Pour Ahmed, il y’avait 4 choses qui pouvaient rendre une journée banale plus intéressante : Siffler une bouteille de whisky en regardant de vieux films des années 2000, voir un bon match de foot, signer de juteux contrats, et tuer.
Il était 17 heures, et aucune de ces 4 choses n’étaient près d’arriver. Autant dire qu’Ahmed s’ennuyait ferme. Il venait de gâcher son après-midi avec un client, qui tenait absolument à lui faire visiter le local qui abriterait bientôt leurs nouveaux bureaux. S’en est suivi trois heures qui pouvaient se résumer en trois mots : Léchage de cul. De ce qu’il avait compris, ce client désirait plus d’argent, pour « investir dans le futur ». Conneries. Ahmed avait déjà analysé et calculé la situation, et il s’était d’ores et déjà rendu compte que tout centime mis dans les comptes de cette vulgaire PME était un gâchis total. Il avait d’abord pensé pouvoir rentabiliser son investissement initial sur 5 ans, en rendant cette entreprise assez importante pour être rachetée plus tard par une quelconque multinationale dont il détenait déjà des parts. C’était une tactique peu orthodoxe, qui lui aurait probablement valu les foudres de ses anciens professeurs. Mais ça avait marché une première fois, quand il avait racheté cette petite entreprise de papèterie, il y’a 4 ans. Ahmed s’était imaginé capable de répéter ce scénario encore une fois. Un échec total.
Après avoir passé la journée à sourire, et à hocher de la tête à chacune des phrases du lécheur de cul, Ahmed était las. Il avait réussi à éviter la question de l’investissement en prétextant vouloir « un délai de réflexion. » Ça marchait tout le temps, ca. Dans ce milieu, celui qui veut du fric obéit à celui qui en détient.
Ahmed haïssait la lassitude plus que tout. L’ennui menait toujours à la mélancolie, et il n’avait clairement pas l’intention de passer encore une semaine à se morfondre, prostré dans son lit à se remémorer d’anciens souvenirs. Qu’est ce qu’il détestait ces moments-là, ou il ressemblait plus à une gamine qui venait de se faire larguer par le beau gosse du lycée qu’a un homme mûr de 38 ans.
Et quel était le meilleur remède à l’ennui qu’un bon meurtre ? Ahmed n’avait planifié aucun assassinat depuis maintenant un mois. Ca faisait déjà bien trop longtemps. Il avait besoin de respirer un bon coup, de se vider la tête. Pourquoi pas le faire en vidant la tête de quelqu’un d’autre, justement ? Ahmed peina à réprimer un petit sourire après cette pensée. Il avait vraiment un sens de l’humour bizarre. Et il assumait.
Mais ses pensées morbides furent interrompues par la vibration de son téléphone. Ah, tiens, quelqu’un l’appelait. Si c’était encore Monsieur Lèche Cul, Ahmed n’aurait pas à chercher loin pour trouver sa future proie…
Ah, non. Numéro inconnu. Soit c’était une erreur, soit c’était en rapport au Réseau. Bah ma foi, un seul moyen d’en être sûr.
Inefficace. C’était le seul mot pouvant décrire ces trois dernières années. Elle en avait charcuté des Stellas et des Pactisants, mais absolument aucun d’entre eux avaient le don qui correspondait à celui qu’elle cherchait. Mais ce n’était pas seulement sa faute, la police elle aussi était incapable de faire son travail correctement. Absolument aucun indice répertorié, une enquête avortée et un laxisme totalement écœurant. Elle ne pouvait plus que reposer sur elle-même. Et si le fallait, Rhoda était prête à exterminer tous ses semblables un par un, jusqu’à le trouver.
Mais depuis quelques temps, elle avait pensé à essayer de trouver une aide extérieure. Le genre d’aide qui se trouve être plutôt opérant, moyennant finance. La scientifique dû batailler pour trouver un informateur qui soit supposé assez compétent pour éclairer sa piste. Même si batailler se résumait à s’adresser volontairement à ses collègues. Il était évident qu’au sein du GDP, ce type de personne était assez souvent employé pour faciliter le travail. Mais Rhoda était assez aveuglée par ses expériences cruelles et la volonté de se débrouiller seule qu’elle avait ignoré cette possibilité. Ce n’est qu’à force de tourner en rond qu’elle avait fini par arriver à cette évidence. Un scientifique dont elle avait oublié le nom lui avait donné un numéro, indiquant qu’il s’agissait d’un tueur à gage qui était aussi assez doué pour glaner des informations. Elle n’en avait pas demandé plus, se contentant de tout noter pour appeler plus tard. Tout cela avait intérêt d’être assez efficace, car elle commençait à perdre patience. Situation qui était par la même occasion assez rare. La preuve en était qu’elle avait attendu trois ans avant de se sentir agacée par cet éternel statu quo. Pourtant cette vengeance lui tenait à cœur, mais il était plus honorable de s’en sortir seul. Elle avait attendu d’être dans son bureau avant d’appeler. Elle composa le numéro sur le téléphone fixe qui était jusqu’alors encore dissimilé sous un amoncellement de papiers plus ou moins importants. Elle attendit assez longtemps avant qu’on ne lui répondit. Après quelques secondes de bips agaçants, elle entendit enfin une voix masculine lui répondre.
-Allô ?
Il y eut un bref instant de silence avant qu’elle ne réplique, sans la moindre salutation, d’un ton neutre et calme :
-Vous êtes réputé pour de divers talents Monsieur, mais un seul d’entre eux m’intéresse. J’ai entendu dire que trouver des informations compliquées à dénicher était dans vos cordes.
Le professeur se rendit compte qu’elle avait oublié de demander le nom de ce « Monsieur » à son collègue. Mais ce n’avait aucune importance, hormis celui de pouvoir faciliter l’identification. De toute façon, elle voulait lui acheter des services d’informateur, pas prendre le thé avec.
-A vrai dire ce que j’ai à vous demander ne sera pas de la plus grande facilité. Réussir là où la police échoue, ce n’est jamais facile je pense. Mais j’en paierais le prix.
Elle s’alluma une cigarette et soupira, avachie dans son fauteuil. La scientifique avait horreur de demander une assistance, mais les conditions l’imposaient. Ce type avait intérêt à être un vrai professionnel, sinon elle allait tordre le cou à l’abruti qui l’avait conseillée. Déjà qu’elle ne l’appréciait pas.
Ahmed Al-Ahmed
Membre- Reseau
MESSAGES : 7
AGE : 35
HOBBIES : Boire, tuer, regarder le foot, et gagner de l'argent.
Il y’eut un court instant de silence après les derniers mots de Rhoda. Mais ce silence fut rapidement brisé par un rire. Pendant 15 secondes, tout ce que la scientifique put entre à l’autre bout du fil était un fou rire.
Ahmed avait du mal à reprendre son souffle. Ca faisait bien longtemps qu’il n’avait plus rit aussi fort. Ah, finalement, cette journée n’était pas gâchée.
« Haaaa…Oh putain, mais vous êtes sérieuse en plus ? Pardon, mais…hahahaha... »
S’en suivit alors 10 autres secondes de fou rire. Il avait tenté de se contrôler, mais c’était plus fort que lui. Il devait avoir l’air d’un malade mental, a rire tout seul dans une ruelle. Mais il s’en foutait. Bordel, c’était la chose la plus marrante qu’il avait entendu depuis un bail. Manquait plus qu’elle croit avoir affaire à un tueur à gage ou quelque chose du genre.
Le visage rouge, Ahmed pris quelques instants pour respirer un grand coup. Il allait devoir essayer au maximum de réprimer le fou rire qui menaçait à chaque instant de réapparaitre.
« Dé-.. Désolé. Mais vous aviez l’air si sérieuse, on s’croirait dans un vieux thriller quoi. Haha…pardon. Vous…cherchez des informations c’est ça ? J’pense pouvoir vous aider. Par contre, oubliez le fric, ce n’est pas ce qui m’intéresse. »
Si le marché de l’information était vraiment rentable, Ahmed aurait arrêté son véritable travail depuis longtemps. Le fric, tout au plus, c’était un moyen de pression. Ce qui intéressait véritablement Ahmed, depuis son intégration dans le Réseau, c’était justement de profiter de ce rôle pour gagner encore plus d’informations. Si le savoir est une arme, Ahmed désirait un arsenal complet. Alors la véritable rémunération de ses services venait tout simplement d’un échange de bons procédés. Il dévoilait ce qu’il savait, et son contact se devait d’en faire autant.
« Bon, y’a un endroit spécial ou l’on pourrait se voir ? »
Il avait éclaté de rire. Un rire interminable, si fort qu'elle dû laisser son téléphone loin de son oreille durant plusieurs secondes. Elle resta muette, les yeux écarquillés en se demandant ce qu'elle avait dit de drôle.
-Haaaa…Oh putain, mais vous êtes sérieuse en plus ? Pardon, mais…hahahaha...
Rhoda haussa un sourcil, toujours interloquée. Elle fuma un peu plus frénétiquement, le stress se faisant sentir. Elle avait fait une erreur de numéro ? L’erreur venait bien d’elle au moins ? Sur l’instant, elle ne comprenait pas vraiment ce qu’il se passait, mais l’homme au bout du fil éclaira bien vite sa lanterne.
-Dé-.. Désolé. Mais vous aviez l’air si sérieuse, on s’croirait dans un vieux thriller quoi. Haha…pardon. Vous…cherchez des informations c’est ça ? J’pense pouvoir vous aider. Par contre, oubliez le fric, ce n’est pas ce qui m’intéresse.
Il avait ri à cause de sa demande. Chose rare, elle sentit la colère monter doucement, par la honte effroyable qu’elle ressentait. La scientifique resta encore un moment coite. Elle serra le téléphone dans sa main, en grinçant de dents. Elle allait le tuer. Elle allait arracher les membres de ce débile, lui greffer ses jambes à la place des bras et ses bras à la place des jambes. Il lui avait donné de fausses informations et maintenant, son interlocuteur se moquait d'elle. On dirait même que c'est la meilleure blague qu'il ait entendu depuis des siècles. Bon au moins c’était ça de fait. C’était bien rare qu’elle illumine la journée de quelqu’un en le faisant rire. Non en fait c’était carrément ironique et invraisemblable.
-Okay, je pense qu'on m'a joué un mauvais, mais vraiment très mauvais tour. C'est une erreur, désolée de vous avoir dérangé. On m'avait assuré que vous étiez un très bon informateur, mais c'est visiblement un énorme canular.
La scientifique souffla en se massant la tempe, essayant de rester calme. En tant qu'handicapée sociale, c'était finalement normal qu'elle s'exprime de façon assez stéréotypée. Elle avait déjà du mal à tenir une discussion normale, alors si en plus il fallait qu'elle fasse une demande aussi délicate que celle qu'elle vient de faire, c'était prévisiblement une chose difficile. Rhoda était agacée, très agacée. Elle avait déjà peu l'habitude des conversations, mais si en plus elle était tournée au ridicule c'était d'autant plus insupportable. Elle perdait son temps et le faisait aussi perdre à cet homme. Elle s'autorisa quelques secondes de réflexion, avant de reprendre la parole.
-Non en fait attendez. C'est possible de se retrouver devant la gare centrale ?
Il pourrait finalement lui être utile. En plus qu'il n'exigeait aucun paiement, ça l'arrangeait. Elle était encore un peu froissée, mais elle n'avait rien à perdre. Dans le pire des cas, elle fera quelques expériences sur un Stella avant de partir pour se détendre un peu.
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