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 Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV]

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Aurelio Pastore

Aurelio Pastore

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Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] Vide
MessageSujet: Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV]   Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] I_icon_minitimeSam 9 Juil - 6:55

And I find it kinda funny
I find it kinda sad
The dreams in which I'm dying
Are the best I've ever had

Après son repas et la prise de conscience magistrale qui lui avait valu un certain temps de compréhension, Elio était sortit de la Casetta del Orso et marchait dans les rues de Milan. Il allait, un peu au hasard, tentant de marcher droit. Car oui, il avait bu. Cela ne lui arrivait jamais d’être dans un tel état d’ébriété, et pourtant cette fois-ci il était clair que le jeune homme ne s’était pas loupé. Mais ses intentions avaient été claires depuis le début, puisqu’il ne s’était offert que le genre d’alcool que l’on prend quand on veut planer un peu. Planer, voilà exactement ce qu’il désirait plus que tout ces dernière semaines. Avoir l’impression d’évoluer dans une mer de coton qui alanguissait chacun de ses gestes et le protégeait du reste du monde. Car cette matière a beau être extrêmement douce au contact, quand on en aligne plusieurs couches il devient si solide qu’il empêche toute agression de passer, gardant Elio dans un paradis illusoire de confort et d’oubli. Il n’entendait plus les remontrances de Delia, n’avait plus mal quand cela lui prenait de frapper le mur jusqu’à se fatiguer et tout arrêter subitement. Le coton, une merveilleuse invention. Sauf que, faute de pouvoir redécorer sa chambre de ces nuages blancs encombrants, Elio se plongeait dans l’alcool. Même effet, moins imposant, plus accessible. Plus dévastateur, aussi. Car avec il y avait les maux de tête, les nausées, les nuits d’insomnies passées à être malade comme un chien abandonné. L’addiction, aussi. Plus il buvait, moins il se sentait partir. Et toujours, la dose augmentait peu à peu. Aujourd’hui, il ne comptait plus le nombre de verres. Il savait que cela le détruisait tranquillement mais surement, seulement il n’avait jusqu’alors rien trouvé pour combler cette sensation de bien être d’une autre manière.

Mais maintenant, il y avait de l’espoir. Un minuscule grain d’espérance qui se glissait dans son esprit, qui éloignait le besoin de se brûler la gorge avec un verre, encore un. Les signes du manque se faisaient déjà sentir alors qu’Elio venait de sortir du restaurant, les mains tremblant et le corps vacillant. Le jeune homme devait se retenir aux murs cagneux qui semblaient rire de son état sur son passage. De la sueur perlait à son visage et son souffle se faisait rauque. Il avait besoin de quelque chose, de quelque chose pour calmer son état. N’importe quoi. Et plutôt que de se ruer dans le premier bar venu, Elio fit encore quelques pas et s’effondra dans une ruelle piétonne pas très fréquentée en ce début d’après midi, se laissant glisser à terre contre la pierre froide, protégée du soleil impitoyable par les hauts murs encadrant le petit passage milanais qui l’accueillait. Il colla son front contre les briques beiges, appréciant la fraicheur que cela apportait à son pauvre esprit totalement embrumé. Il fallait qu’il se calme, qu’il pense à autre chose, qu’il pense à après. Andrea revint alors habiter son esprit. Mais cette fois, Elio ne se focalisa pas uniquement sur les regrets que cette vision comprenait à l’ordinaire. Non, il pensait à ce qu’il pourrait lui dire. A ce qu’il pourrait lui faire pour que le jeune garçon comprenne. Elio avait eut le déclic qui manquait tant à son existence, celui qui l’empêchait de tout faire pour le retrouver et le garder près de lui. Car avant d’aller le trouver et de lui jurer toutes sortes de choses, le barman avait eu besoin de savoir ce que lui-même pouvait promettre ou affirmer en toute connaissance de cause. Il lui avait fallu bien du temps pour cela, ainsi que quelques coups dans le nez et un risotto appétissant. Mais il la tenait maintenant, cette vérité trop longtemps cachée et évitée. Elio ne comptait plus la laisser partir tant qu’Andrea ne l’aurait pas entendue.

Il l’aimait. Bien sûr, dit comme ça, cela n’avait aucun sens. C’était un mot qu’on pouvait entendre dans toute série télé digne de ce nom, c’était une expression que beaucoup de gens employaient à tord et à travers. Seulement Elio ne l’avait jamais utilisé autrement qu’une fois, une seule. Depuis jamais la simple idée n’avait pu lui effleurer l’esprit. Alors derrière cette simple constatation, le jeune homme y mettait beaucoup de choses. Il y mettait toutes les réponses aux regards interrogatifs de son ancien amant, la volonté de le voir chaque jour, le besoin de le découvrir au fur et à mesure d’une relation qui s’avérait non pas sans heurts mais plus facilement qu’auparavant. Car si Elio n’était pas vraiment doué pour les relations humaines ni pour le dialogue, il prenait en cet instant la ferme décision de ne pas abandonner à la première difficulté. Il savait qu’Andrea serait en colère, serait même peut-être cassant et sarcastique. Il entendrait les reproches, accepterait les insultes. Mais lui expliquerait certaines choses. Se justifier, non. Mais lui permettre de comprendre, chose qu’il n’avait jamais pu lui offrir auparavant, faute de tout saisir lui-même sur son propre comportement. S’il savait pourquoi il l’avait évité ce tragique matin, il n’avait aucune vision d’ensemble alors. Mais les temps avaient changés, le jeune homme avait eu le temps de vivre sans lui. Et ça, c’était la pire expérience de sa vie. C’était seulement comme ça qu’Elio avait compris qu’Andrea lui était indispensable. Puis, il en avait saisit la raison. Et voilà qu’il était affalé comme une loque dans une ruelle, le temps de se reprendre. Le bruit d’un moteur de voiture le fit sursauter, entaillant légèrement son avant-bras sans qu’il le remarque toutefois. Ce n’était que caresse comparé à ce qu’il avait connu durant ce mois et demi d’abandon et de folie.

Elio se releva péniblement, serrant toujours une serviette de restaurant dans son poing, crispé et impatient. Prenant appui sur les murs qui le soutenaient, il attendit quelques instants que le monde veuille bien avoir l’obligeance d’arrêter de tourner. Il allait mieux, l’alcool faisait moins d’effet. Ses idées étaient plus claires, bien qu’il ait toujours l’impression de marcher dans son coton préféré. Il repartit de plus belle, comme une épopée au vu de son état. Traversant un quartier pas vraiment bien réputé, il demanda plusieurs fois son chemin. Se perdit en cours de route, pour finir par arriver devant une bâtisse comme toutes les autres. Une devanture sobre mais lumineuse sous le rayonnement du soleil de midi, des volets bleus ciel ouverts à tous les étages, des pots de fleurs ou des rideaux pendant devant les fenêtres. Un immeuble milanais classique, en somme. Mais c’était son immeuble, son appartement s’y trouvait. Un long moment, Elio resta là, comme un piquet sous le soleil et en plein milieu de la route, évitée à cette heure de la journée au vu de la chaleur. Sous son t-shirt sombre et son jean, il avait chaud. Mais depuis trop longtemps il n’avait eu droit qu’au froid de la solitude, aussi cette impression de se consumer sur place ne le dérangeait pas. Il avait l’impression de vivre, et ça faisait du bien.
A présent, la porte de ce bâtiment constituait son principal ennemi. Comment la franchir ? Comment trouver le bon appartement ? Elio n’en savait rien, et à part sonner chez un voisin pour lui expliquer l’urgence de la situation et sa future déclaration enflammée à un autre homme, rien ne lui venait à l’esprit. Ne voulant pas rester comme un con éternellement devant son but, Elio finit par pousser un long soupir et se résigner. Soûl, il n’avait aucune autre idée que celle qui venait de germer dans son esprit. Tant pis, au moins il attirerait son attention.

S’approchant de son but, le jeune homme fixa les plaques jusqu’à trouver ... rien. Là, c’était vraiment bête. Après avoir eu l’adresse, le numéro, après s’être trainé jusqu’ici à moitié dans un autre monde, le merveilleux univers de l’éthylisme, Elio se rendait compte de son échec critique. Il ne connaissait pas le nom de famille d’Andrea. Et ne pouvait, par conséquent, pas sonner chez lui. Il se serait volontiers frappé le crâne contre la porte en face de lui mais ça n’était pas une solution à son problème. Alors, le jeune homme abandonna l’idée de tenter de le persuader par interphone interposé de le laisser monter pour qu’ils discutent. Et opta pour une solution bien plus stupide mais sans doute la seule qui aurait une maigre chance de marcher. Et tant pis pour le ridicule, pour la honte. Elio n’en avait plus rien à faire, seul comptait Andrea. Alors le barman recula de quelques pas en essayant de ne pas tomber à la renverse et, en se positionnant bien sous les fenêtres qui donnaient sur la rue, il pria très fort pour que l’appartement d’Andrea donne sur ce côté-ci de l’immeuble et pas à l’opposé. Et il commença à chanter, d’une voix incertaine et au début maladroite. Au début, seul lui pouvait s’entendre mais au fur et à mesure qu’il répétait la même chose, inlassablement, le jeune homme prit de l’assurance dans sa connerie et son coffre se libéra, sa voix portant et sonnant clairement dans le quartier.

- Andy ! Dis moi oui. Andy, dis-moi dis-moi oui. Hé, tu viens chez moi ? Ou alors on va chez toi. Allez, Andy, quoi, oh dis-moi oui.

Et si tout le monde le regarda comme s’il devait être interné, Elio continuait de plus belle. On est con, quand on est amoureux. Mais s’il pouvait se dépêcher de céder à son timbre qui chantait un peu faux, cela l’arrangerait tout de même. Rester ainsi toute la journée, très peu pour lui. Oui, il était fou. Fou de ne pouvoir le voir, fou de ne pouvoir lui dire.

I find it hard to tell you
I find it hard to take
When people run in circles
It's a very, very mad world
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Andrea Vitaly

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Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] Vide
MessageSujet: Re: Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV]   Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] I_icon_minitimeDim 10 Juil - 17:13

J'en sors pas
Cafard
Bad trip
Idées noires
Avalé par l'espace au fond d'un entonnoir

Ca faisait déjà plus d’un mois que je n’avais pas touché à mon ordinateur. Depuis que j’avais été envoyé inconscient à l’hôpital. Sortir avait prit plus de temps que prévu et même si je mourrais d’envie d’en partir, j’avais la trouille. Je me sentais plus en sécurité là bas que dans mon appartement. Pourtant le GDP pouvait venir n’importe où à tout moment s’il avait décidé que j’étais quand même une potentielle menace. Cette peur, plus la douleur et mes souvenirs de ces derniers fois faisaient que je passais de très mauvaises nuits très courtes et que j’avais la sensation permanente d’être fatigué. Et ce malgré les siestes que je faisais à longueur de journée. J’avais peur et je me sentais irrémédiablement seul et malheureux. Je ne voulais pas vraiment manger ce qu’on m’apportait. Même pas à cause du goût, juste parce que je n’y arrivais pas. Les journées passaient en se ressemblant sans que personne ne vienne me voir. A chaque fois qu’une infirmière ou un médecin ouvrait la porte, je me retournais vivement dans l’espoir de voir un visage connu, des cheveux blonds ou des cheveux noirs avec un sourire moqueur. Et à chaque fois cette étincelle dans mon regard s’éteignait et je replongeais dans la morosité. Et puis à la fin je ne me tournais même plus. Je n’avais plus cet espoir. Je savais parfaitement que j’étais pitoyable et pourtant je n’arrivais pas à me foutre un coup de pied au cul pour avancer. J’avais frôlé la mort, mes blessures me le rappelaient à chaque instant. J’avais été débile avec la personne pour laquelle je ressentais des forts sentiments. J’avais envoyé balader mon oncle qui était venu me voir. J’avais tout gâché et j’étais encore là à m’en lamenter. Sauf que je ne pouvais rien extérioriser, en parler à personne. Alors je restais comme un zombie en attendant que ça passe.

Et c’était passé. Le temps, pas mon état. Un beau matin on était venu me dire que j’étais prêt pour sortir qu’il fallait que je fasse attention et tout le reste. J’avais failli appeler mon oncle pour qu’il vienne me chercher, pour qu’il me ramène dans la maison familiale, même un petit moment, je n’avais pas envie d’être seul. Mais mon orgueil m’en avait empêché. Cette impression que je n’avais besoin de personne alors que je savais très bien que c’était faux. Car à cet instant, avoir quelqu’un avec moi était tout ce que je souhaitais. Mais j’avais prit un taxi et j’avais remit les pieds dans mon appartement, le bras droit en écharpe, boitillant encore un peu. Il me restait quelque trace de bleus qui avaient virés au jaune. Ils ne me faisaient plus mal, c’était juste moche. Enfin, normalement, ça allait bientôt partir, surtout après qu’ils soient passé par toutes les couleurs de l’arc en ciel. J’avais refermé ma porte et je m’étais laissé glisser contre elle. Je revoyais ma discussion avec Vito, ce plan totalement dément et foireux pour ne pas que je finisse au cimetière à côté de mes parents. Je me revoyais allongé au sol crachant du sang. La table basse était toujours renversée, mon pc allumé. Et je revis son visage, son sourire, sa chambre, ses mots. Et j’éclatais en sanglots nerveux. Car c’était bien trop pour que je puisse continuer à le supporter. Je pleurais jusqu’à être trop épuisé pour continuer et je me levais en titubant pour arracher la prise d’alimentation de mon ordinateur avant de m’effondrer dans mon lit pour tenter de passer une nuit complète.

Ce qui fut un échec et alors que je me redressais dans mes draps je fis une grimace de douleur en me tenant les côtes. Il fallait que je fasse quelque chose ou j’allais me laisser dépérir. Sauf que tout me semblait insurmontable. Moi qui n’avais jamais douté, voilà que je n’arrivais plus à rien. J’avais l’impression d’avoir tout perdu. Tout ce qui me tenait de près ou de loin à cœur. Et voila que je me retrouvais comme un moins que rien. J’aurais pu m’offrir un bateau aussi grand que l’immeuble mais je n’aurais eu personne pour en faire avec moi. Mon cœur me faisait mal et ce n’était pas à cause d’une quelconque blessure physique. Mon cœur me faisait mal à chaque fois que je repensais comment ça s’était terminé. A chaque fois que je repensais à ma connerie, à chaque fois que je repensais à lui. Je me recroquevillais au fond du lit en respirant par saccade. Je voulais le revoir, je voulais vraiment le revoir, je voulais de nouveau le sentir contre moi, sentir ses mains passer dans mes cheveux, et ses lèvres sur les miennes. Je voulais le revoir à un point que ça me rendait malade. Je n’avais jamais ressenti cette sensation de manque à ce point. C’était comme si il avait arraché une partir de mon cœur et qu’il ne pouvait me la rendre qu’en retournant le voir. J’avais réellement cru que le temps aiderait et que je passerais à autre chose. Mais quand on venait de passer son temps à ruminer à l’hôpital, on ne rencontrait personne pour vous tirer de la déprime. Et maintenant je n’avais plus aucune motivation pour sortir. Je ne savais pas comment parler aux gens. Ce n’était qu’avec lui que je réussissais à ne pas être trop désagréable.

Et pourtant je l’avais été et ça me hantait. Je ne voulais pas dire toutes ces choses blessantes, je n’avais pas voulu partir comme un voleur sans me retourner. Et le fait de penser que ça ait pu le blesser me rendait horriblement mal. Bien sûr que lui aussi m’avait fait souffrir, mais c’était ma faute, j’aurais dû lui expliquer au lieu de lui balancer ce que je pensais de lui comme ça. J’avais cru que c’était la meilleure solution d’être sincère mais je m’étais lourdement trompé car notre relation n’avait jamais vraiment été construite sur ça. Et j’en payais les pots cassés amèrement. Alors qu’il y avait plus d’un mois je me sentais incapable de continuer à le voir si on ne pouvait pas aller plus loin tous les deux, voilà que j’aurais tout donné pour le faire à nouveau. Peut être qu’avec beaucoup d’efforts j’arriverais à ne lui donner que ce qu’il attendait de moi sans chercher à demander plus. Peut être que j’arriverais à m’habituer à ça. J’avais été trop impatient et voilà le résultat. Mais j’avais peur que si j’y retournais il ne veuille plus me voir autrement que comme un inconnu. J’avais peur d’avoir brisé irrémédiablement notre lien alors que j’y tenais plus que tout. Oui c’était ma faute, mais le fait d’ignorer ainsi mes sentiments en me tournant ostensiblement le dos m’avait ravagé. Et j’avais perdu mes repères et ce que je souhaitais lui faire passer, prenant ce masque de mépris pour ne pas lui montrer mes larmes. Un orgueil qui ne me quittera sans doute jamais. Et qui m’avait déjà perdu. J’avais envie de le voir quitte à passer pour un abruti et essayer ces remarques. Il aurait raison de m’en faire vu mon comportement. Et si il agissait froidement sans avoir envie d’aller plus loin, ça me vaccinerait sûrement et j’aurais pu passer à autre chose. Savoir qu’il n’y avait aucun espoir m’aiderait à guérir. Alors que depuis que j’avais quitté le Love’s Out pour la dernière fois, je ne cessais d’entretenir l’illusion qu’il veuille bien me reprendre si je m’excusais de mon attitude.

Et pourtant je n’allais pas le voir. Et je pensais sérieusement à changer d’appartement, car celui-ci me rendait malade depuis que j’étais de retour. Je me revoyais en train de revenir en pleine nuit du bar, après avoir couché avec lui, essayant de ne plus penser à cette gêne alors que mon sourire devenait de plus en plus récurant quand je pensais à lui. Je ne savais pas comment l’approcher, comment l’aborder. Revenir comme si de rien n’était ? Après tant de temps ? C’était risible. J’avais peur. Peur qu’il me rejette définitivement malgré mes explications que je lui bafouillerais à la figure. A moins qu’automatiquement je ne reprenne le même masque de froideur qui m’accompagnait partout. Qu’est-ce que j’aurais donné pour qu’il me reprenne dans ses bras ? J’en rêvais tout en sachant que si l’opportunité arrivait, je serais dans une impasse sans savoir comment réagir. Passer pour un imbécile ou un connard. Je l’avais déjà été devant lui. Et tout ce que je voulais lui montrer, c’était que… Que je tenais à lui ? C’était ça qui m’avait perdu la première fois. Ca ne pouvait pas être ça qui me sauverait la seconde. Alors quoi ? Que je m’étais laissé emporter ? Je pourrais, mais mes gestes de tendresse envers lui ne le tromperait pas une seconde.

Alors je ne savais pas quoi faire et je tournais en rond chez moi sans oser une seule fois rallumer l’ordinateur, ayant peur de me faire attraper de nouveau. Je voyais des films sans les voir, voyant des allusions à Elio de partout, ça me rendait malade. Il m’arrivait parfois de me mettre à pleurer sans raison juste en repensant à ma bêtise, à lui, à ses baisers et à sa délicatesse. Ca me transperçait la poitrine tellement je voulais le voir. Le voir et encore le voir. Plus d’une fois j’ai ouvert ma porte avec la ferme intention d’y retourner, mais je remontais une fois le pied dans la rue. C’était au dessus de mes forces. Alors je prenais un livre, je lisais un chapitre avant de le refermer, je restais des heures allongé sur mon canapé à imaginer des idées pour que tout finisse bien, en essayant de ne pas ruminer le passé. J’essayais de me trouver des ouvertures, des lueurs d’espoir que je finissais systématiquement par tuer dans l’œuf. Il fallait que je sorte. Et pourtant je n’y arrivais pas, dire quoi à qui ? Qui voudrait bien me parler ? C’était stupide, je savais la seule personne que j’avais envie de voir. Et son prénom tournait en boucle dans ma tête.

Encore une nouvelle journée depuis que j’avais quitté ma chambre blanche et aseptisée. Ca n’allait pas vraiment mieux mais je faisais avec. Je partais du principe qu’un jour j’irais tellement mal, je serais tellement malheureux qu’il faudrait bien que je trouve un exutoire, que je craque et que je finisse par le voir, par l’appeler, ou même par aller voir Egeado. En attendant je voyais la vie en noir et j’avais presque envie de me coller des beignes pour pouvoir retomber dans un sommeil quasi comateux ou au moins je serais tranquille. Et puis ce fut l’improbable. J’étais juste en train de remplir une casserole d’eau pour me faire trois pâtes que je commençais à entendre des cris venant de la rue. J’avais la porte fenêtre du balcon ouverte et plus je m’approchais, plus j’entendais de plus en plus clairement des paroles. Quelqu’un chantait en fait. Avec un voix un peu éraillée, pas très juste mais que j’avais l’impression de connaître par cœur. Qui d’ailleurs se mit à battre plus vite alors que je me précipitais dehors pour aller voir.

- Andy ! Dis moi oui. Andy, dis-moi dis-moi oui. Hé, tu viens chez moi ? Ou alors on va chez toi. Allez, Andy, quoi, oh dis-moi oui.

C’était lui. C’était vraiment lui. Il était planté en train de hurler en boucle cette chanson absolument débile. Mon visage devint plus cramoisi qu’il ne l’avait été depuis un temps qui me semblait infini. C’était Elio. C’était bien Elio qui chantait à tue tête devant la façade du bâtiment. C’était cet abruti finit qui me foutait la honte ainsi. Alors que mon cœur explosait et que j’avais l’impression de le sentir autrement que douloureux depuis trop longtemps. C’était impossible, c’était une hallucination. Je me précipitais aussi vite que mes jambes le pouvaient à la cuisine pour prendre la casserole d’eau froide et je retournais à mon balcon pour lui jeter la flotte à côté. Juste pour l’éclabousser.

- Mais tais-toi !

Je lui hurlais. Je lui hurlais avec les sourcils froncés. Je lui hurlais comme si j’avais pu lui hurler que je l’aimais. Mais qu’est-ce qu’il foutait là ? Qu’est-ce qu’il venait chanter sous ma fenêtre ? Mais qu’est-ce qui se passait ? Finit les réflexions. Je descendis en courant sans sentir la douleur, sans prendre la peine de fermer ma porte. Je descendis et sorti pour me planter en face de lui, la main libre sur la hanche.

- C’est quoi ton problème ? Tu veux réveiller tout le quartier ?

Je voulais paraître en colère, mais c’était impossible. Ce n’était qu’à moitié le grondant que je disais ça. Comment j’aurais pu être aussi froid devant lui ? Devant son visage à moitié perdu, devant ce corps, devant lui que j’avais tant rêvé revoir. Et j’étais à deux doigts de me jeter sur lui pour l’enlacer, pour le palper, vérifier que je n’avais pas totalement craqué en fumant sans m’en rendre compte trop de moquette. Je m’approchais encore d’un pas, retenant mes larmes de joie, de surprise, de choc. Et puis je fronçais le nez en le regardant, un peu à l’ouest.

- T’as bu ?

Mais Elio, explique-moi. Explique-moi avant que je ne m’effondre.

Its More Than A Feeling,
When I hear that old song they used to play
More Than A Feeling
I begin dreaming
More Than A Feeling
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Aurelio Pastore

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Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] Vide
MessageSujet: Re: Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV]   Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] I_icon_minitimeDim 10 Juil - 18:28

Admettons. Admettons un instant que ce n’était pas forcément la meilleure des façons d’aborder quelqu’un que l’on a brutalement blessé, trahi, après presque deux mois d’absence. Elio aurait pu, par exemple, se montrer moins pressé. Plus intelligent. Mais ce n’était pas dans sa nature, et il n’y avait que complètement six pieds sous terre qu’il aurait pu se montrer apte à réfléchir. Alors quoi, une lettre ? Un coup de téléphone ? Jusqu’à il y a peu il n’avait ni adresse ni numéro où le joindre. Il ne connaissait personne qui s’était lié à lui, que ce soit dans le bar ou en dehors. A vrai dire, oui, c’était un bel étranger. Et comment on retrouve quelqu’un qu’on ne connait pas ? Elio avait bien pensé à passer une petite annonce mais au vu de l’état dans lequel lui-même se trouvait, il doutait se sentir capable de lire le journal. Et il devait en être de même pour Andrea, qui avait sans doute autre chose à faire. Comme, au hasard, le maudire et faire des poupées vaudous de son misérable être pour tenter de se venger. Ou s’entrainer aux fléchettes sur une image lui ressemblant, au choix. Bref, se défouler, sans doute. Ou pleurer toutes les larmes de son corps comme lui-même le faisait, mais au vu de la force qu’il avait montrée lors de son départ, peut-être était-il au-delà des pleurs. Peut-être se montrait-il moins pitoyable que lui. Ou peut être pas. Elio avait également pensé au poste de police. S’ils ne le connaissaient pas, il pouvait toujours le faire passer pour un petit frère ayant fugué. Sauf qu’il ne pouvait pas vraiment leur donner des informations précises au sujet du fugitif, et serait donc rapidement discrédité. Ou pire, on lui aurait fait croire s’occuper de lui en lui promettant de le « rappeler ». Il aurait pu aussi demander à Delia, sans doute la solution la plus simple et peut-être la plus efficace. C’est vrai, avec toutes ses connaissances Andrea aurait sans doute pu être retrouvé. Quelqu’un le connaissait bien, quelque part, dans cette ville ! Sauf que la concernant, c’était ... comment dire ? Sans aucun espoir.

Il ne lui avait même pas demandé, en fait. Connaissant trop bien le regard accusateur, lourd de reproches qu’elle lui lancerait. Accompagné d’un petit discours moralisateur sur sa triste condition. Et d’un refus catégorique de faire quoi que ce soit pour retrouver ce merdeux qui pêtait plus haut que son cul. Certes, merci Delia. Ceci dit, Elio savait bien que dans le fond elle avait raison. Tout ceci n’amènerait rien de bon et la seule manière de s’en détacher complètement était de l’oublier et passer à autre chose, redevenir Elio le serveur séducteur. Et le pire, c’est que le principal intéressé était parfaitement d’accord avec cette déduction. Elle avait raison, parfaitement. Et le jeune homme avait été plutôt conciliant, déterminé à suivre cette perspective raisonnable d’avenir une fois les premiers temps passés, où la raison ne signifiait plus rien pour lui. Et tout se serait passé ainsi s’il n’y avait pas eu ce risotto. Ce restaurant, cette journée. Parce qu’Elio n’aurait pas repris cette habitude, n’aurait pas compris à quel point il tenait à ce plat pour le réconfort et le sentiment de bien-être qu’il lui procurait. Il n’aurait pas non plus réalisé que sans ce simple détail dans sa vie, plus rien n’était pareil. Et le mot « amour » n’aurait jamais germé dans son esprit, l’adresse d’Andrea ne se serait sans doute pas rappelée à son souvenir. Tout serait alors merveilleux : Elio serait en train de se remettre doucement au service, comme un convalescent réapprend sa vie quotidienne après une violente amnésie. Il serait derrière un comptoir à inventer de nouveaux mélanges, et sans doute à les boire pour oublier plus rapidement. Si ce n’était pas le bonheur et loin de là, c’était simple. Facile, et profondément logique et raisonnable.

Sauf que l’amour est tout sauf raisonnable. Il est passionné, impulsif, égoïste, dément et totalement surnaturel. C’est un sentiment qui peut faire soulever une montagne au plus chétif des hommes, rendre jolie une femme trop complexée, réconcilier deux amies unies par la peine d’un chagrin commun, accomplir certains miracles ... Comme décider Elio à foutre totalement sa vie en l’air, à parier sur une satisfaction et un soulagement éphémères plutôt que sur la paix de l’esprit à plus long terme. Comme un gosse, il se précipitait vers la maison de pain d’épices sans penser à la sorcière plutôt que d’y préférer la maison de pierre, solide et inébranlable, pour y protéger des sentiments qui n’auraient jamais du voir le jour. Aveuglé par la promesse d’un poids en moins sur le cœur, rien qu’à l’idée de le revoir. C’était ça le pire, Elio n’envisageait pas du tout ce qu’il allait pouvoir faire, pouvoir dire. Il se pointait là, la mine enfarinée et plein de bonnes intentions, confiant en des sentiments qu’il venait d’identifier alors qu’ils étaient présents depuis longtemps, sans vraiment savoir où il mettait les pieds. Lui crier comme ça de but en blanc deux mots qu’il ne croirait sans doute pas ? Rien de mieux pour lui faire une attaque ou une putain de rupture d’anévrysme. Trop de stress, c’était franchement pas une bonne idée. Mais prendre des gants l’éloignerait de son but, le perdrait en discours futiles et en explications qu’il aurait sans doute du mal à mener à bien dans son état. Pourtant, il savait qu’Andrea en avait besoin. Il voulait lui montrer avec suffisamment de force le sérieux de sa présence ici sans toutefois tout lui dire d’un coup. Et maintenant, il n’avait pas d’autre choix que d’assumer cette décision. Parce que sinon il n’aurait pas fait difficilement le chemin qui le séparait de cet immeuble, sinon il n’aurait pas pris la peine de se rendre ridicule, il n’aurait même jamais eu le courage de se manifester à lui après ce qu’il avait fait.

Et alors il ne serait pas là, comme un con, sous un balcon à tenter de chanter la sérénade comme Roméo, mais avec un tantinet moins de classe ... et sans les collants moulants. C’était vraiment stupide, mais comme chanson d’amour il n’avait rien dans son répertoire, et puis restons un peu réaliste, le connaissant c’était trop espérer. Il n’aurait pas été capable d’aligner deux mots cohérents de ces mélodies vaporeuses aux paroles dramatiques. Et surtout, ne pas gâcher ses sentiments en les insufflant dans les paroles de quelqu’un d’autre. Pour qu’il se reconnaisse, il n’y avait rien de mieux. Et il se reconnut. Elio levait les yeux, un peu incertain surtout que sa voix devenait hésitante au fur et à mesure que seuls les regards étonnés et répugnés lui répondaient. Il faillit arrêter, au moins pour reprendre son souffle, mais au milieu de tous les visages perchés aux balustrades des balcons, il surgit. C’était le seul à ne pas avoir l’air totalement dégoûté, le seul qui ne le regardait pas avec un jugement de folie rapidement diagnostiqué. Non, il avait l’air surpris, et terriblement gêné. Elio ne put s’empêcher de sourire quand il retrouva la couleur si particulière de ces joues tant aimées. Même de loin, il le voyait parfaitement. Et cela lui faisait un bien indescriptible. Loin, bien loin la douleur généralisée qui le paralysait parfois quand il tentait de se souvenir de son visage. Les rêves étaient cruels, la réalité pour une fois ne l’était pas. Bien au contraire. Sa simple vision lui donnait envie de hurler de joie. Rien que de le voir, il avait eu ce qu’il était venu chercher. Maintenant Andrea pouvait bien le lapider et lui dire de ne jamais revenir, Elio était comblé pour de nombreux mois. Ce visage tant attendu fit briller ses yeux d’envie de plus. Aussi, quand il disparut dans son appartement Elio eut un instant d’hésitation. C’était pour le rejoindre ou refermer la porte fenêtre ?

Mais évidemment, ce n’était pas ce à quoi il s’attendait. Car il vit bien vite le visage d’Andrea réapparaitre et, alors qu’il chantait encore à tue tête, le jeune homme vit une trombe d’eau arriver sur lui, et mourir à ses côtés, trempant au passage le bas de son jean et l’éclaboussant jusqu’au visage. Et malgré l’injonction colérique et le visage fâché d’Andrea, le barman n’arrêta nullement sa chanson. Pas tant qu’il n’aurait pas satisfaction. Impressionnant quand même de se voir arriver une large quantité d’eau sur la figure. Ça en aurait calmé beaucoup. C’était bien mal connaitre Elio amoureux. En même temps, étant donné que personne de vivant ne l’avait jamais vu ainsi, il aurait été bien difficile de prétendre s’y attendre. Mais sa voix mourut dès qu’il l’aperçut à la porte. Il semblait essoufflé comme s’il avait couru, mais surtout pressé de descendre. Comme si Elio allait partir après tant d’effort et de ridicule ... Le serveur du Love’s out buvait littéralement l’image qu’on lui offrait, détaillant chaque trait du visage tant connu, tant embrassé. Il se retint néanmoins de lui sauter dessus pour le serrer contre lui, devinant que c’était sans doute un peu brusque pour quelqu’un qui ne s’y attendait pas, et même pour lui qui n’avait dans la tête ce dénouement que depuis une petite demie heure ...

- C’est quoi ton problème ? Tu veux réveiller tout le quartier ?

Elio ne pouvait détacher son sourire du visage de son ancien amant, trop heureux pour arriver à garder un air sobre pour le moment comme Andrea le faisait pourtant. Tant pis, qu’il se couvre de ridicule ou d’autre chose, tant qu’il pouvait enfin laisser ses émotions apparaitre sur son visage. Ce sourire qu’il aurait du lui offrir le matin où Andrea avait avoué son besoin de rester à ses côtés, qu’il aurait du afficher à chacune de leur rencontre. Qui voulait dire beaucoup de choses, mais n’expliquait rien pour autant. Et, ressuscité par la simple vision d’Andrea et quelque peu aidé par la joyeuseté de l’alcool, Elio reprit ses bonnes vieilles habitudes. Il plaisanta. Simplement pour lui montrer qu’il était bien réel, qu’il était là, comme avant. En mieux, mais ça il ne le saurait qu’un peu plus tard, s’il ne l’avait déjà deviné par sa présence devant lui.

- A cette heure il n’y avait que toi ou moi pour encore dormir. Et mon problème, c’est que je ne pouvais ni t’appeler ni sonner chez toi. J’ai pas ton numéro ni ton nom. Alors je fais avec ce que j’ai.

Quand il avança encore, Elio dut serrer les poings pour ne pas se précipiter contre lui et le rassurer de sa présence. Car le jeune homme ne savait pas encore. S’il était heureux d’être enfin là, de nouveau face à lui, il ne savait rien des sentiments d’Andrea. Il ignorait totalement si le blondinet avait envie de le voir, envie de lui parler, envie qu’il se rapproche. Ses vieux réflexes n’avaient pas lieu d’être ici, et Elio devait se retenir, se brider. Tant qu’il n’aurait pas tout expliqué, il n’en avait pas le droit. C’était sa punition pour avoir tant manqué de discernement et avoir fait souffrir la seule personne qu’il voulait protéger.

- T’as bu ?

- Pour me donner du courage. Et me souvenir de ton adresse. Je ne sais pas vraiment quoi trouver en venant ici.

Un temps de silence s’installa alors qu’Elio se contentait d’admirer avec délectation son vis-à-vis, jusqu’à ce qu’il finisse par réagir. En observant bien, du moins mieux que le regard béat qu’il lui lançait, Andrea avait le bras bandé et des hématomes sur le corps. Il n’en voyait qu’une petite partie mais il devinait que ce n’était qu’un vague aperçu. Et au vu de leur couleur, ils dataient. Les coups avaient donc été violents, ce n’était pas de l’automutilation ou une simple chute dans les escaliers. Perdant brusquement son sourire, Elio s’autorisa d’effleurer le coude qui n’était pas pris en écharpe pour y passer un doigt hésitant. Le regard interrogateur suivit immédiatement, soutenu d’une vague froide de mécontentement.

- Comment tu t’es fais ça ?

Sous entendu, donne moi son nom que je l’envoie là où il mérite d’être. Mais aussi, et ça il ne le disait pas, pourquoi ne pas en avoir parlé, pourquoi ne pas être venu ? Il pouvait trouver le numéro du bar dans n’importe quel annuaire, alors il aurait pu le prévenir, l’alerter. Il fallait croire qu’Andrea ne lui faisait pas suffisamment confiance, ou lui en voulait trop pour daigner le contacter. Tout d’un coup, la fougue et l’assurance d’Elio retombaient. Devait-il le mettre dans l’embarras et tout lui avouer, se retenir et s’excuser pour le dérangement ? Seule la suite le lui dirait, mais ces marques de blessures venaient de dresser une barrière de doutes et d’interrogations dans l’esprit d’Elio. Ce qui, sans doute, lui permit de ne pas suivre son idée première et de l’embrasser fougueusement avant de tout lui déballer au plein milieu de la rue. Mais en rien sa détermination de se débarrasser de sa prise de conscience n’avait disparue. Juste reportée, peut-être. Le temps de savoir s’il fallait se préparer à un refus, à une moquerie ou à une colère bien méritée. Et d’en apprendre un peu plus sur ce qui l’inquiétait maintenant en premier lieu. Pourtant, les mots lui brûlaient la gorge, les lèvres, dévoraient sa raison et à tout moment il se savait capable de craquer et de tout déballer dans un contexte des plus inappropriés.

De la folie de l’alcool, il avait sombré dans la démence de l’amour.
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Andrea Vitaly

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MessageSujet: Re: Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV]   Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] I_icon_minitimeLun 11 Juil - 14:32

Parce qu'on n’sait jamais
S'il y a un après
Et alors on baisse les bras pour venir se faire pardonner
D'y avoir cru tellement peu et de vouloir se racheter


Oh oui il avait bu. Je ne l’avais jamais vu dans cet état. Les yeux brillants et le regard fébrile et un peu perdu. Sa façon d’osciller et son timbre de voix. C’était comme une vision impossible. J’avais l’impression de voir à quoi je ressemblais quand j’abusais de ses verres. Sauf que là, c’était le barman. Pourquoi ? Mais pourquoi en était-il arrivé à cette extrémité ? Pourquoi avait-il laissé l’alcool prendre possession de ses gestes de la sorte ? Car il n’avait pas que deux verres dans le sang, là, ça se voyait. Qu’est-ce que ça pouvait bien faire de l’embrasser alors que je sentais son haleine de là où j’étais ? Peut être que je pouvais bien faire ce que je voulais, il ne s’en souviendrait pas le lendemain. Penserait à un rêve. Sauf que j’avais déjà du mal à l’approcher alors ça ne semblait pas très pertinent. Et pourtant Dieu sait que j’en mourrais d’envie. Me faire pardonner au creux de ses bras et le supplier de me reprendre, de réessayer. Sauf que tout ce que j’avais imaginé si une telle chose se produisait semblait s’être évaporé de mon esprit, me laissant face à moi-même sans savoir comme agir. Et là je me sentais hyper timide face à lui alors que je luttais pour me montrer détaché. Comme si sa venue sur le pas de mon immeuble ne voulait rien dire. Alors qu’il n’y avait rien de plus faux. Mais je ne voulais pas lui montrer à quel point j’étais heureux de le voir tant que je ne savais pas comment cette rencontre allait se terminer.

Je me doutais, et j’étais quasiment sûr qu’il n’était pas venu ici pour des intentions moqueuses ou belliqueuses, ça ne ressemblait pas au personnage. Ca ne ressemblait pas à celui qui quittait le moins possible son bar. S’il était là aujourd’hui, c’était pour des raisons qui lui étaient propres mais qui devaient être les plus sérieuses du monde. Surtout pour qu’il en arrive à cette extrémité. Je jetais un coup d’œil au dessus de nous et vit les dizaines de voisins nous regarder, ainsi que les passants qui avaient tout suivis depuis le départ. Nous étions au cœur d’un cercle de regards inquisiteurs et ça ne me plaisait que moyennement. On me connaissait un peu par ici quand même. Mais tout ça me paraissait au final quand même secondaire comparé à celui qui se trouvait devant moi. Et rester neutre devint de plus en plus difficile alors que je sentais le bout de mes doigts se mettre à trembler d’impatience de le toucher, de le retrouver. Comment est-ce que j’aurais pu lui en vouloir de m’avoir affiché de la sorte alors qu’il était venu jusqu’à moi ? Chose que j’avais été incapable de faire. A ce moment je crois qu’il m’aurait demandé n’importe quoi j’aurais été prêt à le faire. Avec ce sourire qu’il affichait en face de moi. Comment voulait-il que j’arrive à rester serein ? Et pourtant mon propre sourire ne venait pas et je restais cloué au sol. Cloué par la peur d’être de nouveau rejeté. Et c’était si angoissant que je n’arrivais pas faire ce que j’aurais voulu lui montrer, lui expliquer. Je me contentais de le toiser sans arriver à faire même un pâle reflet de sourire alors que j’aurais aimé le faire.

- A cette heure il n’y avait que toi ou moi pour encore dormir. Et mon problème, c’est que je ne pouvais ni t’appeler ni sonner chez toi. J’ai pas ton numéro ni ton nom. Alors je fais avec ce que j’ai.

J’étais sûrement à deux doigts de me mettre à pleurer et rire et de me jeter dans ses bras. Mais je ne bougeais pas alors que pourtant ça remuait dans mon ventre. Il était débile et totalement à l’ouest. Il avait perdu tout ce mystère qui le caractérisait au bar. Il était un mec normal et paumé. Et ça me faisait encore plus craquer, encore plus battre mon cœur pour lui. Il était venu jusqu’à moi, c’était vraiment lui, lui et ses phrases débiles. Mais qui sonnaient si justes. Je ne voulais pas me faire d’illusions, pas encore et pourtant cet espoir qui n’avait jamais été complètement étouffé depuis que j’étais parti du bar ne cessait de lutter encore et encore. Avec cette idée qui s’imposait de plus en plus durablement à mon esprit, s’il était venu c’était pour qu’on se voit. Je ne savais pas encore pourquoi mais c’était déjà le premier pas. Ca voulait dire que pour l’instant, il n’était pas sorti de ma vie définitivement, et peut être qu’on aurait le droit à un nouveau départ. Peut être que je pouvais y croire. Quant à lui faire confiance, c’était peut être un peu prématuré. Je ne demandais que ça. Mais je n’étais pas encore prêt.

- C’est Andrea Vitaly, tu pourras le retenir ?

C’était une question sans moquerie, peut être avec un peu d’espoir même. De la même façon je ne voulais pas lui donner tout de suite mon numéro, surtout si c’était pour rester collé à mon téléphone toute la journée dans l’attente d’un coup de téléphone qui ne viendrait jamais. Retiens mon nom de famille, retient le plus de choses sur moi possible. Retiens-moi avec toi.

- Pour me donner du courage. Et me souvenir de ton adresse. Je ne sais pas vraiment quoi trouver en venant ici.

C’était ça sa raison stupide ? Se donner du courage ? Mais du courage pourquoi ? Parce qu’il se sentait aussi paralysé que moi à l’idée qu’on puisse se revoir ? Avait-il hésité pendant des semaines avant de franchir le pas de venir ici ? Est-ce que c’était trop beau pour être vrai ? En tout cas il s’était souvenu de mon adresse. Alors que je ne me rappelais même pas lui avoir dit un jour. Il s’en était rappelé parce que ça trouvait écho en lui, parce qu’il avait voulu s’en souvenir. Je commençais à avoir de chaud de gêne sans pour autant être sûr de ce que je pensais. La dernière fois j’avais été presque sûr que les marques de tendresse n’étaient pas mon imagination et je m’étais heurté à un mur, à cent soixante kilomètres heure. Pourtant là, s’il n’y avait pas de tels antécédents, j’aurais tout de suite cru qu’il voulait me revoir à tout prix. Sauf que je ne savais pas pour quelle raison, et je refusais de me souvenir des paroles qu’il chantait encore sous ma fenêtre dix minutes auparavant. Plus de faux espoirs sans être sûr. Sauf que si l’honnêteté ne fonctionnait pas, que me restait-il pour lui parler ? Par quels moyens détournés j’allais savoir la vraie raison de sa visite ? Alors que je ne voulais que lui crier à quel point il m’avait manqué, à quel point le temps avait paru infini sans lui, à quel point j’avais pensé à lui à chaque instant quand je dépérissais dans cette chambre toute blanche.
En tout cas, moi je ne savais pas vraiment quoi trouver en allant le voir. Alors je comprenais très bien cet état d’esprit. Comment l’autre allait nous accueillir après un tel froid ? Je détournais un peu les yeux sans répondre, sa phrase n’avait pas besoin de réplique. Mais j’aurais voulu le remercier pour avoir fait le premier pas.

Sauf que tout à mes émois récents, j’avais oublié l’état dans lequel je me trouvais. Alors que ça ne pouvait passer guère inaperçu et quand je le sentis frôler un de mes bleus, je retirais prestement mon bras et mon regard se fit coupable sous l’accusation voilée d’Elio. Qu’est-ce que je pouvais bien répondre à ça ? Evidemment qu’il allait me poser des questions sur mon état. N’importe qui l’aurait fait. Sauf que je ne pouvais pas répondre, je ne voulais pas répondre. Et son ton qui s’était durci me calma l’envie de craquer pour me blottir dans ses bras. Il fallait rester digne. Je ne pouvais dire la vérité sur quelque chose que j’étais sensé avoir oublié. Sauf que je ne pouvais pas lui faire croire que j’étais victime d’amnésie. Je voulais tout me rappeler de lui. Et le coup de l’escalier était bien trop risible pour qu’il y croit une seconde. Je n’étais pas un enfant battu mais je savais que ça ne marchait pas. Ni le coup de la fenêtre, de la marche ou même d’être renversé par une voiture. Il attendait des justifications que je ne pouvais pas lui donner. Et ça me fendait le cœur de devoir commencer à lui mentir par omission, mais je ne pouvais pas lui dire. Je ne voulais pas y repenser. Car il fallait que l’amnésie soit réellement convaincante pour que je sois tranquille. Et pour ça les coups devaient être puissants. Ce qui n’avait pas fait sourciller Vito. Et finir inconscient sur le parquet avec un certain nombre d’os brisés ou fêlés, ce n’était pas forcément quelque chose que je voulais partager. Tout ce que j’espérais, c’était qu’il n’insiste pas pour ne pas que ça envenime cette rencontre que j’avais tellement espéré à travers mes pérégrinations mentales.

- C’est rien, c’est presque guéri de toute façon.

Je le regardais sérieusement en me retenant de faire fuir mon regard comme j’avais tant l’habitude de le faire face à lui.

- Viens on va boire quelque chose, j’ai pas très envie de rester au milieu de tout ces regards.

Je lui attrapais le poignet pour avancer tant bien que mal dans la première brasserie que je connaissais non loin de chez moi. Et puis je finis par me rendre compte que je l’avais touché moi-même et je le relâchais en marmonnant des excuses incompréhensibles et en chauffant encore un peu plus du visage. Je m’asseyais à une table où il pouvait être en face de moi et commençais à me tordre les mains de nervosité sous la surface boisée. Et maintenant qu’est-ce qu’on faisait ? On tapait la causette comme si de rien n’était ? Alors qu’être avec lui en pleine journée était quelque chose que je voulais absolument avant. Avant que je ne comprenne que ça n’était pas réciproque. Une vague de tristesse m’enserra la poitrine à ce souvenir. Celui du refus pur et dur de ce que je lui avais dit. Ce cœur brisé que je n’arrivais pas à reconstruire. Pour la première fois que je ressentais une telle chose, il avait fallu que ça ne soit pas son cas. Et m’avait fait tellement mal… Et là deux caractères se battaient en moi. Le timide qui aurait bafouillé deux trois phrases d’explication et l’autre. Le mi sérieux, mi désinvolte, celui qui semble être passé à autre chose pour ne pas plus paraître débile. Pour ne pas lui montrer qu’un mois et demi m’avait paru être des années. Que j’aurais été prêt à tout recommencer sans dire les mêmes bêtises pour être avec lui.

Je commandais au serveur deux jus d’orange. Demander un café aurait été le comble du mauvais goût, rien que le mot m’écœurait alors que je le revoyais me tourner le dos en disant sa phrase stupide. Il valait mieux ne pas commander une goutte d’alcool en attendant qu’il redescende sur terre. En espérant juste qu’il ne regrette pas son geste d’être venu jusqu’à mot juste à cause d’un surplus de verre qu’il avait pu boire.

- Pardon pour la flotte. J’ai été prit de court… Sinon qu’est-ce que tu deviens ?

Finalement j’avais choisi la désinvolture. Ne pas lui montrer ce qui bouillonnait en moi et qui s’illustrait à travers mes doigts que je continuais de tordre dans tous les sens alors que j’affichais un air plus ou moins tranquille.

Spoiler:
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Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] Vide
MessageSujet: Re: Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV]   Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] I_icon_minitimeJeu 21 Juil - 10:09

A vrai dire, un instant, Elio fut perdu. Pendant une brève seconde, beaucoup de choses surgirent de ses pensées et vinrent brouiller son raisonnement. Andrea n’avait pas l’air content de le voir. Aucun sourire ne naissait sur son visage un peu méfiant, pas la moindre trace de plaisir ne le trahissait. Il ne le prit pas dans ses bras, ne lui montra aucune marque d’affection ou de ce sentiment si fort qui les avait unis, peut importe quel nom on pouvait lui donner. Tout comme, avant qu’il ne titube jusqu’ici, Andrea n’était pas venu le voir. Ne l’avait pas appelé. Ne s’était en rien manifesté. Et là, oui, Elio douta. Il crut un instant que sa visite n’était pas la bienvenue, que sa présence n’était pas désirée. Qu’il ferait mieux de faire demi-tour et le laisser oublier sagement quelqu’un qui lui avait fait trop de mal. C’était une alternative séduisante, d’autant plus qu’Elio était venu sans prévenir, sans se soucier de ses envies à lui, de ses attentes. L’eau reçue un peu plus tôt sur son visage voulait finalement peut-être dire ce qu’elle voulait dire. Une méthode parmi d’autres pour chasser un indésirable et lui faire comprendre qu’on préférerait qu’il s’en aille rapidement. Et si Andrea s’était précipité dans l’escalier, sans doute était-ce pour le faire taire plus rapidement et ne pas en rajouter sur la couche de honte qui le suivrait maintenant dans ce voisinage si interloqué ? Il ne fallait pas qu’Elio interprète. Il n’avait pas le droit de supposer que son vis-à-vis se trouvait dans le même état d’esprit que lui. Tout pouvait avoir changé en presque deux mois, rien n’était plus pareil entre eux et Andrea avait peut-être décidé de tourner la page et d’oublier. Si ça se trouvait, il ne pensait même plus à lui. Il serait alors le seul à chercher autant, à pleurer parfois, à tenter de se soustraire à ce goudron de tristesse qui lui empêchait tout mouvement pour ne serait-ce qu’espérer se sortir de là.

S’il n’était pas repassé au bar, il était à envisager que les paroles qu’Andrea avait prononcées en partant de cette chambre étaient véridiques. Jusque là, après la première douleur du coup passée, Elio avait toujours voulu se raccrocher à l’hypothèse qui sauvait son cœur. Il ne le pensait pas. Il avait voulu lui faire mal, toucher la corde sensible, le rejeter plus bas que terre pour conserver un peu de dignité après la trahison qu’il lui avait imposée. Il était amusant de voir que le barman, rarement juste dans ses déductions, doutait à présent de la seule chose qui semblait vérité dans leur dispute qui n’en avait même pas été une. Elio aurait préféré les cris, les larmes, plutôt que cette indifférence froide, mais se consoler en croyant que ce ne pouvait être que l’expression de son mauvais caractère et non de ses véritables sentiments l’avait aidé. Et voilà que maintenant, face à lui, il doutait. Il doutait de tout, pendant ce très court instant que dura toute cette inflexible frayeur. Après tout, le jeune homme pouvait très bien avoir pris ses désirs pour des réalités. Sous prétexte que lui, enfin, assumait pleinement ses sentiments, il demandait à Andrea de l’avoir attendu tout ce temps ? De le laisser revenir avec quelques explications et un beau sourire ? Dit comme ça, c’était ridicule et Elio se sentait partir dans les griffes subtilement acérées du pessimisme et du doute. L’impression de s’imposer, de se tromper, la certitude de faire n’importe quoi et de devoir être ailleurs. Chez lui, dans son lit confortable mais désespérément vide, à chercher encore une odeur, un souvenir. Pour se persuader que tout ce cauchemar était bien réel et se basait sur une simple soirée presque idyllique qui l’était tout autant. Et en bon lâche qui se respecte, Elio aurait presque été prêt à oublier cette nuit si on pouvait le soulager de cette douleur. Comme des années auparavant, il refaisait la même erreur de préférer la fuite à la réalité, ce besoin de se soulager pour ne plus penser, ne plus réfléchir. Par l’alcool, par l’oubli, par le déni même.

Si Andrea restait autant de marbre, alors il était certain que le jeune serveur du Love’s out s’y replongerait pour ne plus jamais en sortir. Il devrait à nouveau effacer ce qu’il était, revenir à un essentiel plus basique, plus simple. Se marteler l’esprit jusqu’à ce que les images disparaissent, mutiler son corps pour qu’à son tour il perde l’essence de celui qu’il savait à présent aimer. Tout recommençait, et Elio avait en ce moment presque conscience de ce qui l’attendait si aucun signe, aucune parole ne le rassurait rapidement. Les réflexions embrumées par l’alcool, le jeune homme était incapable de voir ce qu’il lisait pourtant d’ordinaire si facilement sur le visage de son ancien amant. Il aurait pu y deviner la fébrilité, l’excitation, la surprise teintée de plaisir que ses yeux irradiaient pourtant clairement. Mais ses propres prunelles étaient voilées par la boisson et rien de tout cela ne lui apparaissait. Il voyait seulement l’absence d’un sourire, le froid d’une étreinte qui ne se créait pas. Et tremblait presque d’incertitude. Que voulaient dire ces yeux qui le fixaient sans tendresse, signant presque la fin de sa courte bonne humeur. Oui, pendant un instant, Elio imaginait sa fin. Il la sentait couler dans l’espace qui les séparait encore, et pas seulement de manière physique. Il voyait presque son désespoir se matérialiser sur l’épaule d’Andrea et lui faire un grand sourire, comme une promesse de se revoir très vite, et pour longtemps, très longtemps. Telle une conscience mauvaise qui ne cherche qu’à récupérer une âme égarée, on sentait l’impatience et le délice qu’avait cette simple idée de retourner dans l’esprit si tourmenté de son ex-propriétaire. Mais Elio croyait encore que tout ceci n’était que le fruit de son imagination. Qu’Andrea voulait encore de lui, même après tout ce qu’il avait pu lui faire. Qu’il acceptait de le garder à ses côtés. Quel qu’en soit le prix.

- C’est Andrea Vitaly, tu pourras le retenir ?

C’est par un simple hochement de tête qu’Elio répondit. D’abord parce qu’il n’y avait rien à dire de plus, ensuite parce qu’en effet il le retiendrait précieusement, enfin parce que la boule formée au creux de son estomac l’empêchait de parler. A moins que cette gêne ne soit que la conséquence d’un éthylisme manifeste, et donc d’une certaine instabilité de son système digestif. Mais comme vomir ses tripes en plein trottoir et dans un moment pareil n’a rien de bien amusant, ce problème s’arrêtera là et peu à peu, le barman soûl parvint à déglutir et oublier cette incapacité de s’exprimer. Il se répéta en boucle le nom si précieux qu’Andrea venait de lui offrir. Il ne l’oublierai pas, non. Jamais sans doute, puisque c’était la première information un peu plus personnelle qu’il apprenait de sa bouche. En dehors de ses goûts en matière de cinéma ou de musique, détails importants mais bien moins intimes qu’un nom de famille ou qu’une adresse, qu’un numéro de téléphone. Autant de moyen de rentrer en contact, de retrouver, de se voir. Ce qui lui avait tant manqué ces longues semaines passées seul à ressasser encore et encore une scène qu’il croyait pouvoir devenir habituelle. Avec le temps, Elio pensait ne plus autant souffrir, ne plus autant craindre l’heure de rêver. Mais à chaque fois, les images étaient toujours autant réelles, et ne perdaient jamais leur impact sur la pauvre loque qu’il était devenu.

Mais ça, c’était avant. Avant tout ceci, avant qu’il ne retrouve Andrea, avant qu’il ne réalise le pourquoi de son comportement. Il avait été stupide, certes, mais dans un souci de se protéger lui, mais surtout son compagnon qui, il le savait, n’aurait pu accepter un à peu près, une appréciation incertaine de leur relation. Il lui faudrait être clair, et si cela avait pris du temps il était prêt. Mais le moment où Elio allait le prendre dans ses bras et lui déclarer sa flamme en bonne et due forme, pourtant, fut aussi celui durant lequel il remarqua ses blessures. Ce qui modifia quelque peu ses plans. Après le lui avoir fait remarquer, Elio s’attendait à une explication, même vaseuse mais à peu près crédible. N’importe quoi, pourvu qu’on lui dise ce qu’il s’était passé pendant tout ce temps. Le jeune homme pouvait tout entendre, tout accepter mais Andrea n’en était manifestement pas là. Il eut un mouvement de recul alors qu’Elio tentait d’apaiser la couleur indéfinissable de sa peau tant chérie auparavant. Un geste de répulsion, qui imposait la retenue et l’abandon de toute tentative en ce sens. Elio n’avait pas le droit de le toucher, de chercher à se rassurer. Il n’en avait pas l’autorisation, et la peur le reprit quelques secondes à la gorge tandis qu’il regrettait son geste, mais se sentait comme un étranger à ne pouvoir se rapprocher. Un inconnu à qui on ne peut pas parler, à qui on ne peut pas se confier. C’était normal, pourtant. La dernière fois qu’il avait essayé, Andrea s’était pris une remarque débile pour seule réponse et explication. Une telle expérience en calmerait plus d’un, et apparemment le gamin qu’il était encore en faisait partie.

- C’est rien, c’est presque guéri de toute façon.

- Et moi je suis parfaitement sobre ...

La réponse avait jailli de ses lèvres sans qu’il puisse la retenir, mais à mi-mot seulement. Si bas qu’Elio était bien incapable de dire si Andrea l’avait entendue ou pas. Mais manifestement, il ne voulait pas en parler. Et si lui-même en mourrait d’envie pour en savoir plus sur ce spectacle qu’il n’aimait pas, mais alors pas du tout, Elio comprenait que ce n’était pas le moment. Soit il insistait et une nouvelle dispute risquait de se créer, annihilant toute chance pour lui de lui expliquer les raisons de sa présence ici, et tout ce qu’il comptait lui dire à propos de son attitude. Soit il oubliait cette vision désagréable, faisant semblant de rien dans un premier temps et assurait ce pour quoi il était venu. Elio choisit la seconde solution, persuadé en plus de tout cela qu’il n’était plus assez proche de lui pour qu’Andrea se livre, se confie, s’ouvre à lui. Il lui fallait d’abord regagner sa confiance, regagner ses sentiments à son égard. Une longue lutte commençait alors, dont il comptait bien ressortir vainqueur. Car plus rien ne l’empêcherait de faire tout ce qui était en son pouvoir pour le séduire de nouveau, s’il le fallait.

- Viens, on va boire quelque chose, j’ai pas très envie de rester au milieu de tout ces regards.

Pourtant, ces mêmes regards lui permettaient de savoir qu’il ne rêvait pas. Ils l’ancraient dans une réalité qu’Andrea, par sa présence, rendait presque trop belle pour être vraie. Lui permettaient de se rendre compte du poids de sa présence ici et de ce à quoi il s’était engagé en titubant difficilement jusqu’à ce quartier de Milan. Il fallait à présent assumer. Mais ne répondant rien et le laissant prendre les directives, Elio se dirigea à ses côtés vers un petit établissement choisi non par hasard mais pour sa proximité. Histoire de se cacher, de ne pas avoir honte, de recueillir des explications seuls, là où personne ne pouvait juger. Bien qu’il en comprenne la démarche, ce souci de ne pas se faire remarquer, de fuir le monde qui pouvait regarder et critiquer causait souci à notre barman. Lui qui se fichait que toute la ville l’apprenne, lui qui n’avait pas hésité à crier une chanson au bas d’une fenêtre pour le faire venir, lui qui voulait tant être fier de ce nouveau statut qu’il s’était découvert ... Le voilà, relégué sur une banquette de bar, condamné à exprimer ses sentiments en ne parlant pas trop fort pour ne déranger personne, à ne pas s’afficher pour ce qui avait pourtant tant d’importance. Ressentiment trop important pour qu’il puisse se réjouir du bref contact d’Andrea, ne remarquant alors que le moment où il le lâcha, encore une fois comme si sa peau le brûlait. Comme s’il le dégoûtait encore, comme s’il cherchait à le fuir. Là encore, Elio tentait de prendre sur lui, de ne pas le brusquer alors qu’il mourrait d’envie de l’enlacer même contre son accord, jusqu’à ne plus le lâcher. Il était là, rougissant et honteux de ce contact. Ce qu’il n’avait pas été depuis si longtemps que le barman peinait à s’en souvenir. Et cette régression manifeste était difficile à vivre, lui qui avait fait de nombreux pas en avant et non en arrière.

Il saisit son verre machinalement, presque surpris de ne pas y trouver l’alcool dont il avait l’habitude exclusive ces derniers temps. L’odeur du fruit n’était en rien assommée par les vapeurs sirupeuses, et seul le sucre du jus d’orange envahissait ses narines. Sensation inhabituelle. Mais il but une gorgée tout de même, alors qu’un mal de tête commençait à poindre sous son crâne, remarquant une fois de plus l’anxiété de son ancien amant, qui torturait ses mains comme s’il pouvait les faire fusionner à jamais.

- Pardon pour la flotte. J’ai été pris de court… Sinon qu’est-ce que tu deviens ?

- Ce que je deviens ? Un alcoolique amorphe terriblement désolé de ce qui a pu se passer ... la dernière fois. Presque deux mois que je cherche comment m’excuser auprès de toi. Et comment me faire pardonner.

Pause, respiration profonde. Courage.

- J’aimerai tout effacer.

Evidemment, pour Elio c’était effacer toutes leurs erreurs à tous les deux et recommencer sur une base plus saine. Effacer le déni de ses sentiments, ses rejets, ses « non » un peu trop directs. Et tout remplacer par des « oui », tout accepter, tout reconstruire. Effacer le mauvais, n’en garder que le meilleur et renforcer le tout de ce qui était si nouveau à ses yeux. Et non pas effacer totalement ce qu’il s’était passé et repartir sur les mêmes bases, cette idée de ne pas aller plus loin, cette volonté de ne pas s’investir. Bien au contraire. Seulement, si tout cela paraissait absolument évident et trivial pour Elio, il en oubliait une fois de plus la fragilité d’un cœur amoureux. Et quand bien même il doutait de ce qu’Andrea pensait de lui après tant de temps séparés et au vu de son comportement, le jeune homme aurait pu se douter que ce n’était pas assez. Qu’il avait besoin de plus. Mais quand on apprend, c’est toujours lentement et dans la douleur. Puis on comprend, on retient, et on évite de recommencer les mêmes erreurs. Advienne que pourra. Mais ce qui est sûr, c’est qu’Elio ne quitterait pas cet endroit tant que tout ce qu’il avait à dire n’était pas transmis et compris. Les malentendus, c’était trop compliqué. Quitte à chanter encore, à se ridiculiser, à chercher ses mots, à lui décrocher la lune. En lui faisant sa première réponse sincère de la journée, alors que d’autres allaient suivre, Elio posa sa main sur celle d’Andrea qui trainait sur la table les séparant, tentant de retrouver un semblant d’intérêt dans ses yeux. Espérant démentir ses doutes quant à son actuel sentiment à son égard.

Pour la première fois depuis longtemps, Elio avait un but. Indéfectible.
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Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] Vide
MessageSujet: Re: Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV]   Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] I_icon_minitimeMer 10 Aoû - 6:57

Regarde-moi, je suis loin de toi
Si ça n'marche pas, on en reste là
Mais laisse-moi y croire
Pour une minute de plus
Pour un dernier regard
Pour redonner une chance,
A notre belle histoire


Ah oui, passer à autre chose j’avais déjà essayé. Pendant le temps qu’avait duré notre séparation j’avais tout fait pour essayer de penser à autre chose, même me plonger dans des trucs les plus saugrenus comme apprendre à cuisiner, voir même repasser ! Alors c’était pour dire. Mais au final je n’avais plus goût à rien. Et ça c’était encore quand j’avais la possibilité de faire quelque chose. Chez moi. J’essayais de l’extraire de mon esprit par tous les moyens, de sortir ailleurs pour l’exorciser, mais il n’y avait rien à faire, je sentais sans cesse ses mains sur mon corps, ses lèvres sur les miennes, son souffle à mon oreille. Je sentais cette passion à telle point que parfois je me sentais sur le point d’exploser. Mais je restais seul. Et en plus je faisais avec. Je m’en voulais de me comporter ainsi, moi qui n’en avais jamais vraiment eu le besoin, mais il me manquait tant que je ne savais pas comment faire autrement pour assouvir mes envies dévorantes pour lui. Et j’avais failli craquer, plusieurs fois. Me voyant arriver de façon désinvolte, faire comme si rien de s’était passé, essayer de recommencer, de reprendre comme avant. Mais j’en étais incapable je le savais. Si j’avais fuis pour ne plus pousser cette porte, c’était justement car je savais que je ne pourrais cacher plus longtemps ce que je sentais poindre en moi, je ne pouvais pas faire comme si avec lui. Je ne pouvais plus. Et puis à quoi bon ? Ca m’avait suffisamment fait mal pour ne pas que j’ai envie de retenter. Croire aux causes perdues très peu pour moi. J’avais renoncé à croire qu’Egeado puisse avoir un semblant d’intelligence tout comme j’avais renoncé à croire que mes parents reviendraient. Tout comme je renonçais à présent à notre histoire. Si histoire il y avait eu. Elio c’était finit Elio c’était finit.

Et pourtant je n’avais jamais pu m’y résoudre. Me triturant l’esprit sur mon lit d’hôpital, attendant un miracle qui n’était jamais venu. Comment l’aurait-il su ? Su à quel point je regrettais et à quel point je voulais le voir ? J’avais si peur de pousser la porte de bar pour me heurter à un regard plein d’indifférence. Ca me terrifiait. Et je ne voulais pas, je ne me sentais pas capable de surmonter ça. Et c’était pour tellement d’autres raisons que je n’avais pas pu retourner le voir. Je ne pouvais pas penser à l’inverse. Ca me semblait débile. C’était lui qui m’avait jeté, il n’y avait aucune raison qu’il vienne me voir lui. Et pourtant les miracles existaient et il se trouvait devant moi à ce moment précis. Après avoir chanté de la merde et avoir trop bu. Mais il était là. Et pourtant la peur de l’abandon reprenait le dessus et j’étais incapable de faire un vrai geste vers lui. C’était de nouveau les premières fois. Celles où j’étais inexpérimenté. Et là ça me revenait en pleine face, je ne pouvais pas faire le premier pas si lui ne le faisait pas. Il l’avait déjà fait théoriquement vu qu’il était là, devant moi. Et pourtant mon cœur que j’avais essayé de barricader refusait de voir ce que tout être sensé aurait vu là. S’il était venu, ce n’était pas pour me dire bonjour. Surtout dans son état. Mais j’avais trop espéré et là je préférais rester sur mes gardes et assurer mes arrières. Prévoir une solution de replis si jamais quelque chose foirait. Car j’étais presque persuadé que quelque chose allait foirer.

Pourtant il y avait des signes montrant que quelque chose semblait différent. Déjà il s’intéressait, il s’inquiétait, ça se voyait. Enfin, vu ma tronche, c’était normal mais quand même. Et il avait l’air vraiment irrité par mon absence de réponse claire au vu de sa remarque. Il ne me croyait pas pour deux sous. Et je me sentis encore un peu plus coupable tout en évitant à mon cœur d’avoir un regain d’espoir, c’était juste de la simple curiosité, rien de plus. Se demandait-il la même chose alors que je lui posais cette question pour savoir ce qu’il avait fait ? Car oui réellement je m’y intéressais. Qui avait-il vu ? Ce qu’il avait fait, pensé. Avait qui avait-il couché ? Avait-il réfléchi un peu à nous deux ? A ce matin où je regrettais mes paroles. Ce matin où en voulant me protéger j’avais été méchant. Alors que j’aurais simplement pu partir sans un mot. Non il avait fallu que je veuille le blesser. Pour m’éviter d’encore plus souffrir. Et je le regrettais. En tout cas, peut être qu’il n’en avait pas vraiment tenu rigueur. Quand on jetait quelqu’un, on s’attendait forcément à un juste retour des choses. Il avait du s’attendre à ce que je ne parte pas comme un gentil garçon. Pas avec une trahison pareille. Et pourtant j’avais failli basculer dans les suppliques, j’avais failli l’agripper pour lui demander des explications, pour lui dire d’oublier mes dires. Mais je n’avais pas pu. Parce que j’étais moi, parce que j’étais trop orgueilleux. Parce que je ne pouvais me résoudre à me mettre à ses pieds. Alors que j’aurais dû. Et pourtant, maintenant qu’il était là devant moi, j’aurais dû tout lui dire mais je ne pouvais pas. Toujours pas. Tant que je ne pouvais croire en lui, je ne pouvais pas lui dire tout ce que je pensais.

- Ce que je deviens ? Un alcoolique amorphe terriblement désolé de ce qui a pu se passer ... la dernière fois. Presque deux mois que je cherche comment m’excuser auprès de toi. Et comment me faire pardonner. J’aimerai tout effacer.

Je me sentis blanchir plus que rougir alors que j’essayais vainement d’enregistrer la quantité d’informations qu’il venait de me donner à digérer. Je ne pouvais m’attendre à une réponse aussi affirmée. Aussi loin de ce qu’il avait l’habitude de me dire. A savoir pas grand-chose. Il semblait déterminer et empreint d’une forme de sérénité. Et plus il était calme, plus je paniquais. Le pensait-il vraiment ? Je ne voyais aucune trace de moquerie. Mais pourquoi venait-il me dire ça comme ça de but en blanc après deux mois sans lui ? Je perdais le fil de mes pensées et sentit à peine sa main sur la mienne. Que répondre ? Comment agir ? Un alcoolique ? Je ne pouvais l’imaginer comme ça. J’aurais voulu l’aider et le soigner rester avec lui, me jeter sur lui, lui hurlant ma peine, disant que j’étais pire que navré. Et pourtant je restais droit comme un i à ne plus savoir quoi faire pour me sortir de cette torpeur. Il était désolé, il regrettait. Ca voulait dire qu’il voulait bien me voir à nouveau au final ? Qu’il n’avait jamais voulu me rejeter ? Mais ça sonnait faux à mes oreilles. Tout ce que j’avais pu voir, c’était qu’il ne s’attachait pas. S’il pouvait éprouver de l’envie voir même de la tendresse à mon égard, ce n’était rien d’autre, rien de très profond. Et pourtant sa présence actuelle me renvoyait à l’exact opposé. Quelqu’un de sensible qui cherchait réellement à renouer contact. Ca serait mentir que de dire que je ne voulais pas ça. Mais au fond de moi, les morceaux de cœur brisés entaillaient ma chaire, mes émotions. Il me mettait en garde contre les belles paroles, contre les beaux gestes. J’avais été trop crédule, j’en avais fait les frais. Comment pouvait-il attendre de moi que je lui saute dans les bras ainsi ? Il devrait se douter qu’il ne pouvait pas effacer cette matinée par des jolis mots. Je savais que les mots qui faisaient mouche il les maniait. Ce que je pouvais arriver à faire à mes heures également.

Il voulait effacer ? Et moi donc. Moi j’aurais voulu effacer ma bêtise, ma stupidité, ce jeu entre nous. J’aurais voulu effacer mes sentiments naissants, mon abandon dans ses bras, mes phrases sans queue ni tête. J’aurais voulu effacer sa phrase pour laquelle il s’excusait présentement après ses gestes de tendresse. J’aurais tant voulu tout effacer. Sans être sûr de vouloir recommencer. Parce que vu les semaines de merde que je venais de passer, il y avait de quoi être dégoûté pour un moment. Mais je ne l’étais pas. J’étais juste un peu triste et mélancolique. Moi qui ne souriais déjà pas beaucoup, toute trace de joie avait déserté mon visage et ce n’était qu’un peu avant en revoyant son visage que mes yeux s’étaient de nouveau mis à étinceler. Et lui, que cherchait-il en voulant tout effacer ? Recommencer. Je m’appelle Andrea et toi Elio ? Je ne supporterais pas ça. Surtout si c’était pour que ça finisse irrémédiablement de la même manière que la première fois. Au final il disait beaucoup de truc mais n’expliquait rien. Le truc, c’est que je ne me sentais pas de faire vraiment mieux que lui en la matière. Et c’était là que je remarquais sa main sur la mienne. Je dû faire un énorme effort pour ne pas la retirer prestement comme un réflexe. Ca l’aurait vexé, ça aurait coupé le dialogue et je ne cherchais pas ça. Alors malgré mes doigts qui devenaient tremblants, je ne bougeais pas. Essayant de me réhabituer à son toucher. Sa chaleur. Et ce fut à mon tour de prendre la parole.

- C’est moi qui tiens à m’excuser. Les mots ont dépassés ma pensée la dernière fois. J’ai été prit dans l’ambiance de la nuit, de la matinée et du coup j’ai dit des choses sans réfléchir, sans raison. Et puis je me suis emporté pour rien par la suite de façon désagréable. Je ne pensais pas ces reproches, je suis désolé.

Langue de bois ? Bordel mais j’étais le roi pour ça, aussi fort que lui en fait. J’essayais de paraitre un maximum détaché dans mes dires. Je ne voulais pas me trahir maintenant. Alors que je ne faisais que dire des mensonges. Sauf en ce qui concernait les reproches. Je m’en voulais réellement et j’étais content de lui dire que je n’avais pas pensé un traitre mot de ce que j’avais dit. Je voulais atténuer les choses, leur impact. Essayer de regagner sa confiance. S’il était venu, je lui devais bien ça. Et pourtant j’avais envie de fuir devant son regard. Comme je le faisais tout le temps. Elio bordel, qu’est-ce que tu attends de moi ? Je suis prêt à te pardonner. Je suis prêt à tout te donner pour revenir à tes côtés parce que j’ai tant l’impression qu’il me manque quelque chose quand tu n’es pas là. Mais cette peur indicible me clouait au sol sans que je réussisse à m’en dépêtrer. J’avalais ma salive.

- Tu sais je te pardonne. Les torts sont partagés.

J’aurais voulu lui dire, lui redire tout ce que je pensais. Mais je ne voulais pas qu’il se rende compte que le temps n’avait rien arrangé et que je ne pouvais être celui qu’il attendait, s’il attendait quelqu’un qui ne lui dise pas la même chose que moi. Mais il ne répondait pas. Lui aussi devait réfléchir. Et l’angoisse me prit à la gorge en me demandant si j’avais dit quelque chose de travers. Si j’avais encore tout gâché.

- Qu’est-ce que tu veux effacer… ?

Je devins fébrile alors que ma voix se coinça au fond de ma gorge et que mes yeux se mirent à me piquer. Je perdais toute notion de cohérence et de réflexion alors qu’il restait silencieux. Il s’excusait oui, mais au final, pour obtenir quoi après ? Je n’arrivais pas à comprendre, pas à analyser tellement c’était improbable qu’il soit devant moi en train de me demander pardon. Est-ce qu’il voulait effacer notre relation ? Venir ici pour mettre un terme à tout ça ? Mais je ne voulais pas en entendre parler de ça. Même si je n’étais pas revenu ça ne voulait pas dire que je ne voulais plus le revoir bien au contraire ! Mais les mots restaient bloqués dans ma gorge alors que son silence m’enserrait le cœur. Je me levais rapidement, manquant de faire tomber ma chaise. J’attrapais un billet dans mon porte monnaie et le jetais sur la table en partant rapidement, passant ma main sur mes yeux qui avaient tendance à devenir un peu trop brillants.

Fuir encore oui. Pour ne pas entendre que c’était fini.
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Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] Vide
MessageSujet: Re: Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV]   Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] I_icon_minitimeJeu 11 Aoû - 8:43

Quand on y pense, Aurelio avait bien changé. D’Aurelio en Elio, le jeune homme avait fait du chemin. Il était passé par une phase où l’indifférence était son credo, les sentiments n’étant qu’un mot stupide à son oreille. Du sensible, timide et faible Aurelio il était devenu le cœur de pierre qui rejetait quiconque s’approchait de lui dans ce but, refusait toute proposition, se détournait de tout ce qui pouvait ressembler à un semblant d’émotion. Puis il y avait eu Andrea, qui l’avait quelque peu fait remonter, doucement, vers ce qu’il avait été. Plus tendre, plus doux, plus attentionné le jeune homme s’était laissé prendre au piège. Alors qu’il avait longtemps clamé avoir réussi à capturer ce gosse timide et angoissé, voilà qu’il s’était retrouvé lui-même à terre, soumis aux envies de son partenaire. Son visage l’avait hanté, sa voix lui avait manqué, son corps avait été le seul qu’il désirait. Pendant de longues semaines, Andrea était devenu le seul qu’il voulait voir sans toutefois se l’avouer et le mettre en pratique. Plus il se montrait délicat et conciliant avec lui, plus il prenait sauvagement un autre. Les mots de réconfort qu’il lui adressait à lui devenaient injonctions remplies d’un désir animal envers un autre. Il effaçait ce qu’il estimait étrange et nouveau par ses plus mauvaises habitudes, tentait d’annuler ses améliorations en faisant ressortir ses pires côtés. La douceur et la violence, la tendresse et le dégoût, Elio avait navigué toujours entre deux eaux sans comprendre, sans vouloir se l’expliquer. Pour se préserver, pour conserver ce qu’il était devenu, ce qu’il avait douloureusement bâti.

Alors oui, avec les sentiments revenaient la peur et le doute. La terreur viscérale de revivre ce qu’il s’était passé avec Anaelle. La peur de se perdre à nouveau si Andrea le refusait maintenant qu’il avait compris que l’histoire se répétait. Il retrouvait le besoin de se confesser à l’élu de son cœur malgré les hésitations, parce qu’on veut toujours croire que la fin sera heureuse et qu’il y a de l’espoir. Parce qu’Elio, malgré l’attitude présente d’Andy, préférait espérer que se résigner. Comme face à Anaelle de nombreuses années auparavant, il se sentait fébrile, ses poignets tremblaient un peu et un tic nerveux le faisait remettre une mèche de cheveux à sa place, sans cesse et sans aucun espoir de la faire tenir comme il le voulait. Il en reconnaissait les symptômes, maintenant que la barrière des souvenirs se fendillait. La perle de sueur sur son front, les bouffées de chaleur sur des frissons incontrôlables. Tout ce petit manège avait tant d’ampleur pour le jeune homme que, de longues minutes, il ne put se concentrer que sur ces réactions purement physiques. Le cœur qui bat, les lèvres qui ne savent même plus respirer. La boule au ventre, le mal au crâne. Tout son corps se faisait la malle, tout dysfonctionnait, Elio n’était plus capable de rien. Car il avait peur, peur d’être repoussé. D’entendre un refus, un « non » déguisé en excuses. De comprendre qu’Andrea n’était là que par pitié pour son être misérable se présentant dans un état pathétique. De sentir son cœur se déchirer une fois encore, répandant tous les fondements de son amour dans chaque cellule de son corps, jusqu’à ce qu’il en perde la raison. S’effondre. Oui, Elio savait ce qu’il risquait. Mais malgré tout ça, malgré l’angoisse qui montait de plus en plus, il était résolu.

Parce qu’il lui manquait trop, et tant pis si pour assouvir son envie égoïste il devait l’obliger à le blesser en refusant poliment ce qu’il lui offrait trop tard. Et tant pis s’il devait l’obliger à vivre avec ça sur la conscience, si ça devait le travailler et le faire doucement souffrir d’avoir été si direct. Car l’amour se montre parfois égoïste, et Andrea lui manquait trop. Il avait besoin de lui, besoin de sa timidité adorable, de ses étreintes hésitantes, de ses efforts constants pour lui plaire, de ses rougissements constants, de la douceur de sa peau et de la lueur de honte dans ses yeux quand il le transportait. Ce n’était pas seulement charnel, non. C’était pourtant aussi fort, comme un besoin impérieux qu’il ne pouvait ignorer. Son absence auprès de lui creusait un vide que seule sa personne rassurante pourrait combler. Et si Elio devait apprendre à faire des choses sans utilité, s’il devait devenir futile, faire des concessions, changer, eh bien il y était préparé. Tout pour de nouveau le sentir contre sa peau nue, tout pour écouter encore et encore son nom murmuré par cette bouche qui appelait aux baisers. Plus d’une fois pendant ces deux longs mois, Elio avait cédé. A son appel, aux souvenirs, à son empreinte qui restait partout dans sa chambre. Plus d’une fois il avait tenté de se soulager, seul, en pensant à lui mais toujours il avait terminé en pleurant, nullement soulagé même de façon purement physique. Ses gémissements n’étaient que poudre aux yeux, son plaisir teinté de tristesse le ramenait douloureusement à la réalité de son absence, à la véritable distance créée entre eux par sa faute. Et, si Elio ne pourrait jamais lui avouer ces actions coupables qui ne le soulageaient qu’une fraction de seconde, il gardait cette main dans la sienne comme une bouée de sauvetage, comme un phare dans la sombre nuit de sa solitude.

Sauf que cette main n’était pas aussi assurée et tendre qu’il essayait de l’être. Elle hésitait, tentait de ne pas bouger pour ne pas créer de contact. Tout comme l’ensemble de son attitude, crispée et distante, qui ne se rapprochait pas de lui, ne lui envoyait aucun message. Elio était perdu, ne comprenait pas pourquoi cette méfiance. Du moins en avait-il une idée, mais toujours est-il qu’il ne s’attendait pas à une aussi constante froideur. Ce qui le décourageait quelque peu, malgré tout. N’avait-il alors aucune chance, jamais, de s’approcher de lui ? Etait-ce trop tard, alors qu’il avait fait tout ce chemin pour comprendre et prendre la décision d’assumer ? C’était sa faute, sa faute, mais n’avait-il pas droit à une deuxième chance, pour se racheter une conduite ? Lui dire à quel point il attendait de lui que ce qu’il était capable de donner, et que lui ferait tout pour tout lui offrir ? Pour le combler ? Elio n’était pas certain de s’en sentir capable, pourtant il avait réellement pensé qu’en venant s’excuser il aurait pu avoir droit à un second essai, quitte à ce que cela soit le dernier. Peut-être se montrait-il naïf en espérant une telle chose, peut-être avait-il fait trop de mal pour être pardonné. Sûrement. Mais Elio voulait croire, comme depuis quelques heures déjà, que la chance pouvait être de son côté, rien qu’une fois. Il n’avait pas voulu voir qu’Anaelle appartenait déjà à un autre et c’est cet aveuglement qui l’avait tant blessé. Mais Andrea, lui, n’était à personne. Il aurait pu être à lui, il aurait pu en ce moment même se trouver dans ses bras. Il avait laissé sa chance, mais si personne ne l’avait prise alors, alors il pensait pouvoir arranger la situation. Si seulement Andrea comprenait, oui s’il comprenait alors tout irait bien.

- C’est moi qui tiens à m’excuser. Les mots ont dépassés ma pensée la dernière fois. J’ai été prit dans l’ambiance de la nuit, de la matinée et du coup j’ai dit des choses sans réfléchir, sans raison. Et puis je me suis emporté pour rien par la suite de façon désagréable. Je ne pensais pas ces reproches, je suis désolé.

Manifestement, il n’avait pas compris. Les mots furent un coup au cœur pour Elio, qui enleva sa main, reculant son dos contre le dossier de sa chaise. Il resta là, muet d’incompréhension. Mais non, il ne devait pas s’excuser. Il ne devait pas retirer ce qu’il avait dit. Bon, certes ses paroles avaient été dures mais son indifférence l’avait été encore plus. Il en avait souffert, mais c’était mérité. En fait, il aurait du en recevoir le double pour l’avoir fait souffrir si misérablement. Ce n’avait pas été assez, ça ne serait jamais assez. Et Elio restait toujours sans réaction, repensant les mots qu’il venait d’entendre. Peut-être qu’il faisait ça pour se couvrir, mais alors que lui-même venait de s’excuser, ne comprenait-il pas où tout cela allait les mener ? Ou peut-être, oui peut-être qu’il le pensait vraiment. Qu’il revenait sur ses dires. Et alors, ce qu’Elio s’apprêtait à lui avouer n’avait plus aucun sens, aucune justification. Pire, ça l’indisposerait, ça le mettrait mal à l’aise.

- Tu sais je te pardonne. Les torts sont partagés.

Comme si à ces mots tout était réglé, comme si tout était effacé et qu’ils pouvaient repartir chacun de leur côté. Elio ne réagit pas plus, plongé dans des réflexions qui n’avaient rien de très agréable. Enfoui sous une montagne d’incertitude, le jeune homme fixait bêtement le visage qu’Andrea baissait pour ne pas avoir à le regarder. Partagé violemment entre deux décisions, il ne savait pas vers laquelle pencher. Le laisser faire son deuil de lui et admettre qu’il était le seul dans un tel état, ou bien agir de façon égoïste et lui imposer des sentiments dont il n’avait peut être rien à faire ?

- Qu’est-ce que tu veux effacer… ?

A vrai dire, Elio n’eut même pas le temps de répondre à cette question. De toute façon, trop perturbé par ces paroles empreintes de détachement, il n’aurait sans doute pas pu le faire. Rien ne se passait comme il l’avait imaginé, rien n’était aussi simple, rien n’était encore sorti de ses lèvres pour le convaincre de sa bonne volonté et de ses sentiments à son égard. Mais il n’eut pas le temps de faire quoi que ce soit qu’Andrea quitta son siège, renversant presque sur son passage la chaise sur laquelle il était assis. Se soustrayant à son champ de vision, le jeune homme blond s’éloignait. Et tout ça, trop rapidement pour qu’Elio ne se réveille de son indécision. Ce ne fut que quand il sentit le froid sur sa paume, créé par son absence, qu’il réagit. En voyant le billet sur la table, il comprit mieux et se décida enfin. Tant pis, il ne pouvait pas tout finir comme ça. Elio ne lui laisserait pas le dernier mot, ne le laisserait pas s’enfuir sans l’entendre, quitte à ce qu’il revive le douloureux moment où le refus empreint d’ennui arrive. La condescendance, la pitié, il était prêt à les affronter. Mais le malentendu, le silence et l’omission, plus jamais. En se ruant dans la rue, il aperçut une silhouette familière qui fendait rapidement la foule qui commençait à déambuler dans les rues à cette heure. Se précipitant à sa suite, Elio saisit son épaule, le retourna. Ses yeux étaient brillants et leurs bords rouges faisaient presque écho au trouble qui se faisait une joie d’habiter le cœur du barman tout chamboulé.

- Ne me pardonne pas ma bêtise, ne dis pas que c’est également ta faute. Juste moi, moi qui ai eu peur. Je me connais si mal, que je n’ai pas vu, ou pas voulu voir. Et quand j’ai commencé à l’apercevoir, je me suis retourné pour cacher mes yeux. Tu en as subi la conséquence.

Il était maladroit, sa respiration était essoufflée mais son emprise sur les épaules d’Andrea restait ferme, quoi qu’il en soit. Et tant pis si plusieurs passants se retournaient d’un air interrogatif ou acéré sur eux. Une pause se fit, pour qu’il puisse réfléchir à une certaine cohérence dans ses phrases. Descendant ses bras, il saisit les mains d’Andrea dans les siennes et son ton se fit moins agressif que précédemment, plus posé et ses yeux remplis de douceur cherchèrent les siens jusqu’à ne plus les quitter.

- Je veux effacer ma connerie, effacer ma peur, effacer mes erreurs envers toi. Mon indifférence, ma légèreté, le mal que je t’ai fait. Effacer ces deux mois passés dans le noir de ton souvenir, où chaque jour était d’une solitude douloureuse, où seul l’alcool me permettait d’oublier un peu les traits de ton visage. Je veux oublier ma colère contre moi-même, oublier ma raison qui me dit que je ne peux pas faire ça.

A ce moment, soutenir son regard était trop difficile pour Elio alors il se rapprocha et prit Andrea dans ses bras de force, pour ne pas l’affronter trop directement. Il continua toutefois sur sa lancée, ce qui l’avait décidé à venir ici, sa voix se faisant moins forte puisque son oreille était située près de ses lèvres. Il y mit toute l’émotion qu’il ressentait à son égard, tentant de la lui faire passer alors qu’il le serrait contre son buste.

- Et je veux me souvenir de tout le reste. Pour pouvoir te dire à quel point tu as eu raison, à quel point je ne suis qu’un idiot. Pour te dire que je veux être avec toi, parce qu’avec toi c’est différent. Quand tu es là je me sens plus entier, quand tu es là j’ai l’impression que le misérable de ma vie est moins présent. Et je ne veux plus que tu t’en ailles le matin, je ne veux plus que tu ne viennes que le soir, je ne veux plus coucher avec toi. Je veux te préparer un petit déjeuner, aller faire les courses avec toi, t’embrasser, te faire l’amour. Je te veux tout entier.

Et il resta là, immobile, tremblant de tant de vérité. Fébrile, comme un petit garçon qui après avoir fait sa bêtise perd toute son assurance, hésite et a peur d’être grondé. Ou ici repoussé. Advienne que pourra.
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Andrea Vitaly

Andrea Vitaly

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Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] Vide
MessageSujet: Re: Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV]   Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] I_icon_minitimeDim 4 Sep - 14:18

Come on, come on
Jump a little higher
Come on, come on
If you feel a little lighter
Come on, come on
We were once
Upon a time in love…

We're accidentally in love
Accidentally in love
Accidentally in love


Je savais que c’était une attitude pitoyable. Je ne le savais que trop bien mais que faire, que dire ? Alors que j’avais attendu cette rencontre pendant des jours et des jours à me morfondre, il fallait que je parte ? Je n’étais qu’un lâche incapable de me prendre en main, incapable d’affronter la réalité de mes sentiments, la réalité des siens. J’avais toujours fuis devant la mort de mes parents, et pourtant j’avais tant de fois tenu tête à Egeado, comme si ça me permettait de garder la tête hors de l’eau. Mais là plus rien n’avait de sens, je n’avais le contrôle sur rien. Elio m’avait tout prit. Et je n’arrivais pas à reprendre quoi que ce soit. Parce que je n’avais pas envie de reprendre quoi que ce soit. J’avais envie qu’il garde ces choses, ce qu’il m’avait prit, nos souvenirs communs, nos sourires, nos soupirs, nos moments. Je voulais me souvenir moi aussi de ces moments rares mais intenses. Ces moments qui étaient devenus si importants pour moi à tel point que je ne pouvais plus m’en passer, à tel point que l’air qu’Elio expirait, je ne voulais que le garder pour moi. Je me perdais de plus en plus en lui. Je m’oubliais l’histoire d’un nuit, je repartais, je croyais rêver. Mais au fur et à mesure, cette marque qu’il laissait sur moi devenait indélébile. Et j’en voulais encore, j’en voulais de plus belle. Je ne voulais plus être seulement le client avec qui on couche, le client un peu plus important que les autres. Je voulais être véritablement important. Pas le seul. Je ne pensais pas qu’Elio puisse se contenter d’un seul. Mais voilà de toute façon je ne le connaissais même pas.

Comment est-ce que j’en étais arrivé à la conclusion que je l’aimais ? Pourquoi ? A cause du physique, des cocktails ? A cause des sourires à cause de sa voix ? A cause de choses aussi superficielles que n’importe qui aurait pu avoir ? Mais il n’était pas, plus n’importe qui. Il ne l’avait jamais été à vrai dire. Je n’aurais su dire d’où sortait ce sentiment. Cette envie de le voir, de le voir tout le temps, prêt de moi, cette envie de partager, de lui parler. Mais cette peur aussi. Cette peur d’être ridicule, de ne pas être assez bien, cette peur de se faire lâcher. Que tout le monde me tourne le dos je m’en foutais, je le faisais avec tout le monde. Mais pas lui et ça voulait bien dire quelque part qu’il comptait pour moi. Réellement. J’aurais voulu lui dire tout ça, lui expliquer le fond de ma pensée, être sincère. Plus sincère que je ne l’avais jamais été. Mais je savais que c’était une très mauvaise idée de faire ça. J’avais compris plus ou moins son mode de pensée, même si je n’avais jamais été très empathique avec les gens. Parce que je cherchais à mieux le connaitre, parce que c’était lui qui comptait et qui envahissait mon esprit. Et je savais que la vérité sur mes intentions n’était pas la bonne chose à dire. Parce qu’il n’était qu’un barman et j’étais son client. Comment en aurait-il pu être autrement ? Alors j’avais rongé mon frein, j’avais essayé de prendre, de donner un peu, mais de ne pas demander plus. Mais j’avais échoué. Alors qu’il avait depuis longtemps brisé chacune de mes barrières, j’avais craqué. Parce que je ne jouais pas la comédie, parce que je voulais plus.

Après tout ce n’était pas grand-chose. Une ballade de temps en temps. Apprendre à se connaitre en dehors d’un bar la nuit. Discuter, peut être même rire. J’aurais voulu essayer ces choses que je ne faisais que voir, que lire, qu’imaginer. Mais je n’avais pas choisi une fille mignonne et un peu tête en l’air. J’avais choisi un homme, un homme fier, barman, volage et pas sérieux. Mais je n’y pouvais rien. Sauf que se balader main dans la main avec lui ne concordait pas. Coucher après quatre cinq verres concordait mieux. Je ne pouvais pas m’en vouloir d’avoir essayé, d’avoir dit la vérité. Car je savais que je n’aurais pas supporté plus longtemps de faire semblant que ça ne soit pas important. Car ça l’était. Ca l’était plus que je ne l’aurais imaginé. Et puis ça avait échoué. Alors que j’y croyais vraiment. Et alors ce n’était pas mon orgueil qui avait été réellement blessé. Mais moi-même, mon cœur et mes sentiments. Et ça faisait mille fois plus mal que le pire des passages à tabac de Vito. Et pour éviter ça à nouveau je fuyais encore. Comme la dernière fois. Fois où j’aurais dû le secouer, lui hurler que dans ce cas, il n’aurait pas dû faire des choses plus tendres qui pouvaient porter à confusion. J’aurais dû lui crier que j’étais comme ça et que ça n’y changerait rien. Mais j’avais été hautain, j’avais été moi-même. Et j’étais parti sur des paroles cinglantes que je ne pensais pas. Et j’avais passé un mois horrible. Et il avait réapparu. Comme une fleur. Comme l’homme qu’il était.

Et je ne pouvais pas assumer son regard, ses paroles. On n’avait pas rompu, on n’était même pas ensemble. Et je n’avais pas montré que qu’il y avait une infime chance que je repousse la porte du bar. Pourtant j’avais espéré. Stupidement, comme si on avait pu recommencer un jour. Et pourtant je restais mort de peur à l’idée qu’il m’annonce que c’était simplement fini. Qu’après un échange de politesse et d’excuse, nous quittâmes définitivement la vie de l’un et l’autre. Mais j’étais juste paniqué, parce qu’à l’inverse de d’habitude, je n’avais rien préparé, je n’avais pas imaginé des dialogues, des gestes, non j’avais été prit de court par sa venue et du coup malgré cette joie de le revoir, je n’arrivais pas à assumer ces émotions, ces sentiments qu’il avait piétiné la dernière fois. Je ne voulais pas lui refaire le même speech. Non je voulais préserver mon reste d’amour propre. Pourtant s’il était venu, ce n’était pas pour rien. Mais cette peur me bloquait. Et s’il voulait vraiment tout effacer ? Moi je ne voulais pas effacer, je voulais tout garder comme je voulais qu’il garde tout. Et je n’arrivais pas à accepter ça. Finalement, on n’avait peut être vraiment plus rien à faire tous les deux. Et pourtant, cette main, sur la mienne, je n’arrivais pas à m’en débarrasser. Alors il le fit à ma place, juste après mes excuses. Ce qui ne fit que me blesser un peu plus. Mais je n’étais plus à ça prêt. Alors je fuis. Un peu trop vite, un peu trop brusquement, sans attendre de réponse que j’avais trop peur d’entendre. J’avançais en oubliant la douleur à mes côtes, dans les jambes, dans le bras. Je me fichais de cette douleur stupidement physique. Il fallait juste penser à autre chose maintenant. Faire un point et essayer juste de repartir.

Mais Elio n’en avait pas l’intention. Il me saisit par l’épaule alors que je lutais contre mes larmes qui avaient tant de fois coulé durant son absence. Je voulus ouvrir la bouche, lui demander des explications, des comptes. Mais il le fit à ma place.

- Ne me pardonne pas ma bêtise, ne dis pas que c’est également ta faute. Juste moi, moi qui ai eu peur. Je me connais si mal, que je n’ai pas vu, ou pas voulu voir. Et quand j’ai commencé à l’apercevoir, je me suis retourné pour cacher mes yeux. Tu en as subi la conséquence.

Hey ho, pause. C’était quoi ça ? C’était quoi ce déballage de sentiment en pleine rue comme ça ? On dirait moi. C’était ridicule, Elio n’était pas comme ça. Et pourtant ça ne sonnait pas faux, ça ne sonnait pas pour rassurer ou quoi que ce soit, ça sonnait bien trop juste, bien trop fort à mes oreilles. Ca ne sonnait que trop véridique. De toute façon il ne gagnait absolument rien à mentir de la sorte, sur des sujets pareils. Je ne valais pas la peine qu’on mente de la sorte. Ce qu’il disait voulait dire tellement de chose et à la fois rien. Car ce n’était que des mots lancés sans vrai sens, sans réelle portée.

- Non non c’est rien c’est juste…

Des mots balbutiés comme ça, sans même être sûr qu’il les ait entendus. Sans queue ni tête. Parce que je ne savais pas quoi dire face à ça. Je ne savais pas comment réagir face à ses mains tenant fermement mon épaule, tentant d’y imprimer sa marque. Puis descendant jusqu’à mes mains pour les serrer. Et cette fois il était hors de question penser les retirer. Car quelque chose d’important était sur le point de se passer. Je le sentais, il était parti pour parler. Pour parler bien plus qu’il ne m’avait jamais parlé avant et il était hors de question que je laisse quoi que ce soit nous interrompre pendant ce moment. Ainsi je fis l’effort de regarder ses yeux, pour ne pas fuir devant ce qu’il allait dire. Que ça soit positif ou non. Car s’il m’avait rattrapé, c’était que c’était forcément important, et que ça valait la peine d’être dit, et surtout d’être écouté.

- Je veux effacer ma connerie, effacer ma peur, effacer mes erreurs envers toi. Mon indifférence, ma légèreté, le mal que je t’ai fait. Effacer ces deux mois passés dans le noir de ton souvenir, où chaque jour était d’une solitude douloureuse, où seul l’alcool me permettait d’oublier un peu les traits de ton visage. Je veux oublier ma colère contre moi-même, oublier ma raison qui me dit que je ne peux pas faire ça.

Je l’écoutais parce que je ne pouvais rien faire d’autre de toute façon. Je l’écoutais déverser des phrases lourdes de sens, des phrases qui n’étaient certainement pas faciles à dire. Des phrases que je n’espérais plus entendre, des phrases auxquelles je ne pouvais pas croire. Pas maintenant c’était impossible. Et pourtant comment pouvais-je douter de sa bonne foi ? Qui aurait pu sa fierté autant de côté pour revenir après autant de temps et autant de souffrance de chaque côté pour déballer tout ça ? Comment est-ce que ça aurait été possible que je puisse le repousser ? J’en étais incapable, pas face à ça. J’aurais préféré croire que ça puisse être vrai quitte à encore souffrir par la suite que de lui tourner le dos face à ça. Et j’étais loin d’avoir tout entendu. Ni tout vu. Car il me prit dans ses bras, chose que je le laissais faire aisément et je me sentis soudainement à l’abri de tout. Comme si ici, rien ne pouvait m’arriver. Je le laissais me serrer contre lui encore et encore alors que les mots ne semblaient plus pouvoir s’arrêter de sa bouche.

- … Je ne veux plus coucher avec toi. Je veux te préparer un petit déjeuner, aller faire les courses avec toi, t’embrasser, te faire l’amour. Je te veux tout entier.

Et à chaque mot, à chaque révélation, les larmes me montaient de plus en plus aux yeux jusqu’à ce que je ne puisse plus les retenir. Et mes pleurs se firent silencieux alors que j’enfouissais mon visage dans le creux de son épaule. Je restais les bras ballants, un peu tremblants dans ses bras mais sans aucune envie de m’en extirper. Pourquoi avait-il attendu tant de temps pour me dire tout ça de but en blanc ? Sans que je me rende compte d’à quel point c’était aussi important. C’était bien plus que ce que je lui demandais, que ce que j’espérais, il était allé bien au-delà dans cette déclaration qui me mettait au tapis. Sans préavis, il venait de me donner la plus belle preuve d’attachement et d’affection qu’on pouvait avoir. Qu’on pouvait imaginer. J’avais vraiment l’impression de rêver. Je relevais un peu la tête pour parler, malgré les mots qui buttaient un peu contre mes lèvres ?

- Pourquoi tu ne pouvais pas faire ça ? Qu’est-ce qui t’en empêchait tant ?

Je remontais ma main pour essuyer un peu mes yeux avant de la passer sur sa joue.

- Tu n’es pas un idiot. L’idiot c’est celui qui continue à se faire souffrir sans rien faire pour y changer. Je suis un vrai idiot de ne pas être passé. D’avoir eu peur de ton regard. Un vrai idiot de n’avoir pas appelé pour prendre même des nouvelles, pour essayer encore. Un vrai idiot pour m’être fait voler la main sur de telles déclarations.

Je me reculais un peu pour le regarder, pour voir ce regard que je n’avais jamais vu si déterminer. De voir ce que ma propre douleur m’empêchait de discerner. De voir qu’il avait au moins aussi peur de ma réaction que j’avais peur de la sienne. Et je ne pouvais pas le laisser douter. Car je savais à quel point le doute faisait mal, à quel point l’espérance peut donner des ailes et à quel point la réalité, même mensongère pouvait les couper. L’atterrissage était dur. Et après le courage qu’il venait de montrer pour me dire ça, je ne pouvais que le préserver. Parce que pour une fois, quelqu’un passait avant mon propre bonheur. Je me jetais dans ses bras et le serrais contre moi autant que la douleur à mes côtes me le permettait. Je le serrais, je le sentais, je l’écoutais. Et il était hors de question que je le laisse maintenant. Que je parte sur des paroles amères. Il ne pouvait pas me mentir après ça. Il en était hors de question.

- Je n’en demandais pas tant et tu m’as dit bien plus que ce que je pouvais espérer. J’ai besoin de toi Elio si tu savais à quel point tu m’as manqué.
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Aurelio Pastore

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Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] Vide
MessageSujet: Re: Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV]   Parce qu'il y a des choses qu'il faut se dire. [PV] I_icon_minitimeMar 6 Sep - 16:51

Si tout avait changé ? Pas vraiment. Elio savait toujours avec la même certitude qu’il avait raison. Eux deux, c’était impossible, illusoire. Pour commencer, ils n’étaient pas du même monde. Andrea avait grandit dans le luxe, du moins de ce que Elio avait pu deviner à son attitude hautaine et à la qualité d’une veste oubliée. Lui n’était qu’un barman payé à la sauvette, logé et nourrit par sa patronne, attaché à un simple bar qui était toute sa vie. Andrea devait avoir d’autres intérêts, une existence propre, des loisirs, un travail peut être ? Tout ça, tout ce qu’il ne s’était jamais demandé, remontait à la surface maintenant, dans cet instant si critique sans que la moindre logique ne puisse l’expliquer. Il n’avait pas l’habitude, ne savait pas évoluer comme un être humain normal, à la lumière du jour. Vivant la nuit, le jeune homme savait que rien ne serait plus difficile que de comprendre ce qu’il fallait faire, ce qu’il fallait dire, comment il devrait se comporter lorsque leur relation prendrait peu à peu vie à la lueur du soleil. Aujourd’hui ils n’étaient que dans l’instant, que dans l’euphorie, la surprise, la peur. Ce n’était pas ça qu’Andrea attendait et Elio se rendait compte qu’il ne le désirait pas non plus. Mais comment agir au quotidien pour le satisfaire et lui plaire en utilisant des gestes et des mots qu’on ne lui avait jamais appris ? Elio était fait pour séduire, pour charmer le temps d’un soir et toute sa notoriété reposait sur son physique entretenu et bonifié au fil du temps ainsi que sur le mystère qui l’entourait. Le fait que personne n’ait réussit à l’approcher, voilà ce qui plaisait. Si c’était aussi comme cela qu’Andrea l’avait rencontré, nul doute que c’était encore comme ça qu’il le voyait et de cette manière que le jeune homme restait attaché à lui -si toutefois il l’était encore-.

Deux solutions, alors. La première était de demeurer dans cet univers, de garder cette part d’ombre et de cultiver toujours son charme de l’inaccessible tout en lui prêtant attention et amour. Cette alternative ne tiendrait sans doute que quelques semaines avant qu’Andrea ne se lasse ou s’insupporte de le voir encore plongé dans un monde qui était pourtant le sien. Arriverait-il à accepter qu’il continue de dire aux clients ce qu’ils étaient venus entendre ? Leur faire ce pourquoi ils avaient accourus jusqu’au bar, du moins la première fois avant de se trouver d’autres partenaires moins évidents et faciles ? Sans doute pas. La seconde option était plus simple : laisser tomber le Love’s out, Delia, tout. Abandonner cela, trouver un autre travail qui n’impliquait pas ce genre de dévotion physique dont il faisait preuve envers l’établissement qui l’avait recueilli. Mais cette pensée effrayait Elio, faisait presque trembler ses jambes d’appréhension. Car sans le Love’s out, qu’était-il donc ? La réponse était là, derrière un soupir résigné. Il n’était rien, rien sans cet univers qui avait sauvé son âme du pêché dans lequel il retombait à présent, face à Andrea. Alors oui Elio avait toujours aussi peur, mais savait que c’était cette terreur de tout perdre qui lui avait fait abandonner ses sentiments pour son vis-à-vis. Et pour avoir expérimenté la vie sans lui, même avec le bar encore présent et ses habitudes vieilles de quelques années déjà, la saveur de ce qu’il croyait immuable s’était teintée d’amertume. Le plaisir n’était plus là et seul le désespoir restait. Pour autant, Elio ne regrettait pas un seul instant d’avoir rencontré le jeune homme blond qui faisait battre son cœur aussi rapidement cet après midi là.

Car Elio se sentait suffisamment prêt pour des moments compliqués tant qu’il pouvait avoir la joie d’être auprès de lui en cet instant, de lui avouer tous les sentiments qui pesaient sur son cœur. Ces derniers devenaient trop lourds pour qu’il les garde pour lui seul et c’était tout avouer ou bien aller crier dans la rue ce qui devait nécessairement sortir pour devenir réel. Alors non il ne regrettait pas, bien que tout ne soit sans doute pas terminé, bien que sa présence ici et les mots qui s’évacuaient n’arrangeraient peut-être pas tous les problèmes qui ne manqueraient pas de survenir. Il était le premier depuis longtemps à lui donner l’impression d’être utile. Car Elio savait bien qu’il n’était qu’un serveur à la mode dont tous ses admirateurs se lassaient rapidement, que seul son don pour les cocktails le définissait vraiment. En dehors de cela il n’était qu’un minable qui couche à droite et à gauche pour éviter d’affronter la solitude de sa pauvre vie ridicule, si semblable de jours en jours. Il en avait pris conscience récemment, et cette vérité lui pesait tout autant que la présence d’Andrea allégeait cette peine. Dans ses yeux à lui il lisait la curiosité, l’intérêt, l’admiration mais aussi l’affection et l’envie de découvrir là où il savait ne trouver que désir et possessivité dans ceux de tous les autres. Se sentir un peu plus important qu’un cafard qu’on écrase, voilà ce que lui avait permis de réaliser Andrea. Sans lui il serait encore à se croire le plus beau, le plus fort, ridiculement attablé à une table avec une confiance inébranlable et aucune vision de l’avenir. Un crétin fini. Et si dans ce domaine il avait encore des efforts à faire, les progrès étaient notables.

Pourtant, tout restait toujours aussi impossible et prendre une décision relevait de l’exploit. La faiblesse, c’était aussi d’être venu le voir et céder à sa souffrance pour ne pas avoir mal, encore, alors que se séparer définitivement aurait pu être une meilleure solution. Eux deux, une illusion. Oui mais voilà, le jeune homme en était arrivé à un point où le combat entre sa raison et ses sentiments s’était soldé par un échec de la première, laissant libre cours à son envie de croire à ces mêmes illusions. Même s’il n’y avait aucune chance, aucune raison, aucun espoir pour que tout se déroule aussi facilement que ce qu’il voulait bien lui promettre. Mensonge que ses paroles envoûtantes et chargées d’émotion ? Non, réalité à court terme. Ils seraient heureux, sans doute, mais l’espace d’un instant seulement. Tout se gâterait, les problèmes surgiraient. Mais Elio avait envie d’essayer quand même, quitte à n’être complètement satisfait qu’une mineure partie du temps passé ensemble. C’était mieux que rien, et de toute façon l’amour a un aspect égoïste qui l’empêchait d’avoir le même résonnement qu’il y a deux mois, alors qu’il l’éloignait pour leur bien à tous les deux mais surtout celui d’Andrea qui serait immanquablement déçu par ce qu’il pourrait découvrir en creusant sa personne si friable. Rien n’était parfait et eux encore moins, là-dessus Elio ne se leurrait pas. Mais malgré toutes les raisons qui le poussaient à s’éloigner ou se taire, malgré toute la logique qui se battait contre le couple qu’ils formaient maladroitement, le barman cédait aux sentiments trop longtemps refoulés.

Elio était alors plongé dans un maelström d’émotions qui oscillaient entre l’angoisse et la tendresse, projeté au gré de la houle de son esprit d’un côté puis de l’autre, comme une épave qui tente encore de sortir le mât de l’eau, ou un noyé tentant d’éviter la mort, pourtant si reposante. Si profondément ancré dans ce déluge, ce trop plein, le jeune homme n’entendit même pas la première injonction d’Andrea. Il était trop concentré, trop déterminé à ne rien omettre pour se permettre de prêter attention à une vague tentative d’opposition. Et puis, il valait sans doute mieux car si ce « Non non » lui était parvenu, sans doute se serait-il violemment arrêté en pleine tirade, inquiet de ce qui se cachait dans cette intervention. Il aurait toutefois alors pu se rassurer dans les yeux d’Andrea enfin fixés sur les siens. Ou pas, car en ce moment Elio était bien incapable de les lire et de les comprendre. Il pouvait tout aussi bien y saisir un désir d’affronter son sentimentalisme pour ne pas gâcher son pitoyable sursaut de courage avant de lui casser une par une ses illusions et ses espoirs. C’était plausible, après tout, bien que durant tout son discours Elio tenta de ne pas y penser. Aller au bout, tel était son but et rien ne pourrait l’en détourner.

Quand il eut terminé, toutefois, le silence s’installa un instant. Un silence rempli de calme pour le jeune homme qui se sentait enfin en paix avec lui-même, heureux d’avoir trouvé la force d’être sincère malgré ses démons effrayés. Il inspira une grande bouffée d’air tandis qu’Andrea se trouvait si près de lui qu’il put alors humer son parfum. Cette délicate fragrance qu’il n’avait jamais remarquée avant qu’elle ne lui manque affreusement. Un mélange de jeunesse et de peur, de tendresse et de recul. Si sensible à la sienne, et pourtant tellement différente. Il ne reprit pied que lorsqu’il sentit les épaules d’Andrea tressauter entre ses bras, alors qu’il s’était littéralement enfoui dans son corps qui le recevait si bien qu’on aurait pu le croire fait pour lui. Elio raffermit sa prise sans toutefois lui donner l’impression de l’étreindre trop fort, ne pouvant contenir son affection et son amour pour ce petit être fragile qui finit par étouffer un ou deux sanglot avant de prendre courageusement la parole.

- Pourquoi tu ne pouvais pas faire ça ? Qu’est-ce qui t’en empêchait tant ?

Il s’essuya la joue, et Elio tomba instantanément amoureux de ce simple geste qu’il ne lui avait jamais offert. Le voir si vulnérable le confortait dans sa décision de tout faire pour le rendre heureux, bien qu’il se rende compte que c’était un objectif trop vaniteux pour lui. Il prit toutefois le temps de lui répondre, le laissant imposer un peu de distance pour ne pas le faire retomber dans les pleurs.

- Parce que je sais que tu mérites mieux que moi, qui ne saurait te rendre heureux que quelques instants. Je suis toujours cet idiot qui ne sait pas gérer, Andrea. Je risque de te faire mal, encore. La seule différence maintenant c’est que je sais que je voudrais toujours réparer ce que je pourrais te faire.

Et c’était vrai, alors qu’il l’aimait, conscient toutefois de ses faiblesses et des erreurs qu’il pourrait de nouveau commettre. Sachant très bien qu’il n’était pas fait pour le long terme, Elio savait que des moments seraient difficile mais que, à chaque fois, il viendrait s’excuser, quoi qu’il fasse, quoi qu’il n’ait pas fait.

- Tu n’es pas un idiot. L’idiot c’est celui qui continue à se faire souffrir sans rien faire pour y changer. Je suis un vrai idiot de ne pas être passé. D’avoir eu peur de ton regard. Un vrai idiot de n’avoir pas appelé pour prendre même des nouvelles, pour essayer encore. Un vrai idiot pour m’être fait voler la main sur de telles déclarations.

Le jeune homme esquissa un sourire, attendri devant autant de remise en question de leur part à tous les deux. Il n’eut cependant pas le temps de répliquer qu’Andrea s’extirpa de ses bras pour reculer un instant, l’observer, le faire douter aussi une infime seconde. Prêt à partir, le jeune blond revint pourtant avec d’autant plus de force et de conviction.

- Je n’en demandais pas tant et tu m’as dit bien plus que ce que je pouvais espérer. J’ai besoin de toi Elio si tu savais à quel point tu m’as manqué.

Elio referma une fois de plus son étreinte, le berçant presque en bougeant lentement les épaules de droite et de gauche comme on réconforte un enfant qui a fait un cauchemar. Ils étaient en pleine rue, il s’en fichait. Elio se moquait de tout tant les paroles d’Andrea le touchèrent au cœur, soufflant d’un coup sur ses doutes et ses appréhensions de voir ses sentiments non partagés. Il sentait que s’il disait quelque chose, sa voix tremblerait légèrement sous le coup de l’émotion et pourtant il se lança, tentant de bien distinguer les mots, parlant lentement pour éviter de fondre en larmes à son tour, amenant du ridicule là où Andrea savait être adorable.

- Tu ne pouvais rien faire après ce que j’avais pu te dire. Me pardonneras-tu mes horreurs ? Et en échange, je te promets de te laisser l’occasion de me déclarer encore une fois ces belles paroles, comme si c’était pour la première fois. Je t’en offrirai d’autres à mon tour, je ferais tout pour ne plus revivre ton éloignement.

Il marqua une pause, hésita. Etait-ce le bon moment ? Sans doute pas. Mais un jour prochain, il leur faudrait parler de ces blessures qu’il avait voulu cacher. Un jour, oui, un jour ils en parleraient et Elio demanderait. Mais pas maintenant.
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