L’amour n’est qu’un fantasme Shin. Une illusion. Un moyen de te permettre d’exister et de te racheter de ce souhait, de ce pacte que tu as passé avec la Lune. Bientôt ce sera ta vie, c’est déjà ta vie, t’es brisé. Plus que brisé, t’es seul Shin. Maintenant, ton unique ami, c’est la rancœur.
Shin, il a le sang qui fait des Bims et des Bangs dans les veines. Déjà quand il bouge à peine, ce sont des étincelles qui embrasent ses yeux, et là il se dérobe, son corps sous l’averse fuit comme son esprit sous stupéfiants. Les ombres courent à ses pieds, il comprend pas ce qui se passe sous sa peau, blanchie par le miroir terni qu’on avait accroché dans cette chambre. Il galope, faut le comprendre, il veut rentrer. Il veut un chez lui aux senteurs d’été, aux couleurs du pays du soleil levant. Avec ce qu’il s’est passé, ce qu’il a fait… Vous le seriez aussi, à sa place, désorienté, vous auriez aussi la conscience pas si tranquille, vous regarderiez aussi derrière vous avec cette impression d’être suivi.
Et après avoir tourné à l’angle de la rue, il ne prend pas la direction de son ancien appartement. Il l’a quitté il y a bien longtemps, il a crut bien faire mais il semblerait aujourd’hui qu’il est juste fait de travers. Après avoir tourné à l’angle de la rue, il s’arrête et se demande encore une fois, comme chaque soir, si le jeu en vaut la chandelle, si la peine à supporter est surpassée par le plaisir procuré. Et comme il n’a jamais su trouver la réponse, il descend l’escalier, continue quelques mètres et rentre dans l’immeuble. Après avoir tout laissé, il a espéré un retour à zéro, une saleté de nouvelle vie. Il est partit à Rome, il s’est laissé pousser les cheveux et les a teints, il a abandonné ses lentilles, il a trouvé un nouveau travail, de nouveaux amis, que ce nouveau physique n’intriguait pas. Les Romains ne lui ont pas posé de questions. Ou peu, et dans ces cas là, broder une ancienne existence était facile, accessible à sa folle pensée, à sa réflexion embourbée. Et pourtant, les nouveautés n’ont rien changées, sa nouvelle vie n’a pas remplacé l’ancienne. Pire, la mémoire de cette dernière lui est revenue, mais en lambeaux, par bribes et affublée de remords et de nostalgie. Le mal du retour. Bonjour Tristesse.
Il ne sait pas pourquoi il est revenu. C’est un peu comme s’il n’était jamais parti, comme si son voyage n’avait été qu’une parenthèse qui lui aurait troué l’étage des souvenirs. Ça fuit, ça bloque, ça coule, ça bug. Y’a quelque chose dans sa tête qui tourne pas rond, quelque chose qu’il n’identifie pas mais qui le rend fou. Quelqu’un d’extérieur peut-il nous faire perdre la tête à tel point qu’on en oublie des choses, comme pour se protéger. Parce que c’est de ça qu’il s’agissait. Il s’agit encore de ça et tant que Shin vivra, il s’agira toujours de ça, l’addiction.
L’esprit enfariné, encocaïné, Maddox rentre dans l’appartement. Il a les clés et ne se rappelle pas comment il les a obtenues. Un matin, il s’est juste réveillé dans ce lit sans comprendre comment il y était arrivé. Depuis c’est son chez lui, son endroit secret, sa planque, tout à la fois et ça compte si fort que s’il devait partir encore une fois, il en mourrait. Ce serait différent en tout point, parce que sa lubie s’est déjà envolée au loin et ses rêves, eux, n’ont depuis, jamais volé bien haut.
Il s’écroule sur le lit et se roule sur lui comme un gosse. Maddox n’est pas vraiment plus qu’un gosse, tout juste un chien errant qui a peur des passants. Il est lâche et menteur. Maddox est plusieurs. Chaque vérité qu’il détourne le transforme en quelqu’un d’autre et cette réalité là, cette capacité à oublier son passé lui fait de plus en plus peur. A Rome, il est devenu Camille Santeria. Théoriquement, il est toujours Camille Santeria. Il est si facile de changer d’identité quand on connaît les bonnes personnes. Et pourtant, la mémoire de Maddox, celle de Shin, sont revenues. Et désormais, Camille aussi fait partie de ce qu’il est. Reste à savoir ce qu’il veut être.
Vous luttez toujours en moi, et vous continuerez ainsi.
Un jour on se tuera en larmes et on comprendra tout ça, toutes ces choses.
Sans amour… La vie passe comme un éclair.
Sans Amour.On peut séparer le monde en deux parties, comme ça, Bien et Mal. Les Pactisants sont une méthode, mais le GDP a réussi à tous les rassembler, les révolutionnaires, les extrémistes et ceux qui ne veulent de mal à personne, sous cette notion qu’est la Lune Rouge. Tout combattre, sans faire la part des choses. Au début, Maddox s’en foutait, maintenant ça lui fait peur, le GDP lui fait peur, les pactisants lui font peur, Milan le terrorise. Pourtant c’est là qu’il a finit par revenir, il voudrait s’en passer mais ne peut pas, on l’en empêche, quelqu’un l’en empêche, cette chimère au nom meurtri et meurtrier.
Il a cette tâche de naissance, cette marque du nom de Caïn qui s’est imprimée dans sa peau et ses os. Caïn Eden Wellens, amoureux de lui à en souffrir, Mad expire son nom comme on se pique au Crystal, à la méthadone, à l’héroïne, toute ces merdes qui vous enfument. C’est facile d’être philosophe quand on n’a pas le sang qui pourri. Maddox l’a dans les veines et ça fait des Bims et Bangs dans le cœur quand il pense à lui. Alors il évite. Il préfère l’oubli à la douleur, il a toujours fait ainsi et pourtant il est revenu de Rome. Maintenant, il l’attend. Sagement dans cet appartement, SON appartement, il attend.
Caïn, douce absinthe et triste peine. Sérieusement Mad, tu vas faire des erreurs, tu es jeune. T’as surement merdé plus que n’importe quel gars de ton âge, et ce depuis ta naissance. Félicitation pour ton existence, il serait temps d’en faire quelque chose.