction, accepte de venir à lui pour ensuite s’abandonner totalement. Elio le comprenait, et si cela était particulièrement dur pour lui il mettait un point d’honneur à ce que ses petites parties de jambes en l’air se passent toujours pour le mieux, aussi était-il tout bonnement inconcevable de presser l’ignorant ou de le bousculer, ce qui l’aurait fait fuir malgré son ego, malgré son envie, malgré tout le reste. Et surtout, le barman ne voulait pas perdre un client, d’autant que son ego à lui en prendrait un coup s’il n’était pas capable de satisfaire même les plus difficiles, les plus effrayés et les plus réfractaires de ses compagnons d’un soir ... ou plus. Enfin, Elio osa un geste en descendant l’une de ses mains qui prenaient racine dans le dos d’Andrea pour passer sur ses fesses avant de stopper son geste, d’y rester et de céder au le délice de leur baiser pour murmurer à son oreille :

- Tu veux que j’arrête ?

Evidemment, une réponse négative était fortement attendue et prévisible. Mais Elio tenait à l’entendre, déjà pour faire prendre conscience à Andrea de ce qu’il voulait et ce à voix haute pour ne plus pouvoir le fuir, et ensuite pour lui montrer que son approbation n’était pas qu’un détail dont il se moquait éperdument. Et, en attendant la réponse de son amant dans un futur sans doute très proche, Elio conserva sa position, étreignant simplement Andy contre lui, le laissant ressentir l’envie qui se personnifiait en chaleur et respiration accélérée, lesquelles étaient partagées par eux deux. Il était temps de le laisser accepter leur évolution. Andy, dis moi non ...
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Andrea Vitaly

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[Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] Vide
MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeDim 27 Mar - 15:37

Never opened myself this way
Life is ours, we live it our way
All these words I dont just say
And nothing else matters


Cette requête formulée du bout des lèvres n’était pas vraiment une preuve de faiblesse. Non la vraie faiblesse ça aurait été soit de partir tout de suite sans chercher à persévérer ou alors de ne rien dire malgré le malaise. Non il fallait bien que je fixe les choses car rien n’allait pouvoir se faire dans l’état dans lequel j’étais. Cette angoisse qui me serait le cœur, celle d’une des premières fois, cette montagne à laquelle je faisais face. Il fallait que je m’en sorte et ce n’était pas facile comme ça dans le feu de l’action. Peser le pour et le contre, calmer ce stress qui courait sous ma peau, faire face à son interlocuteur, tout ça était loin d’être facile. Et j’aurais mille fois été plus rassuré devant le fil de l’épée d’un bretteur de ma connaissance plutôt qu’ici, fasse à quelque auquel je ne savais comme réagir. Pour l’instant je n’avais pas l’intention de laisser tomber, il suffisait que je me calme et si Elio comprenait, ça pouvait peut être bien se passer. Parce que demander des conseils, ça faisait un peu tâche dans ce genre de situation et je regrettais l’espace d’un instant une connaissance qui aurait pu m’en fournir. Mais il était également trop tard pour les regrets. Ce qui avait été dit était dit. Et il y avait intérêt à ce qu’Elio ne considère pas ça comme une faiblesse ou esquisse un sourire moqueur. Ca je ne l’aurais pas supporté. Pas alors que je faisais tout pour à l’origine, lui faire plaisir.

Ce qui était en soi des plus étranges. Moi, faire plaisir à quelqu’un ? Alors que le seul intérêt que j’avais était le mien ? Moi je voulais lui faire plaisir ? Non je confondais, je cherchais à me faire plaisir. Sauf que pour l’instant, c’était un peu raté. Certes, je ressentais cette chose qu’on pouvait appeler le désir, l’envie. Mais en contrepartie, l’angoisse était bien présente aussi. Je me faisais plaisir parce que je découvrais enfin minutes après minutes le sens du monde de la nuit, l’essence d’Elio, la danse des ses mains, le fer de lance de sa volonté. Oui ce n’était qu’égoïste. Et pourtant, je ne pouvais m’empêcher de penser à ce que lui pensait. De moi, de cette situation, s’il n’était pas blasé, énervé, ennuyé. Si ce n’était pas lui qui au final allait partir à cause de mes hésitations. Et rien qu’à cette idée, je sentais une épine se planter dans mon cœur. Comme si ça m’aurait réellement gêné qu’il m’abandonne là. Et c’était pour ça que j’essayais aussi de lui faire plaisir tout en essayant d’oublier les pensées endogènes et néfastes que produisait mon cerveau. Sûrement que si je le plantais là, ça aurait fait souffrir son égo de séducteur, mais peu à peu je me rendais compte que la réciproque était totalement vraie. Sauf que moi, je n’avais pas de raison tangible pour justifier mon égo blessé. Certes je n’étais pas au meilleur de ma certitude, mais il n’empêchait qu’envers et contre tout, si on faisait abstraction de cette peur, j’étais bien contre lui. Cette sensation de chaleur, celle de quelqu’un d’autre était largement supérieure à la chaleur produite par le soleil, par une couverture. Celle que dégageait le corps d’Elio était différente, était mieux.

Alors je m’y essayais, pour voir. Ce qu’il avait déjà fait, serais-je capable de le reproduire ? Hésitant et maladroit, je tentais à mon tour de le caresser comme lui pouvait le faire. Ca ne devait pas être bien fameux. Mais en faisant ça je surmontais lentement mes peurs. Alors qu’il suffisait simplement de faire abstraction de ses mains, de la honte que ça pouvait bien occasionner. Tellement plus facile à dire qu’à faire. Surtout qu’il était en train de me laisser faire, comme pour pouvoir voir à quel niveau j’en étais. Sûrement le niveau moins un en ce qui concernait la chose. Mais cela me donna un regain de motivation. S’il me laissait faire, ça voulait dire que je pouvais avoir moi aussi voix au chapitre, même à moindre mesure. Allez Andrea, ce n’est pas si dur. Ma main continua de caresser doucement son ventre alors que celle sur l’épaule se déplaça en direction du cou, comme pour chercher, pour comprendre ce qui m’était inconnu dès lors. Je me penchais rapidement pour poser un baiser sur le cou, comme il avait pu le faire aussi mais je reculais bien vite, gêné. Non c’était loin d’être simple, j’avais l’impression d’apprendre à marcher. C’était comme si je faisais quelque chose de mal, ou alors j’étais juste simplement mauvais. Ah mais c’était pitoyable. C’était n’importe quoi mon attitude il valait peut être mieux arrêter les frais ici. Je baissais la tête comme pour montrer que finalement, ce n’était pas la peine.

Mais à mon grand étonnement, Elio ne semblait guère gêné par mes tentatives maladroites pas plus que mes demandes. Ce qui durant un court instant me mit du baume au cœur. Je sentis sa main revenir sur ma mâchoire, relevant la tête. Je frissonnais et croisais de nouveau son regard. Son regard rassurant m’apaisa un peu. Il n’avait pas encore l’intention d’abandonner sa quête de longue haleine dans l’espoir d’enfin me faire venir ici. C’est vrai que ça aurait été bête de gâcher tant de temps et tant d’énergie pour finalement laisser tomber dans les starting block. Ce n’était sûrement pas son genre. C’était à espérer. Je savourais ses douces caresses, la sensation de ses doigts allant et venant doucement sur mon visage, comme la promesse de d’aucune brusquerie. Je fermais les yeux pour les ressentir alors que ma main continuait de parcourir doucement le ventre, les hanches d’Elio sous sa chemise. La tension dans mes épaules déclina un peu. Ses doigts sur mes lèvres. Ses quelques mots que j’attendais plus que je ne le croyais.

- Ça va aller, Andrea. Je ne ferai rien que tu ne veuilles vraiment pas. Tu peux te détendre, maintenant. Je vais te montrer, je suis là.

Malgré moi, comme un automatisme ancré, j’embrassais les doigts qui se présentaient à moi. Remerciement peut être d’avoir dit ça. Je n’étais aucunement rôdé aux manières de remercier, par les mots ou par les gestes, mais celui là était ce qui me semblait le plus logique à faire à cet instant. Pourtant ça semblait aller de soi, c’était comme naturel alors que c’était loin de l’être. Je ne faisais peut être que ce que j’avais déjà vu, en vrai, dans des films, des livres. Le manque d’expérience se faisait sentir et j’essayais de compenser avec les maigres ressources que je pouvais avoir sur le sujet. Mais il fallait bien avouer que ces quelques mots m’avaient fait tant de bien. Le poids sur le cœur s’allégea à son tour. Il n’avait pas l’intention de partir, il n’avait pas l’intention de m’ignorer et de continuer sur sa lancée. Non il avait réellement fait attention à ce que j’avais dit, à ce que je ressentais. Il avait vraiment compris le problème auquel j’étais confronté. Et en ces mots il l’avait rendu obsolète et décadent. Il ne pouvait pas mentir, pas comme ça, pas avec cette tête, avec ces yeux. Un rire nerveux de soulagement failli sortir de mes lèvres. Il aurait pu me raconter n’importe quoi que je l’aurais cru, car il disait ce que je voulais entendre, il disait ce qu’il fallait pour me rassurer. Alors tant que ça calmait le tambour de mon cœur, j’étais prêt à écouter, même des choses qui n’étaient pas vraies.

Tout allait bien se passer, il allait me montrer, il l’avait dit. Je respirais mieux. Il fallait avouer que ça faisait comme un choc de sentir son corps ne plus être qu’une boule de nerfs tendue. Et ça faisait clairement du bien. Elio reprit alors doucement ses assauts, mais ce n’était plus comparable avec avant. Et pourtant… Pourtant je sentais quand même l’envie de mon interlocuteur transparaitre dans ses gestes, dans ses attentions, mais il se retenait. Pour moi il ne voulait pas aller trop vite, trop fort et il avait réellement tenu compte de mes attentes, de ce que j’avais implicitement signalé. Là aussi c’était bien la première fois depuis bien longtemps que ça m’arrivait. Qu’on se préoccupe de moi. J’envoyais si souvent balader les gens qu’ils n’avaient pas envie de s’occuper de si ça pouvait aller ou pas. Il n’y avait personne pour me demander de mes nouvelles ou pour chercher à comprendre pourquoi je faisais une tête de six pieds de longs. Je savais que ça marchait avec réciprocité aussi je ne m’en plaignais pas, je me fichais bien de ce que les gens pouvaient penser. Mais avec Elio, c’était si différent. Même si je n’avais pas toujours été des plus agréables avec lui il avait continué à venir, on s’était cherché tous les deux un bon moment. Et là je ne ressentais plus l’envie de l’écraser de mépris comme j’en avais envie pour les autres. Lui il était différent. Même si c’était pour servir ses propres intérêts à lui, il avait réussi à me faire changer, il se préoccupait de moi… Et pire encore, je m’intéressais à lui, je cherchais à lui rendre la pareille. Chose quasiment impossible à concevoir il n’y avait pas si longtemps. Lui seul, cet inconnu, ce barman, lui seul avait réussi à fissurer un peu ce mur de mépris que j’instaurais autour de moi. Il ne pouvait pas avoir conscience de ce que ça pouvait bien représenter. Et je me garderais bien de lui dire. Ce n’était pas la peine de lui donner encore plus d’importance qu’il ne s’en donnait sûrement déjà. Demain était un autre jour et je ne voulais pas dire des choses sous l’effet de ses attentions que je regretterais plus tard.

J’essayais de ne pas détourner les yeux de gêne alors qu’Elio laissait glisser sa chemise. J’avais déjà vu des hommes torse-nus, mais ce n’était pas vraiment dans ce genre de situation. S’en était loin même. Et Elio était beau. Ce corps que la faible lueur lunaire mettait tant en valeur. Bien loin de ce à quoi je pouvais ressembler. Je me laissais guider, pour l’instant, c’était ce que j’avais de mieux à faire. Jusqu’à ce qu’il pose mes mains sur sa peau, cet endroit que la chemise ne m’avait pas permis d’aller voir. Je pris une discrète inspiration et commençait à laisse glisser mes mains, mes doigts sur ce torse. J’étais sûr que des légères rougeurs étaient apparues sur mes joues mais j’osais espérer que dans le noir, ça ne se remarque pas trop. Juste ne pas y penser, ce n’était rien pour l’instant, et j’avais envie d’essayer, de lui montrer. Je frissonnais alors que ses doigts me frôlaient la peau en déboutonnant ma chemise. Ce n’était toujours rien, pas de quoi en faire une maladie. Juste respirer.

Un nouveau baiser. Qui me fit tant de bien. Je me rendis compte à quel point la sensation de ses lèvres m’avait manqué. Il savait réellement embrasser, il savait quoi faire pour que ça donne du plaisir. Et je me laissais faire en répondant un peu, sachant très bien que pour le moment, je ne pourrais arriver à son niveau. Un de mes bras passa sur sa taille pour l’enlacer alors que le second caressait toujours délicatement le haut du torse. Lentement, nos deux langues se rencontrèrent de nouveau, mais de façon bien moins virulente qu’il y avait dix minutes. Non le ballet était beaucoup plus sensuel, beaucoup plus recherché et je le suivais, le laissais mener la danse tout en essayant de reproduire instinctivement. Ma chemise glissa, je la laissais tomber et j’enserrais un peu plus sa taille alors que nos deux torses nus se frôlaient enfin. J’ouvris un peu plus la bouche, me laissant aller à ce baiser lent et lascif. Reflet de ses bras autour de moi, je fis pareil, cherchant à retrouver une proximité. Nouveau soupir qui s’échappe. Tant pis je n’y pouvais rien si doucement mais sûrement, l’envie remontait. Ca, je pouvais encore gérer. Ce n’était pas encore de trop je pouvais le surmonter. Tant que ça ne descendait pas plus bas j’y arrivais.

Et il faisait tout pour m’y amener quand même, je le sentais mais j’évitais d’y penser. Je ne faisais que profiter de ce changement d’attitude qui m’étonnait autant qui me rassurait. Doucement, tendrement, à l’écoute de ce que je pouvais lui montrer. Je ne l’aurais pas cru comme ça. Vraiment pas. J’espérais juste ne pas le forcer à agir ainsi. Mais j’en doutais car s’il avait vraiment envie, il choisirait quelqu’un d’autre. Il ne prendrait pas cette peine. Non je voulais le croire, croire ce qu’il disait, ce qu’il me prouvait minutes après minutes. Ca allait passer, ça allait se faire. Pourtant j’étais bien comme ça. Bien dans ses bras, bien à passer lentement mes doigts dans son dos, à savourer ses lèvres contre les miennes, laissant doucement mais sûrement monter un désir commun. Et nous le sentions chacun.
Et puis je me raidis quelque peu, mes muscles se tendirent en sentant sa main commencer à descendre, ma pression sur sa taille se raffermit tandis que je me forçais à penser à autre chose. Oh, c’est pas grand-chose de plus, t’affole pas comme ça t’es ridicule. Il a promis. Moi qui m’accrochais ainsi à cette promesse illusoire et éphémère, c’était vraiment du jamais vu. Mais ses mots étaient les seuls auxquels je me raccrochais pour me rassurer. S’il faisait tant d’effort pour me mettre à l’aise, j’en ferais aussi pour ne pas paniquer inutilement. Il s’y connaissait, il n’y avait pas de raison que tout foire. Non il fallait juste essayer, se mettre dans la tête de tenter.

- Tu veux que j’arrête ?

Non, pourquoi tu dis ça ? Pourquoi tu me tends cette perche alors que j’essaie justement de ne pas la saisir ?! En même temps, l’entendre me demander ça, c’était justement ce dont j’avais besoin pour renforcer ma façon de m’auto rassurer. Si je lui disais oui il arrêterait. Mais est-ce que c’était vraiment ce que je voulais ? Je suppose que dans l’absolu oui. Idéalement, je repartirais chez moi, je reviendrais un autre soir et on recommencerait où on s’était arrêté. Mais je savais que j’en étais incapable. Incapable de revenir à ce niveau que l’on avait atteint. Si on ne continuait pas maintenant, rien ne se ferait jamais. Mais était-ce vraiment un mal ? Une occasion manquée certes mais… Mais… Je ne pouvais en aucun cas la renouveler avec quelqu’un d’autre qu’Elio. En arriver là, c’était déjà énorme, et refaire tout ce travail de s’apprivoiser avec quelqu’un d’autre me semblait insurmontable. Non j’étais bien avec lui, pourquoi essayer ailleurs ? Et puis je n’allais pas lui faire l’affront d’arrêter maintenant. Ce n’était plus pour lui prouver quelque chose, mais bel et bien pour lui faire plaisir, pour lui rendre l’effort qu’il faisait pour moi.
Malgré tout je n’arrivais pas à lui dire. Moment de flottement. « Allez, soit courageux Andrea, il t’a promis d’aller doucement et de te montrer. Tu vas enfin découvrir ce sur quoi tu t’interroge depuis des semaines. Allez cède ça va aller, la peur sera là, mais si vite remplacée par ces nouvelles sensations que tu vas ressentir… »

Oui arrête oui arrête oui arrête. Non continue.

Il était temps. Temps de choisir. Mais je ne voulais plus réfléchir. Sûrement que ce qui allait suivre allait me faire sursauter plus d’une fois, j’allais vouloir me rétracter devant cet inconnu. Mais j’allais signer quand même. Il suffisait juste que mon corps tout comme mon esprit acceptent progressivement ce que j’allais leur imposer.
Je me penchais alors vers l’oreille d’Elio et lui soufflais des mots que je n’avais jamais prononcés à personne et qui voulaient tant dire. Mais c’était la vérité en ce cas présent.

- Je te fais confiance.

Mes lèvres happèrent de nouveau les siennes alors que je le serrais plus fort contre moi, pour oublier dans son odeur, sa présence, ce qui pouvait potentiellement me gêner, m’effrayer. Je descendis dans son cou comme pour m’y cacher, pour échapper à son regard. Mes lèvres posèrent lentement des baisers sur sa peau si fine à cet endroit, essayant de lui faire ressentir ce qu’il arrivait à faire avec moi. Prétentieux ? Oui jusqu’au bout. Tout pour se persuader que tout allait bien se passer.

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[Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] Vide
MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeMar 29 Mar - 11:02

Pour commencer par une bien étrange réflexion, on peut parfois être légitimement amenés à se demander, qu’est-ce que le sexe ? Pour certains, tout. Pour d’autres, rien. Et le juste milieu ? Il se fait tout petit, chacun essayant de partir à la recherche d’une sensation, d’une émotion qui caractériserait cet acte purement physique et pourtant étonnamment proche des émotions. Bien plus que ne l’est un serrement de mains, dans la rue, quand on retrouve quelqu’un que l’on n’a pas vu depuis longtemps. Bien plus que le simple fait de recouvrir une tranche de pain de confiture. Une affaire de culture ? Certainement, mais pas seulement. Le sexe, c’est avant tout un moyen de reproduction. Certains laissent ce pouvoir immense libre de toute entrave, mais dans une société où il n’est plus possible de faire totalement confiance, où les gens volettent de ci de là et dans laquelle une grande famille est un fardeau plus qu’un véritable bonheur, c’est une illusion profondément ancrée dans la bêtise humaine. D’autres le brident, tentent de dominer un pouvoir bien supérieur au leur. Faire plier les lois de la Nature ne réussit pas à l’Homme, cela a été maintes et maintes fois montré. Alors quoi, dans une culture qui sacralise un acte pourtant commun dans l’esprit de certaines autres, il est bien difficile de l’intégrer et de lui faire une place, entre les obligations et les limites imposées par le temps. Mais ce pouvoir premier n’est pas unique, et l’acte en lui-même peut se parer de milles déclinaisons, de complications ou de détournements qui prennent toujours plus d’importance que la tartine de pain et sa confiture.

Mon premier, c’est désir. Celui qui brûle, celui qui consume l’envie pour faire place à une impulsion violente, passionnelle et dévorante. Qui ne peut espérer être assouvie que par sa consécration. Du serrement de cœur au corps qui se manifeste bruyamment, à grands coups de regards langoureux et d’approches plus ou moins subtiles, le désir est imminent. Il prend à la gorge, vous empêche toute réflexion, vous soumet à lui. Résister parait alors bien futile, quand on prend conscience de la force que le désir dégage à lui seul. De quoi rendre fou si on tente le contre-courant, parce qu’aller dans le sens inverse des envies les plus inconscientes mais également les plus virulentes, c’est annihiler toute la logique de son être. S’y soumettre, ou le ravaler en vain et le voir s’exprimer dans toutes les manifestations moins évidentes de sa personne ... Mon deuxième, du plaisir. C’est évidement la principale raison qu’évoque la majorité des gens. Évidente, peut-être trop, c’est la réponse idéale à la définition du sexe, c’est le pourquoi tout le monde le fait, la valeur intrinsèque et inaltérable. Ceux qui ne rentrent malheureusement pas dans cette case inévitable le disent rarement, ceux qui ne comprennent pas pourquoi ce partage a tant de valeur. Pourtant, ça n’a pas tant d’incidence que cela, pourtant cela fait surtout plaisir à l’autre. Sensation d’être un peu à part, de ne pas être normal. Se questionner, se culpabiliser, savoir que quelque chose là-dedans ne fonctionne pas. Pour diverses raisons, on se fiche desquelles, ces pantins de chair ne vivent pas cet instant, n’en retirent rien si ce n’est un questionnement un peu flou. Cette déferlante de plaisir, ils ne la connaissent pas. Cette envie de toujours découvrir, d’aller plus loin, de voir partout ailleurs si c’est identique. Désirer, se fondre dans la jouissance du corps, être à l’écoute d’une enveloppe qui n’est pas en adéquation avec ses émotions, c’est l’inconnu. Se sentir à part, complètement rejeté de la plus simple et la plus évidente des choses, vu de l’extérieur. Ce qui unit les êtres, ce qui les rassemblent, ce qui les rend un, même pendant un court instant, même si ce n’est que pour un soir. Le plaisir, qui se fait surtout remarquer par son absence, parfois.

Mon troisième, c’est souffrir. C’est une technique impayable qui, même lorsque tout plaisir est absent, permet de briser, de déchirer un cœur, une âme. C’est la soumission, la fin de quelque chose. C’est le souvenir honteux d’un moment, d’un soir, qu’on regrettera toute sa vie. Cette ruelle qu'il ne fallait pas emprunter, cet homme qu’il ne valait mieux pas rencontrer. Pas de meilleur moyen, sans doute, de dominer quelqu’un en peu d’effort. Un peu de force, et il n’est même pas besoin de tortures ou de violence physique, piétiner un sacre habité par une image positive et plaisante suffit. La culpabilité, les remords, la souffrance s’invitent sans attendre et rongent, font partir cet esprit torturé en miettes, n’en laissant que de vagues bribes comme ultime réminiscence. Il suffirait de ne pas accorder à la chose l’importance qu’on lui porte, il suffirait de fermer les yeux et de ressentir cette soumission comme une simple claque. Rien de plus difficile, pourtant, que de modifier sa perception d’une chose, d’en rendre l’impact moindre et de rejeter toute retombée qui aurait une force inouïe. Et mon tout fait des souvenirs. Parce que le corps se souviennent, parce que le cœur est meurtri bien plus qu’on ne le pense, parce que les images et les bruits reviennent sans cesse. Le choc sourd et régulier d’une canalisation qui fuit, déversant des larmes sur le sol, les faisant éclater en un infime bruissement que seul l’esprit totalement ouvert à son environnement pourra déceler. Le crissement des roues des voitures qui passent à l’extérieur, les paroles indistinctes de quelqu’un dans les étages. Mais aussi la couleur des rideaux qui encadrent les vitres sombres et mal nettoyées, la table si peu éloignée qui devait soutenir un gâteau d’anniversaire. Les bougies qui ne sont pas là, les rires d’amis qui ne sont jamais venus. Et surtout, ne pas écouter les mots de la seule chose importance de la pièce.

Ne pas déchiffrer les sons faits de mots, les phrases qui brisent, le ton victorieux et fier de sa proie, les murmures éhontés qui glissent jusqu’à une oreille sans parvenir au cerveau de celle qui prie pour que tout cela s’arrête. Puis finalement, l’indifférence. Revoir la scène encore et encore, la vivre souvent même. Ne rien faire pour la fuir, pour l’éviter. Se convaincre qu’on le mérite, justifier l’acte du traître en reprenant ses propres mots, les intégrer et les faire siens, comme pour éviter de se disloquer dans l’espace et l’infini désespoir qui vous guette. Devenir distante, se barricader derrière un mur et laisser son corps faire semblant d’apprécier ce que son esprit refuse. Se détacher de tout, et voir la scène de l’extérieur, plaindre la victime sans avouer que l’on aurait envie de se secouer pour se réveiller. Ouvrir les yeux sur l’horreur est trop difficile, encore vaut-il mieux tout refuser en bloc et se perdre dans le même temps. Faire mine d’apprécier, se convaincre de jouer la simulation. C'est ça, la souffrance qui découle du pouvoir et du sens de ce sexe. Et pourtant il faut vivre, ou plutôt survivre. Être heureux, malheureux, mais vivre pour toujours là où les vieilles fleurs se fanent, là où les autres baissent les bras. Se raccrocher aux couleurs d’un futur qui peut se construire à deux, en pensant aux souffrances infinies qui naissent chaque jour, se dire qu’on n’est pas le plus malheureux. Quand dans la confiance tout s’effondre, il reste toujours la misère du monde, qui n’est rien devant un adieu. Et puis l’espoir, celui de l’union de deux êtres. La signification ultime, celle dont toute jeune fille rêve dans son adolescence. On peut la trouver d’emblée, la perdre immédiatement. N’en garder qu’un lointain souvenir ou la retrouver par la suite, quand on ne l’attend plus. La pressentir, y croire, la deviner sans vouloir la précipiter. En dessiner des contours incertains, se dire que peut-être, il y a quelque chose derrière tout cela. Que peut-être, la lumière au bout du tunnel n’est pas qu’une invention pour rassurer les plus démunis devant la défaite. L’espoir, celui de tous. Que le désir peut amener le plaisir, sans passer par la case souffrance.

Et voilà les multiples définitions du sexe, voilà les différentes facettes de ce mot qui abrite tant de choses dans son ombre. Elio aurait sans doute aimé se vanter de faire partie uniquement de la première catégorie, bien sûr. Qui ne rêve pas de pouvoir exploiter quelque chose uniquement dans sa plus entière satisfaction ? Il aurait souhaité n’être que plaisir et luxure dans ses draps qu’il trempait régulièrement de sueur. Sauf que, rien n’est jamais aussi simple et si le premier passant pouvait sans nul doute le ranger dans une case, facilement et sans se poser de question, la quête du jeune homme était menée par une toute inspiration. Le barman qu’il était perdait un fragment de son âme à chaque fois qu’il prenait ces corps tremblotants dans ses bras, puisqu’il se dénaturait et violait sans vraiment vouloir s’en rendre compte des notions comme le partage et la sincérité. Mettant au placard tout ce qu’il s’évertuait à considérer comme mensonges et ridicules inventions humaines, celles-ci le rattrapaient et grignotaient peu à peu la faible éthique qu’il lui restait, l’entraînant toujours plus loin et profond dans ses bêtises. Ne pas croire au Diable ne vous protégera pas de lui. C’est comme tenter d’ignorer l’évidence, tout va bien tant que personne ne nous met devant le nez la vérité implacable et irréfutable. Jusque là pourtant, personne n’avait eu la force nécessaire pour briser le monde d’Elio et le jeune homme ne se doutait pas un seul instant que le gamin qui à présent le prenait à son tour dans ses bras, l’étreignant dans le même temps, allait changer quoi que ce fut à sa manière de voir les choses. Mais ceci est une autre histoire et en parler maintenant n’aurait aucun sens, étant donné qu’Elio ne se doutait pas un seul instant de ce risque encore silencieux et même inexistant.

Ce n’était en effet pas le câlin timide qu’ils échangeaient qui allait perturber le jeune homme, prêt à prendre son temps s’il y gagnait un peu d’initiatives de la part de son compagnon, qui enfin se mettait à répondre à ses avances. En effet, les mains tant rêvées se mirent en mouvement et partirent à la découverte de ce qu’Elio lui offrait en toute sincérité. C’était à la fois agréable et étrange de sentir ce tout petit garçon, du moins dans le monde du serveur, se débrouiller comme il pouvait. Se calquant sur ce qu’on lui avait appris sans trop le dire, il tentait pour déceler les réactions de son partenaire. Celui-ci ne se fit pas prier pour lui montrer qu’il allait dans la bonne voie, insistant de ses propres caresses lorsqu’il appréciait le contact hésitant et maladroit. Elio ne pensait pas souvent au lendemain, pourtant lui venait à l’instant l’idée de revoir Andrea dans un futur proche, plusieurs fois s’il le fallait, dans le but de lui apprendre toutes ces choses auxquelles il était étranger. Il pourrait peu à peu lui faire découvrir les différentes facettes de cet art qu’il croyait maîtriser mais dont il ne connaissait que les techniques et les gestes. Pour lui, cet échange physique n’avait pas d’âme, pas de consistance aussi restait-il distant et totalement néophyte devant une partie de ce monde qu’il pensait connaitre de long en large. A Andy, il pourrait montrer tout l’autre côté de la pièce, celui qui pourtant n’est pas le plus glorieux, celui qui les unissait ce soir et qui continuerait, du moins l’espérait-il, à les lier jusqu’à ce que l’un des eux en ait assez. Elio serait sans doute le premier, étant donné qu’Andrea ne serait sans doute rassasié qu’après avoir totalement abandonné ses peurs et sa fierté, tandis que le barman qu’il était n’attendait plus que cette étape. Délivrante pour l’un, elle signerait pour l’autre la fin du jeu, la fin du spectacle qu’il se plaisait à croire mener.

Mais pour l’heure il y avait bien d’autres choses à penser, comme les approches du jeune homme qui se blottissait peu à peu contre lui, tentant de chasser son appréhension et sa fierté quand il confia à son délicat bourreau que sa confiance lui était remise. Évidemment, Elio ne saisit pas toute l’ampleur que ces simples mots avaient pour Andrea. Il comprenait, on l’a déjà dit, le langage du corps et peu celui des mots aussi mit-il le soudain rapprochement d’Andy sur le compte de l’envie qui chassait le doute maintenant qu’il avait accepté à voix haute que son tortionnaire continue. Ce qu’il fit, d’ailleurs. Laissant quelques instants sa main là où elle était, Elio répondait aux baisers qui venaient mourir dans son cou en embrassant par à coups la tête blonde nichée contre lui, profitant de son autre main pour apprécier la douceur de ces cheveux qui le chatouillaient de temps à autre. Puis, il vint placer ses deux avant-bras contre les hanches d’Andrea, le soulevant à moitié pour le faire faire demi-tour avec lui, quelques pas plus loin que la porte. A présent, Elio faisait face à son lit tandis qu’il tenait toujours contre lui le corps de son compagnon, qui faisait dos au meuble si accueillant. Nouveau baiser, nouveau moment de calme tendresse, comme un pré requis à la suite des évènements qui allaient indubitablement s’enchainer. Tout en douceur, Elio reprit son geste d’un peu plus tôt en faisant remonter une cuisse contre sa jambe, appuyant de ses doigts contre la peau encore protégée. Puis il relâcha la jambe d’Andrea. Recommença. Plusieurs fois, afin d’habituer le jeune homme à son contact, à sa présence, en allant chaque fois un peu plus dans l’intérieur de la cuisse.

Nouveau retournement, encore, et Elio s’assit sur son matelas tandis qu’Andrea pendant quelques instants l’observait de haut. Puis, le barman saisit sa main et l’attira à lui. Les corps qui se retrouvent, les lèvres qui se soudent à nouveau. Temps d’attente, infiniment court mais aussi interminable. Elio fit s’asseoir Andrea sur lui, savourant alors le contact de son épiderme et caressant sans plus s’arrêter mais sans précipitation ce que sa chemise avait découvert. Le temps passait, et à chaque passage sur le ventre du jeune homme, Elio se faisait plus insistant, plus explorateur. Jusqu’à ce, finalement, il se saisisse de la ceinture chic de son partenaire pour l’ouvrir, en le fixant droit dans les yeux. Il marqua un temps d’arrêt et se décida à reprendre la parole, doucement et un sourire plein de promesses à la bouche.

- Ferme les yeux, si jamais tu en as besoin.

Et ressens, ressens. Car il n’y a que cela qui compte. Nouvelle étreinte, temps qui passe encore pour les deux amants qui apprennent doucement à se découvrir, bien qu’en l’état actuel des choses l’excitation d’Elio se fasse douloureusement sentir. Puis, enfin, avec une hardiesse qui défiait tout ce qu’il avait fait ce soir, Elio posa sa main sur l’objet de sa convoitise. Seulement une main, qui signifiait sa présence par une douce pression, qui laissait entrevoir le plaisir qu’il y aurait par la suite et qui permet à tout le monde d’imaginer ce qu’il va dorénavant se passer dans cette chambre. A force de temps, de douceur et de patience Elio était sûr d’arriver à ses fins. Enfin, il allait pouvoir vivre ce qu’il attendait depuis déjà un certain temps. Son emprise se fit plus assurée, tandis qu’il comblait le buste d’Andrea de caresses et de baisers afin de ne pas le faire fuir aussitôt. Finalement, sa main se relâcha un instant juste pour agripper le haut d’un vêtement qui se faisait gênant et commençait tout juste à le faire disparaitre ...
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Andrea Vitaly

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[Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] Vide
MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeMer 30 Mar - 7:44

Tonight we escape, just you and me


Sûrement qu’il ne pouvait pas appréhender l’effort que je fournissais à présent. Pour lui dire ces mots. Pour lui dire ce que je pensais être incapable de confier. Car je lui confiais bel et bien quelque chose. Et c’était moi-même. Peut être que lui avait l’habitude, mais heureusement qu’il semblait conscient que ce n’était pas mon cas. Je n’avais jamais été porté sur la chose, sur le sexe. J’avais d’autres trucs à penser, à faire, et puis quand on n’aimait à ce point pas les gens, c’était difficile de construire une relation qui amenait à ce qu’on couche ensemble. Je savais qu’il n’y avait pas besoin forcément de relation pour coucher avec quelqu’un mais je ne cherchais pas ça non plus. Je ne ressentais pas de besoin de ce côté-là. Les histoires d’amour finissent mal en général. Ca pouvait aussi s’appliquer aux histoires de cul. Je n’avais pas envie de tenter l’expérience comme ça alors que je n’y connaissais rien. Je me disais que ça viendrait en temps et en heure et je n’étais pas pressé plus que ça. Chercher des informations sur la lune rouge me paraissait bien plus intéressant que de chercher à connaitre les « plaisirs charnels ». Je ne voulais pas me lancer à corps perdu dans quelque chose d’inconnu. L’inconnu était bien uniquement quand je le contrôlais. Et puis je me disais que personne n’arriverait à me supporter dans tous les cas alors le problème était réglé. Aussi je ne m’attendais pas à en arriver à un tel point, dans un tel lieu avec une telle personne. Comme quoi, le dicton disant que ça arrive vraiment quand on ne s’y attend pas était véridique. Et c’est assez curieux de se dire que les hasards, les rencontres forgent une destiné. Pour une fois, mon caractère avait été assez mit à mal par quelqu’un. A la suite d’autres rencontres, comme celle de Vargas. J’avais été bousculé et Elio s’était engouffré dans la brèche. Et je l’avais laissé faire. Et voilà où on en était.

Et malgré la peur et le reste, je voulais me prouver à moi-même que j’en étais capable. Que ce n’était pas grand-chose. Qu’il fallait bien y passer un jour. Jamais je n’aurais cru que ça puisse se faire avec un homme. Mais après tout quoi ? Ca m’évite de me sentir ridicule et inexpérimenté devant une fille, ça m’évite de mentir. Ce n’était pas tant le sexe qui comptait mais comment ça pouvait se passer. C’était une épreuve de plus. Le plus dur évidemment c’était de montrer quelque chose que personne d’autre n’avait vu. Sans qu’il le sache, Elio était en train de collectionner mes premières fois. C’était alors plus simple que ne se soit pas connu avant. Rien ne nous liait, c’était plus simple de s’oublier dans des bras inconnus. Je comprenais alors le réflexe que certains pouvait avoir de coucher à tout va avec les premiers, premières venues. Elio ne dirait rien à personne, personne n’en saurait jamais rien. C’était rassurant de se dire ça. Mais il n’empêchait que se dévoiler et montrer son corps nu à quelqu’un n’était jamais facile, même quand on était imbu de soi même et orgueilleux, ce n’était pas pareil dans ces moments là. Et j’en faisais durement l’expérience. En retour, c’était également voir le corps opposé. Et ça aussi c’était toute une affaire. Pourtant il n’y avait rien de laid dans le corps d’Elio, rien à jeter c’était sûr. En plus j’étais sensé connaître le corps masculin. Plus que le corps féminin, c’était clair. Et pourtant la gêne n’était pas moins grande. Je n’étais pas prêt à aller l’explorer de façon plus proche et c’était pour ça que mes mains restaient sur le haut du corps, il allait déjà descendre lui, je savais que ça allait arriver. Je lui aurais volontiers (ou pas) fait une fleur, mais j’en étais bien incapable à ce niveau. Arriver déjà là relevait de l’impossible, alors il ne fallait pas trop en demander non plus.

S’il y avait bien une chose que je trouvais dérangeante ici, outre la sensation de confinement, c’était le silence. Le bruit unique des respirations, les vêtements qui glissent, les caressent, les soupirs, les murmures, les battements de cœur. Une simple formalité pour les habitués, un concert pour les autres. Entendre ses propres désirs informulés par la voix, la respiration qui s’accélère sous l’envie. Il y avait de quoi gêner. Cependant il n’avait aucun moyen de mettre de la musique, n’importe quoi qui aurait pu cacher ces bruits, qui m’aurait fait penser à autre chose. Quelque chose de doux, comme la façon dont il m’apprivoisait. La musique qui prend qui berce qui électrise qui laisse aussi épuisé qu’après avoir couru. La musique qui était capable de tant de chose. Moi-même j’en écoutais très souvent, le matin, la nuit, devant mon ordinateur, dans la rue. La musique qui colorait le monde, qui remplaçait allègrement la compagnie des gens. On pouvait la changer, lui faire dire ce qu’on souhaitait, la modifier, la mettre fort jusqu’à avoir les oreilles qui sifflent ou juste en bruit de fond, discrète. Il était trop tard pour demander un fond sonore, j’allais devoir m’habituer aux soupirs. Que j’étais certain de me forcer à retenir jusqu’à ce que ça soit trop dur. Peut être comme cette nuit là que je n’arrivais qu’à me rappeler qu’à peine. « Des bribes d’un rêve semblables à un souvenir lointain. Je veux rassembler ces fragments.» Ou peut être valait-il mieux les oublier pour de bon. Juste un écart et beaucoup d’alcool. Mais dans un sens, ça m’aurait peut être permis d’être moins mal à l’aise à l’instant. Dans les deux cas ça aurait été compliqué.

De toute façon je préférais être maitre de mes moyens que de boire encore à tout oublier. Peut être que ça aurait satisfait Elio qui aurait pu faire ce qu’il voulait mais je l’aurais amèrement regretté. Je le savais. Tout comprendre signifiait faire l’effort. Et je lui avais dit que j’étais prêt à le fournir. Même de façon hésitante. J’inspirais profondément tout en continuant à lui caresser le dos, le ventre, le torse. Ce qui au départ était si compliqué devenait peu à peu plus logique. Oui passer sa main là, repasser ici du bout des doigts, sentir d’autres caresses en retour. Un échange sans parole mais qui véhiculait tellement plus. Sa main qui passe dans mes cheveux, déclenchant malgré moi quelques frissons que je m’efforçais de cacher en embrassant son cou de plus belle. Ca va, ça ce n’était pas trop dur non plus. Et puis si moi ça me plaisait, pourquoi pas lui ? Ses mains douces et attentionnées. Ses lèvres du même acabit. Ca ne pouvait pas mal se passer, pas alors qu’il me montrait tant de preuve de bonne volonté. Ce qui bloquerait, si jamais ça arrivait, ce n’était que moi.

Elio me fit soudainement faire demi-tour, me supportant. J’étais si léger que ça ? Enfin, c’était plutôt positif que négatif. Et puis force était de constater que j’étais bien dans ses bras. Là aurait pu convenir un léger bruit de synthétiseur. Ponctuant la douceur des gestes. Et puis une voix qui enfle doucement, montrant la future évolution de la situation. Elio reprit où il s’était arrêté avant que je le stoppe. Mais une fois de plus de façon beaucoup moins pressante qu’avant. De nouveaux frissons me parcoururent. Des frissons de froid… De plaisir ? S’il n’y avait pas de musique, je me ferais la mienne intérieurement. J’avais suffisamment de matière et de connaissances pour le faire. Je me laissais faire cette fois, sans rechigner alors que le synthé se taisait, laissant place à une légère mélodie électrique d’une guitare. La vitesse au dessus cette fois. Ca ne pouvait que monter crescendo et j’en étais acteur moi aussi. Si c’était quelque peu gênant, le contact me dérangeait moins qu’avant, je m’habituais à cette sensation, même sur des endroits plus intimes. Chercher ses lèvres et les trouver.

Les premiers débuts à la batterie alors qu’on virevoltait. Je le regardais, alors qu’il était assis sur son lit. Sur cet endroit qui serait le théâtre des actes à venir. Alors que nous étions tout juste au lever de rideau. Je me laissais attirer à lui sans résistance pour venir retrouver ses lèvres encore. Mes bras l’enlacèrent au niveau des épaules alors que je laissais les siens se balader. Bridge. Le retour des notes aigrelettes du synthé pour une douceur qui laissait présager la tempête. Qui finit par arriver parce que maintenant, Elio ne pouvait se contenter que de ça. Cymbales et batterie, coup de tonnerre alors que son regard me fixa à tel point que je ne pouvais m’en détourner. Battements de cœur qui s’accélèrent, musique qui elle, se calme, laissant la basse faire son office. Ground Zero.

- Ferme les yeux, si jamais tu en as besoin.

Hochement de tête. Etrange cette prévenance. Mais si agréable. Mes paupières se fermèrent alors qu’un violon strident retentit, mes mains se crispèrent sur ses épaules. Non il ne fallait pas le voir comme ça. Juste comme une douce mélodie. Ca va aller Andrea. Tu n’es pas obligé de le regarder, tu peux juste le laisser faire, sentir, écouter, vivre. Faire abstraction de ce qui te dérangeait. Oui échappe-y. L’envie de bousculer se fit pressante. La guitare fut de retour accompagnée de la batterie. Show must go on. Je clignais des yeux et l’entrevis. Ca allait. Montre moi Elio réchauffe moi, fait moi ressentir encore cet electric feel. Mes baisers se firent plus pressants, mes mains descendirent dans le bas de son dos, effleurant le haut des fesses. Le prénom du barman tournait en boucle dans ma tête. Fait moi ressentir je suis prêt. Sauf que j’étais incapable de le dire. Il valait mieux lui montrer autrement. Alors que je sentais mes derniers vêtements glisser à leur tour.

Je m’appuyais sur lui, le rythme musical s’accélérant, mise en scène pour un nouvel acteur. Il basculait allongé sur le lit et je me remis à l’embrasser de plus belle, cherchant sa langue. Si moi-même je m’y mettais, peut être que là aussi ça serait moins dur. Maelstrom dans mon cerveau. Nos corps plaqués, ma main qui passe dans ses cheveux, l’autre qui lui caresse la hanche, les siennes qui ne s’arrêtent guère. C’est là que je compris qu’une fois la machine enclenchée, il était dur de l’arrêter. Et c’était le cas. Par mon geste symbolique j’avais donné le feu vert qu’Elio attendait. Nouveaux soupirs de bien être alors que me température corporelle recommençait à monter. Sans que je les contrôle, mes mains agissaient toutes seules, cherchant à se frayer un chemin pour faire plaisir alors que mes lèvres refusaient de lâcher les siennes. La machine était en marche et avançait furieusement vers le point de non retour. Concert et public en folie alors que je commençais à me sentir vaguement serré dans mes derniers remparts de tissu.

Tonight we will be
Finally on our own

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Aurelio Pastore

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MessageSujet: Re: [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio]   [Love's Out Act III] Et la digue fut brisée [Elio] I_icon_minitimeDim 11 Sep - 18:01

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Imaginons rien qu’un instant qu’Elio puisse avoir un ami. Ou une amie, en fait. Elle serait en effet plus facile à appréhender pour le jeune homme, qui avec les hommes conservait toujours une certaine relation de domination. Il n’y pouvait rien mais un visage masculin éveillait toujours en lui l’envie de posséder, le besoin de conquérir. Qu’il soit partant ou pas, celui qu’il avait ciblé cédait bien souvent. Avec peu de refus à son actif, Elio trouvait même qu’il était alors beaucoup plus amusant de se diriger vers cette voie, peuplée de défis en tous genres qui l’attendaient au détour d’un verre ou d’une conversation. Les femmes, c’était presque facile, à force, quoique rien ne soit véritablement compliqué pour le serveur du Love’s out. Se montrer prévenant ou faussement distant, laisser parler son désir ou se faire un compagnon à l’écoute, toutes ses réactions étaient adaptées, réévaluées en fonction de la réponse qu’on y faisait. Et avec les femmes, il était pour le jeune homme facile de taper juste. Car une femme s’adapte d’avantage, elle arrondit les angles et accepte de se faire passer pour une autre si c’est pour séduire le serveur, si c’est pour se montrer sous un jour abordable. Elles jouent à la perfection la comédie dans laquelle Elio se complait en temps normal, lui volant la vedette et avec elle la satisfaction d’avoir réussi à surmonter une minuscule épreuve de pacotille. Il ne restait alors que quelques caresses échangées rapidement, sans la passion dont pouvait faire preuve Elio lorsqu’on lui résistait et lorsqu’il devait faire sortir sa proie de sa tanière.

Oui, les hommes sont plus amusants, plus difficiles, plus fiers. Combien de fois Elio avait du faire semblant de respecter une homophobie feinte d’un de ses clients, en se retenant de toutes ses forces de ne pas lui rappeler leur soirée de la dernière fois. Un homme suit ses propres envies, ne se préoccupe pas de l’autre, va droit au but et n’assume pas. Un homme ne joue pas, un homme ne ment pas. Sauf Elio. Et dans tout cela on pouvait reconnaitre Andrea, qui ne faisait pas exactement tout pour plaire à son serveur, malgré l’envie manifeste qu’il dégageait de le faire. Il restait maladroit, apeuré, fier et terriblement réticent à l’idée de se faire avoir aussi facilement par un homme qu’il ne connaissait pas réellement, pas vraiment. Pas du tout. C’était ça, le challenge, bien que cela fasse bien longtemps qu’Elio ne soit confronté à autant de précautions à prendre. Il avait l’impression de devoir enfiler des gants de soie pour déplacer un objet précieux, et se forçait à réfléchir à chaque instant pour trouver la meilleure attitude à adopter, le meilleur comportement possible. Ne pas le brusquer, mais avancer tout de même. Ne pas le faire fuir, et le pousser à venir jusqu’à lui. C’était difficile, fastidieux, long et horriblement frustrant pour lui. C’était merveilleusement bon. Et cela le serait encore plus lorsque le but serait atteint, cela serait simplement délicieux de le voir ou de l’entendre s’abandonner totalement. Car jusqu’à la dernière minute, Elio pouvait encore faillir, se précipiter et perdre.

Et donc, si Elio avait eu une amie, disons blonde et menue, disons un peu trop portée sur l’alcool et les discussions sans queue ni tête, disons Alexis, peut-être aurait il eu envie à ce moment là de lui en parler. De lui raconter cette situation. Sans doute le traiterait-elle d’idiot en lui demandant s’il n’avait pas un peu perdu la tête de vouloir entrainer un gamin dans la noirceur de sa vie et dans le vice de son quotidien ? Peut-être. Qui savait ce qui pouvait bien se passer dans la tête de la jolie blonde. Elio se souvenait vaguement lui avoir parlé d’Andrea mais il n’avait alors -et encore aujourd’hui- que si peu d’importance que le jeune homme était bien en peine de se souvenir ce qu’elle avait bien pu dire en réaction à ce prénom. Conseil de bien s’en occuper ? C’était possible, mais assez étrange venant d’elle étant donné qu’Alexis savait très bien qu’il passait son temps à faire n’importe quoi avec les clients, elle en avait été la victime il y a de ça bien longtemps, avant qu’ils ne lient cette amitié plus forte que l’attirance physique et que l’entente sexuelle. Il aurait pourtant pu lui en parler, à elle, de cette sensation de s’échapper totalement dans une douceur et une prévenance qui ne lui étaient pas familières. Faisait-il cela uniquement pour aller jusqu’au bout du défi, ou bien simplement pour faire plaisir à Andrea ? Normalement, donner du plaisir était un dommage collatéral quasiment systématique mais dont il ne faisait pas grand cas lorsqu’il s’agissait de lui. Alors la deuxième hypothèse semblait déjà s’effondrer sur ses principes.

Pourtant, ses doutes s’envolèrent alors qu’Andrea était sur lui, si proche, si accessible. Alors qu’il n’avait toujours été qu’un gosse à apprivoiser voilà que maintenant il le tenait entre ses jambes, et que les bras du jeune homme venaient enserrer ses épaules tandis qu’Elio continuait ses caresses. On aurait dit qu’il avait enclenché le pilote automatique pour tout ce qui relevait de la douceur, agissant avec une prudence extrême tout en se concentrant sur la difficile transition vers quelque chose de plus sérieux, vers quelque chose de plus passionnant et passionné. Tout n’était plus qu’un vaste défilé incertain dans lesquelles les règles n’avaient ni consistance ni limite. Les gestes d’Elio semblaient se faire dans une mare de coton, rendant tout plus souple, tout plus intime et plus agréable pour Andrea. Il le pressait contre lui avec précaution, l’embrassait avec délectation et le regardait avec dans les yeux cette lueur de patience qui, sans doute, expliquait la présence d’Andrea ici. S’il en avait parlé à Alexis, sans doute eut-elle rigolé. Il y avait de quoi, à l’imaginer ainsi aussi délicat et à l’écoute du corps de son partenaire. Chaque mouvement d’Andrea était observé, interprété par Elio qui rajustait sa conduite en fonction des gémissements ou des frissons de celui qui devenait au fil des secondes son amant. Il fermait les yeux, tentant d’oublier la présence du barman. Ce dernier pouvait ainsi en profiter pour le regarder plus longuement.

S’il trouvait son corps plutôt agréable à détailler, Elio prit cette fois-ci le temps d’observer son compagnon. La peau était fine, blanchie par de nombreuses heures passées à l’intérieur, mais le toucher était des plus agréables. La blondeur de ses mèches qui chatouillaient tour à tour le nez et le menton d’Elio rayonnait doucement à la maigre lueur qui filtrait de sous la porte et à travers la fenêtre. Il était là, frémissant et hésitant entre entreprendre et subir. Un indécis qu’il ne fallait pas brusquer mais qu’il convenait d’accompagner, un enfant qui apprend des choses qu’Elio aurait aimé qu’il découvre plus vite. Car la candeur et la naïveté de ses gestes ne faisaient que lui donner envie d’arracher avec force ses derniers habits pour le couvrir des meilleures intentions. Le sentir découvrir un autre endroit que son dos tiraillait ses muscles qu’il bandait pour les empêcher de se mettre en mouvement, la pression de son corps sur le sien réveillait en lui des instincts qu’il connaissait bien pour les employer et les cultiver depuis longtemps déjà. Et toujours, toujours les baisers qu’ils échangeaient lui faisaient peu à peu perdre la raison et la réflexion. Une langue râpeuse contre la sienne, Elio crispait sa main sur la cuisse d’Andrea. La sienne dans ses cheveux bruns, une autre sur son flanc, Elio faisait glisser la fermeture éclair du jeune garçon et écartait les pans de son habit. La sensation d’un désir qui répondait au sien contre son bassin, Elio enlevait tout à fait le pantalon d’Andrea, le jetant au loin.

Et le spectacle habituel commença, avec d’autant plus de lenteur qu’Elio voulait qu’Andrea découvre chaque instant, chaque moment de ce qu’il se faisait un plaisir de lui enseigner. Ils n’étaient tous les deux là que pour le plaisir d’une nuit, demain tout serait terminé. C’était sans doute la dernière fois qu’ils se croisaient, bien qu’Elio souhaite clairement remettre ça avec lui. Jusqu’à le briser, jusqu’à laisser sa marque, son empreinte. Jusqu’à satisfaire ce désir inassouvi de compter pour quelqu’un au point de faire naitre le manque, la frustration, la jalousie parfois. Tout ce qu’il rejetait, tout ce qui signait la fin d’une de ses innombrables relations d’un soir ou deux. Elio se serait donné des claques devant tant d’égoïsme alors qu’il se débarrassait des derniers remparts qui existaient entre eux. Toujours lentement, toujours en l’embrassant pour le rassurer, Elio en vint peu à peu à le caresser à un endroit qui lui avait bien manqué depuis leur première rencontre. Doucement encore, il roula avec lui sur le lit pour se positionner au dessus d’Andrea, l’embrassant encore et encore sans retenue, sans limite, sans se lasser. A chaque fois il y avait un peu plus d’impatience et de passion, mais toujours Elio se retint jusqu’au dernier moment. Ultime attente qui déboucha enfin, après tant de préparations et de promesses, d’assurance et de prévenance, sur ce qu’Elio attendait tant.

Le sentir autour de lui, si proche, combla le jeune serveur qui exultait d’avoir finalement réussi. Il resta là longtemps, attendant le bon moment. C’est seulement lorsqu’il lut un imperceptible assentiment dans les yeux d’Andrea qu’Elio se mit en mouvement. Ses mains l’enserraient, se gardant près de son compagnon, tandis que ses lèvres rendaient hommage à son visage, son cou, la naissance des ses épaules. Il prit tant de précautions que cela dura bien plus longtemps qu’à l’ordinaire, il fit tant attention à Andrea que le barman du Love’s out s’écroula de fatigue alors qu’il avait réussi à retenir la jouissance de son partenaire pour l’amener à sentir le plaisir de venir ensemble. Dans les bras l’un de l’autre. Et, alors qu’Elio retombait sur le matelas, éreinté, il prit vaguement conscience que le jeune blond partait après avoir récupéré ses affaires, un peu honteux sûrement. Il imaginait la rougeur de ses joues, la chaleur de ses pommettes, la gêne dans son regard. Et c’est sur l’idée que tant d’attentions le poussaient à une fatigue trop intense qu’Elio s’endormit, totalement nu, entre des draps qui venaient d’accueillir un instant plutôt important pour Andrea, mais somme toute assez banal pour lui mis à part la dose excessive de douceur dont il avait fait preuve. Il faudrait qu’il en parle à Alexis. Mais pas ce soir, pas demain. Plus tard. Le temps d’y repenser et de rationnaliser tout ça en admettant que ce n’était rien de plus qu’un dépucelage dans les règles.

Il était vraiment trop bon.
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