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| Je ne suis pas de ceux. [Fini] | |
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Psuchè Hadzis [Sôma] Membre- pactisant
| Sujet: Je ne suis pas de ceux. [Fini] Ven 9 Juil - 22:02 | |
| « Par ces deux grands yeux noirs, soupiraux de ton âme, O démon sans pitié! verse-moi moins de flamme; Je ne suis pas le Styx pour t'embrasser neuf fois. » Et nous venons d' ici.Et Psuchè avait de la peine, presque, pour ce grand corps qui semblait mourir encore et encore, pour cet enfant qui croyait être le loup dans la cours des grands. Qui qu’il fut, quoi qu’il puisse lui faire, il n’en avait cure. Mais ça Lysandre ne le savait pas. Mais ça, Lysandre ne pouvait pas le deviner. Il ne pouvait pas deviner la résignation, le peu d’intérêt à vivre, la fuite des souvenirs et les cauchemars qui peuplent ses nuits. Alors l’enfant se perdait en insolence sous le regard désintéressé d’H. qui fixait droit devant lui avec détermination. Oh, Lysandre pouv ait bien penser ce qu’il voulait, il s’en moquait éperdument. Loin d’être bête et de jeter des menaces en l’air, il toisait le gamin d’un regard sombre et absent tout à la fois. Il l’énervait. C’était clair, c’était viscéral. Il l’exaspérait. Il lui en voulait presque d’avoir l’air aussi démuni, de paraître si faible, si soumis à des substances que Psuchè avait même du mal à imaginer, les sourcils froncés et l’air anxieux. Lysandre l’aurait sans doute traité de niais. Sans doute. De fait, Psuchè avait toujours été le genre d’homme ne supportant d’aucune façon la dépendance. Encore moins lorsque la dépendance en question risquait de lui faire perdre les pédales. Minutieux, ordonné et maître de lui-même, il était inenvisageable pour lui de ne serait-ce que tenter. Et voilà le gamin qui surgissait, les yeux explosés, le corps secoué de spasmes. Alors c’est ça, ta dépendance, Lysandre ? C’est de ça dont tu es si fier ? Tu es si pitoyable. Il aurait voulu le lui dire. Il aurait voulu le plaquer au mur, lui déchirer le visage. Il aurait voulu l’arrêter là. Comme on écrase un vase trop beau au sol, comme l’on émiette les restes de faïence. Et c’est un début de nausée qui lui saisit le ventre lorsqu’il reposa ses yeux sur l’adolescent pâle. De ce genre de nausée brutale qui lui lavèrent un instant le cerveau avant de le balancer au milieu de la rue, au milieu de la populace. Et les regards vous cherchent. Et les regards vous trouvent. Et c’est l’ordalie, le jugement divin de ces braves gens. Ils étaient trois peu banals, peu commodes. Le camé, le gay et le pitbull. Aha. Psuchè eut un rictus mauvais en voyant une mère écarter un enfant de leur passage. N’y pensons plus.
« A défaut d’être réellement ce que tu penses que je suis, j’ai au moins assez de maîtrise de moi pour éviter de sombrer dans ta déchéance. »
Et il alignait les mots comme on lançait des poignards. Lentement, avec calcul. Pour être sûr de faire mouche. Pour être sûr qu’il comprenne. Ne me prend pas pour tous ces abrutis que ton charme fait blêmir, je ne suis pas de ceux qui courbe la tête devant ton corps infantile. Alors oublie. Oublie tes prétentions. Oublie tes faux-semblants. Ni toi ni moi ne sommes là pour ça. Il ne lui dit pas un mot de ses pensées, se saisit juste de sa main pour traverser de crainte que Lysandre ne chute. Oh, n’allez pas croire qu’il se faisait du souci pour le drogué. Non. C’était juste son mot de passe, son sésame, la clé d’un nœud inextricable dans lequel il s’était emmêlé. Et il avait besoin de Lysandre pour atteindre le dealer. Touché coulé, Tristan. Une nouvelle danse ? Et tout irait bien. Et tout irait mieux. Alors ses doigts se resserrèrent légèrement sur les doigts de Lysandre. Un peu plus doux, rasséréné. Alors Sôma se lança dans un amphigouri des plus alambiqués, beuglant dans ses oreilles une histoire de souris dont il serait fou amoureux et avec qui il souhaiterait convoler sur l’heure. Rien d’intéressant. Rien de plus, rien de moins que d’habitude et H. le chassa de sa main libre comme une mouche gênante qui lui tournerait autour. Et Sôma rageait. Et Sôma trouvait le camé un peu trop intéressant. Comme une pointe de jalousie dans son ego d’enfant. Alors, lui, Psuchè, lui, il t’intéresse ? Quelle misère. Il n’est rien, pourtant. Rien qu’un pitoyable humain qui joue au plus fort. Rien qu’un pitoyable humain qui pense pouvoir avoir le dernier mot. Un rire saisit son corps de fil de fer alors qu’il appuyait subrepticement ses lèvres contre l’oreille de Lysandre, ton de voix enjouée, phrases lancées en l’air, sans sens, trop sensée, qui sait ? Sôma était toujours incompréhensible.
« Tu sais, Amour, mon chou, mon chéri, les yeux rouges comme ça jurent beaucoup avec ton teint. Tu devrais devenir un shtroumpf, tu serais plus sexy, Psu’ il te kifferait grave, comme ça. T’sais il est un peu pédophile sur les bords avec ta gueule d’ange tu- … »
« Tu » rien du tout. Une preuve supplémentaire que Sôma n’était pas pusillanime, perdu dans ses délires grotesques sous le regard brutalement furieux de Psuchè qui lui avait envoyé son coude dans les côtes sans pour autant daigner relever les informations mensongères que la tête rose avait formulées à son propos. Sans intérêt. Et puis quoi, encore ? Désirer cette espèce d’adolescent aseptisé ? Ce rebelle de canapé qui paye sa came parce que c’est cool, que c’est in et qui se détruit au passage parce que – putain – c’est trop drôle de se sentir vivant en se faisant mourir à petit feu ? Qu’ils aillent au diable. Surtout ce pantin des substances illicites avec ses yeux bien trop grand qu’il ne pouvait s’empêcher d’admirer du coin de l’œil. Bien trop beau pour son bien. Bien trop attirant pour ses intérêts. Oublie, Psuchè. Il n’est pas de ces gens qui valent la peine de risquer ton rêve. Il n’est pas de ces gens à qui tu peux faire confiance. Il n’est rien. Ni plus ni moins. C’est un moyen. C’est un outil. Mais n’espère pas plus, tu y brûlerais tes ailes. Et tu n’as pas besoin de ça. Tu n’as besoin que de ton flingue et de ton stella, cette ombre rosâtre qui tourne autour de vous en sifflotant alors que vous pénétrez dans les ruelles sombres de Milan. L’odeur était atroce et Psuchè plissa le nez, essayant de déterminer ce qui pouvait sentir si mauvais. Pas les poubelles, non. Pas l’odeur de la gerbe. Pas l’odeur de tout ça. C’est lorsqu’il manqua de chuter sur le cadavre d’un chat étendu au milieu de la venelle qu’il comprit enfin où il était tombé.
Bienvenue en enfer, mes enfants.
« J’espère que ça vaut le coup, gamin. », chuchota-t-il péniblement en écartant le cadavre du pied. « J’espère aussi que tu te rends compte que tu te conduis comme une catin à vendre ton âme à un homme qui te soumet. », il haussa les épaules, fit quelques pas de plus. « Après tout, ça ne regarde que toi. »
Exact, Psuchè. Alors cesse de le regarder avec cette sorte d’anxiété empathique qui semble affecter toutes les cellules de ton cerveau. Alors cesse de guetter le moindre signe de renoncement sur le visage de ton vis-à-vis. Il n’est pas comme toi, Psuchè : la décadence l’a déjà tué.
Dernière édition par Psuchè Hadzis [Sôma] le Lun 12 Juil - 20:51, édité 1 fois |
| | | Lysandre A. Hill [Heaven] Membre- pactisant
| Sujet: Re: Je ne suis pas de ceux. [Fini] Dim 11 Juil - 19:12 | |
| « Jamais, c’est terriblement long... » Peter Pan. Et il valsait avec la mort. Dansait avec la vie. Se riant de chacune. Se riant de tout. Profitant de tout ce que son cerveau dépravé pouvait réclamer, pouvait quémander, pouvait salir. Il aurait voulu souiller son propre corps pour le laisser choir dans un cloaque de dégoût et d’immondices. C’aurait été encore pire. Il aurait été encore plus miteux. Pour peu qu’il sombre, pour peu qu’il puisse continuer à regarder avec un rictus amusé les gens bien propres sur eux exécuter des oratoires alambiqués sur tout ce qui concernait la sainteté, pour peu qu’il puisse envisager le pire dans tout ce qu’il y avait de meilleur… Alors il serait comblé. Il n’aurait pas besoin de toute cette mésestime, de toute cette connerie qui s’insère et zigzague entre les venelles de Milan, il n’aurait besoin de rien ni de personne. Pas même de cette ombre fantomatique qui lui murmurait chaque soir ses plus noirs secrets, ses cauchemars les plus denses et les plus froids, qui lui rappelait qu’avec sa disparition, elle sortirait de son long coma pour revenir vers lui, pour présenter à nouveau à ses yeux ses mains dévastatrices, pour avaler son autre œil. Son dernier. Il avait peur. Il n’était qu’un gamin effrayé perdu dans un monde dans lequel il ne se reconnaissait pas. C’était le vice et l’amertume qui l’avaient accueilli. C’était son cerveau désinhibé, c’était les grands yeux sépulcraux de la luxure, l’orgie indigente qu’il pouvait réaliser avec son corps. Et lui, cet étranger, tentait de dicter son comportement, tentait de lui inculquer un mode de vie qui lui donnait envie de vomir. Ce n’était pas drôle. Il n’avait pas besoin de vivre correctement. Il n’avait pas besoin d’aimer la vie pour réussir. Ce n’était pas pour rien qu’il avait fini sa première année de médecine major. Ce n’était pas parce qu’il avait étudié, parce qu’il avait fait du gringue à ses professeurs ou parce qu’il s’était acharné à paraître. Il n’y avait pas de faux-semblants. Il y avait juste la came, l’acide. Tout ce qui pouvait rendre son cerveau inapte à réfléchir, tout ce qui pouvait calmer ses neurones sans cesse en mouvement, toujours en fonction. Il haïssait l’humanité et elle le lui rendait bien. Et il lui aurait ri au nez si sa bouche avait pu fonctionner correctement. Il se déclarait plus fort. Meilleur. Maîtrisant son corps et son âme. C’était drôle. C’était bien pour ça qu’il accompagnait un gamin éploré dans les ruelles les plus sombres de Milan. C’était pour ça que son regard s’était illuminé comme les guirlandes décorant un sapin de Noël lorsqu’il avait évoqué l’idée de se rendre de ces lieux insalubres et pestilentiels. 90% de la population aurait refusé sa proposition, se serait détourné avec répulsion. Les 10% restants concernaient les camés comme lui et ceux ayant sombré encore plus bas, ceux ayant déjà atteint le fond et creusant encore pour continuer à s’enterrer dans toute cette pourriture, pour se couvrir de tous les vices et de tous les péchés de ce monde. Sa réaction apathique en disait long. Témoignait elle-même de sa condition. Mais il ne prit pas la peine de lui signaler le paradoxe de sa phrase. C’était trop stupide. Un sourire vint orner son visage alors qu’il se détournait, maîtrisant une nouvelle crise. Le manque se faisait de plus en plus ressentir. Ca le torturait. Ca lui faisait mal. C’était comme anéantir le peu de vitalité qu’il lui restait, comme consumer chaque cellule de son épiderme, brûler chaque organe au fer rouge, marquer, détruire, écrouler, renverser, ruiner, démanteler… Il avait l’habitude. Ce n’était pas la première fois. Ce n’était pas si terrible. Il savait qu’il serait vite soulagé, il savait que ce n’était qu’un mauvais passage à franchir. Une étape de plus dans sa longue descente vers les enfers. Aurait-il le droit de confier son obole à Charon ou serait-il condamné à errer sur les rives du Styx, esprit esseulé, incapable de rejoindre son Cerbère, prisonnier à jamais d’un entre deux-mondes, rejeté par le vivant et expulsé par la mort même. La tête rose l’emmerdait.Psuchè avait saisi sa main, l’empêchant de tomber. Ce contact lui avait arraché un frisson, au milieu de son délire. Depuis combien de temps ne l’avait-on pas touché pour autre chose que pour en réclamer plus ensuite ? C’était doux. Ca lui rappelait elle avant que la démence ne vienne ronger sa cervelle et ne la rende totalement dépendante, soumise à une force qui la dépassait, ne se sentant pas capable de lutter pour tenir éveiller sa raison et préférant enterrer tout ce qui composait autrefois son être. Elle avait été faible. Une pauvre créature rapidement dévorée. Il les avait entendus rire. Se congratuler. Se féliciter de cette prise. Ces graines de la folie qui avait éclos au sein même de son esprit, déchirant son âme et poussant son intelligence et tout ce qui constituait sa gentillesse, sa bonté, sa générosité, son envie, ses désirs, à se retrancher derrière des remparts desquels ils n’étaient jamais ressortis. « Ma gueule d’ange sert seulement à payer ma came. »Marmonna-t-il entre ses dents, ignorant la tête rose qui s’acharnait à se coller à lui, à glisser ses lèvres au creux de son oreille pour y murmurer des insanités et des conneries dignes de lui. Il n’avait jamais vu un stella con. C’était le moment ou jamais de pouvoir se cultiver. Un soupir s’échappa de sa bouche alors qu’ils atteignaient enfin les ruelles tant attendues. L’ Eldorado. Le Paradis. La lumière vers laquelle se dirigent tous les esprits errants une fois qu’ils ont accompli leur vengeance. Pour lui, c’était l’apogée de la douleur, parce qu’il savait qu’elle se calmerait bientôt. Alors elle en profitait pour s’insinuer partout, prenant de l’ampleur et allant déchirer ses organes, labourant ses poumons de coups, l’empêchant d’avaler l’air nécessaire à sa survie. Sa respiration s’était faite sifflante alors qu’il sentait que son seul œil encore présent allait bientôt quitter son orbite. Il aperçut Psuchè écarter le cadavre d’un chat. Pour un gros dur, le voilà qui jouait les timorés devant un malheureux petit animal mort. Il était mignon, quand il le voulait. Pouvait-il se montrer adorable derrière les airs d’armoire à glace qu’il voulait se conférer ? Ca le fit sourire. Ca lui donnait envie de s’amuser, malgré les langues de feu qui sillonnaient son corps à la recherche de matière à détruire là où il ne restait déjà plus rien. Une catin ? Vraiment ? Psuchè avait des airs apostoliques, une sorte de tyran déguisé qui voulait remettre les gosses dans le droit chemin. Lysandre n’avait plus rien d’un gosse. Il avait passé depuis longtemps cette douloureuse étape, l’achevant avec ce baiser caché avec la lune, terminant la fin de cette époque avec l’apparition de la crétine qui continuait de masquer sa présence. Heaven. Il la sentait. Toute proche de lui, lui caressant le dos de temps à autre. Si elle n’avait pas voulu demeurer invisible, sûrement aurait-elle ri tout le long du chemin. « Une catin ? »Et ses lèvres s’étirèrent en un immense sourire alors qu’il se saisit de sa main, entrelacent ses doigts avec les siens et le pousse contre un mur. Il colle son corps au sien, s’amuse avec sa main libre à effleurer chaque parcelle de son visage, chaque petite touche de sa peau hyaline. Il était beau, Psuchè. Il avait cet air de splendeur inachevée, arrêté avant la concrétisation du rêve de l’artiste. Il sentait couler sur ses doigts un sang factice, invisible, alors que son esprit touche le sien, y pénètre, découvre une série sanglante, mortuaire, effrayante à souhaits, digne d’un drame familial. Ses lèvres cherchent les siennes, ne lui laissent pas le temps de réagir avant de se poser et de se retirer. Il veut en savoir plus. Il veut deviner ce qui se cache derrière tous ces meurtres, derrière ce costume de cours compliqué et fastueux que Psuchè tend à dresser devant lui pour brouiller les pistes. Ce ne serait pas difficile de deviner. De savoir. D’agencer chaque morceau du puzzle qu’il distingue pour former une phrase qui s’étirerait avec délice dans les méandres de son esprit. « Mais n’est-ce pas toi, le vrai prisonnier ? Condamné à errer, tuant tous ceux qui t’empêchent d’atteindre ton but. »Son but. Il ne sait pas encore ce que c’est. Ca ne saurait tarder. Il y mettrait tout son cœur et toute son âme. Et sur sa tombe, il pourrait rédiger une opulente épitaphe, vantant ses mérites, occultant ses gloires avortées. Ci-gît, Psuchè Hadzis, citoyen modèle, capable de tout pour atteindre ses rêves.Et il dépose un nouveau baiser sur ses lèvres, souriant, oubliant jusqu’à son manque avant de se détourner et de se saisir à nouveau de sa main, s’enfonçant dans les ruelles sales, contemplant les graffitis, ornements aristocratiques de ces artères alimentant le trafic interne de Milan. « On ne sait jamais où il est. Il faut le trouver. Mais soyez certains que lui nous trouvera en premier et s’amusera à nous regarder. »Son dealer. Son maître. Son tortionnaire. Son cauchemar. Il en avait besoin. Maintenant. |
| | | Psuchè Hadzis [Sôma] Membre- pactisant
| Sujet: Re: Je ne suis pas de ceux. [Fini] Dim 11 Juil - 21:02 | |
| « Imbécile! — de son empire Si nos efforts te délivraient, Tes baisers ressusciteraient Le cadavre de ton vampire! » Et c’est l’enfant de tes cauchemars, celui qui s’agite, celui qui sait, qui te devine. Celui qui se faufile dans ton esprit en s’agrippant à tes doigts alors que, blême, tu retiens ton souffle. Et tu es fou, fou, fou. Fou de l’entrainer ici, de serpenter entre les murs aveugles, fou de crisper ta main sur ton pistolet alors que, regard vacillant, tu le vois tanguer sur ses pieds, raffermir sa prise sur tes doigts. Et il parle, Lysandre, il parle trop, il parle bien, il agace Psuchè par sa perspicacité, lui donne envie de le serrer contre lui, de le plaquer contre le mur, de le frapper. Parce que Lysandre, tout comme Sôma, était, pour son esprit douillet, des êtres bien trop irritant. Bien trop menaçant. Sauf que. Sauf que, là où Sôma était prévisible, Lysandre le déconcertait. Il ne l’avait pas vu venir. Il n’avait pas vu venir ça. Et ses yeux se voilèrent. Et ses yeux se plissèrent. Met ton esprit en pause, Psuchè, ne relève pas la chaleur de ses lèvres, celle de son corps, bien trop près. Ne relève pas les yeux. Ne pense pas. Ne pense pas. Ne pense surtout pas. Retiens ton souffle Psuchè, tu vas choir. Tu vas tomber sur un os. Et l’os te brisera le cœur, te broiera les sens et tu n’auras plus que tes vieux rêves pour pleurer. Ne prend pas garde à cette chimère, à cet immonde tentateur aux yeux de velours. Il se fout de tes souvenirs, de tes ambitions. Lui, tout ce qu’il aime, c’est Marie-Jeanne, sa dope, son âme, unique passion. Elle te déprave, non, Lysandre ? Elle colle son corps atmosphérique contre tes poumons, enlace ton corps trop blanc de ses bras tendres. Et ses courbes épousent ton âme, et tu peux te perdre en elle. Oublie tes soucis, doit-elle te chanter à l’oreille, t’immobilisant sous son joug. Oublie tout ça. Et Psuchè avait ricané lorsque Lysandre avait relevé le mot catin. Oui, une catin, ni plus ni moins, il te vend du rêve contre un peu de ton âme, il te soumet, il joue avec toi. Tu l’amuses, petit pantin. Et Psuchè s’assombrit. Cette fois, les pantins sont deux. Les pantins, ce sont eux. Et ça, c’est insupportable. Surtout pour Sôma. Sôma qui fuit, Sôma qui étouffe, Sôma qui ne peut pas. Qui ne peut pas faire face à la situation, à Psuchè se perd, à Lysandre qui s’accroche. Alors il court, il court, il court. Et il disparaît. Plop. Pas très loin, il les suit depuis les toits. De haut, prudence. Tignasse rose qui s’agite au vent.
Mais il ne voit pas.
Non. Il ne voit pas. Il ne voit pas les lèvres qui se collent, qui se cherchent. Et Psuchè dira ensuite qu’il déteste Lysandre, lui et ses attaques, lui et cette espèce de foi chancelante en quelque chose qui le dépasse. Et Psuchè était déstabilisé. Déstabilisé par la situation, déstabilisé par la fuite de Sôma, déstabilisé par les lèvres qui, encore une fois, se posaient contre les siennes. Si tu savais comme il te hait, Lysandre. Si tu savais comme il te hait de mettre à mal ses convictions, de le faire tourner en bourrique, de le placer dans une situation si difficile alors qu’il aurait voulu se rouler en boule, se planquer, tout arrêter. Mais non. Mais non. Mais non. Improbable. Que veux-tu arrêter ? Vas-tu te laisser avoir par les mots doux que te susurre l’enfant ? Par ces mots que tu aurais voulu entendre depuis si longtemps, que tu détestes et désires à la fois. Ta quête est tellement dérisoire, Psuchè. Que crois-tu poursuivre, au fond, sinon le fantôme d’une mère qui jamais ne t’accorda assez d’attention ? Alors tes yeux se plissent, alors tes yeux se voilent. Et tu es en colère, et tu es furieux alors que, doigts enlacés aux tiens, Lysandre s’avance dans les ruelles sombres et étouffantes, parlant de son dealer, de cette fée aux doigts d’or qui lui vendait sa came. Alors Psuchè enroule son bras autour de la taille de l’enfant, le stoppe, l’arrête net, colle son torse contre son dos, le regard sombre, les dents serrés. Croyait-il pouvoir se moquer impunément de lui ? Pouvoir profiter de ses ambitions pour le couler plus bas qu’il ne l’était ? Je ne sais pas ce que je vaux, aurait-il dit à Lysandre, si sa voix avait fonctionné correctement. Ce que je sais, c’est que l’un comme l’autre nous nous enferrons dans un cercle vicieux. Et pourtant, Psuchè planta ses dents dans le cou de Lysandre, mordit la peau blanche, maintenant fermement l’autre contre lui. Il ne le laissera pas filer. Pas comme ça. Porte cette marque, assume tes fautes, Lysandre. Assume-les.
Ou l’ouroboros te détruira. L’infinité des recommencements.
« A jouer avec moi, la seule chose que tu gagneras… », souffla-t-il contre la peau un peu humide, un air mauvais au visage : « C’est de souffrir un peu plus. Tu te perdras toujours un peu plus dans ce que tu crois être le sublime de ta décadence. », ajouta-t-il en glissant une main sous le pull de l’enfant, l’appuyant tout contre son ventre : « Et tu choiras comme jamais tu n’es tombé. »
Le savais-tu ? Et il relâcha Lysandre, gardant sa main jointe à la sienne, seul lien indéfectible entre les deux perdus. On peut se perdre partout, s’esquiver n’importe où de cette réalité factice. Parce qu’il n’y avait rien de pire que la réalité, dans le monde du factice. Parce qu’il n’y avait rien de pire que ce grand théâtre de la vie, dans le monde de l’illusion. L’on tire les ficelles, l’on manipule. Et ces doigts que tu serres aussi fort que tu le peux dans tes doigts. Pour ne pas qu’il s’échappe, pour qu’il t’emmène où tu le veux. Jusqu’à qui tu veux. Parce qu’on ne renonce pas à Tristan Camilleri. Parce qu’on ne renonce pas à la haine. Parce qu’on ne renonce pas à la vengeance. Et qu’importent les moqueries d’un inconnu bien trop séduisant. Et qu’importe l’avis de ce blanc-bec bien trop sûr de lui. De ce garçon qui l’égarait, Peter Pan des temps modernes. Entre les seringues, et la poudre, ton Pays Imaginaire, Lysandre ? Et la question lui brûlait les lèvres alors qu’il caressait sa paume du pouce, machinalement, bien trop doucement. Tu les aimes, les humains, Psuchè. Tu les aimes. Tu te donnes des airs d’impassible. Tu t’empoisonnes à leur contact. Tu t’empoisonnes à son contact. En quelques secondes, te voilà contaminé. En quelques secondes, te voilà accroché, pendu à ses doigts, dépendant de ce que l’enfant consent à t’accorder. Et tu tables sur pas grand-chose, sur pas du tout. Et tu ne tables sur rien, sur le néant, comme le vide qui t’habite, qui te paralyse les membres et t’emplie la tête d’idée morbide et d’odeur de poudre.
Tu es né pour tuer, qu’elle dirait, ta mère. Né pour la venger. Elle t’a fait grandir dans ce milieu pourri, au milieu de ce luxe. Et ton monde n’était qu’un fruit à la beauté plastique, rongé par la nécrose à l’intérieur. Et tu es pareil. Il pencha son visage fin, obliqua dans une nouvelle ruelle. Il cherchait au hasard, tournait, se perdait. Il n’était pas anxieux. Il n’était pas inquiet. Ce serait comme d’habitude, comme toutes les autres fois. Et ses yeux se fermèrent à demi alors que, machinalement, il se plaçait, protecteur, devant Lysandre alors qu’une ombre surgissait dans la rue, fantôme blême, addict, drogué. Sans-abri. Les muscles de l’homme se relâchèrent alors qu’il secouait la tête pour chasser le geste bien trop embarrassant qu’il venait de faire. Et que Lysandre fasse un commentaire, il le giflerait sans hésiter. Alors ne tique pas, Lysandre, laisse couler. Laisse-le se refermer sur lui-même, tuer son empathie. Tuer tout ça.
« Il ressemble à quoi, ton vendeur de rêves ? », osa-t-il d’un air absent. « Tu m’agaces, Lysandre. Que cherches-tu à faire ? »
Que recherches-tu au fond, chez ce dealer du fond de la rue ? N’es-tu pas encore trop enfant, pour te soucier de te détruire ? Pour te soucier de mourir jeune ? Et ça révulse Psuchè. Psuchè et ses mains sales. Psuchè et ses mains rouges. Et ça le révulse qu’on se laisse mourir, qu’on se laisse tomber, qu’on se relâche. Qu’on ne se batte pas, au fond du trou. Qu’on reste juste là. Dégueulasse. Relent âcre dans la bouche alors qu’un bruit de pas se fait entendre, au loin, et qu’il fronce les sourcils, lâchant un instant la main de Lysandre pour fourrer la sienne dans la poche de son manteau où le flingue était bien planqué. Alors il se penche en avant, doucement. Alors il lui propose son autre main avec un naturel déconcertant.
« Ton dealer risque de mourir. Tu le sais, non ? Alors pourquoi tu me conduis jusqu’à lui ? », murmura-t-il tout bas lorsqu’il saisit à nouveau la main de l’enfant, les lèvres tout contre son oreille. « Toi, la putain, tu sacrifies ton fournisseur au premier inconnu qui passe ? Tu es tellement incompréhensible. »
Il y a comme un labyrinthe, dans la tête de Lysandre. Un labyrinthe dans lequel Psu tâtonnait. Il ne savait même pas comment il s’y était engagé. Il ne savait même pas pourquoi il l’avait fait ni même quand. C’était un peu angoissant, un peu excitant. Plongé dans le noir, il ne savait plus où allait. En territoire inconnu. Et pourtant, souffla-t-il intérieurement, les yeux à demi-clos et l’épaule pressée contre celle de Lysandre. Et pourtant, je ne suis pas de ceux qui se joue de l’inconnu. Hey, toi, Lysandre. Es-tu de ceux-là ? Partons en voyage, tous les deux.
Un peu plus profondément, en Enfer.
« Avance plus vite. Il va pleuvoir. »
Ton sec et péremptoire, claquement de langue énervé. Psuchè n’aimait pas la pluie. Il n’aimait pas les ruelles sombres non plus. Il aimait l’enfant encore moins. Alors vite, dépêchons-nous. Vautrons-nous un peu plus dans la décadence, noyons-nous sous le sang des sacrifiés. Ce sera très bien comme ça, vous ne pensez pas ?
Si. Bien sûr que si. |
| | | Lysandre A. Hill [Heaven] Membre- pactisant
| Sujet: Re: Je ne suis pas de ceux. [Fini] Lun 12 Juil - 16:11 | |
| « Deuxième étoile à droite et tout droit jusqu’au matin. » Peter Pan. Et il le veut. Il le cherche. Il quémande sa présence pour maintenir le sursaut de vie qui agite ses entrailles. Il a besoin de lui, pauvre soumis, indigent baratineur, dandy des beaux quartiers venus réclamer son dû pour tous ses beaux tours joués aux habitants. Au creux de ses poches, il sentait le poids si lourd de l’argent qu’il lui donnerait en échange de quelques grammes, de quelques doses dont il pourrait abreuver son sang qui le mettait au supplice, bouillonnant au cœur de ses veines, hurlant, se cassant la voix dans son manque et dans sa détresse. Juste un peu. Un dernier effort et il pourrait accéder à sa libération, à la fin de cette torture qui le maintenait au bord de l’évanouissement. Sur son front, quelques perles de sueur menaçaient de dégringoler le galbe de son visage alors qu’il s’accrochait désespérément à cette main qui le maintenait dans un état de conscience à peu près stable. Elle se raffermissait, l’enivrant, lui rappelant avec douceur, sulfureux élixir, tout ce qu’il avait perdu en la laissant à demi-rongée, à demi-inachevée, pas totalement morte, mais pas totalement en vie non plus. Il n’avait plus d’elle que le pâle souvenir de ses longs bras spectraux, de ses grands yeux obituaires, de sa voix traînante et fatiguée, toujours assise dans ce vieux fauteuil aux bras râpés par le temps. Vers la fin, elle n’avait plus été que l’ombre d’elle-même. Une chose qui se baladait en envisageant un tout autre avenir là où il n’y avait déjà plus rien. Un esprit qui errait d’un bout à l’autre de l’appartement, n’ayant plus la force de manger ou de boire pour se maintenir en vie, aspirant juste à changer le cours du temps, à remonter sa longue pente raide pour faire les choses autrement. Et il l’entendait déblatérer. Promettre monts et merveilles à une déité impalpable et inconnue. S’abandonner aux bras d’êtres qu’elle seule voyait. Elle ne lui faisait même plus peur. Elle ne lui inspirait que de la pitié. Une espèce de compassion qui le poussait à la détruire, à l’enterrer sous le poids de sa culpabilité, à aimer sentir son échine se courber face à tous ses remords. Il n’attendait plus que le craquement sinistre du moment où sa colonne vertébrale se romprait, incapable de supporter tout ce qu’on lui faisait endurer. Mais ça n’était jamais arrivé. Elle avait toujours gardé un semblant de fierté. De tête haute. Une grande dame de l’aristocratie ancienne préservée par son éducation rigoureuse qui l’empêchait de sombrer définitivement. Alors il la haïssait pour ça. Il aurait voulu qu’elle se brise, qu’elle lâche prise et se laisse aller à son humeur spleenétique. Mais elle avait tenu bon malgré tous ses efforts. Il avait fallu aller murmurer son noir secret à la lune, aller lui chuchoter ce désir inavoué, interdit pour se débarrasser de ce cadavre qui lui encombrait les bras. Il avait tout simplement voulu qu’elle disparaisse, au milieu du rouge carmin de la lune, avalée par les derniers reflets d’un passé trop peu glorieux. Dis, Maman. Je t’ai juste libérée, n’est-ce pas ? Je t’ai libérée de ce monde aux couleurs irisées, de cette vie qui ne voulait plus de toi. Tu es fière de moi ? Il aurait voulu lui demander si ça lui avait fait plaisir, si elle se sentait mieux maintenant, si toute l’attention que lui prodiguait les médecins lui plaisait et la rendait plus forte. Mais c’eût été se leurrer. Accorder trop d’estime à un acte qui ne méritait même pas le plus petit des applaudissements. Un frisson remonta le long de son corps, secouant son cerveau lorsque le bras s’enroula autour de sa taille pour le propulser contre un torse inconnu. C’était futile comme geste… Et pourtant, il sentait son cœur qui s’accélérait, sous l’effet du manque, sous l’effet de l’envie de rester au milieu de ces bras qui le rassuraient et le révulsaient. C’était contradictoire. Ca embrouillait son esprit. Ca dérangeait ses pensées d’habitude si organisées. Perturbant. Les règles si soigneusement établies qui régissaient son monde d’une poigne de fer s’effondraient les unes après les autres, s’entremêlant, déclenchant un chaos inacceptable, bouleversant l’ordre, renversant les idées, se focalisant sur les sensations. Son besoin, son manque, renforçaient cette cacophonie qui lui donnait l’impression d’être scié en deux, partagé entre le dégoût et le désir. Qu’est-ce que tu fous ? Lâche-moi ! aurait-il voulu hurler. Mais sa langue s’était nouée dans sa bouche, l’empêchant de prononcer le moindre mot. Il se serait retourné et l’aurait frappé si ses membres n’avaient pas refusé de lui obéir ; poupée de chiffons détraquée. Il n’aimait pas perdre le contrôle. C’était à lui de perturber. A lui d’interagir avec les sentiments de l’autre, de les bousculer pour n’en laisser qu’un désordre inhumain. Mais là, c’est lui qui se fait avoir. C’est lui qui se fait marquer par cet inconnu. C’est lui qui sent ses dents se planter dans son cou, qui voit la main se faufiler sous son pull, touchant sa peau, déclenchant de nouvelles langues de feu qui labourent son corps, lui rappelant qu’il est toujours sous l’effet de sa came qui lui souffle à l’oreille des mots qui l’empêche d’entendre ceux de Psuchè. C’était imprévisible. Improbable. Et déjà la lueur de la vengeance s’allumait dans son regard. Rendre coups par coups. Au centuple. Décupler chaque sensation. Mais pour le moment, il se tait, parce que la souffrance a atteint son paroxysme. Il aurait aimé pouvoir se replier dans un coin et se rouler en boule, tenant ses côtes qui menacent de quitter son organisme, envisageant la possibilité de réduire à néant tout son squelette pour oublier cette douleur lancinante qui régit pour l’instant sa vie. Il aurait aimé mourir. Il se sentait mourir. Petit à petit. Plaie béante qui s’ouvre, déchire, corrompt, avale dans un bâillement d’ennui chaque molécule, chaque pensée, chaque salve desservie par son corps pour régir ses hormones. Comme à chaque fois qu’il attendait trop, il fantasmait sur toutes les possibilités de meurtre, sur tous les moyens de mettre fin à son existence en un claquement de doigts. Parce que ce manque-là, c’était pire que de la torture. C’était pire que de se jeter au milieu de flammes pour sentir peu à peu sa chair brûler et se nécroser sous leurs coups de langue. Là, c’était avoir la sensation de brûler tout en sachant que l’on est parfaitement indemne. Sa misère ne fait rire que lui. Il n’arrivait plus à distinguer les ruelles qui se succédaient, mais ce n’était pas important. Son marchand de rêves, son marchant de sable à lui, saurait le trouver sans qu’il n’ait besoin de le rejoindre. C’était toujours comme ça. Toujours cette même farandole qui se profilait devant son champ de vision. Il sent toujours la main de Psuchè contre la sienne, sa paume chaude qui le maintient en contact avec la réalité et l’empêche de s’évanouir là, sur les pavés froids, qui l’empêche de s’endormir dans un coin pour échapper à ce qu’il ressent. Mais la main s’enfuit, les doigts s’éloignèrent, le forçant à se tenir tout seul debout, alors qu’une silhouette apparaissait au milieu des deux murs qui encadraient la ruelle et que le propriétaire de la main se plaçait devant lui. Un sourire se dessina sur le visage de Lysandre. Il retint son rire. Faisait-il donc tellement pitié que l’on arrivait à ressentir le besoin de le protéger ? Il ne prit même pas la peine de répondre à sa question tant la situation lui semblait grotesque. Son marchand de sable, de rêves, de bonheur et d’ecstasy, était indescriptible. Charismatique. Il aurait couché avec lui sur le champ si ce dernier le lui avait permis. A chaque nouvelle rencontre, il ne pouvait s’empêcher de dévorer son visage, de détailler son corps, d’envisager mille et une possibilités pour l’attirer à lui. Mais jamais il n’avait osé. Alors oui, il le sacrifierait à Psuchè. Parce qu’il n’aimait pas être dépendant de la drogue et de son propriétaire. « Les catins n’aiment pas être dépendantes de leur mac. Je n’aime pas me savoir dépendant de mon dealer. »Un nouveau paradoxe tellement risible. Volontiers dépendant de la drogue, mais refusant sa dépendance à un être humain. Parce que les humains le répugnaient, lui donnaient la nausée et secouaient ses boyaux à chaque fois qu’il avait besoin de les côtoyer. Mais il s’accrochait à Psuchè comme un gosse désespéré. « … Tout comme toi tu ne sais pas s’il est utile ou non de continuer à être dépendant d’un seul avenir. »Un seul destin. Celui de tuer. Encore et encore. Faire couler le sang, en barbouiller les rues de Milan. Dis, Psu chéri, tu la connais la fin de ton histoire ? Tu veux que je te la raconte ou tu la devines déjà ? Tu la sens se dessiner au fur et à mesure sous tes pieds ? Cette fin horrible qui te projettera bien plus loin dans la déchéance que moi. Bien plus profond. Bien plus bas. Là où personne ne pourra plus jamais te récupérer.Et il l’entraîna, agrippant sa main et changeant de direction, guettant chaque signe, chaque geste, chaque petite ombre qui trônait au milieu des poubelles sales et des préservatifs usagés. Il savait qu’il était là. Il pouvait sentir sa présence. Il jeta un regard à Psuchè qu’il traînait derrière lui sans ménagements, sa main en contact avec la sienne lui laissait voir des bribes de souvenirs, de pensées inachevées, jamais complétées, des cris… Et cette recherche infinie, surplombant le désespoir et l’empêchant de se morfondre dans la pourriture de Milan. « Il connaît celui que tu recherches. Il pourrait même t’indiquer où le trouver. Mais une fois que ce sera fait, qu’adviendra-t-il de toi, mon petit Psuchè ? Une fois que tu auras perdu le seul et unique but qui dictait ta vie... »Il se retourna et se colla contre lui, levant son regard, braquant son œil et enlaçant son cou avec ses bras. « Une fois que ce que tu as toujours recherché ne sera plus… Est-ce que tu te crois capable de continuer à vivre ? Sans rien, sans terminus vers lequel te diriger. Toute ta colère, elle se dirigera vers quoi ensuite ? Tu crois peut-être qu’elle s’évanouira dans le néant ? »Il approcha ses lèvres de son oreille, le serrant plus fort contre lui, comme un gamin désespéré qui veut empêcher sa nouvelle découverte, son nouveau centre d’intérêt de s’échapper. « Si c’est ce que tu crois, tu te leurres, Psu chéri. Elle ne partira jamais, cette rage qui te dévore l’esprit. Et tu resteras inachevé. Incomplet. »Un frisson. Il se retira et reprit sa main pour continuer à avancer. Et c’est là qu’il le distingua, au milieu de deux poubelles, accroupi face à un chat, cherchant à capter son attention par tous les moyens… Lui. Celui dont il avait le plus besoin à l’heure actuelle. Celui que son corps réclamait à cor et à cris, Comos. Bientôt la libération, le soulagement, la fin de cette souffrance fastidieuse et agaçante. Il lâcha la main de Psuchè pour se précipiter vers lui, pour réclamer son dû, pour le payer et échanger quelques billets contre quelques doses. Déjà, il sentait son corps se détendre, ravi de ce futur apport, ravi de combler ce vide, ravi aussi de pouvoir à nouveau détailler son dealer, de suivre la courbe de son visage avec une envie non-dissimulée, avec un désir qui faisait battre son cœur plus fort. Il se pencha, déposa un baiser sur ses lèvres. Ils concluaient toujours comme ça. Mais là, il sentait que c’était aussi un baiser d’adieux. Un baiser de fin. Et Cosmos l’avait senti aussi. Il s’était levé, tournant son regard vers l’invité que lui avait apporté Lysandre. « Psuchè Hadzis, Cosmos. »Présentations faites.Maintenant, il ne rêvait plus que de combler le vide de ses veines. |
| | | Psuchè Hadzis [Sôma] Membre- pactisant
| Sujet: Re: Je ne suis pas de ceux. [Fini] Lun 12 Juil - 18:55 | |
| « De mon esprit humilié Faire ton lit et ton domaine ; - Infâme à qui je suis lié Comme le forçat à la chaîne. » Si ça n’avait été aussi vrai, Psuchè en aurait ri. Que te resteras-tu, au final, pauvre humain faiblard ? Rien. Mais il le savait. Il le savait depuis le début. Sauf qu’il y avait une autre donnée. Une autre inconnue au problème que Lysandre exposait, collé contre lui, corps palpitant contre le sien. C’est si drôle de s’amuser avec toi. Et Psuchè ferma les yeux. Et Psuchè oublia de le prévenir. Il oublia de lui dire que, le jour où le contrat se terminera, il aurait de toute façon tout oublié. Il aura oublié son nom. Il aura oublié son prénom. Il aura oublié son enfance, sa quête, le sens même de sa vie, ce pour quoi son cœur se brisait tous les jours. Il oublia de lui dire qu’il l’aurait oublié, lui. Pour le meilleur et pour le pire. Mieux vaut en rire qu’en pleurer. Quoi que. Les larmes, il avait déjà donné. Il les avait pleurées, s’était noyé dedans, imbibé d’un liquide salé qui ravivait les plaies, tourmentait son cœur, tremblait de tout son corps. Et il aurait voulu le mordre, encore une fois, le griffer, lui faire du mal, le salir. Il aurait voulu qu’il cesse de lire si clairement en lui, comme s’il était facile à saisir, comme s’il n’était que façade, qu’apparence, qu’un livre ouvert que chacun aurait pu lire. Ca le rendait malade. Et tu sais, Lysandre, lui ne l’avouera pas, lui ne le dira jamais, mais il n’a déjà plus aucune envie de t’oublier. Tu le dégoûtes, tu l’accules. Tu lui donnes envie de vivre. Et c’est mal ce que tu fais, ce rôle que tu joues. Les questions que tu poses, les doutes que tu sèmes ; inconscient ! Vois-tu les affres dans lesquels tu le pousses ? Et Psuchè se raccrocha désespérément à la raison de tout ça, à l’enfant qu’il était, aux morts qui furent et qui seront. Et ce n’était pas cet inconnu, cet enfant, qui le ferait épargner Camilleri. Non. Non. Il le refusait.
Parce qu’entre Camilleri et lui, c’était une haine profonde, puissante, vivace et immortelle. Il avait fallu deux mots à l’homme pour se faire détester. Uniquement deux mots. Le reste n’avait fait qu’attiser la haine d’H. La mort de sa mère n’en était que le paroxysme. Comme la goutte d’eau qui fait déborder le vase, le coup de marteau qui parfait la statue. L’apocalypse. Et rien que d’y penser, les mains de Psuchè était agitée de soubresauts nerveux et immondes. Et ce corps qui l’avilissait. Qui le trahissait. Le visage qui se baisse. Il aurait voulu que Sôma soit là, qu’il allège l’atmosphère. Mais Sôma était parti. Et Psuchè se sentait moins assuré, moins résigné. Et lorsque les fleurs écarlates fleuriront sur la peau blanche de Tristan Camilleri, Psuchè Hadzis mourra. Comme s’il n’avait jamais existé, comme s’il n’avait jamais connu personne. Et Sôma sera Psuchè et Psuchè ne serait plus rien. Ce n’était pas grave. Il s’en foutait éperdument, il le jurait, il le jurait. Ne fouillez pas plus, n’allez pas plus loin, ne creusez pas. Vous trouveriez trop de choses, vous vous perdriez en lui. Vous vous noierez dans le doute et dans les raisons jamais exprimés. Psuchè Hadzis craignait de vivre comme on craint de tomber. Il craignait de vivre comme d’autre craigne de mourir. Parce que vivre, c’était regretter. Parce que vivre, c’était choisir. Et lui, lui, lui ne voulait pas avoir à faire ça. Surtout pas. Alors il poursuivait des chimères, semait la mort, répandait le sang. Et Milan se teintait d’écarlate alors que Psuchè évoluait dans les venelles sombres de la ville. Et Milan virait au sombre alors qu’H. dégainait son flingue, les yeux plissés, les lèvres serrés. Comme une habitude. Un parfum de déjà vu. Et Lysandre se jetait sur le corps, sur ce Cosmos atmosphérique qui était la clé de tout. Vendu.
Il ignora avec superbe les quelques mots de Lysandre, il se moqua éperdument de tout ça. Le canon du pistolet atterrit sur la tempe de Cosmos. Juste un geste fluide et implacable, la gueule béante et noire contre la peau de ton vendeur de rêve. Que dis-tu de ça, Lysandre, alors que Psuchè enroule possessivement son bras autour de tes hanches, alors qu’il te dédaigne, alors que son regard se fait laser, transperçant mentalement la boite crânienne du dealer. Te foutrais-tu de moi, bête chose ? Sale chose. Et il sent Sôma qui se glisse dans la ruelle, dont les hanches tanguent, dont le pas se fait léger. Vous êtes enfants de la destruction, adolescents destructeurs et adultes inconstants. C’est si bon de vous voir évoluer tous les deux. C’est si bon, la souffrance humaine, tant que ce n’est pas la sienne.
« Enchanté. », fit-il seulement, la voix basse, la voix sèche, l’espoir tremblant d’une vie normale qui s’échappe. Et sa main ne tremblait pas. Il reprit : « Je crois qu’il va falloir qu’on parle. Toi et moi. »
Je t’ordonne. Soumets-toi. De toute façon, il est trop tard, Psuchè a déjà cédé son souvenir, un de ses souvenirs si précieux, et Sôma s’en repaît, les bras à présents glissés au-dessus de celui de Psuchè, les mains nouées sur le ventre de Lysandre. Qu’as-tu oublié, aujourd’hui, Psuchè ? Qu’as-tu donc cédé ? Te rappelles-tu encore du visage de ton père ? Te souviens-tu de son nom ? De la nuit qu’il a passé à te consoler, lorsqu’il apprit la mort de ta mère ? De la nuit où il te raconta tous les contes de Grimm, penché sur toi, front appuyé contre le tien, doigts posés sur ta joue pour essuyer tes larmes ? Non ? Tu te perds. Tu te perds. Pourtant tu l’aimais, ton père, il ne t’indifférait pas. Il ne te laissait pas de marbre, n’est-ce pas ? Il t’a touché. Il t’a touché par sa sollicitude, il t’a touché par son amour. Et toi ? Et toi tu l’oublies. Alors tu chasses ces pensées désagréables. Alors tu laisses tomber tes peines. Et les doigts qui reposaient sur la taille de Lysandre s’agitent alors que Cosmos se redresse, alors que Cosmos se tend. Tu sens l’emprise qu’il a sur toi ? Tu sens ton sang qui ne t’obéis plus, qui fait de toi une marionnette ? Qui fait de toi un pantin ? Oui ? Alors souffre ! Souffre ! Souffre ! Regarde le visage de Psuchè qui transpire d’une satisfaction sans borne alors que le corps de Cosmos est agité de soubresauts immondes et inhumains, alors que sa tête frappe le mur rudement, alors que le sang pointe lorsqu’il s’écorche le bras sur un bout de verre. Et tu te crois puissant, Psuchè, a frappé dans l’eau et à torturer tellement plus perdu que toi. Et tu te sens puissant.
« Dis-moi comment atteindre Camilleri. »
Et une fois que le prénom est prononcé, plus question que le dealer ne s’en sorte vivant. Et Sôma soupira, lâcha l’enfant, sautilla vers le pantin sur qui Psuchè avait relâché la pression, le pantin qui s’était laissé tomber contre le mur, tout tremblant. As-tu peur, Cosmos, d’avoir trouvé marionnettiste plus puissant que toi ? Et le pistolet change de main, les yeux de Psuchè rivé dans ceux de l’homme alors que Sôma le tient en joue sans un mot. Et les doigts de Psuchè pianotent sur la hanche de Lysandre qu’il relâche, dont il décide de se foutre. Rien n’a d’importance lorsque les lèvres de Cosmos s’arquent, lorsqu’il le défie du regard. Tu ne les impressionnes pas, tous ces camés, Psuchè. Fais-toi à l’idée.
« Gamin. » « Si seulement, monsieur le vendeur de rêve. »
Psuchè qui faillit, Psuchè qui défaille. Est-ce là ta seule réponse, Cosmos ? Bien. Un fou rire nerveux qui secoue le corps de pierre de l’homme. Un fou rire comme on en a jamais entendu. Gamin. Avais-tu seulement été enfant, Psuchè ? Avait-il seulement profité de l’innocence ? Non. Evidemment que non. Il n’a jamais profité de rien. Et les doigts de Psuchè s’envolèrent, s’entrecroisant, se nouant, s’embrassant et le corps de Cosmos semblaient exploser de partout, alors qu’un filet de sang glissait de son oreille, tout au long de sa joue.
« Tu ne diras rien, n’est-ce pas ? Tu es comme lui, au fond » muramura Psuchè pensivement en désignant Lysandre du menton. « Comme lui ni plus… Ni moins. » Rictus haineux. « Tu es inutile. Alors. »
Il aurait voulu dire « Amen », il aurait voulu s’épancher sur la foi en un dieu commun à l’humanité. Mais rien ne lui sembla plus factice. Mais rien ne lui sembla plus stupide. Alors il se contenta juste de lancer sa montre au visage de l’homme, cette belle montre d’argent aux aiguilles finement ouvragées, symbole de l’horloger, symbole de son dieu personnel. Et il serra les poings fermement. Et que meurt ton cœur toi qui n’es plus rien. Toi qui ne me sers à rien. Psuchè n’eut pas une once de pitié pour ce corps qu’il détruisait. Il n’eut pas une once de pitié pour Sôma qui fixait le corps secoués de spasmes horribles qui s’agitaient devant lui. Et c’était plus immonde que les tripes, que les organes qui explosent. C’était plus horrible que les balles dans la tête, que le sang qui gicle, que les lames qui s’enfoncent. C’était plus horrible que tout. Les doigts de Psuchè se détendirent tout doucement lorsque le corps blême se fit inanimé. Sôma baissa les yeux. L’index de Psuchè traça une croix sur le front du cadavre, une croix de sang, rouge écarlate sur la peau blême. Nouveau crime entre tes doigts, oxygène dans tes poumons. Si tu avais été seul, tu en aurais pleuré.
Mais tu n’es pas seul.
Alors Psuchè se retourna, posant son regard mort sur le visage de Lysandre, sur le visage de l’enfant, sur celui du camé. Il ne savait pas s’il comprenait, s’il comprenait vraiment mais il ressentit le besoin de relever ce qu’il lui avait dit auparavant. A propos de son but. A propos de sa vie. De cette vie sans sens qu’il avait bâti sur la vengeance. Alors il s’étira, sourire tranquille alors qu’il partait, qu’il prenait la tangente, qu’il se faufilait au loin, prenant une rue au hasard sans prendre garde à l’enfant. Jusqu’à ce qu’il se retourne, qu’il le regarde, qu’il le fixe tristement :
« Lorsque j’aurai abattu Tristan Camilleri, Lysandre, j’aurai tout oublié. Toi, mes raisons, ma raison, mes rêves et mes passions. Tout aura disparu. Je n’existerai plus. Alors choir m’importe peu. Presque autant que le sang sur mes mains, vois-tu. », chuchota-t-il en insérant le doigt maculé de sang dans sa bouche, le léchant, indécent, provoquant. « Alors. Adieu ? »
Petit, petit, petit. Me suivras-tu ? La main de Psuchè qui se tendit vers lui. Vous êtes tellement incompréhensibles. |
| | | Lysandre A. Hill [Heaven] Membre- pactisant
| Sujet: Re: Je ne suis pas de ceux. [Fini] Lun 12 Juil - 20:43 | |
| « Je veux que les fées existent ; j’y crois, j’y crois ! » Peter Pan. Ça devait arriver. C’était écrit. Il ne regrettait même pas d’avoir guidé Psuchè jusqu’à Cosmos parce qu’il savait que si ce n’était pas lui qui s’en chargeait, Lysandre aurait fini par le tuer de ses propres mains, dévoré par la passion qui s’embrasait au creux de son ventre à chaque fois qu’il croisait son visage. Il avait juste envie de le voir disparaître, d’effacer son existence de la surface de la terre, de rayer son prénom des registres, de détruire chaque parcelle de sa vie pour pouvoir l’oublier. Il aurait aimé tempérer cette scène d’une foule de cris discordants, d’un amas de belles manières insinuantes, insignifiantes. Il aurait aimé pouvoir aller réclamer l’aumône pour la comédie qui allait se jouer à l’abri des regards indiscrets. Mais il s’en fout, Lysandre. Il s’en fiche. Il a eu ce qu’il voulait. Il a comblé son désir le plus vil et le plus abscons. Il a juste envie de remplir ce vide qui saille au creux de ses veines qu’il entend pulser à l’idée de récolter la précieuse poudre. Déjà, l’aiguille emmitouflée dans sa poche lui pique doucereusement la cuisse pour rappeler à son esprit sa présence. Il a l’impression que ça fait une éternité que les molécules qui pulsent au fond de son corps n’ont pas été satisfaites. Combien de temps depuis la dernière fois ? Un jour. Peut-être deux, au grand maximum. Quand on se drogue, on perd la notion du temps. La notion de tout. On ne regarde plus le monde qu’à travers une feuille pâle et usée qui reflète une réalité déformée par les affres de l’acide. Il ne veut pas savoir ce que Psuchè va faire. Il veut juste faire flamber sa poudre, l’insérer dans son aiguille et combler sa veine pleine de trous immondes. Une bonne fois pour toutes. Avant que Cosmos ne disparaisse. Avant que Cosmos ne soit plus qu’un vague souvenir, en équilibre précaire sur le bord d’une psyché branlante et instable. Il aurait voulu lui dire au revoir, lui demander de lui pardonner, mais il n’en a pas le temps. Psuchè est impatient. Il peut sentir chaque fibre de son être s’embraser à l’idée d’éliminer un nouveau proche de l’homme qu’il recherche : Camilleri. Il n’a même pas eu besoin d’aller fouiller sa tête, de passer son cerveau sous une loupe pour avoir le nom de l’homme qui hantait ses rêves. C’en devenait presque ennuyant. Pour un peu et il regrettait que Psuchè ait révélé aussi rapidement le nom de celui qu’il désirait abattre plus que tout. Pour lequel il aurait tout sacrifié. Son monde. Sa vie. Son identité. Il n’y avait rien à dire. Rien à faire. Juste à sentir le bras de Psuchè autour de sa taille. Juste à regarder l’horreur qui se déroulait sous ses yeux, enfer limpide, rempli de cristaux de haine et de coulées de rage qui embrasaient tout sur leur passage. C’était à la fois beau et fascinant. Révulsant et infâme. Ignominieux. Mais il le savait. Il savait ce qu’il faisait en l’amenant ici. Ce n’était pas comme s’il avait cherché à jouer les naïfs stupides. Alors il regardait. Jusqu’à la fin. Jusqu’à ce que le sang de Cosmos ne finisse par le tuer. Jusqu’à ce qu’il ne le voie s’étirer loin de son corps, recouvrant les pavés froids de Milan, les tâchant un peu plus de la folie meurtrière animant la ville depuis l’apparition de la Lune Rouge. Elle était responsable de tout, ce disque carmin qui errait dans le ciel, narguant les étoiles et les hommes, répondant aux souhaits les plus profonds et les plus atroces. Ce que, habituellement, le refoulement permet de sublimer dans un autre désir, dans une autre action. Là, on sait que c’est possible. On sait qu’on peut tuer. Que la police est indifférente, faible devant cette nouvelle ville qu’elle ne maîtrise plus. Un meurtre n’a plus rien d’excitant. Ce n’était qu’une chose banale de la vie quotidienne. Pour un Pactisant. Parce que les humains, ceux qui ne croyaient ou refusaient de prêter oreille aux racontars, menaient leur vie tranquillement, aveugles à ce qui se déroulait dans les bas-quartiers, sourds et muets aux appels à l’aide et aux hurlements qui enflaient et recouvraient toute la ville d’un voile obituaire. Seule la drogue avait son importance. Tout le reste est factice. Toute cette opulence, tous ces étalements de luxe et de richesses, de désespoir et de mésestime, rien n’était parfait. Rien n’était complet. La drogue, elle, était achevée. Le reste n’était que puzzle désordonné qui se mélangeait un peu plus à chaque nouvelle lune, embrouillant les esprits, créant pour les génies un labyrinthe impossible à démanteler, des fils impossible à démêler. Alors mieux valait se maintenir loin de tout ça pour ne pas sombrer avec le reste, pour garder pour soi sa propre décadence. Parce que si l’on commence à se mêler de ces histoires compliquées qui torturaient déjà bon nombre de Pactisants, le monde ne s’en sortirait jamais. Parce qu’il était trop instable pour se relever d’une telle cacophonie, d’un tel chaos. La Lune Rouge était en train de détruire les croyances, de bousculer toutes les déités pour ne laisser que la sienne, ténébreuse et impalpable, insaisissable et qui, pourtant, distribuait chaque jour des preuves de son existence. La lune était tâchée de sang. Elle pleurait. Saignait. S’épanchait en lamentations et en misères. Elle était faible face à la bêtise de l’homme. C’était bien pour ça que Lysandre ne les aimait pas. Ne pouvait pas les aimer. Ils étaient tous trop bêtes pour saisir l’importance de ce qui les entourait, pour se satisfaire de ce qu’ils possédaient. Son regard se tourna vers Psuchè. Oh oui, il aurait aimé le suivre, s’accrocher à lui, pauvre désespéré, SDF à la recherche d’un endroit où rentrer le soir, désireux d’avoir quelqu’un pour l’attendre. Mais il n’était pas prêt à franchir ce pas. Psuchè le fascinait. Psuchè était important. Le sang qu’il avalait avec insolence ne parvint même pas à le révulser. Il était trop fascinant. Sa première vraie énigme qui se dévoilait à lui d’elle-même, lui posant de nouveaux puzzles à achever, de nouveaux choix à déterminer. Qu’est-ce qui importait réellement ?Il aurait tout oublié, et alors ? Il n’y aurait plus personne, et alors ? Il n’y aurait plus de souvenirs, et alors ? A la fin, il n’y aurait plus que le néant, la fin de sa personne, la fin de tout. Et alors, merde ? Alors il se saisit de sa main pour se redresser. Dans sa poche, ses doses l’attendaient sagement, attendaient de pouvoir pénétrer son organisme pour continuer le massacre entamé par leurs prédécesseurs. Souiller, répandre ce doux nectar qui l’envoyait bien au-delà des étoiles, loin de Milan et son enfer perpétuel. Il noua ses bras autour de son cou et alla chercher ses lèvres pour quémander un nouveau baiser, entrouvrit sa bouche, poussant l’audace plus loin, introduisant sa langue pour caresser la sienne. Il en voulait plus. Tellement plus. Mais ce n’était pas possible. Ç'aurait été un sacrifice trop grand. Une décision stupide et irréfléchie. Il s’écarta avec précaution, déposa un léger baiser sur sa joue et lui adressa un sourire orgueilleux. « Oui. Adieu. »Il le dépassa, gagna les ruelles, s’y enfonça, plongeant toujours plus loin dans l’obscurité. Oui, adieu, Psuchè Hadzis.« Et merde, va falloir que je trouve un autre camé aussi bon que Cosmos. »--- Et nous allons ici. |
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